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Progastrine

La progastrine est une protĂ©ine intracellulaire de 80 acides aminĂ©s et le prĂ©curseur de la gastrine, une hormone gastrointestinale produite par les cellules G de l'antre gastrique[1]. La fonction principale de la gastrine est de rĂ©guler la sĂ©crĂ©tion acide[2]. Au cours de la digestion, seule la gastrine est libĂ©rĂ©e dans le sang et stimule la sĂ©crĂ©tion d’acide chlorhydrique dans l’estomac ainsi que celle d’enzymes digestives pancrĂ©atiques. Chez l’humain, la progastrine est codĂ©e par le gĂšne GAST[3]. La progastrine est principalement exprimĂ©e dans les tissus de l’estomac.

DĂ©couverte

En 1905, John Sydney Edkins a montrĂ© l’existence d’une hormone responsable de la sĂ©crĂ©tion d’acide gastrique[4]. Cette hormone fut appelĂ©e sĂ©crĂ©tine gastrique ou gastrine. Mais ce n’est qu’en 1979 et plus tard en 1987 et 1988 que la progastrine a Ă©tĂ© identifiĂ©e comme Ă©tant le prĂ©curseur de la gastrine[5] - [6] - [7]. Sa sĂ©quence protĂ©ique et de son ARNm ont Ă©tĂ© dĂ©voilĂ©es . A ne pas confondre avec la progastrine, la Pro-Gastrin-Releasing-Peptide est le prĂ©curseur de la Gastrin-Releasing Peptide (GRP), un neuropeptide qui appartient Ă  la famille de la bombĂ©sine/neuromĂ©dine B et dont l’expression est importante dans l’intestin et le cerveau. Le GRP est impliquĂ© dans de nombreux processus physiologiques et physiopathologiques. Le GRP stimule la libĂ©ration de la gastrine et d’autres hormones gastro-intestinales. Il contribue Ă  la rĂ©gulation de la prise alimentaire. Il faut Ă©galement distinguer 2 types de progastrine, la progastrine intracellulaire Ă©voquĂ©e dans cet article et la progastrine extracellulaire, principalement appelĂ©e hPG80[8].

Structure et production

Le gĂšne GAST est situĂ© sur le chromosome 17 (17q21). Il se compose de trois exons contenant la sĂ©quence qui code la prĂ©progastrine. La progastrine est formĂ©e de plusieurs hĂ©lices alpha. La structure primaire de la prĂ©progastrine humaine est constituĂ©e d'une sĂ©quence signal de 21 acides aminĂ©s Ă  l’extrĂ©mitĂ© N-terminale suivie d'un peptide espaceur, d'un domaine bioactif et enfin d'un C-terminal Flanking Peptide (CTFP)[9].

Action

La production de gastrine permet de favoriser la production d’acide gastrique lors de la prise alimentaire. Par ailleurs, il a Ă©galement Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© que la progastrine est exprimĂ©e dans d’autres tissus sains (cervelet, glande pituitaire, pancrĂ©as, testicules), mais dans une bien moindre mesure que dans l’estomac et sous diffĂ©rentes formes[10] - [11] - [12] - [13]. Par exemple, on retrouve de la gastrine carboxyamidĂ©e au niveau des testicules[14]. Cependant, le rĂŽle de la progastrine n’est pas clairement Ă©tabli dans ces organes.

BiosynthĂšse

En conditions physiologiques

Chez l’humain, le gĂšne GAST code un peptide prĂ©curseur de 101 acides aminĂ©s, la prĂ©progastrine[9]. Cette derniĂšre est synthĂ©tisĂ©e et maturĂ©e dans le rĂ©ticulum endoplasmique. Lors de l'initiation de la traduction, la sĂ©quence signal facilitant la translocation du polypeptide est Ă©liminĂ© par une peptidase signal liĂ©e Ă  la membrane. Cette enzyme clive la chaĂźne polypeptidique naissante entre le rĂ©sidu d'alanine 21 et la sĂ©rine 22 pour gĂ©nĂ©rer le peptide de 80 acides aminĂ©s, la progastrine. La progastrine est ensuite coupĂ©e par une enzyme pour donner les principales formes circulantes biologiquement actives de la gastrine : la gastrine-34 et la gastrine-17, sous forme sulfatĂ©e et non sulfatĂ©e. La sulfatation et la phosphorylation jouent toutes deux un rĂŽle dans le processus de maturation : elles augmentent la maturation de la progastrine. Tandis que la phosphorylation peut Ă©galement affecter la conversion de produits intermĂ©diaires possĂ©dant une glycine carboxy-terminale (G34-Gly et G17-Gly) en gastrines matures[15]. De petites quantitĂ©s de gastrine-52 (aussi appelĂ©e composant 1), de gastrine- 14 (mini-gastrine) et mĂȘme de plus petits fragments ont Ă©tĂ© dĂ©tectĂ©s dans le sĂ©rum[2]. A cette Ă©tape, deux voies de modifications post-traductionnelles existent au sein des cellules G antrales. Dans la voie dominante, la progastrine est clivĂ©e en trois sites, ce qui donne deux gastrines bioactives majeures, la gastrine-34 et la gastrine-17. Dans la voie alternative prĂ©sumĂ©e, la progastrine peut ĂȘtre clivĂ©e uniquement au niveau du site dibasique le plus proche de l'extrĂ©mitĂ© C-terminale, ce qui entraĂźne la synthĂšse de la gastrine-71[3] - [16]. Les autres produits de maturation, en particulier G34-Gly, G17-Gly et CTFP ont diverses fonctions. Le CTFP a Ă©tĂ© dĂ©crit comme capable d’induire ou d’inhiber l’apoptose, en fonction du type de tissu ou de cellule concernĂ©. AprĂšs l’étape de conversion de la progastrine, il y a un passage par la voie sĂ©crĂ©toire.

En conditions pathologiques

DĂšs 1996, il est dĂ©montrĂ© que l’expression du gĂšne GAST est requise pour la tumorigĂ©nicitĂ© cellulaire du cancer du cĂŽlon humain[17]. Il a Ă©tĂ© prouvĂ© que le gĂšne GAST est une cible en aval de la voie de signalisation ß-catĂ©nine/TCF-4. La transfection d’une construction exprimant une forme constitutivement active de la ß-catĂ©nine triple l’activitĂ© du promoteur du gĂšne GAST[18]. Cette Ă©tude permet d’établir un lien entre la progastrine et le cancer Ă  travers de nombreuses fonctions cellulaires impliquant la voie Wnt dans une cellule cancĂ©reuse, en commençant par son importance pour la survie des cellules souches cancĂ©reuses[19]. Dans des situations pathologiques, la progastrine est sĂ©crĂ©tĂ©e par les cellules tumorales dans le sang et est nommĂ©e en tant que telle, hPG80[20].

L’expression de la progastrine dans de nombreux cancers a Ă©tĂ© mise en Ă©vidence[21]. Il a Ă©tĂ© relevĂ© que dans le cas de cancers colorectaux, la progastrine est plus de 700 fois plus abondante que la gastrine amidĂ©e[22]. Une autre Ă©tude a permis de dĂ©montrer que les carcinomes colorectaux possĂšdent des peptides dĂ©rivĂ©s de progastrine non convertis en gastrine[23]. Enfin, il a Ă©tĂ© prouvĂ© que la moitiĂ© des cellules tumorales expriment la progastrine. Les cancers ovariens, hĂ©patiques et pancrĂ©atiques prĂ©sentent le mĂȘme cas de figure : la progastrine non maturĂ©e est plus abondante que la gastrine amidĂ©e[24] - [25] - [26]. En effet, la progastrine n’est pas complĂštement maturĂ©e et elle est sĂ©crĂ©tĂ©e dans le sang par de nombreux cancers.

Notes et références

  1. Fiona M. Gribble, Frank Reimann et Geoffrey P. Roberts, « Gastrointestinal Hormones ☆ », dans Physiology of the Gastrointestinal Tract, Elsevier, (ISBN 978-0-12-809954-4, lire en ligne), p. 31–70
  2. (en) Jens F. Rehfeld et Jens Peter Goetze, « 2 The Post-Translational Phase of Gene Expression in Tumor Diagnosis », dans Handbook of Immunohistochemistry and in Situ Hybridization of Human Carcinomas, vol. 4, Elsevier, (ISBN 978-0-12-369402-7, DOI 10.1016/s1874-5784(05)80057-1, lire en ligne), p. 23–32.
  3. « GAST - Gastrin precursor - Homo sapiens (Human) - GAST gene & protein », sur www.uniprot.org (consulté le )
  4. (en) Irvin M. Modlin, Mark Kidd, I. N. Marks et Laura H. Tang, « The pivotal role of John S. Edkins in the discovery of gastrin », World Journal of Surgery, vol. 21, no 2,‎ , p. 226–234 (ISSN 0364-2313 et 1432-2323, DOI 10.1007/s002689900221, lire en ligne, consultĂ© le )
  5. (en) B. E. Noyes, M. Mevarech, R. Stein et K. L. Agarwal, « Detection and partial sequence analysis of gastrin mRNA by using an oligodeoxynucleotide probe. », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 76, no 4,‎ , p. 1770–1774 (ISSN 0027-8424 et 1091-6490, PMID 88048, PMCID PMC383472, DOI 10.1073/pnas.76.4.1770, lire en ligne, consultĂ© le )
  6. (en) H. Desmond, S. Pauwels, A. Varro et H. Gregory, « Isolation and characterization of the intact gastrin precursor from a gastrinoma », FEBS Letters, vol. 210, no 2,‎ , p. 185–188 (DOI 10.1016/0014-5793(87)81334-0, lire en ligne, consultĂ© le )
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