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Drosophila melanogaster

Mouche du vinaigre

La drosophile ou mouche du vinaigre (Drosophila melanogaster) est une espĂšce d'insectes diptĂšres brachycĂšres de la famille des Drosophilidae.

La drosophile mesure quelques millimĂštres de long et est connue pour pondre dans les fruits. Thomas Hunt Morgan, un embryologiste et gĂ©nĂ©ticien amĂ©ricain, Ă©tait parmi les premiers Ă  Ă©tudier sa zoologie et ses variations phĂ©notypiques (Morgan, Bridges et Sturtevant, 1925) ; en 1933, il a reçu le prix Nobel de physiologie ou mĂ©decine pour ses dĂ©couvertes sur le rĂŽle jouĂ© par les chromosomes de la drosophile dans l’hĂ©rĂ©ditĂ©[1]. Depuis, cette derniĂšre est devenue l'un des principaux organismes modĂšles des recherches en gĂ©nĂ©tique et en dĂ©veloppement. Son utilisation comme espĂšce modĂšle nous permet d’avoir une acquisition de connaissances rapide vu que l’étendue de son gĂ©nome est connue et qu’elle est facile Ă  manipuler (petite taille, Ă©levage aisĂ©)[2]. De plus, son code gĂ©nĂ©tique et l'organisation de la cellule reflĂštent ceux de la grande majoritĂ© des animaux, incluant les organismes plus complexes, notamment l’Homme[2].

Ainsi, plusieurs autres expĂ©riences ayant pour sujet la drosophile ont permis de comprendre la reproduction sexuĂ©e, le dĂ©veloppement de l'embryon, ou bien encore l’adaptation Ă  l’environnement, chez l’ensemble des Animalia. Entre autres, les Ă©tudes de Hall, Rosbash et Young sur les mĂ©canismes de l’horloge de la drosophile et les gĂšnes impliquĂ©s ont reçu le prix Nobel de mĂ©decine de 2017[3] - [4]. Dans la littĂ©rature biologique contemporaine, elle est souvent dĂ©signĂ©e tout simplement sous le nom de son genre, Drosophila (qui contient pourtant de nombreuses autres espĂšces).

Nom

Drosophila, nom du genre, est une adaptation scientifique moderne du grec ÎŽÏÏŒÏƒÎżÏ‚, drĂłsos, « rosĂ©e », + Ï†ÎŻÎ»ÎżÏ‚, phĂ­los, « qui aime ». L'Ă©pithĂšte spĂ©cifique melanogaster, Ă©galement tirĂ©e du grec, signifie « au ventre noir ».

« Mouche du vinaigre » est l'appellation vernaculaire de l'espÚce[5]. Elle renvoie à son attirance pour ce breuvage et pour les matiÚres volatiles issues de la fermentation[6] (en contradiction formelle avec l'adage selon lequel « on n'attrape pas les mouches avec du vinaigre[7] »).

Aspect physique

D. melanogaster mĂąle (Ă  droite) et femelle
Drosophila melanogaster

Ces mouches sont de couleur brun jaunùtre, avec des anneaux transversaux noirs sur l'abdomen. Elles ont des yeux rouge vif. Elles présentent un dimorphisme sexuel : les femelles mesurent environ 3 à 4 millimÚtres de long ; les mùles sont un peu plus petits et la partie arriÚre de leur corps est plus foncée. Les antennes sont courtes et possÚdent une extrémité plumeuse. De plus, cette mouche possÚde des ailes de taille réduite et d'aspect chiffonné. Pour un néophyte qui essaierait de décrire la différence entre les sexes sous une loupe binoculaire, le caractÚre distinctif le plus marquant est probablement l'amas de poils pointus entourant l'anus et les parties génitales du mùle. Sur le site web FlyBase, on trouve un grand nombre d'images à ce propos.

Cycle de vie

Le cycle de vie de Drosophila melanogaster dure environ deux semaines Ă  22 °C ; le cycle prend deux fois plus de temps Ă  18 °C. Les femelles pondent environ 400 Ɠufs dans des fruits en putrĂ©faction ou dans d'autres matiĂšres organiques. Les Ɠufs ont une longueur d'environ 0,5 millimĂštre. La larve sort de l'Ɠuf aprĂšs 24 heures et croĂźt durant cinq jours en muant deux fois, 24 et 48 heures aprĂšs l'Ă©closion. Au cours de leur croissance, elles se nourrissent des micro-organismes qui dĂ©composent le fruit, ainsi que des sucres du fruit lui-mĂȘme. Ensuite, les larves s'encapsulent dans la pupe et subissent une mĂ©tamorphose qui dure cinq jours, Ă  la suite de laquelle l'adulte Ă©merge.

Pour assurer leur reproduction, les femelles ont tendance Ă  choisir des mĂąles dont les ailes sont symĂ©triques, qu'elles reconnaissent au son Ă©mis par la vibration de ces ailes lors des parades nuptiales effectuĂ©es par les mĂąles[8]. Les femelles s'accouplent 8 Ă  12 heures aprĂšs ĂȘtre sorties de leur pupe (dĂ©pendant de la tempĂ©rature). Elles stockent le sperme des mĂąles auxquels elles se sont accouplĂ©es pour pouvoir l'utiliser ultĂ©rieurement. Pour cette raison, les gĂ©nĂ©ticiens doivent capturer les mouches femelles avant leur premier rapport sexuel et s'assurer ainsi qu'elles ne s'accouplent qu'avec le mĂąle prĂ©cis requis par l'expĂ©rience. Selon le Red Book de Michael Ashburner, les femelles insĂ©minĂ©es peuvent ĂȘtre « re-virginisĂ©es » par incubation prolongĂ©e Ă  −10 °C, ce qui tue le sperme.

Cobaye exceptionnel en génétique

Vue latérale

Drosophila melanogaster est l'un des organismes modÚles les plus étudiés en recherche biologique, en particulier en génétique et en biologie du développement. Il y a plusieurs raisons pour cela :

  • Elles sont petites et faciles Ă  Ă©lever en laboratoire
  • Leur cycle de gĂ©nĂ©ration est court (environ deux semaines) et elles ont une grande productivitĂ© (les femelles peuvent pondre jusqu'Ă  500 Ɠufs en dix jours)
  • Les larves matures ont des chromosomes gĂ©ants dans les glandes salivaires.
  • Elles n'ont que 4 paires de chromosomes : 3 autosomiques, et 1 sexuelle.
  • Les mĂąles n'effectuent pas de recombinaison, ce qui facilite les Ă©tudes gĂ©nĂ©tiques.
  • Des techniques de transformation gĂ©nĂ©tique sont disponibles depuis 1987.
  • Leur gĂ©nome, qui est compact, a Ă©tĂ© sĂ©quencĂ© en 1998.


GĂ©nome des Drosophila

Chromosomes métaphasiques de Drosophila melanogaster observés au microscope optique aprÚs coloration au Giemsa. a est un mùle et b est une femelle.

Le gĂ©nome des Drosophila contient 4 paires de chromosomes : une paire X/Y, et trois autosomes appelĂ©s 2, 3, et 4. Le quatriĂšme chromosome est si minuscule qu'on l'omet souvent. Le gĂ©nome contient environ 165 millions de bases et environ 13 000 gĂšnes. Le gĂ©nome a fini d'ĂȘtre sĂ©quencĂ© et annotĂ© en 2000[9].

Similitude par rapport aux humains

D'un point de vue gĂ©nĂ©tique, les ĂȘtres humains et les drosophiles ont des similitudes significatives. Selon une Ă©tude de de l'Institut amĂ©ricain de recherche sur le gĂ©nome humain, environ 60 % des gĂšnes sont conservĂ©s entre les deux espĂšces[10]. Selon une analyse de 2001, 77 % des gĂšnes associĂ©s Ă  des maladies humaines identifiĂ©es ont un homologue dans le gĂ©nome de la drosophile[11]. 50 % des protĂ©ines de cette mouche ont des analogues chez les mammifĂšres. Drosophila est utilisĂ©e comme modĂšle gĂ©nĂ©tique pour diverses maladies humaines dont la maladie de Parkinson et celle de Huntington.

Vue antérieure.

DĂ©terminisme du sexe chez la drosophile

Le chromosome Y ne dĂ©finit pas le sexe mĂąle chez la mouche comme chez l'ĂȘtre humain. C'est le rapport entre le nombre de gĂšnes autosomaux dĂ©terminant le caractĂšre mĂąle et le nombre de gĂšnes femelles portĂ©s sur le ou les chromosomes X qui importe. Ainsi une mouche XY peut phĂ©notypiquement ĂȘtre une femelle si la balance entre le nombre de gĂšnes dĂ©terminant mĂąle et femelle penche en faveur du dĂ©terminisme femelle[12]. Plus prĂ©cisĂ©ment, si le rapport entre le nombre de chromosomes X et le nombre de jeux d'autosomes est supĂ©rieur Ă  1 pour 1, on obtient une mouche femelle. De mĂȘme, si ce rapport est infĂ©rieur ou Ă©gal Ă  0,5 pour 1, on obtient une mouche mĂąle. Par exemple une mouche diploide (deux jeux d'autosomes) possĂ©dant deux chromosomes X est une femelle, alors qu'une mouche diploide possĂ©dant un seul chromosome X est un mĂąle. Il est Ă  noter que certains gĂ©notypes particuliers donnent des mouches de phĂ©notype intermĂ©diaire (intersexe) et stĂ©riles.

Déterminisme génétique du sexe

Nomenclature génétique

Le nom des gÚnes nommés d'aprÚs des allÚles récessifs commence par une minuscule, celui des allÚles dominants par une majuscule. Les gÚnes qui doivent leur nom à un dérivé de protéine commencent par une minuscule. Les gÚnes sont typiquement écrits en italiques. La convention d'écriture des génotypes est :

X/Y ; 2nd/2nd ; 3rd/3rd.2

Dans la communautĂ© de la biologie du dĂ©veloppement, les gĂ©nĂ©ticiens, travaillant sur des Drosophila nomment les mutations d'aprĂšs le phĂ©notype observĂ©. Par exemple, l'homologue de Pax 6, qui est important pour la formation de l'Ɠil est appelĂ© eyeless (sans Ɠil) car cette structure est absente chez le mutant. eyeless est donc requis pour la formation de l'Ɠil. Ces noms Ă©voquent directement la fonction des gĂšnes, et sont faciles Ă  mĂ©moriser.

MĂ©canismes de rĂ©gulation de l’horloge circadienne

Boucle de rétroaction principale

L'horloge circadienne de la drosophile implique plusieurs gĂšnes rythmiques interliĂ©s par des boucles de rĂ©troaction pour permettre une rĂ©gulation Ă©troite. La premiĂšre boucle implique les gĂšnes Per (Period) et Tim (Timeless) comme facteurs principaux[13]. La transcription de ces deux gĂšnes est activĂ©e durant le temps de Zeitgeber de ZT4 Ă  ZT18, lorsque l’hĂ©tĂ©rodimĂšre formĂ© par les protĂ©ines Clock (Circadian Locomotor Output Cycles Kaput) et Cycle (Cyc) se lie Ă  la boĂźte E de leur promoteur respectif[14] - [15] - [16]. Le temps de Zeitgeber est en relation avec les cycles lumiĂšre / obscuritĂ© des horloges circadiennes dans lesquelles ZT0 Ă  ZT12 correspond Ă  la lumiĂšre constante et ZT12 Ă  ZT0, Ă  l’obscuritĂ© constante[17]. Une fois traduites, les protĂ©ines Per et Tim s’associent ensemble pour former un hĂ©tĂ©rodimĂšre Ă  leur tour[18]. L’accumulation des hĂ©tĂ©rodimĂšres Per/Tim dans le cytoplasme entraĂźne sa pĂ©nĂ©tration Ă  travers la membrane nuclĂ©ique Ă  environ ZT0[15]. Dans le noyau, elles inhibent la liaison entre les protĂ©ines Clk et Cyc, ce qui provoque l’arrĂȘt de la transcription de ses propres gĂšnes[19] [Figure 1]. Cela Ă©tant dit, l’expression oscillatoire des protĂ©ines de Clk et Cyc est dĂ©calĂ©e de phase par rapport Ă  l’expression de Per et Tim vu que ces deux couples d’hĂ©tĂ©rodimĂšres sont interliĂ©s par une boucle de rĂ©troaction nĂ©gative.

Boucle de rétroaction secondaire

En plus de la boucle de rĂ©troaction principale, l’horloge interne est rĂ©gulĂ©e par une boucle de rĂ©troaction secondaire impliquant directement l’hĂ©tĂ©rodimĂšre Clk/Cyc ainsi que les facteurs de transcription vrille (Vri) et PDP1 (protĂ©ine de domaine PAR 1) qui travaillent ensemble afin de crĂ©er une oscillation cohĂ©rente de l'expression de Clk[20] - [21]. ExpĂ©rimentalement, in vivo, l’absence de Vri dans les cellules rythmiques entraĂźne une augmentation de la transcription de Clk ce qui rĂ©sulte, subsĂ©quemment, Ă  une surexpression des protĂ©ines per et tim[22] ; autrement dit, Ă  l’état sauvage, Vri est un inhibiteur de la transcription de Clk. Par opposition Ă  Vri, Pdp1 est un activateur de la transcription de Clk : en prĂ©sence de ce facteur de transcription, Clk, ainsi que per et tim, sont surexprimĂ©es[23]. L'activation de la transcription de Vri et Pdp1 est directement rĂ©gulĂ© par le complexe Clk/Cyc, formant, ainsi, une seconde boucle de rĂ©troaction qui rĂ©gule l’expression rythmique du gĂšne Clk[20] [Figure 2].

Les deux boucles de rĂ©troaction impliquent, toutes deux, l’hĂ©tĂ©rodimĂšre Clk/Cyc ; ces deux protĂ©ines peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme l’élĂ©ment central de la rĂ©gulation du rythme endogĂšne des drosophiles[24] [Figure 2]. Cette relation entre les boucles de rĂ©gulation de la rythmicitĂ© de l’horloge circadienne assure une meilleure stabilitĂ© et constance pour maintenir l’homĂ©ostasie de l’organisme sous multiples conditions externes.

Influence des signaux environnementaux : effets de la lumiùre sur l’horloge

RĂ©gulation circadienne

Le temps circadien est utilisĂ© afin d'interprĂ©ter la photopĂ©riode afin d'obtenir des rĂ©sultats qui dĂ©pendent de la longueur du jour. Chez la drosophile, la variation de la lumiĂšre externe affecte grandement les mĂ©canismes de l’horloge circadienne qui coordonne leurs activitĂ©s physiologiques. En effet, selon la prĂ©sence ou l’absence de lumiĂšre, le motif d’expression des gĂšnes impliquĂ©s et la distribution cellulaire des protĂ©ines sont modifiĂ©s dans les neurones rĂ©gulateurs, clock neurons. Durant la journĂ©e, la lumiĂšre active la protĂ©ine Cryptochrome (Cry) qui est directement impliquĂ© dans le processus d’ubiquitination et de dĂ©gradation de la protĂ©ine Tim de l’hĂ©tĂ©rodimĂšre Per/Tim[15]. En absence de la protĂ©ine Tim, la protĂ©ine Per devient sensible Ă  la phosphorylation par la protĂ©ine doubletime (DBT). Toutefois cette derniĂšre n'est pas directement responsable de la dĂ©gradation de Per. Or, une fois les hĂ©tĂ©rodimĂšres Per/Tim dĂ©gradĂ©s, le complexe Clk/Cyc ne reçoit plus de signal d’inhibition et se lie de nouveau au promoteur des gĂšnes Per et Tim[15] - [20] - [25]. Ainsi, durant le jour, la transcription de ces gĂšnes est continuĂ©e, mais les protĂ©ines sont systĂ©matiquement dĂ©gradĂ©es par Cry[26] [Figure 3]. L’arrivĂ©e de la nuit coĂŻncide avec l’achĂšvement du signal lumineux, et donc, l’inactivation de Cry. Cela conduit Ă  une accumulation de Per et Tim dans le cytoplasme[15] ; Per et Tim entrent, alors, dans le noyau soit sĂ©parĂ©ment, soit en tant que hĂ©tĂ©rodimĂšre, et rĂ©gulent l’expression d’autres gĂšnes[27].

Au niveau de la seconde boucle de rĂ©troaction impliquant Vri et Pdp1Δ, les rĂ©percussions directes de la lumiĂšre sont encore peu connues. Par contre, par l’analyse de Western blot de protĂ©ines extraites Ă  diffĂ©rentes pĂ©riodes de la journĂ©e, il est possible de constater qu’elles sont, toutes les deux, transcrites durant la journĂ©e et leur concentration chute en obscuritĂ©[20] [Figure 4]. Or, vri est dĂ©gradĂ© avant Pdp1Δ d’une pĂ©riode d’environ 4 heures, ce qui permet de dĂ©finir le passage de l’activation Ă  la rĂ©pression de la transcription Clk[20] - [24] - [28].

RĂ©gulation circannuelle

Comme la photopĂ©riode varie au cours de l’annĂ©e, la rĂ©ponse aux signaux environnementaux lumineux permet un mĂ©canisme d’estimation du nombre de jours passĂ©s, qui est toutefois peu connu. Il semblerait que lorsqu’un certain seuil de pĂ©riode d’activation ou d’inhibition est atteint par les gĂšnes de l’horloge, les neurosĂ©crĂ©teurs Ă©mettent un signal endogĂšne responsable de divers mĂ©canismes physiologiques comme le dĂ©veloppement ou la diapause[29]. Toutefois, il semblerait que le processus d’éclosion est ne soit pas rĂ©gulĂ© par le photopĂ©riodisme[30]. D’autant plus, des Ă©tudes rĂ©centes dĂ©montrent que des changements dans la photopĂ©riode peuvent mĂȘme confĂ©rer un avantage au niveau de la tolĂ©rance du froid. En effet, chez Drosophila Montana, une journĂ©e Ă©courtĂ©e dicte un signal qui peut permettre une acclimatation au froid anticipĂ©e. Il s’agit alors d’une plasticitĂ© de tolĂ©rance au froid induite par des changements photopĂ©riodiques perçus par l’horloge interne[31].

Les horloges périphériques et la synchronisation de ces cellules

Des horloges molĂ©culaires ont Ă©tĂ© identifiĂ©es dans divers tissus pĂ©riphĂ©riques de la drosophile[32]. Effectivement, des segments corporels dissociĂ©s et ensuite cultivĂ©s (la tĂȘte, le thorax et l'abdomen), marquĂ©s avec la protĂ©ine fluorescente verte GFP[33], dĂ©montre l'autonomie circadienne de ses tissus [Figure 5]. De plus, chaque segment dissociĂ© est rythmique avec la mĂȘme phase et la mĂȘme forme d'onde. Cela confirme que l'horloge molĂ©culaire de la drosophile peut fonctionner Ă  un niveau cellulaire et ce de maniĂšre autonome. Chaque cellule Ă  une capacitĂ© photorĂ©ceptrice et peut un certain rythme endogĂšne propre[34]. PrĂ©cĂ©demment, la tĂȘte Ă©tait considĂ©rĂ©e comme la coordonnatrice principale de l'horloge molĂ©culaire chez la drosophile mais ces rĂ©sultats illustrent qu'elle ne coordonne pas tous les rythmes. Il s’agit de la lumiĂšre dans ce cas qui a le potentiel d'affecter en mĂȘme temps toutes les parties du corps et celle-ci sert de signal de coordination principal[33]. Cependant, dire que la lumiĂšre est l'unique cause de synchronisation n'est pas tout Ă  fait juste, car il est possible que la tempĂ©rature en soit Ă©galement impliquĂ©. De plus, le comportement alimentaire de la drosophile est sous contrĂŽle des tissus mĂ©taboliques qui le rĂ©gulent de face rythmique. L'horloge molĂ©culaire affecte le stockage d'Ă©nergie dans le corps gras de la drosophile. En effet, l'homĂ©ostasie Ă©nergĂ©tique de la drosophile est contrĂŽlĂ©e grĂące aux horloges neuronales et pĂ©riphĂ©riques qui ont des effets opposĂ©s sur le mĂ©tabolisme du glucose[35]. Bref, il existe des oscillateurs circadiens autonomes prĂ©sents dans tout le corps et chaque cellule chez la drosophile est capable de supporter leurs propres horloges indĂ©pendantes.

Développement et embryogénÚse

OvogénÚse de drosophile

L'ovogenĂšse se dĂ©roule dans les ovarioles de la femelle. Les cellules souches germinales se divisent de façon asymĂ©trique pour donner une nouvelle cellule souche et un cystoblaste. Il y a formation d'un syncitium de 16 cystocytes appelĂ© cyste. L'un des cystes se diffĂ©rentie en ovocyte et les 15 autres en cellules nourriciĂšres. L'ovocyte migre vers la rĂ©gion postĂ©rieure. L'axe antĂ©ro-postĂ©rieur est donc mis en place avant la fĂ©condation (de mĂȘme que l'axe dorso-ventral). Des ponts cytoplasmiques relient les cellules, ce qui permet aux cellules nourriciĂšres de transfĂ©rer des ARNm Ă  l'ovocyte. Les cellules folliculaires et nourriciĂšres disparaissent avant la fĂ©condation.

La fécondation déclenche des mitoses incomplÚtes sans ségrégation des noyaux dans des cellules différentes. Il y a formation d'un syncitium. Certains noyaux migrent à l'extrémité postérieure de l'embryon et se cellularisent formant les cellules germinales initiales. La plupart des autres noyaux migrent ensuite à la périphérie de l'embryon et il y a cellularisation, formant un blastoderme. La gastrulation permet aux cellules ventrales formant le mésoderme de rentrer à l'intérieur de l'embryon par invagination puis par délamination. L'endoderme forme le tube digestif par une double invagination, formant deux tubes qui se rejoignent au milieu de l'embryon. Les 14 segments (ou plus précisément les parasegments) se mettent en place.

OvogenĂšse de Drosophila melanogaster

La vision chez les Drosophila

Paire d'images en stĂ©rĂ©ovision (relief) tels que les reçoivent un Ɠil de mouche

Un Ɠil composĂ© de drosophile contient 800 unitĂ©s de vision ou ommatidia, ce qui en fait l'un des plus dĂ©veloppĂ©s parmi les insectes. Chaque ommatidium contient 8 cellules photorĂ©ceptrices (R1-8), des cellules de support, des cellules de pigment, et une cornĂ©e. Les drosophiles standard ont des cellules de pigment rougeĂątre (causĂ©s par les pigments pteridines et ommochromes)[36] qui servent Ă  absorber l'excĂšs de lumiĂšre bleue ce qui empĂȘche l'Ă©blouissement de la mouche par la lumiĂšre ambiante. Certains gĂšnes de la couleur des yeux rĂ©gulent le transport vĂ©siculaire des cellules. Les enzymes et autres substances nĂ©cessaires Ă  la synthĂšse des pigments sont donc transportĂ©es Ă  la granule du pigment, qui contient les molĂ©cules prĂ©curseures des pigments[36].


Vol des Drosophila

Les ailes d'une mouche peuvent battre jusqu'à 250 fois par seconde. Les mouches volent par des séquences directes de mouvement alternant avec de rapides rotations appelées saccades. Au cours de ces rotations, une mouche peut effectuer une rotation de 90 degrés en moins de 50 millisecondes.

Notes et références

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  2. (en) Benjamin A. Pierce, Genetics : a conceptual approach, New York, W. H. Freeman and Company, , 5e Ă©d. (1re Ă©d. 2003), 700 p. (ISBN 978-1-4641-0946-1 et 1-4641-0946-X).
  3. (en) Paul E. Hardin, Jeffrey C. Hall et Michael Rosbash, « Feedback of the Drosophila period gene product on circadian cycling of its messenger RNA levels », Nature, vol. 343, no 6258,‎ , p. 536–540 (ISSN 0028-0836, e-ISSN 1476-4687, PMID 2105471, DOI 10.1038/343536a0).
  4. (en) Thaddeus A. Bargiello, F. Rob Jackson et Michael W. Young, « Restoration of circadian behavioural rhythms by gene transfer in Drosophila », Nature, vol. 312, no 5996,‎ , p. 752–754 (ISSN 0028-0836, e-ISSN 1476-4687, PMID 6440029, DOI 10.1038/312752a0, lire en ligne).
  5. Didier Pol, « Élevage de la mouche du vinaigre, Drosophila melanogaster », sur planet-vie.ens.fr, .
  6. « Les Entreprises Maheu Ltée / Gestion parasitaire (extermination) », sur Entreprises Maheu (consulté le ).
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