Un moteur à deux temps comporte un ou des pistons qui se déplacent dans les cylindres et effectuent un cycle complet de combustion en seulement deux mouvements linéaires. Le déplacement du piston dans le cylindre, par l’intermédiaire des conduits des lumières[1] entre la partie basse du carter et la partie haute du cylindre, permet d’évacuer les gaz brûlés et remplir le cylindre de gaz (vapeur de carburant et comburant) frais via la boîte à clapet. Une autre technique de moteurs à deux temps repose sur des admission et échappement par soupapes, comme les Diesel de marque Cummins. Aucun gaz ne passe dans le carter, le balayage est fait directement dans le cylindre, l'injection se fait une fois les soupapes fermées.
Sommaire
Origine
S'inspirant des travaux de Pierre Hugon, le premier moteur à deux temps a été conçu par l'ingénieur belge Étienne Lenoir en 1859[2]. Ce moteur a été amélioré par l'ingénieur écossais Dugald Clerk en 1878.
Le moteur à deux temps dans une forme à peu près identique à ce que nous connaissons aujourd'hui a été conçu par un autre ingénieur anglais, Joseph Day, en 1889.
Le moteur Ixion est inventé en 1897 par Léon Cordonnier[3] et marque les débuts du moteur à deux temps à distributeur rotatif[4].
Cycle du moteur
Le cycle deux temps d’un moteur à combustion interne diffère du cycle de Beau de Rochas en ayant un cycle de seulement deux mouvements linéaires du piston au lieu de quatre, bien que les mêmes quatre opérations (admission, compression, combustion/détente et échappement) soient toujours effectuées. On a ainsi un cycle moteur par tour au lieu d'un tous les deux tours pour le moteur à quatre temps. Le cycle se décompose ainsi[5] :
- Compression, combustion, détente puis échappement avec transfert du mélange combustible frais par la fenêtre de transfert[N 1] ;
- Admission, aspiration puis compression du mélange dans la partie basse du moteur[N 2].
Les différentes étapes sont les suivantes[5] :
- le piston (5) est au point mort haut. La bougie déclenche la combustion et le piston descend en comprimant en même temps le mélange présent dans le carter (4), sous le piston. C'est la partie motrice du cycle, le reste du parcours sera dû à l'inertie créée par cette détente. Cette étape est la détente. Lors de cette descente du piston, l'entrée (6) du mélange dans le carter se ferme ;
- arrivé à proximité point mort bas (image « Admission et échappement »), le piston débouche les lumières d'échappement (2) et d'arrivée de mélange dans le cylindre (3) : le mélange en pénétrant dans le cylindre chasse les gaz de la combustion (zone 1 de l'image). Il s'agit de l'étape d'admission - échappement ;
- en remontant (image « Compression »), le piston compresse le mélange dans le cylindre. Au passage, il rebouche l'échappement (2) et l'entrée de mélange dans le cylindre (3), tout en créant une dépression dans le carter (4) qui va permettre l'arrivée du mélange air-essence par le conduit d'arrivée (6) dont l'entrée a été libérée par la position du piston proche du point mort haut. Cette étape est celle de « compression » ;
- une fois arrivé à nouveau au point mort haut, le cycle peut recommencer à partir du premier point.
Particularités
- Moteurs simples (simplicité de la distribution ; sauf cas particuliers dans certains moteurs Diesel industriels comme les Detroit Diesel Series 71), légers, avec peu de pièces en mouvement.
- Moteurs facilement reconnaissables par l'implantation basse de l'échappement et du carburateur sur le cylindre, et non sur la culasse.
- Puissance spécifique voisine de 1,7 fois celle d'un moteur 4-temps (il a fallu autoriser les 4-temps de 990 cm3 de cylindrée pour obtenir un équivalent des moteurs 2-temps de 500 cm3 sur les motos de Grand Prix qui étaient très polluantes à cause de la combustion d'une partie de l'huile servant à la lubrification, mais aussi du fait de la demande des différents constructeurs qui ont fait pression sur la Fédération internationale de motocyclisme).
- Consommation de carburant en rapport[N 3].
- Lubrification par mélange (huile dans l'essence) ou par injection d'huile (graissage séparé), d'où émission de fumée (à remarquer que les dernières normes relatives aux huiles 2-temps imposent des émissions de fumée extrêmement faibles - norme ISO-LEG-D).
- Faible taux de compression géométrique (environ 7), compensé par l'effet de compresseur effectué par la face inférieure du piston dans le cylindre, et le pot accordé, aboutissant à une compression réelle de 10 voire plus dans le domaine de la compétition.
- Production importante de gaz imbrûlés du fait de la communication des transferts avec l'échappement (sauf avec les moteurs à injection directe).
- Forme de la chambre de combustion pouvant être proche de l'idéal du fait de l'absence de soupapes.
- Bruit spécifique, plus aigu que celui d'un moteur 4-temps[N 4].
Évolutions
Le moteur 2-temps n'a pas toujours eu les performances qu'on lui connaît aujourd'hui. Il s'agissait même auparavant d'un moteur capricieux, poussif et au rendement désespérément faible. Très tôt, les ingénieurs apportent des évolutions pour contrecarrer le principal problème du moteur 2-temps, le fait que les lumières d'admission et d'échappement ne soient pas totalement fermées lors de la phase montante du piston provoque deux phénomènes :
- faible compression du mélange ;
- croisement des gaz frais et gaz brûlés au niveau du cylindre et de l'échappement (on appelle cela le balayage).
Plusieurs évolutions sont donc développées au fil du temps. Certaines sont aujourd'hui répandues, d'autres plus marginales.
Les évolutions majeures sur les moteurs grand public sont les suivantes :
- Pot de détente accordé
- Ce pot permet d'améliorer le balayage en repoussant les gaz frais dans le cylindre[N 5]. Le terme « pot de détente » est une appellation répandue mais impropre (on l'utilise aussi pour le pré-silencieux des systèmes d'échappement automobile) ; techniquement il est plus correct de parler de résonateur. L'accord du pot de détente-résonateur est une science complexe et pour partie empirique, les préparateurs développant de véritables bibliothèques de pots d'échappement, dont certains conviennent aux circuits tortueux et d'autres aux circuits avec de longues lignes droites, jouant de subtiles différences dans les quatre éléments : tube d'échappement, cône divergent, contre-cône convergent et tube de fuite. Sans entrer dans les détails, un résonateur court et ventru favorise la puissance maximum mais sur une plage de régime étroite tandis qu'un résonateur plus fin et plus long favorise la souplesse et la polyvalence du moteur au détriment de la puissance maximale. Les propagations d'ondes de pression et de contre-pression dans un résonateur 2-temps sont assez semblables à celles rencontrées dans le pulsoréacteur qui fut développé durant la Seconde Guerre mondiale pour les missiles V1. Les calculs permettant la conception des pots de détente tiennent compte d'une vitesse de l'onde de l'ordre de 510 mètres par seconde pour une température de 700 °C. Ce concept ayant été développé en 1955 par CZ (marque de moto tchécoslovaque) a été une des principales améliorations du moteur à deux temps.
- Clapets à l'admission
- Ces clapets peuvent être plats ou en forme de toit afin de rendre asymétrique le cycle d'admission dans le carter. Il se trouve généralement sur le carter (parfois sur le cylindre). L'admission par clapet constitue à elle seule une petite révolution : elle permet l'ajout d'un transfert à l'arrière du cylindre, rendant ainsi le moteur plus performant, et supprime le problème de refoulement de gaz dans le carburateur, ce qui permet aussi un démarrage plus facile à froid et de meilleures reprises (pré-compression améliorée). Ces clapets plats « en marguerite » ont été d'abord utilisés en série par les fabricants de moteurs hors-bord (Kiekhafer-Mercury, OMC-Johnson-Evinrude). La firme japonaise Yamaha et suédoise Husqvarna perfectionnèrent ce système avec les clapets « en toit » appelés commercialement « reed valve » permettant un meilleur débit et un vrai contrôle des phénomènes de résonance. D'autres évolutions consisteront à remplacer les lamelles de premières génération par d'autres en époxyde ou en carbone.
- Comme tout système cyclique, la fréquence de résonance pouvant perturber le bon phasage de fermeture et d'ouverture. À noter qu'il n'existe pas d'étude sur ces systèmes si ce n'est dans le domaine des compresseurs frigorifiques.
- Toutefois, il a été déterminé que les clapets en carbone sont préférables pour les plages de fonctionnement en haut régime, alors que ceux en époxyde favorisent les bas et mi-régimes.
- L'inconvénient de ces boites à clapets réside dans la perte en charge ne permettant pas de remplissage complètement optimisé.
- Néanmoins, c'est le meilleur système d'admission car il est complètement auto-adaptatif.
Autres systèmes d'admission
Le distributeur rotatif à l'avantage de ne pas générer de pertes en charge et ainsi de permettre un remplissage optimum sur une plage de régime donnée.
Au contraire des boites à clapet, la plage d'utilisation est plus restreinte. Néanmoins, il reste possible d'utiliser ce dispositif pour des régimes importants (avec des temps d'ouvertures élevés) et il a été très utilisé dans le milieu de la vitesse.
- Variation de la lumière d'échappement en fonction du régime
- Cela permet d'augmenter le temps d'échappement à haut régime. Rare sur les cyclomoteurs mais répandus sur les machines de plus grosses cylindrées[N 6]. Toutefois, ce système est très répandu dans le domaine des jet-sky, sky-doo (très connu chez Bombardier), mais aussi dans le milieu de la compétition motocycliste puisqu'il est devenu indispensable.
- Ainsi, un système d'ouverture (électronique ou centrifuge) permet de faire varier la hauteur de la lumière d'échappement.
- Avantages :
- ouverture faible en bas régimes afin de limiter l'évacuation des gaz frais imbrûlés vers le système d'échappement pour bénéficier d'un couple intéressant ;
- grande ouverture pour les hauts régimes avec ainsi une surface d'ouverture très importante permettant une bonne évacuation des gaz brûlés.
- L'ouverture de la valve d'échappement doit coïncider avec la résonance du pot de détente.
- Allumage à avance variable
- Permet d'avoir le maximum de performances à différents régimes (facilité par l'arrivée des allumages électroniques).
- À remarquer aussi l'arrivée des allumages numérisés permettant de mieux adapter l'avance en fonction des conditions.
- Contrairement à la majorité des 4-temps, l'avance doit considérablement baisser lors de la montée en régime du fait de l'amélioration du remplissage avec la montée en régime.
- Autres évolutions plus marginales
- Valve d'admission, d'un fonctionnement similaire aux clapets.
- Distributeurs rotatifs. Dans ce cas, l'admission des gaz frais s'effectue par un disque possédant une échancrure et fixé en bout de vilebrequin ou entraîné par celui-ci (l'admission est effectuée quand l'échancrure démasque la conduite d'admission du carburateur). Il a été développé dans le domaine du deux-roues malgré sa complexité et son coût ; un des 2-temps les plus puissants a été le Derbi 125 de Grand Prix à admission rotative, de 54 ch (soit 432 ch/litre). Les premiers distributeurs rotatifs modernes permettant d'éviter le refoulement vers le carburateur (comme les clapets) mais aussi de maîtriser la dissymétrie des temps d'admission, transfert et échappement dans le diagramme de distribution sont développés par Walter Kaaden (République démocratique allemande) et installés sur la moto est-allemande MZ du pilote-ingénieur Ernst Degner, qui « passa à l'ouest » au milieu des années 1960 car la firme japonaise Suzuki lui offrait un meilleur salaire. Yamaha, Suzuki et Kawasaki adoptèrent le distributeur rotatif non seulement pour leurs machines de course mais aussi pour quelques modèles de série : par exemple les Yamaha YG-1, YA-6, les Kawasaki bicylindres 250 et 350 Avenger et Samouraï, puis le monocylindre 125 KH. Toutefois cette technique, outre sa complexité et l'élargissement du bas moteur, avait aussi l'inconvénient de ne pas convenir aux moteurs multicylindres en ligne. Les moteurs 4-cylindres 2-temps à distributeurs rotatifs utilisèrent alors l'architecture « en carré », comme la Jawa 350 de Grand Prix pilotée par Bill Ivy, la Yamaha RD500LC, et la Suzuki RG 500 Gamma.
- Chambre de résonance ouverte à bas régime pour simuler un pot plus long accordé ou bien de valves d'échappement à hauteur variable permettant des temps d'échappement plus ou moins longs permettant de conserver un moteur à fort couple dans une large plage de régime.
- Deuxième cylindre pour assurer la pré-compression. Ce type de moteur a équipé la célèbre Motobécane 99 Z, ainsi que certaines voiturettes.
- Injection directe, permettant un rendement optimum supérieur aux moteurs 4-temps (du fait de l'absence de distribution) ainsi qu'une diminution importante de la pollution. La lubrification est assurée par injection d'huile (rapport de 80:1) dans le carter-cylindre[6].
- Balayage avec de l'air au lieu du mélange air-essence et injection (directe ou non) une fois l'échappement refermé (encore en étude).
- Qualité des huiles
- L'amélioration de la qualité des huiles au fil des années a énormément contribué à l'amélioration de la robustesse et du rendement des moteurs 2-temps. Jusqu’à la fin des années 1980 et même au début des années 1990, les moteurs étaient lubrifiés par des huiles minérales de mauvaise qualité, au film fragile, cassant facilement entraînant des serrages de moteurs. La quantité d'huile à utiliser devait être importante pour pallier ce problème, et la proportion d'huile-essence être de 4 % minimum.
- Avec les huiles de synthèse ou semi-synthèse actuelles, une proportion huile-essence de 2 à 3 % est largement suffisante, la consommation d'huile est donc nettement diminuée, la longévité des moteurs accrue, et la pollution réduite.
- Le graissage séparé améliore également le rendement et la lubrification du moteur (pourcentage huile essence variable en fonction du régime et de la charge) tout en supprimant la contrainte du mélange directement dans le réservoir, peu pratique (utilisation d'un mélangeur de station service avec des huiles bas de gamme, mélange effectué par l'utilisateur directement dans le réservoir, « secouage » de la machine avant chaque départ, etc.). Le graissage par mélange n'est pratiquement plus utilisé que sur les machines de course ou encore sur des engins type tronçonneuse, souffleur, etc.
Utilisation
Ce type de moteur est courant surtout dans les plus petites cylindrées, notamment les scooters. Il a les avantages de la simplicité, d’un poids et d'un encombrement réduit ainsi que de fonctionner dans toutes les positions sans nécessiter de lubrification par carter sec. Il est également utilisé sur des moteurs marine de forte puissance comme celui du porte-conteneur CMA CGM Jules Verne, un moteur à 14 cylindres en ligne, alésage 960 mm, puissance 108 000 ch. Certains gros navires méthaniers récents utilisent des moteurs 2-temps gaz et fioul, dont le gaz provient de l'évaporation du méthane liquide des réservoirs ce qui évite de rejeter dans l'atmosphère du méthane gazeux, et également de diminuer les rejets de polluants contenus naturellement dans les combustibles liquides qui sont alors utilisés en faible quantité. Cependant, s'il s'agit là aussi de moteurs 2-temps, ce sont des moteurs Diesel fonctionnant au fioul lourd, équipés de compresseur(s), à injection indirecte ou même directe, et pour certains de soupapes contrôlant la phase d'échappement. Ces moteurs n'ont évidemment que peu en commun avec ceux de nos deux roues de petite ou moyenne cylindrée.
Motocyclettes
Dans les années 1970, le moteur à deux temps était très utilisé du fait de sa légèreté, sa simplicité et ses performances, et aussi de son moindre coût de fabrication. À cette époque, beaucoup de constructeurs de motos ont développé des modèles avec des moteurs 2-temps, y compris de grosse cylindrée, comme la Kawasaki 750 H2. En France, la Motobécane 125 de 1970 est le reflet même de cette époque. Mais l'augmentation du prix du pétrole et surtout les normes antipollution de plus en plus contraignantes ont progressivement limité l'usage de ce type de moteur.
Toutefois, pour des raisons de coût, de fiabilité et de poids, les motos à moteur 2-temps dotés d'un système d'injection d'essence sont de plus en plus présentes au départ des compétitions en tout-terrain (motocross, enduro et trial).
Motobécane 125 LT1, préparée pour participer aux Coupes Moto Légende.
En 2017, l'injection directe apparut sur les KTM 250 et 300 TPI EXC (motos d'enduro homologuées pour la voie publique et Euro 4[7]). La pulvérisation de l'essence se faisant à l'aide de deux injecteurs disposés au niveau des transferts gauche et droite. À noter que la lubrification est assurée par une pompe de graissage séparée, ce qui permet de faire le plein de carburant directement à la pompe. En 2020, ce fut le tour de TM Racing d'utiliser un système très similaire également sur leur 250 et 300 d'enduro.