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Style 1940

Le style 1940, ou style 40 est une branche tardive de l'Art déco qui connut son heure de gloire essentiellement en France durant la période 1937-1955. À la différence du style « paquebot » et de ses lignes claires et sobres, c'est un style excentrique et baroque qui déclina au profit du style international et des courants modernistes des années 1950. L'apogée de ce style se situe dans l'immédiat après-guerre d'où le nom qui lui est souvent associé, à plus ou moins juste titre, bien qu'on en trouve des échos jusque dans les années 1960.

Décor en verre églomisé du théâtre de Poitiers, par Robert Pansart (1955-1956).

Origines

C'est Ă  partir de l'exposition universelle de 1937 que l'on situe le dĂ©veloppement de cette tendance dĂ©corative. Peut ĂŞtre en rĂ©action Ă  la sobriĂ©tĂ© monumentale et lisse de l'Art dĂ©co des annĂ©es 1930, on voit apparaĂ®tre dans les dĂ©cors et meubles des lignes baroques, et une tendance vers le pastiche. Si l'Art dĂ©co des annĂ©es 1920 Ă©tait un cubisme purement dĂ©coratif, vidĂ© de ses ambitions philosophiques et radicales, le Style 1940 lui trouve sa source dans l'art surrĂ©aliste. Encore une fois, l'aspect psychanalytique et philosophique de l'art surrĂ©aliste est gommĂ©, pour en retenir l'onirisme et le fantastique. La reconstruction et les transformations de l'après-guerre verront se dĂ©velopper ce style qui est aussi une dernière rĂ©action contre la sobriĂ©tĂ© fonctionnelle et l'esthĂ©tique minimaliste du modernisme dĂ©veloppĂ©es dans des Ă©coles telles que le Bauhaus et prĂ´nĂ© par des architectes comme Le Corbusier. C'est ainsi l'antithèse absolue du design fonctionnel qui lui est contemporain. Comme l'Art nouveau ou l'Art dĂ©co, c'est Ă  l'origine un style luxueux et snob, rĂ©servĂ© Ă  une forme d'Ă©lite, mais Ă  la diffĂ©rence de ces deux autres styles, il n'a pas connu de version industrielle très poussĂ©e. De mĂŞme, le « style 1940 Â» concerne essentiellement le mobilier et le dĂ©cor intĂ©rieur. Outre les appartements de luxe, il s'est surtout dĂ©veloppĂ© dans l'amĂ©nagement des ministères, des ambassades ou des demeures prĂ©sidentielles qui allaient de pair avec une certaine idĂ©e de l'apparat, et ce grâce Ă  de nombreuses commandes du Mobilier national. Il s'est aussi beaucoup manifestĂ© dans les foyers de théâtre et de cinĂ©ma, de mĂŞme que dans les grands rĂ©amĂ©nagements de musĂ©es nationaux (le Louvre, le château de Versailles). On en trouve aussi de nombreux exemples dans l'architecture domestique Ă  Bruxelles.

Caractéristiques

Le « style 40 Â» est un style difficile Ă  dĂ©finir tant il est polymorphe. Il prend autant de dĂ©finitions qu'il avait de crĂ©ateurs. On peut en revanche en faire ressortir certaines gĂ©nĂ©ralitĂ©s.

Architecture

  • L'architecture quant Ă  elle conserve la monumentalitĂ© froide des annĂ©es 1930, dans la lignĂ©e du palais de Tokyo ou du palais de Chaillot. Elle fait souvent la concession de la modernitĂ© dans l'utilisation de structures en bĂ©ton, gĂ©nĂ©ralement plaquĂ©s de dalles de pierre claire (calcaires, travertin...). L'imposante bibliothèque municipale de Tours, inaugurĂ©e en 1957, ou les premiers immeubles reconstruits Ă  Royan dès 1947 par Claude Ferret (boulevard Aristide-Briand) montrent bien cette continuitĂ©.
  • Les façades d'immeuble sont scandĂ©es de rangĂ©es de fenĂŞtres verticales, souvent encadrĂ©es de moulures très simples en pierre. Dans l'architecture domestique les ouvertures sont parfois adoucies par des arcs en plein cintre, des rangĂ©es d'arcatures et des Ĺ“ils-de-bĹ“uf grillagĂ©s.
  • Chez certains architectes tels que Jean-Charles Moreux ou Emilio Terry, les Ă©difices reprennent parfois des formes nĂ©o-classiques voire palladiennes.
  • Les bas-reliefs et bronzes figuratifs ornent encore parfois les immeubles, quoique cette tendance disparaisse progressivement dans la dĂ©cennie 1950. L'ornementation se concentre surtout Ă  l’intĂ©rieur, et Ă  l’extĂ©rieur se rĂ©sume parfois Ă  quelques sculptures en bas-relief isolĂ©es. La ferronnerie fait aussi office de dĂ©cor extĂ©rieur.
  • ÉnormĂ©ment de cinĂ©mas ont Ă©tĂ© construits et amĂ©nagĂ©s Ă  cette Ă©poque : on retrouvait dans les foyers, les restaurants/bar et les salles de spectacle des somptueux dĂ©cors baroques de miroirs, sculptures en bas-relief et lustres (voir "Ameublement et dĂ©coration intĂ©rieure" ci-dessous), des rideaux drapĂ©s cachaient l'Ă©cran et s'ouvraient cĂ©rĂ©monieusement avant les projections. Malheureusement la plupart de ces salles ont Ă©tĂ© dĂ©truites dans les annĂ©es 1980-1990 pour faire place Ă  la crĂ©ation de plusieurs salles voire des multiplexes, et les foyers ont Ă©tĂ© gĂ©nĂ©ralement modernisĂ©s (cinĂ©ma de l'ancien palais Berlitz, dĂ©cor dĂ©truit vers 1991). Très peu d'exemples conservĂ©s existent encore intacts.
  • Immeuble construit vers 1947 Ă  Royan par Claude Ferret, montrant les moulures aux formes classiques en pierre et les bas reliefs dans une tradition Art dĂ©co d'avant-guerre.
    Immeuble construit vers 1947 à Royan par Claude Ferret, montrant les moulures aux formes classiques en pierre et les bas reliefs dans une tradition Art déco d'avant-guerre.
  • HĂ´tel particulier Ă  Boulogne-Billancourt, construit par Emilio Terry en 1932.
    HĂ´tel particulier Ă  Boulogne-Billancourt, construit par Emilio Terry en 1932.
  • CinĂ©ma Le ComĹ“dia de Brest, par Michel Ouchacoff et sculptures de Jean-RenĂ© Debarre, 1950.
    Cinéma Le Comœdia de Brest, par Michel Ouchacoff et sculptures de Jean-René Debarre, 1950.
  • Collège d'Espagne, Ă  la CitĂ© internationale universitaire de Paris de Modesto Lopez Otero, 1937. Toit-terrasse ornĂ© d'obĂ©lisques.
    Collège d'Espagne, à la Cité internationale universitaire de Paris de Modesto Lopez Otero, 1937. Toit-terrasse orné d'obélisques.

Ameublement et décoration intérieure

  • Les rĂ©fĂ©rences surrĂ©alistes : le mobilier se pare de motifs extravagants, de formes de coquillages ou de coraux, des peintures sur les murs et les portes de meubles s'inspirent des compositions de Dali, de Labisse ou de Giorgio de Chirico. Au niveau dĂ©coratif, le peintre Christian BĂ©rard en est le meilleur reprĂ©sentant. Les dĂ©cors Ă©voquent parfois les cabinets de curiositĂ©s.
  • Un goĂ»t pour le fantastique : les dĂ©cors de BĂ©rard pour la Belle et la BĂŞte de Jean Cocteau en sont une manifestation.
  • Une théâtralitĂ© baroque poussĂ©e et assumĂ©e comme telle : au mur des peintures murales en trompe-l'Ĺ“il Ă©voquent des vues d'Italie, surtout de Venise, rappelant le style schĂ©matique des dĂ©cors de la ComĂ©die-Française de l'Ă©poque. Les lustres sont parfois en tĂ´le peinte, les dĂ©cors peuvent volontairement faire faux pour insister sur leur aspect de simples dĂ©cors. On retrouve Ă©galement des colonnes aux formes arrondies encadrĂ©e par des moulures assez exagĂ©rĂ©es pour former des chapiteaux.
  • Des verrière au style Ă©purĂ© de l'Art Deco mais avec des formes un peu baroques.
  • Les miroirs, simples ou parfois Ă©glomisĂ©s recouvrent les meubles (coiffeuses, tables de chevet, tables basses...) et les murs, les grands miroirs vĂ©nitiens aux formes baroques ornent les murs des chambres.
  • Lustres Ă  pampilles, appliques murales de style vĂ©nitien en laiton et miroir.
  • Le fer forgĂ© est très prisĂ©, dans les sièges, tables, consoles et les grilles d'intĂ©rieur qui sĂ©parent parfois les pièces. Gilbert Poillerat en est le plus grand reprĂ©sentant. Le mĂ©tal peut ĂŞtre laissĂ© nu, dorĂ© Ă  la feuille ou patinĂ© vert-de-gris.
  • Le dĂ©cor fait rĂ©fĂ©rence aux styles Louis XIV, Empire, ou NapolĂ©on III.
  • Les meubles de rangement font parfois preuve d'une certaine lourdeur dans leurs formes. Souvent, buffets et meubles bar sont les pièces maĂ®tresses de l'amĂ©nagement.
  • Les obĂ©lisques sont souvent utilisĂ©s, autant comme ornements de jardin que dans les intĂ©rieurs en tant qu'objets de dĂ©coration Ă  poser. Ils peuvent ĂŞtre aussi entièrement recouverts de miroirs.
  • le travail artisanal dans la tradition de l’ébĂ©nisterie française.
  • Les bois sombres, noircis, blanchis Ă  la cĂ©ruse, les bronzes dorĂ©s.
  • Les drapĂ©s abondent, aux fenĂŞtres mais aussi en tenture murale, en encadrements de portes.
  • Statues, cariatides, plaques en bronze sur les portes de meuble, tĂŞtes fĂ©minines, dauphins, sirènes, thèmes marins.
  • Des formes en arabesques adoucies, rappelant les pleins et dĂ©liĂ©s de la calligraphie apparaissent dans les ferronneries et les marqueteries.
Verrière décorative avec lumière naturelle, 1951
  • Masque en galets dans la tradition des grotesques de la Renaissance rĂ©alisĂ© par Jean-Charles Moreux, Square RenĂ©-Le Gall, Paris (1938).
    Masque en galets dans la tradition des grotesques de la Renaissance réalisé par Jean-Charles Moreux, Square René-Le Gall, Paris (1938).
  • Porte et imposte en fer forgĂ© avec des motifs « calligraphiques Â» typiques, vers 1947-1950, Tours
    Porte et imposte en fer forgĂ© avec des motifs « calligraphiques Â» typiques, vers 1947-1950, Tours
  • Rampe en fer forgĂ© et verre de la Bourse du Travail Ă  Bordeaux, 1938.
    Rampe en fer forgé et verre de la Bourse du Travail à Bordeaux, 1938.
  • Les luminaires Rococo en verre soufflĂ© de Murano connaissent une grande faveur dans la dĂ©coration de cette pĂ©riode.
    Les luminaires Rococo en verre soufflé de Murano connaissent une grande faveur dans la décoration de cette période.
  • Miroir vĂ©nitien du XVIIe siècle. Dans les dĂ©corations intĂ©rieures, tout ce qui Ă©voque Venise, ses fastes baroques et son aspect merveilleux, sont Ă  l'honneur.
    Miroir vénitien du XVIIe siècle. Dans les décorations intérieures, tout ce qui évoque Venise, ses fastes baroques et son aspect merveilleux, sont à l'honneur.

Paysagisme et jardins

Principaux représentants

Peinture et arts visuels

Architecture, mobilier et décoration intérieure

Verrerie

Tapisserie

Ferronnerie

Sculpture

Exemples

Notes et références

  1. Léon Marie André Domin (1883-1962), ensemblier, nommé chevalier de la Légion d'honneur par décret du 22 mai 1926 en récompense de sa participation à l'exposition de Paris de 1925 « Notice LH 19800035/427/57089 », base Léonore, ministère français de la Culture. Associé à Marcel Genevrière (1885-1967), il est cofondateur de la maison Dominique, sise 8, rue de Castellane à Paris.

Bibliographie

B. Foucart & J.-L. Gaillemin, Les Décorateurs des années 40, Norma, Paris, 1998

Liens externes

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