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Taille du génome

La taille du gĂ©nome correspond Ă  la quantitĂ© d'ADN contenue dans une copie d'un gĂ©nome. La taille d'un gĂ©nome est Ă©galement appelĂ©e valeur C. Elle est mesurĂ©e soit par sa masse oĂč on utilise le picogramme, notĂ© pg comme unitĂ©, ou bien par le nombre de nuclĂ©otides (paires de bases) avec le MĂ©gabase, notĂ©e Mb (1 million de nuclĂ©otides) comme unitĂ© : 1 pg correspond Ă  978 Mb[1] (cette Ă©quivalence posĂ©e entre le nombre de paires de bases et la masse en picogrammes est facilitĂ©e par le fait qu’une paire GC a une masse molĂ©culaire trĂšs voisine d’une paire AT).

Arbre phylogénétique indiquant la taille des génomes chez les organismes des trois domaines du monde vivant: les bactéries Bacteria (en bleu), les archées Archaea (en vert) et les eucaryotes Eucarya (en rouge).

Origine du terme

Le terme de "Taille du génome" est souvent attribué par erreur à Hinegardner[2], puisque Hinegardner utilisa ce terme en 1969 dans le sens "nombre de gÚnes". Par contre, en , Wolf et al. utilisÚrent le terme "taille du génome" avec le sens actuel[3]. Le terme de "taille du génome" est devenu populaire au début des années 1970 sans doute à la suite de la publication du livre de Susumu Ohno, Evolution by Gene Duplication[4].

Conversion de picogrammes (pg) en paire de bases (bp),

ou simplement:

[1]

Évolution de la taille du gĂ©nome

La taille des gĂ©nomes eucaryotes est trĂšs variable. Le parasite intracellulaire Encephalitozoon cuniculi a un gĂ©nome de 2,8 Mb (2,8 millions de paires de bases) alors que l'amibe Polychaos dubnium pourrait avoir un gĂ©nome de 675 Gb (milliards de paires de bases), bien que cette estimation ancienne soit contestĂ©e[5]. Ces variations peuvent Ă©galement ĂȘtre importantes au sein d'un mĂȘme groupe : la taille du gĂ©nome chez les arthropodes varie de l'ordre de 250 fois, chez les poissons de 350 fois et chez les angiospermes de 1000 fois. La variation des tailles de gĂ©nome est due Ă  une diffĂ©rence de tolĂ©rance Ă  l'augmentation du gĂ©nome ainsi qu'Ă  un taux de perte d'ADN diffĂ©rent suivant les espĂšces. Par exemple, le gĂ©nome relativement compact de la mouche Drosophila melanogaster est dĂ» Ă  un taux de perte d'ADN par dĂ©lĂ©tion Ă©levĂ© et bien supĂ©rieur Ă  celui des mammifĂšres[6]. De plus, il est apparu qu'il n'existait pas de corrĂ©lation entre la taille du gĂ©nome et la complexitĂ© d'un organisme. Cette observation a Ă©tĂ© appelĂ©e le paradoxe de la valeur C.

Enfin, contrairement à l'opinion courante, l'histoire évolutive du vivant ne se confond pas avec l'histoire de sa complexification (au niveau des organismes et au niveau génomique) car il semble que la réduction du génome soit le mode dominant de l'évolution[7].

Réduction du génome

La réduction de la taille d'un génome est une rÚgle générale chez les virus et les procaryotes. La relation ou rÚgle de Drake chez ces organismes montre une relation inversement proportionnelle entre la taille de génomes de ces microbes et une estimation de leurs taux de mutation spontané global (en moyenne une mutation par génome toutes les 200 générations cellulaires, mutation se produisant lors de la réplication de l'ADN, ou sous l'effet d'agents mutagÚnes, composés chimiques divers, rayons ultraviolets, radioactivité, radicaux libres issus du métabolisme cellulaire). Cette réduction du génome peut également se produire lors d'erreurs des mécanismes de réparation de l'ADN[8].

Cette réduction a été également mis en évidence chez des parasites eucaryotes (Par exemple:Encephalitozoon cuniculi) ou bien chez des symbiontes intracellulaires (Par exemple:Buchnera aphidicola). Dans le cas de symbiontes intracellulaires, la réduction du génome est accompagnée d'un transfert de gÚne du symbionte vers le noyau de la cellule hÎte. Ce processus est à la base de la théorie endosymbiotique de l'origine des mitochondries et des chloroplastes.

Expansion du génome

La relation de Drake n'est valable que pour les virus et les procaryotes, car chez les eucaryotes, la relation serait en sens inverse[9].

Les mécanismes sont:

Chez les plantes, l'amplification des rĂ©trotransposons LTR semble ĂȘtre une cause importante de la variation de la taille du gĂ©nome. Ainsi, 70 % du gĂ©nome du maĂŻs est composĂ© de rĂ©trotransposons LTR. Cette expansion de rĂ©trotransposon a induit le doublement du gĂ©nome du maĂŻs en quelques millions d'annĂ©es[10]. Chez les arthropodes, le taux de perte d'ADN semble ĂȘtre le facteur essentiel pour la variation des tailles de gĂ©nome. Ainsi, le criquet d'hawaĂŻ a un gĂ©nome 11 fois supĂ©rieur Ă  celui de la mouche Drosophila melanogaster et un taux de perte d'ADN 40 fois infĂ©rieur[6]. Chez les bactĂ©ries, la taille du gĂ©nome est corrĂ©lĂ©e avec le taux de gĂšnes dupliquĂ©s[11].

Les données de génomique structurale montrent que la taille d'un génome n'est pas proportionnelle à la complexité de l'organisme : c'est le paradoxe de la valeur C. Par exemple, la taille du génome du petit pois est 1,5 fois plus grande que celle de l'homme, celle du riz cultivé est dix fois plus grande[12]. Ce paradoxe est attribué au taux relatif d'expansion des séquences répétitives dispersées selon la lignée, et à la délétion de séquences sans grande importance. Ces séquences répétitives représentent à peine quelques pour cent de certains génomes eucaryotiques comme ceux de la levure et de la drosophile, mais plus de 50 % du génome humain et plus et plus de 90 % du génome d'espÚces aussi diverses que certains criquets, des liliacées et des amibes[13].

Implication Ă©volutive

La taille du gĂ©nome est un « trait biologique » important car elle corrĂšle avec la taille cellulaire et nuclĂ©aire, le taux d'activitĂ© mĂ©tabolique et la durĂ©e de la mitose et de la mĂ©iose[14]. Cependant, plusieurs modĂšles ont Ă©tĂ© proposĂ©s pour expliquer la fonction sĂ©lective et l'origine de la variation de la taille du gĂ©nome. Une des explications de l'origine est l'importance de l'ADN non codant (appelĂ© improprement « ADN poubelle ») constituĂ© notamment de sĂ©quences rĂ©pĂ©tĂ©es qui ont un rĂŽle dans la rĂ©gulation de l'expression des gĂšnes[15]. L'hypothĂšse du gĂ©nĂ©ticien Michael Lynch (en), appelĂ©e parfois « hypothĂšse du pĂ©ril mutationnel Â» (mutational hazard hypothesis ou MH), a eu un grand impact en gĂ©nomique Ă©volutive par son Ă©lĂ©gance et sa capacitĂ© Ă  expliquer de nombreuses caractĂ©ristiques Ă©volutives des gĂ©nomes eucaryotes. Reposant sur la gĂ©nĂ©tique des populations, elle propose que la taille efficace de population (en) a un impact dĂ©cisif sur la taille des gĂ©nomes. En effet, l’efficacitĂ© de la sĂ©lection pour limiter la propagation des gĂšnes Ă©goĂŻstes (ou de toute sĂ©quence d’ADN qui peut Ă  terme interfĂ©rer avec la valeur sĂ©lective de l’organisme), augmente avec la taille efficace de population. Les espĂšces avec de petites tailles efficaces de populations telles que les hommes auraient tendance Ă  accumuler de l’ADN non codant dans leur gĂ©nome, alors que les espĂšces aux grandes tailles (communautĂ©s bactĂ©riennes) maintiendraient des petits gĂ©nomes denses en sĂ©quences fonctionnelles et dĂ©pourvues de sources inutiles de mutations souvent dĂ©lĂ©tĂšres[16].

Taille des génomes d'espÚces modÚles

Organisme Taille du génome (Mpb) Nombre de gÚnes protéiques estimés
Virus Virus de la grippe0,013
Bactériophage λ0,05
Bactériophage T40,165
Mimivirus1,21 260
Bactéries Mycoplasma pneumoniae0,816689
Pelagibacter ubique1,31 354
Haemophilus1,81 657
Staphylococcus aureus2,82 619
Bacillus subtilis4,24 106
Escherichia coli4,644 243
Archaea Nanoarchaeum equitans0,49536
Pyrococcus abyssi1,771 898
Sulfolobus solfataricus32 977
Eucaryotes Encephalitozoon cuniculi2,91 996
Saccharomyces cerevisiae (levure)125 863
Plasmodium falciparum21,85 314
Caenorhabditis elegans (nĂ©matode)10022 628
Drosophila melanogaster (mouche)11816 548
Arabidopsis thaliana (plante)11927 379[17]
Populus trichocarpa (peuplier)48545 500
Zea mays (maĂŻs)5 00054 606[18]
Mus musculus (souris)3 40030 000
Homo sapiens (homme)3 40026 517
Polychaos dubium (amibe)675 000

Avant qu'il soit sĂ©quencĂ©, le gĂ©nome humain Ă©tait supposĂ© contenir environ 100 000 gĂšnes. Cette estimation a Ă©tĂ© revue Ă  la baisse par la suite, et est actuellement de l'ordre de 24 000 - du mĂȘme ordre que la plante Arabidopsis thaliana (27 379 gĂšnes).

La séquence complÚte du dernier chromosome dans le génome humain (chromosome 1, le plus grand, contenant à lui seul 8 % de ce génome) a été obtenue en .

Plus grand génome

La fleur japonaise Paris japonica, du genre Paris a le gĂ©nome eucaryote le plus vaste dĂ©crit : il comporte prĂšs de 150 milliards de paires de base, soit prĂšs de 50 fois la taille du gĂ©nome humain[19]. Ceci est Ă  considĂ©rer en excluant le gĂ©nome de l'Amibe Polychaos dubium (≈700 Gpb) du fait de la prĂ©cision incertaine de la mĂ©thode de mesure de son gĂ©nome et de par le niveau de polyploĂŻdie de l'espĂšce en question[20].

Références

  1. (en) Dolezel J, BartoĆĄ J, Voglmayr H, Greilhuber J, « Nuclear DNA content and genome size of trout and human », Cytometry A, vol. 51, no 2,‎ , p. 127-128 (PMID 12541287)
  2. (en) Hinegardner R, Molecular Evolution, Sinauer Associates, Inc., Sunderland, , « Evolution of genome size », p. 179-199
  3. (en) Wolf U, Ritter H, Atkin NB, Ohno S, « Polyploidization in the fish family Cyprinidae, Order Cypriniformes. I. DNA-content and chromosome sets in various species of Cyprinidae », Humangenetik, vol. 7,‎ , p. 240-244
  4. Ohno S, Evolution by Gene Duplication, New York, Springer-Verlag,
  5. (en) Casey L. McGrath et Laura A. Katz, « Genome diversity in microbial eukaryotes », Trends in Ecology & Evolution, vol. 19,‎ , p. 32–38 (DOI 10.1016/j.tree.2003.10.007, lire en ligne)
  6. Petrov DA, et al. Evidence for DNA loss as a determinant of genome size Science, 2000, 287, 1060-1062
  7. (en) YI Wolf, EV Koonin, « Genome reduction as the dominant mode of evolution », Bioessays, vol. 35, no 9,‎ , p. 829-837 (DOI 10.1002/bies.201300037).
  8. (en) J W Drake, « A constant rate of spontaneous mutation in DNA-based microbes », Proc Natl Acad Sci USA, vol. 88, no 16,‎ , p. 7160–7164 (DOI 10.1073/pnas.88.16.7160).
  9. (en) M. lynch, « Evolution of the mutation rate », Trends Genet, vol. 26, no 8,‎ , p. 345-352.
  10. SanMiguel P, Bennetzen JL, Evidence that a recent increase in maize genome size was caused by the massive amplification of intergene retrotransposons. Ann. Bot. (Lond.), 1998 82:37–44
  11. Gevers D, Vandepoele K, Simillion C, Van der Peer Y, Gene duplication and biased functional retention of paralogs in bacterial genomes Trends in Microbiology. 2004 April;12(4):341-5.
  12. Norbert Latruffe, Françoise Bleicher-Bardeletti, Bertrand Duclos, Joseph Vamecq, Biochimie, Dunod, , p. 160.
  13. Greg Gibson et Spencer V. Muse, Précis de génomique, De Boeck Supérieur, , p. 101.
  14. Petrov DA. Evolution of genome size: new approaches to an old problem Trends Genet 2001 17 (1), 23-28
  15. Jean Deutsch, Le GĂšne. Un concept en Ă©volution, Le Seuil, , p. 87.
  16. (en) M. Lynch et al, « The repatterning of eukaryotic genomes by random genetic drift », Annu Rev Genomics Hum Genet, vol. 12, no 1,‎ , p. 347–366 (DOI 10.1146/annurev-genom-082410-101412).
  17. « TAIR9 Genome release » (consultĂ© le ) : « The TAIR9 release contains 27,379 protein coding genes, 4827 pseudogenes or transposable elements and 1312 ncRNAs (33,518 genes in all, 39,640 gene models) »
  18. « Release Version » (consulté le )
  19. Pellicer J, Fay M, Leitch IJ, The largest eukaryotic genome of them all?, Botanical Journal of the Linnean Society, 2010;164:10–15
  20. T. Ryan Gregory, « Synergy between sequence and size in Large-scale genomics », Nature Reviews Genetics, vol. 6,‎ (DOI 10.1038/nrg1674, lire en ligne)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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