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Rapport Goldstone

Le rapport de la mission internationale indĂ©pendante d’établissement des faits sur le conflit Ă  Gaza plus connu sous le nom de rapport Goldstone[1] est un rapport de 575 pages rĂ©digĂ© Ă  la demande du Conseil des droits de l'homme des Nations unies sur l'opĂ©ration militaire israĂ©lienne appelĂ©e opĂ©ration Plomb Durci de et contre la bande de Gaza et sur les tirs de roquettes et de missiles contre des localitĂ©s civiles israĂ©liennes par le Hamas et autres organisations islamistes au cours de laquelle prĂšs de 1400 Palestiniens, dont 758 civils, et 13 IsraĂ©liens, pour la plupart militaires avaient Ă©tĂ© tuĂ©s[2].

Le juge sud-africain Richard J. Goldstone

Contenu du rapport

RĂ©digĂ© aprĂšs un mois et demi d’enquĂȘte menĂ©e par une mission d’information de l’ONU formĂ©e de Christine Chinkin (Professeur de Droit international Ă  la London School of Economics and Political Science[3]), Hina Jilani (ReprĂ©sentante spĂ©ciale du SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral des Nations unies sur les questions de dĂ©fenses des droits de l'homme[4]), Desmond Travers (Colonel Ă  la retraite des forces armĂ©es irlandaises[5]) et dirigĂ©e par le juge Richard Goldstone, le Rapport Goldstone examine en dĂ©tail 36 « incidents » au cours desquels les lois de la guerre et le droit international pouvaient avoir Ă©tĂ© violĂ©s. Les rapporteurs ont entendu 188 personnes, examinĂ© plus de 10 000 pages de documents, 1200 photos et 30 vidĂ©os, et tenu deux audiences publiques Ă  Gaza et Ă  GenĂšve. La mission – qui n’avait pas Ă©tĂ© autorisĂ©e par le gouvernement israĂ©lien Ă  enquĂȘter sur son territoire et Ă  entendre des militaires israĂ©liens[2] – a remis ses conclusions le jeudi [6]. Le rapport accuse l'armĂ©e israĂ©lienne et des groupes armĂ©s palestiniens (en particulier ceux du Hamas) d'avoir commis des actes pouvant constituer des crimes de guerre et peut-ĂȘtre, dans certaines circonstances, des crimes contre l'humanitĂ©[7] - [8] - [9].

À IsraĂ«l, il est reprochĂ©[10] :

  • La mission dans son rapport estime que malgrĂ© l’isolement Ă©conomique et politique imposĂ© par IsraĂ«l Ă  la Bande de Gaza depuis 2006, en d'autres termes le blocus, n'exonĂšre pas du respect des termes de la 4e Convention de GenĂšve, Ă  savoir la fourniture des biens humanitaires. (Art. 27 et 28)
  • Nombreuses attaques des forces israĂ©liennes contre des bĂątiments gouvernementaux et des personnels gouvernementaux de Gaza incluant des policiers. (art. 32 Ă  34)
  • Avertissement insuffisant des populations civiles et mise en danger de celle-ci du fait du bombardement par les forces israĂ©liennes avec des obus au phosphore blanc de complexes hospitaliers, qui ne constituaient pas des cibles militaires. Emplois d'armes dangereuses pour les civils : phosphore blanc, flĂ©chettes. (art. 37 Ă  40, 48 et 49)
  • Attaques sans discrimination pour rĂ©pliquer Ă  un tir de mortier dans un quartier comprenant de nombreux civils. (art 41 et 42)
  • 10 attaques des forces israĂ©liennes contre des populations civiles sans objectif militaire justifiable. Les divers incidents, graves, mettant en cause les forces israĂ©liennes, montrent que les instructions donnĂ©es fixaient un faible seuil Ă  l’utilisation d’un feu mortel contre la population civile. (art. 43 Ă  47)
  • Attaques visant les fondements de la vie civile Ă  Gaza : destruction des infrastructures industrielles, de la production alimentaire, des installations d’approvisionnement en eau, des stations d’épuration des eaux usĂ©es et des habitations. (art 50 Ă  54)
  • Utilisation de civils palestiniens comme boucliers humains. (art 55)
  • DĂ©tentions arbitraires, dĂ©gradantes, violentes de civils palestiniens. (art 56 Ă  60, 87 Ă  91))
  • Disproportion militaire dĂ©libĂ©rĂ©e, reprĂ©sailles. (art 61 Ă  64)
  • chĂątiment collectif voire persĂ©cution, cette derniĂšre infraction pouvant relever du crime contre l'humanitĂ© (art 73 Ă  75, 78, 91)
  • Recours excessif Ă  la force envers les Palestiniens de Cisjordanie et de JĂ©rusalem-Est, climat d'impunitĂ© (art. 83 Ă  85)
  • Restrictions de dĂ©placement (art 92 Ă  96)
  • Restrictions Ă  la facultĂ© de manifester, atteinte Ă  la libertĂ© de l'information (art 11 Ă  116)

Aux groupes armés palestiniens, il est reproché :

  • La mise en danger de la population civile en lançant des attaques depuis des zones urbaines. (art 35 et 36)
  • Le maintien en dĂ©tention, sans visite, du soldat Gilad Shalit, prisonnier de guerre selon les termes de la 3e Convention de GenĂšve. (art. 77)
  • Des violences et des attaques commises par les forces de sĂ©curitĂ© de Gaza contre les opposants politiques membres du Fatah. (art 79 et 80)
  • Violences variĂ©es, discriminations, principalement contre les membres du Hamas (art 97 Ă  102)
  • Tir de 8000 roquettes et obus en direction de zones civiles pour gĂ©nĂ©rer une terreur. (art 103 Ă  110)

Accusations et réponses des accusés

Accusations contre Israël et réactions

Aux militaires israĂ©liens, il est reprochĂ© d’avoir ouvert le feu sur des civils brandissant des drapeaux blancs, tirĂ© des obus au phosphore blanc (armes utilisĂ©es entre autres sur les hĂŽpitaux Al Quds et Al Wada[11], elles sont interdites par les conventions internationales depuis 1983[12]) et des obus de mortier contre des zones trĂšs peuplĂ©es, pris pour cibles des bĂątiments de l’ONU, des dispensaires, des usines, des fermes, des mosquĂ©es, utilisĂ© des civils palestiniens comme boucliers humains, ou fait obstacle Ă  la circulation des ambulances. L’armĂ©e israĂ©lienne a, selon le rapport, a cherchĂ© Ă  « punir, humilier et terroriser » les habitants de Gaza en faisant un usage disproportionnĂ© de sa force[2].

L'État d'IsraĂ«l rĂ©pond que lors de l'OpĂ©ration Plomb durci, Tsahal n'a pas « tuĂ© intentionnellement des civils » palestiniens et qu'IsraĂ«l n'a fait qu'exercer « son droit d'auto-dĂ©fense » face Ă  des « attaques terroristes » contre son territoire[13].

Incident de Zeitoun

Le rapport Goldstone affirme[14] (selon les tĂ©moignages des survivants, de voisins, de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge ainsi que les soumissions de nombreuses ONG) que, le , au cours d'une incursion de l'armĂ©e israĂ©lienne, les membres de la famille Samouni (environ 100 personnes, en majoritĂ© des femmes) ont Ă©tĂ© rassemblĂ©s par l'armĂ©e dans une habitation avec d'autres personnes, aprĂšs la fin des combats. Une fois rassemblĂ©s Ă  l'intĂ©rieur, l'armĂ©e israĂ©lienne a tirĂ© plusieurs missiles sur le bĂątiment. Lorsque les survivants ont voulu s'enfuir et rejoindre la ville de Gaza, selon eux l'armĂ©e israĂ©lienne leur aurait ordonnĂ© de faire demi-tour et de retourner Ă  la mort[15]. Les ambulanciers qui se sont par la suite rendu sur les lieux affirment que l'armĂ©e israĂ©lienne les a mis Ă  nu contre le sol et leur a ensuite demandĂ© de retourner Ă  Gaza sans les blessĂ©s. AprĂšs plusieurs tentatives infructueuses[16], ils purent finalement accĂ©der aux blessĂ©s 3 jours plus tard, le . Ce jour-lĂ  l'armĂ©e israĂ©lienne ne leur accorda que 3 heures pour opĂ©rer, ils durent laisser de nombreux blessĂ©s sur place. L'armĂ©e israĂ©lienne empĂȘcha l'accĂšs Ă  la zone durant les 11 jours suivants, quand les rescapĂ©s revinrent ils trouvĂšrent le village rasĂ© au bulldozer[14] - [17]. La Croix-Rouge accuse IsraĂ«l de n'avoir pas respectĂ© les conventions internationales sur l'accessibilitĂ© et les soins aux blessĂ©s[16].

À la suite de l'incident le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA) a dĂ©noncĂ© les meurtres mais n'a pas directement accusĂ© l’armĂ©e israĂ©lienne d’avoir « dĂ©libĂ©rĂ©ment ciblĂ© cet immeuble de Zeitoun », il s'Ă©tait contentĂ© de demander une enquĂȘte[18], l'accusation s'est concrĂ©tisĂ©e plus tard Ă  travers le rapport Goldstone. Peu de temps aprĂšs l'offensive, dans une dĂ©claration Ă  Newsweek, Avital Leibovich, porte parole de l’armĂ©e israĂ©lienne, avait dĂ©clarĂ© n'avoir aucune information sur cet incident, mais que l'armĂ©e israĂ©lienne n'avait jamais eu l'intention de viser des civils, avant de rajouter « Pensez-vous que nous disons aux [soldats] d'entrer dans une maison et de les tuer dĂ©libĂ©rĂ©ment ? »[19] Selon le colonel israĂ©lien, Jonathan D. Halevi, dans une dĂ©claration du , aprĂšs examen de sources palestiniennes, au moins 3 membres de la famille Al Samouni auraient Ă©tĂ© affiliĂ©s au Jihad islamique et auraient pu participer aux opĂ©rations militaires dans la rĂ©gion[20], l'enquĂȘte montre que les personnes suspectĂ©es sont mortes plusieurs jours avant l'incident de Zeitoun.

Accusations contre les groupes armés palestiniens et réactions

Les groupes armés palestiniens sont accusés d'avoir tiré des obus de mortiers et des roquettes sur des civils[2].

Le Hamas rétorque que ses groupes armés n'ont « frappé que des cibles militaires et ont évité les cibles civiles, et toutes les accusations dans ce sens concernent des balles perdues. Les roquettes visaient exclusivement des objectifs militaires mais, n'étant pas équipées de systÚme de guidage, il est possible qu'elles aient touché des civils par erreur. »[13] - [21].

Adoption par les Nations unies et résolutions

Le , Le Conseil des droits de l'homme des Nations unies approuve le texte et en adopte les recommandations[22]. Dans sa lancĂ©e, il prend une rĂ©solution condamnant l'absence de collaboration d'IsraĂ«l Ă  l'enquĂȘte de la commission conduite par le juge Goldstone. L'adoption du texte a Ă©tĂ© fait avec 25 voix pour, 6 contre (dont les États-Unis) et 11 abstentions[23].

RĂ©sultat du vote :

Vote sur l'approbation du rapport Goldstone

Le également, le Conseil des droits de l'homme engage les parties à veiller à l'application du rapport sur la situation en « Palestine occupée »[24].

AprĂšs le Conseil des droits de l’homme, c’est au tour de l’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations unies d’adopter en [25] une rĂ©solution dans laquelle elle approuve les recommandations du rapport Goldstone. La rĂ©solution a Ă©tĂ© adoptĂ©e par 114 voix pour, 18 voix contre, et 44 abstentions. « Ce vote est une dĂ©claration importante contre l’impunitĂ©. C’est un appel en faveur de la justice. » a dĂ©clarĂ© le prĂ©sident de l’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale, Ali Treki, Ă  l’issue du vote[1].

Critiques envers le Conseil des droits de l'homme

L'Ă©crivain Fabio Rafael Fiallo estime que le Conseil des droits de l'homme est une organisation partiale[26]. La Licra (soutenu par des intellectuels français)[27] y voit une organisation dans laquelle siĂšgent de nombreux pays dans lesquels sont commis de graves violations des droits de l'homme. Jusqu'en 2010, IsraĂ«l a Ă©tĂ© condamnĂ© par 32 rĂ©solutions qui reprĂ©sentent 45,86 % de la totalitĂ© des rĂ©solutions passĂ©es par le Conseil depuis sa crĂ©ation en 2006[28]. En 2006, le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de l'ONU Kofi Annan a dĂ©clarĂ© que les rĂ©solutions du Conseil concernant IsraĂ«l Ă©taient « disproportionnĂ©es »[29], tout comme le ministre nĂ©erlandais des affaires Ă©trangĂšres Maxime Verhagen[30]. La secrĂ©taire d'État amĂ©ricaine Hillary Clinton affirme que les positions contre IsraĂ«l discrĂ©dite le travail du Conseil des droits de l'homme[31].

Suivi du rapport

La rĂ©solution 13/9 du Conseil des droits de l'homme de l'ONU votĂ©e le [32], a crĂ©Ă© une commission d'experts pour Ă©valuer l'Ă©tat d'avancement des enquĂȘtes recommandĂ©es par le rapport Goldstone.

Le comité d'experts constitué de deux membres, la juge américaine Mary McGowan Davis[33] et le juge suédois Lennart Aspegren (en), a rendu un rapport d'avancement le , dit Rapport McGowan Davis[34].

Dans ce rapport les juges McGowan Davis et Aspergren, regrettent le manque de coopĂ©ration des autoritĂ©s israĂ©liennes: refus d'accĂšs Ă  IsraĂ«l, Ă  la bande de Gaza par IsraĂ«l et Ă  la Cisjordanie, ce qui a empĂȘchĂ© le comitĂ© d'avoir accĂšs Ă  des tĂ©moins clĂ©. Si le comitĂ© d'experts admet qu'IsraĂ«l a mis d'importantes ressources (significant resources) pour prendre en compte 400 cas rapportĂ©s dans le rapport Goldstone, il Ă©met de fortes rĂ©serves sur la promptitude Ă  diligenter ces cas, compte tenu des moyens mis en Ɠuvre : sur 19 cas de violation des droits humains diligentĂ©es, seulement trois cas ont menĂ© Ă  des actions disciplinaires, tout en rĂ©futant les violations du droit humanitaire et des lois internationales.

Si le comitĂ© se fĂ©licite de la mise en place par l'AutoritĂ© palestinienne d'une commission palestinienne d'investigation indĂ©pendante (Palestinian Independent Investigation Commission, PIIC) qui fournit une bonne base d'enquĂȘte sur les cas de violation des droits humains, il regrette que les investigations n'ont pas commencĂ©.

Campagne Ă  l'encontre du juge Goldstone

En le journaliste belge Serge Dumont, correspondant du Soir de Bruxelles, du quotidien suisse Le Temps et du quotidien français La Voix du Nord, mentionnait la campagne de dénigrement contre le juge Richard Goldstone, organisée par le gouvernement israélien. Un dossier à charge était publié par le Yediot Aharonot et selon Serge Dumont le ministre des Affaires étrangÚres, Avigdor Lieberman, demandait à toutes les représentations diplomatiques de l'état hébreu de diffuser ce dossier dans le monde entier[35].

Rétractation du juge Goldstone et réactions

Le , le juge Goldstone, dans une tribune publiĂ©e dans le Washington Post, a dĂ©clarĂ© qu’il est temps de « reconsidĂ©rer » les conclusions du rapport portant son nom. Il affirme que la commission d'enquĂȘte qu'il prĂ©sidait « ne disposait pas assez d'Ă©lĂ©ments pour dire avec certitude qu’IsraĂ«l a tuĂ© intentionnellement des civils. » Il a par ailleurs dĂ©plorĂ© que le Hamas n'ait, quant Ă  lui, menĂ© aucune enquĂȘte et qu'avoir escomptĂ© qu'il le fasse Ă©tait une « erreur »[36].

RĂ©actions des autres rapporteurs

L'avocate pakistanaise Hina Jilani

Le les 3 autres coauteurs du rapport (Hina Jilani, Christine Chinkin (en) et Desmond Travers (en)) publient un communiquĂ© commun critiquant la rĂ©tractation de Richard Goldstone, affirmant que le rapport est juste et qu'IsraĂ«l n'a pas su dĂ©montrer que les tirs sur des civils n'Ă©taient pas dĂ©libĂ©rĂ©s[37] (point sur lequel Goldstone se rĂ©tracte). Ils accusent Goldstone de « dĂ©naturer les faits », dĂ©mentent ses assertions et affirment qu'elles sont « le fruit d'une intense pression politique »[38]. Dans une interview accordĂ©e au Middle East Monitor, Hina Jilani, avocate des droits de l'homme qui faisait partie de la commission Goldstone, a contredit les derniĂšres affirmations du juge. Elle affirme : « En dĂ©finitive, le rapport n'aurait pas Ă©tĂ© diffĂ©rent de ce qu'il est. » Selon elle, il reste une piĂšce importante « qu'aucune procĂ©dure acceptable n'invaliderait [
]. Si cela arrive, ce serait vu comme une dĂ©cision suspecte ». Elle insiste Ă©galement sur le fait que rien dans la tribune Ă  travers laquelle Richard Goldstone se rĂ©tracte ne pourrait Ă©branler l'objectivitĂ© du rapport initial[39].

Demandes israéliennes de l'annulation du rapport initial

Président d'Israël Shimon Peres.

Pour le premier ministre israĂ©lien Benyamin NĂ©tanyahou, il est maintenant dĂ©montrĂ© que, comme les autoritĂ©s israĂ©liennes l'ont toujours affirmĂ©, « IsraĂ«l n'a pas nui intentionnellement aux civils ». Dans le cadre d'une campagne diplomatique et mĂ©diatique visant Ă  rehausser l'image internationale d'IsraĂ«l, il demande Ă  l'ONU d'annuler et classer ce rapport et dĂ©clare que (selon lui) « il faut jeter ce rapport dans les poubelles de l'Histoire » [40]. Lors d'une rĂ©union tenue au siĂšge de l'ONU le , le prĂ©sident de l'État d'IsraĂ«l Shimon PĂ©rĂšs, s'appuyant sur les rĂ©tractations du Juge Goldstone du , demande au SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de l'ONU Ban Ki-moon de retirer le rapport. Ban Ki-moon refuse, reprochant entre autres Ă  IsraĂ«l son manque de coopĂ©ration dans l'Ă©laboration du rapport[41].

Le , M. Yossi Gal, ambassadeur d'IsraĂ«l en France, auditionnĂ© par la Commission des affaires Ă©trangĂšres de l'AssemblĂ©e nationale, dĂ©clare : « Vendredi dernier, le Washington Post a publiĂ© une tribune intitulĂ©e « ReconsidĂ©rer le rapport Goldstone sur IsraĂ«l et les crimes de guerre », (...) signĂ©e du juge Goldstone (...). Au moment de sa publication, en 2009, j’étais directeur gĂ©nĂ©ral du ministĂšre israĂ©lien des affaires Ă©trangĂšres (...et) me suis battu jour et nuit contre cette odieuse campagne diffamatoire. En effet, l’accusation de crime de guerre Ă  l’encontre de mon pays a apportĂ© un soutien de poids aux tentatives de « dĂ©lĂ©gitimation » menĂ©es depuis le Conseil des droits de l’homme Ă  GenĂšve. Dans cet article, Goldstone dĂ©clare que s’il avait su, Ă  l’époque, ce qu’il sait maintenant, le rapport aurait Ă©tĂ© diffĂ©rent. (...) J’espĂšre que ceux, en Europe, qui se sont hĂątĂ©s d’accuser IsraĂ«l auront le courage intellectuel de reconnaĂźtre leur erreur car mon pays a Ă©normĂ©ment souffert de ces accusations. (...). »[42]

Gabriela Shalev, juriste et ambassadrice d'Israël aux Nations unies, a déclaré que « le rapport occulte les efforts sans précédent entrepris par Israël afin de sauver des vies civiles et ainsi fait la preuve que toutes les victimes civiles étaient intentionnelles » Shalev a aussi fait remarquer que le rapport a occulté « la réalité de la terreur » ainsi que « la complexité des défis militaires [que posent] le combat de groupes terroristes en zone urbaine »[43] - [44].

Réponse du juge Goldstone aux déclarations israéliennes

Le mardi , le juge Goldstone a dĂ©clarĂ©[45] qu’il n’avait pas l’intention de demander l’annulation de son rapport onusien trĂšs critique envers IsraĂ«l concernant l’offensive 2008-2009 dans la bande de Gaza et a affirmĂ© que les allĂ©gations du contraire par le ministre de l’IntĂ©rieur d’IsraĂ«l Eli Yishai Ă©taient fausses[46].

Autres avis favorables Ă  l'abrogation du rapport initial

À la suite de la tribune du juge Goldstone, le SĂ©nat des États-Unis a adoptĂ© une rĂ©solution demandant Ă  l'ONU d'annuler le rapport qui accuse IsraĂ«l de « crimes de guerre »[47] - [48].

Simone Rodan-Benzaquen, reprĂ©sentante de l'American Jewish Committee en France, espĂšre « que la communautĂ© internationale et en relai toute la presse accorde la mĂȘme importance aux dĂ©nĂ©gations spectaculaires du juge qu’à son rapport original »[49].

Le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) appuie une "pétition internationale pour l'abrogation du rapport Goldstone" lancée à l'initiative de Siona (qui fait partie du CRIF), de JFORUM, et du Bureau National de Vigilance Contre l'Antisémitisme (BNVCA)[50].

À la suite de la rĂ©tractation de Goldstone, le Centre d’Études du Terrorisme, ONG israĂ©lienne considĂ©rĂ©e comme la face publique des services de renseignement israĂ©liens[51], composĂ©e d'anciens membres des services secrets[52], et qui se dĂ©clare spĂ©cialisĂ©e dans les domaines du renseignement et du terrorisme, demande l'abrogation du Rapport Goldstone, selon lui :

« La proportion entre les terroristes (60 %) et les civils (40 %) tués dans la bande de Gaza corrobore l'affirmation israélienne au sujet de l'effort systématique de Tsahal de réduire le nombre de pertes humaines palestiniennes civiles. Elle réfute également les données fournies par le Hamas et les organisations des droits de l'homme opérant dans la bande de Gaza, utilisées par le Rapport Goldstone pour vilipender Israël (ces derniÚres ayant affirmé que seul un Palestinien tué sur cinq était "un combattant"). »

Cependant cette proportion de victimes civiles donnée par le centre israélien ne colle pas avec celle de nombreux rapports indépendants qui chiffrent entre 50 et 65 % de victimes civiles[53] - [54].

Dans une interview au quotidien londonien Al-Hayat le ministre de l’IntĂ©rieur du Hamas Fathi Hamad a admis que 600 Ă  700 des victimes palestiniennes durant l'opĂ©ration Plomb durci Ă©taient de ses membres ou d'autres factions islamistes. Le Hamas avait dĂ©clarĂ© initialement 49 morts. Fathi Hamad, le ministre de l'IntĂ©rieur du Hamas, aurait dĂ©clarĂ© qu'au premier jour de l'opĂ©ration, l'armĂ©e israĂ©lienne aurait tuĂ© 250 policiers, dont certains militants du Hamas ou d'autres organisations, durant l'attaque du commissariat de police central de Gaza[55]. Dans ce mĂȘme interview au quotidien al-Hayat, Fathi Hamad a accusĂ© IsraĂ«l de cacher le nombre exact des victimes militaires tuĂ©es pendant l'opĂ©ration Plomb durci[55]. Le juge Goldstone affirme que le Hamas a des raisons politiques de gonfler, au dĂ©triment des victimes civiles, le nombre de ses combattants[36].

Réactions et commentaires à la rétractation

FrĂ©dĂ©ric MĂ©gret, titulaire de la chaire de recherche du Canada en droits de la personne et pluralisme juridique Ă  l’universitĂ© McGill, pense que le discours de Goldstone peut ĂȘtre justifiĂ©. Il explique que : « La commission s'est retrouvĂ©e Ă  faire une enquĂȘte avec un accĂšs biaisĂ© Ă  l'information, en partie car IsraĂ«l refusait de coopĂ©rer. Il y a certains aspects oĂč elle est vraisemblablement allĂ©e un peu trop loin dans ses affirmations[56] »

Avis de la partie palestinienne

Porte-parole du gouvernement de l'Autorité palestinienne Ryiad al-Maliki.

Le porte-parole du Hamas, Sami Abou Zouhri (en), maintient que « des crimes de guerre ont été commis contre les 1,5 million de personnes vivant à Gaza" » par Israël et le ministre palestinien des Affaires étrangÚres, Riyad Al-Maliki, a jugé que le « rapport reste aussi clair que les crimes qu'Israël a commis au cours de cette guerre »[57].

Analyses sur les conséquences de la rétractation

Le correspondant du Monde Ă  JĂ©rusalem, Laurent Zecchini, affirme[58] que « L’opĂ©ration Plomb durci Ă©tant ainsi partiellement rĂ©habilitĂ©e, il sera plus facile Ă  IsraĂ«l de justifier la nĂ©cessitĂ© de rĂ©tablir sa “dissuasion” vis-Ă -vis du Hamas, pour une nouvelle opĂ©ration militaire Ă  Gaza. » C'est Ă©galement le point de vue Gabriela Shalev, juriste et ambassadrice d'IsraĂ«l aux Nations unies qui a dĂ©clarĂ© : « que si nous devons nous dĂ©fendre Ă  nouveau contre des organisations terroristes, nous serons capables de dire qu'il n'y a pas d'autre solution que celle que nous avons utilisĂ©e pendant l'opĂ©ration Plomb durci. » [59].

Pour David Ruzié, spécialiste du droit international, « la rétractation du juge Goldstone est une bonne chose pour discréditer le Conseil des droits de l'homme de l'ONU »[56].

Denis Sieffert, directeur de rĂ©daction de la revue Politis, estime Ă  propos du Rapport Goldstone que, « Nul ne s’y Ă©tait trompĂ© : derriĂšre l’apparent Ă©quilibre de cette formulation (accusations contre les deux camps), c’est surtout IsraĂ«l qui Ă©tait visĂ© (par le rapport). » [60]. « MalgrĂ© sa crĂ©dibilitĂ©, le rapport n’avait guĂšre eu de consĂ©quences autres que morales. Il faut croire que cet opprobre Ă©tait dĂ©jĂ  de trop pour IsraĂ«l. Car voilĂ  que le juge Goldstone est soudain en proie Ă  d’étranges tourments intĂ©rieurs qui ressemblent Ă  ceux d’un homme soumis Ă  des pressions. » En demandant l'annulation du rapport, le prĂ©texte invoquĂ© par le gouvernement israĂ©lien pour l'opĂ©ration militaire sur Gaza de / devient obsolĂšte. Pour Denis Sieffert, la semaine du au a Ă©tĂ© « la plus meurtriĂšre depuis
 . Seize Palestiniens ont Ă©tĂ© abattus Ă  la suite de raids sur Gaza. Remettre en cause le rapport Goldstone, de la part d'IsraĂ«l. Cela discrĂ©dite le rapport, lui enlĂšve toute valeur morale »[56], et rejoint le commentaire de Gabriela Shalev « L’opĂ©ration “Plomb durci” Ă©tant ainsi partiellement rĂ©habilitĂ©e, il sera plus facile Ă  IsraĂ«l de justifier la nĂ©cessitĂ© de rĂ©tablir sa “dissuasion” vis-Ă -vis du Hamas, pour une nouvelle opĂ©ration militaire Ă  Gaza. »[59] - [61].

Autres commentaires opposés à la rétractation de Goldstone

Pour Alain Gresh, rĂ©dacteur en chef du Monde diplomatique, ce « permis de tuer » les terroristes, c’est ce que NĂ©tanyahou exigeait depuis longtemps, lorsqu'il affirmait que, « contre les barbares, les rĂšgles du droit international ne peuvent s’appliquer » [62] - [63]. Selon Alain Gresh[64], les rĂ©tractations du juge Goldstone posent plusieurs problĂšmes :

  • Au sujet du «meurtre dĂ©libĂ©ré» de la famille palestinienne al-Samouni par l'armĂ©e israĂ©lienne qui conteste cette accusation[83] (48 morts palestiniens dont des militants du Hamas et du Jihad islamique lors de l'attaque de Zeitoun dont 29 membres de la famille al-Samouni, 23 selon le rapport Goldstone, parmi lesquels des femmes et des enfants en bas Ăąge[15] - [84] - [85]), le juge Goldstone affirme qu’une enquĂȘte israĂ©lienne a Ă©tĂ© ouverte. Or les Nations unies, dans le rapport citĂ© par le mĂȘme Goldstone Ă  l’appui de sa thĂšse, affirment que l’officier responsable n’est pas l’objet d’une enquĂȘte judiciaire[86].

John Dugard, rapporteur spĂ©cial sur les droits de l’homme dans les territoires occupĂ©s aux Nations unies, affirme que les reconsidĂ©rations du juge Goldstone ne s’appuient sur aucun Ă©lĂ©ment sĂ©rieux[87].

Gilles Devers, avocat et porte-parole des ONG qui ont dĂ©posĂ© une plainte[88] Ă  la Cour pĂ©nale internationale contre IsraĂ«l, souligne « Ce n'est pas sĂ©rieux de dĂ©savouer son travail dans un mĂ©dia, car mĂȘme s'il en est le rapporteur, l'enquĂȘte est le rĂ©sultat du travail de quatre experts. S'il pense que de nouvelles investigations sont nĂ©cessaires, il devait avertir le Conseil des droits de l'homme pour ĂȘtre de nouveau envoyĂ© en mission. »

Kenneth Roth, directeur exécutif d'Human Rights Watch, a déclaré le que « Le désir du gouvernement (israélien) d'enterrer le rapport Goldstone est compréhensible, mais ce rapport continuera à vivre » [89].

Pressions exercées à l'encontre de Goldstone

Selon Ilan PappĂ©, historien israĂ©lien et directeur du Centre europĂ©en d'Ă©tudes sur la Palestine, cette rĂ©tractation s'explique par « une annĂ©e et demi de campagne incessante d’intimidation et de diffamation du juge » et le lien avec « la crĂ©ation d’une unitĂ© spĂ©ciale dont la mission est d’espionner les individus ou organismes soupçonnĂ©s de "dĂ©lĂ©gitimer" IsraĂ«l »[90].

Chantal Meloni, chercheuse en droit de la criminalitĂ© Ă  l’universitĂ© de Milan et qui vit Ă  Gaza depuis 2010 oĂč elle travaille avec le Centre palestinien pour les droits de l'homme dĂ©nonce la pression exercĂ©e sur Goldstone. Selon elle, « Les critiques qui ont Ă©tĂ© Ă©mises en IsraĂ«l l'ont probablement affectĂ©, il est juif, religieux, bien sĂ»r que ce n'Ă©tait pas facile pour lui de porter tout cela. Au dĂ©part, lorsqu'il a Ă©tĂ© nommĂ©, il a d'ailleurs hĂ©sitĂ© Ă  accepter cette mission »[91] - [92] - [56]. Elle voit Ă©galement un lien entre la rĂ©tractation de Goldstone et une rĂ©solution adoptĂ© le par le Conseil des droits de l'homme[93] qui « demandait Ă  l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de l'ONU d'amener la question des exactions commises par le Hamas et IsraĂ«l devant le Conseil de sĂ©curitĂ© »[56].

Commentaires humoristiques de Roger Cohen

Le journaliste britannique Roger Cohen, chroniqueur pour les quotidiens The International Herald Tribune et The New York Times indique, dans une chronique Ă  coloration partiellement humoristique publiĂ©e dans les colonnes du New York Times, le , qu'il existerait selon ses vues un « nouveau verbe, “to Goldstone” » dont il donne deux dĂ©finitions supposĂ©es. En introduction de sa chronique, il indique que ce verbe supposĂ© signifierait, selon lui, « faire un constat puis se rĂ©tracter partiellement » et qui trouverait son Ă©tymologie dans « les actions Ă©tranges d'un juriste juif respectĂ© d'Afrique du Sud soumis Ă  des pressions intenses d'IsraĂ«l, du CongrĂšs amĂ©ricain et de groupes juifs internationaux »[94] puis, en conclusion de sa chronique, il ajoute de supposĂ©es acceptions familiĂšres de ce « verbe, “to Goldstone” » : « semer la confusion, cacher un secret, faire des ravages »[95].

Liens externes

Notes et références

  1. L’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale approuve le rapport Goldstone sur Un-ngls.org
  2. L’Affaire Goldstone. sur Nouvelobs.com par RenĂ© Backmann le 15 avril 2011
  3. Site de Christine Chinkin Ă  la London School.
  4. Biographie de Hina Jilani sur le site du Centre Jimmy Carter
  5. Site de l' Institute for International Criminal Investigations.
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  8. AFP, « Israël a commis des "crimes de guerre", conclut l'ONU », L'Express, 15 septembre 2009.
  9. Rapport de la Mission d’établissement des faits de l’Organisation des Nations unies sur le conflit de Gaza, rĂ©sumĂ©, AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations unies, 23 septembre 2009, article 75 et 108.
  10. Rapport de la Mission d’établissement des faits de l’Organisation des Nations unies sur le conflit de Gaza, rĂ©sumĂ©, AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations unies, 23 septembre 2009
  11. (en) Human Rights In Paplestine And Other Occupied Arab Territories. Report of the United Nations Fact Finding Mission on the Gaza Conflict sur Ohchr.org, voir l'UNRWA cité à la page 14.
  12. Protocole sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des armes incendiaires (Protocole III). GenĂšve, 10 octobre 1980. sur Icrc.org
  13. "Quel avenir pour le rapport Goldstone ?" sur Liberation.fr, 29 janvier 2010.
  14. Rapport Goldstone, paragraphe 712 Ă  735.
  15. Goldstone: ‘If This Was a Court Of Law, There Would Have Been Nothing Proven.’ sur Forward.com, par Gal Beckerman le 7 octobre 2009.
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  94. « We have a new verb, “to Goldstone.” Its meaning: To make a finding, and then partially retract it for uncertain motive. Etymology: the strange actions of a respected South African Jewish jurist under intense pressure from Israel, the U.S. Congress and world Jewish groups. ». Source : Roger Cohen, « The Goldstone Chronicles », 7 avril 2011, The New York Times.
  95. « To “Goldstone”: (Colloq.) To sow confusion, hide a secret, create havoc. ».
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