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Narco-État

Le terme « narco-État » est utilisé pour décrire un pays où toutes les institutions légitimes ont été pénétrées par le pouvoir et la richesse issus du trafic de stupéfiants.

Dans un narco-État, des activités criminelles sont souvent largement tolérées voire encouragées par les autorités gouvernementales. Les groupes criminels peuvent avoir des relations étroites avec les responsables gouvernementaux, en achetant leur protection ou en les corrompant pour garantir leur immunité contre les poursuites.

Les narco-États peuvent également avoir des conséquences graves pour les citoyens de ces pays, notamment la violence, l'insécurité, la corruption généralisée et le manque de confiance dans les institutions gouvernementales.

Les exemples de narco-États incluent certains pays d'Amérique latine, tels que la Colombie (qui produit plus de 60 % de la production mondiale de cocaïne), le Mexique ou le Suriname ; d'Afrique comme la Guinée-Bissau ; du Moyen-Orient comme la Syrie ou l'Afghanistan ; ou encore d'Europe de l'Est comme l'Albanie.

Concept et analyse

Le concept de « narco-État » est difficile à évaluer, car il ne suppose non seulement qu'une part significative de l'économie d'un pays soit issue du trafic de stupéfiants, mais aussi une complicité au sein des autorités dans ce trafic[1]. Hors, cette complicité peut exister à différents échelons, du niveau national au niveau local, y compris des petits fonctionnaires comme des policiers ou douaniers[2], ce qui rend complexe à évaluer à partir de quel « seuil » d'implication de ses autorités un pays peut être considéré comme un narco-État[1]. Par ailleurs, dans certains pays, la passivité et le « défaitisme » des autorités confrontées à un trafic de stupéfiants devenu incontrôlable par son ampleur, peut être assimilée par certains observateurs à une forme de complicité, même aucune collaboration entre ces dernières et les trafiquants n'est attestée[2].

Le risque pour un pays de devenir un narco-État augmente avec plusieurs facteurs :

  • Le positionnement gĂ©ographique du pays propice Ă  la production de cultures utilisĂ©es dans la fabrication de stupĂ©fiants (comme l'Afghanistan) ou sa proximitĂ© avec un marchĂ© important (comme le Mexique).
  • Le niveau de corruption, dès lors que les autoritĂ© d'un pays davantage intĂ©ressĂ©es par l’appât du gain que par l'intĂ©rĂŞt public sont plus enclines Ă  encourager un trafic de stupĂ©fiait sur leur territoire. Il est Ă  ce titre rĂ©vĂ©lateur que la plupart des pays qualifiĂ©s de « narco-État » sont très bas dans le classement de Transparency international sur l'indice de perception de la corruption : l'Albanie et le Panama (tous deux 101e), la Bolivie et le Mexique (touts deux 126e), l'Afghanistan (150e), le Honduras (157e), la GuinĂ©e-Bissau (164e), la CorĂ©e du Nord (171e), le Venezuela (177e) ou encore la Syrie (178e)[3].
  • La pauvretĂ©, et souvent une situation de conflit armĂ©, qui pousse les habitants d'un pays, y compris ses fonctionnaires Ă  rechercher d'autres sources de revenus. En Syrie, ce sont les sanctions Ă©conomiques internationales qui poussent le rĂ©gime Ă  chercher d'autres sources de recettes[4].

Exemples consensuels de narco-États

Afrique

Guinée-Bissau

La Guinée-Bissau, petit pays côtier d’Afrique de l'ouest, est considéré comme une « tête de pont » du trafic de drogue international entre l’Amérique du Sud et l’Europe dans lequel l'État est impliqué jusqu'au sommet du pouvoir[5]. Cela vaut à ce pays le qualificatif « narco-État » par l'Office des Nations unies contre les drogues et le crime[6]. Sa pauvreté fait de ce pays une « proie » idéale : ses fonctionnaires, mal payés, sont faciles à corrompre y compris les militaires et forces de l'ordre, sa prison détruite depuis la guerre civile de 1998 et la surveillance des frontières inexistante[6].

La drogue y arrive par bateau ou par avion via l'archipel des Bissagos qui dispose des pistes d'avion de fortune construites pendant la Seconde Guerre mondiale alors que la Guinée-Bissau était une colonie portugaise[6]. Tandis qu'une grande partie de l'argent gagné est envoyé et blanchi au Portugal, notamment via des « biens mal acquis » dans lesquels investie l'importante diaspora guinéenne installée dans ce pays[5].

En 2008, les élections législatives voient pour la première fois l'irruption de l'argent issu de ce trafic dans la campagne, permettant à une trentaine de trafiquants notoire d'être élus députés[6]. En mars 2009, un double-attentat vise le président Joao Bernardo Vieira et son chef d'état-major des armées, le général Batista Tagmé Na Waié, qui décèdent tous deux à quelques heures d'intervalle[6]. Il est considéré comme probable que ces attaques aient été fomentés par les trafiquants colombiens en représailles de la destitution en août 2008 du contre-amiral José Américo Bubu Na Tchuto, chef de la marine nationale, qui couvrait le trafic[6].

Honduras

L'ancien chef d'État hondurien au pouvoir de 2014 à 2022 Juan Orlando Hernández est accusé par les États-Unis d'avoir conclu des accords avec des trafiquant pour acheminer des tonnes de cocaïne vers l'Amérique du Nord via le territoire du Honduras[7]. Le frère de ce dernier Juan Antonio Tony Hernández Alvarado, ancien député, est arrêté à l'aéroport de Miami en , et jugé aux États-Unis en octobre 2019 pour trafic de cocaïne vers les États-Unis, possession d'armes, et d'être lié aux meurtres de deux narcotrafiquants rivaux en 2011 et 2013[8] - [9]. Le scandale devient politique quand le président Juan Orlando Hernández et son prédécesseur Porfirio Lobo sont soupçonnés d'avoir utilisé l'argent issu du narco-trafic pour financer leurs campagnes électorales de 2009 et 2013[9].

En 2021, le procès d'un trafiquant hondurien arrêté aux États-Unis Geovanny Fuentes, permet de prouver la collaboration entre les narcotrafiquants et la police, l’armée et le personnel politique, pour leur permettre d'agir en toute impunité sur le territoire hondurien[7]. De nombreuses pistes d'aviation sont ainsi installées dans l’est du pays, d’où décollent régulièrement vers les États-Unis des avions chargés de drogue[7].

Le 7 février 2022, le secrétaire d'État des États-Unis Antony Blinken annonce que Juan Orlando Hernández figure sur une liste de dirigeants politiques corrompus depuis juillet 2021. La semaine suivante, alors que la justice américaine demande son extradition, la police hondurienne émet un mandat d'arrêt à son encontre et ce dernier se rend, tandis que sa maison est quadrillée par 600 policiers et des manifestants[10]. Deux mois plus tard, l'ancien président hondurien est extradé vers les États-Unis pour y être jugé pour trafic de drogue et d’armes, et risque la prison à perpétuité, accusé d'avoir participé, entre 2004 et 2022, à un trafic de 500 tonnes de cocaïne[11].

Mexique

Le Mexique est qualifié par les journalistes et chercheurs Octavio Rodríguez-Araujo et José Luis Solís González de « régime politique néolibéral à penchant technocratique, avec une forte présence de représentants du crime organisé au sein de ses différentes institutions, de l’économie et de la finance »[12].

C'est dans les années 1990, conséquence de la libéralisation économique du pays, près la crise de la dette dans les années 1980 que le trafic de drogue, très rentable et bénéficiant de la proximité de l'un des principaux producteurs (la Colombie), et l'un des principaux marchés (les États-Unis), voit sa part augmenter dans l'économie mexicaine[12].Cette tendance s'est accélérée avec la désindustrialisation des années 2000, tandis que la corruption et l’impunité sont devenues endémique[12].

Les cartels disséminés à travers l’ensemble du territoire dont ils contrôlent des zones entière, développent une énorme capacité de corruption et de pénétration des appareils et des institutions de l’État, au niveau local, régional et national[12]. La présence du crime organisé dans les institutions publiques et dans l’économie se reflète dans des partenariats et dans la collusion des cartels avec des fonctionnaires, comme par le pacte de non-agression, conclu 2008 entre Joaquín Guzmán dit « El Chapo », chef du puissant cartel de Sinaloa, et le Ministre de l'intérieur Juan Camilo Mouriño[12]. En contrepartie, El Chapo aurait fourni des renseignements qui auraient aidé à la capture ou à l’élimination de gangs rivaux[12].

Ce pacte révèle une ambivalence du gouvernement mexicain de Felipe Calderón au pouvoir de 2006 à 2012. À son arrivée à la présidence, celui-ci a officiellement déclaré une guerre totale aux narco-trafiquants, particulièrement coûteuse et meurtrière, tout en concluant dans le même temps des accords avec le cartel de Sinaloa[12].

Suriname

Le Suriname est utilisé comme une plaque tournante par les narco-trafiquants pour transporter la drogue produite en Colombie vers la Guyane, région française d'outre-mer, d'où la drogue est transportée vers la métropole[1]. L'ancien président Desi Bouterse (au pouvoir de 2010 à 2020) a été condamné en 1999 aux Pays-Bas pour trafic de drogue. Depuis, un mandat d'arrêt international l'empêche de quitter le territoire du Suriname. Ronnie Brunswijk, vice-président du pays depuis 2020, a également été condamné pour trafic de cocaïne avant d'arriver au pouvoir[1].

Venezuela

La Drug Enforcement Administration, le service amĂ©ricain en charge de lutter contre le trafic de stupĂ©fiants, estime que 150 Ă  200 tonnes de cocaĂŻne en provenance de Colombie et Ă  destination des États-Unis ou de l'Europe transitent par le Venezuela chaque annĂ©e[13]. Selon un ancien cadre de ce service, ce trafic, qui ne pourrait pas se faire sans la collaboration des militaires et des officiels du pouvoir, permettrait au prĂ©sident vĂ©nĂ©zuelien Nicolas Maduro de se maintenir au pouvoir[13]. En mars 2020, le procureur gĂ©nĂ©ral amĂ©ricain, William Barr inculpe ce dernier pour « narco-terrorisme », tandis que Washington propose une rĂ©compense de 15 millions de dollars pour quiconque contribuera Ă  son arrestation et Ă  sa condamnation[14].

Malgré cette collusion évidente entre les trafiquants et les autorités du pays, son importance dans le trafic international doit être nuancée ; seuls 10 % de la production de cocaïne de la Colombie, majoritairement à destination des États-Unis, transiterait chaque année par le territoire vénézuelien[15].

Afghanistan

La production d'opium s'est développé en Afghanistan pour deux raisons historiques principales : un climat et un sol favorable, mais aride pour d'autre cultures ainsi qu'une structure tribale couplée à une instabilité politique presque constante depuis les années 1970 rendant difficile, pour tout gouvernement de lutter efficacement contre[16]. En outre, le manque d'alternative économique pousse les gouvernements successifs, à tolérer cette production[16]. Ainsi, la culture d'opium augmente fortement dans les années 1980 avec la guerre de 1979-1989 qui disloque et appauvrie davantage la population, augmentant sa dépendance à ce secteur[16].

Le comportement des talibans, au pouvoir de 1996 à 2001, puis de nouveau à partir de 2021, est ambivalent[17]. Si ces dernier ont dans un premier temps lutté contre le trafic d'opium via une fatwa du Mollah Omar édictée en 2000, cela semble davantage être dans un objectif de reconnaissance internationale de leur régime, qu'en raison d'une réelle ambition d'éradiquer cette activité de leur territoire[17]. Pour autant, cette fatwa quoi qu'opportuniste, s'avère très efficace et permet donner un coup d'arrêt à ce trafic avec d'importantes répercussions internationales sur le commerce mondial d'héroïne dont l'Afghanistan est le premier producteur[17] - [16].

Mais cet effet est de courte durĂ©e puisque l'annĂ©e suivante, les attentats du 11 septembre 2001 provoque une intervention militaire amĂ©ricaine en reprĂ©sailles qui renverse d'autant rapidement les talibans, que leur lutte contre le narco-trafic les avait rendu très impopulaire auprès des paysans afghans producteur d'opium[17]. Dès lors, le nouveau gouvernement pro-amĂ©ricain est face Ă  un dilemme cornĂ©lien, entre la recherche d'un soutien populaire difficile Ă  obtenir en interdisant la culture d'opium, et la recherche d'un soutien international, difficile Ă  obtenir en l'autorisant[17]. Cette position intenable pousse le nouveau prĂ©sident afghan Hamid Karzai Ă  un exercice Ă©quilibriste consistant Ă  tenir un discours de façade ferme dans la lutte contre le narco-trafic, tout en laissant celui-ci reprendre dans les campagnes[17]. En 2002, un an après la chute des talibans, la production nationale d'opium atteint 3 400 tonnes, soit le mĂŞme niveau qu'avant la fatwa du Mollah Omar[17].

Dès lors, ce double-jeu va se gĂ©nĂ©raliser chez les Ă©lus locaux (dans un contexte oĂą l'Afghanistan est aussi l'un des pays les plus corrompus au monde), tandis que parmi les rares personnalitĂ©s politiques s'attaquant sĂ©rieusement Ă  ce trafic, plusieurs sont assassinĂ©s[17]. D'autres enfin, se livrent Ă  des luttes opportunistes motivĂ©es par l'Ă©limination de rĂ©seaux de trafiquants concurrents de ceux qu'ils protègent[17]. En 2006, cinq ans après la chute des talibans, le directeur de l’Office des Nations Unies contre les drogues et le crime dĂ©clare que « l’Afghanistan est en train de passer de la narco-Ă©nonomie au narco-État »[17]. L’annĂ©e suivante, la production d'opium en Afghanistan atteint un record de 8 200 tonnes, puis 9 000 tonnes dix ans plus tard (en 2017), alimentant près de 90 % du trafic mondial d'hĂ©roĂŻne[17]. La mĂŞme annĂ©e, les talibans augmentent leur pression militaire, et prennent le contrĂ´le de la majoritĂ© des exploitations d'opium, dont ils bĂ©nĂ©ficient pour s'armer et recruter[16].

L'armée américaine, déployée dans le pays jusqu'en 2021 est impuissante face à l'ampleur de ce trafic (malgré plusieurs bombardements ciblés), et la crainte, comme le gouvernement afghan qui leur est favorable, qu'une lutte trop acharné donne un soutien populaire aux talibans[17]. Certains analystes expliquent aussi leur passivité par le fait que les États-Unis, inondés de drogues d'origine colombienne, sont en revanche relativement épargnés, de par leur position géographique, par celles provenant d’Afghanistan[17]. À partie de 2020, l'ouverture des négociations entre les États-Unis et les talibans, dont la puissance militaire n'a pas diminué en vingt ans, en vue d'un retrait des troupes américaines du pays, place le gouvernement d'Ashraf Ghani dans une position délicate[17]. Se sachant très affaibli sans soutien militaire américain, ce dernier ne pouvait plus se permettre de s'aliéner le moindre parrain de l’opium[17].

L'année suivante, après le retrait négocié des troupes américaines, les talibans reprennent le pouvoir presque sans combattre en août 2021, après avoir largement bénéficié de trafic d'opium qu'ils avaient pourtant eux-mêmes vingt ans auparavant, pour financer leur guerilla[16]. Lors de la chute du régime de la République islamique d'Afghanistan, entre 20 et 30 % du produit national brut était lié à la production d'opium[17]. Comme la génération précédente, les talibans, en quête de reconnaissance et de soutien international, décident d'interdire la production d'opium, mais reviennent rapidement sur leur décision, se sachant incapables de faire respecter une telle interdiction[18]. Dans l'année qui suit leur arrivée au pouvoir la production nationale d'opium en Afghanistan augmente de plus d'un tiers[18].

Syrie

Sous le régime de Bachar el-Assad, la Syrie est devenu l'un des principaux narco-États du Moyen-Orient en étant une plaque-tournante du captagon[19]. La production et le trafic de cette drogue de synthèse composée de fénétylline sont devenus au fil de la guerre en Syrie une source alternative de financement pour la survie du régime syrien, criblé par les sanctions en raison de se répression sanglante de la révolution de 2011[4].

Maher al-Assad, frère du président syrien Bachar el-Assad, chef de la 4e division blindée,

En 2022, la Syrie concentre 80 % de la production de cette drogue de synthèse, devenu principal produit d'exportation du pays[20], avec des profits s’élèveraient Ă  10 milliards de dollars[19]. La 4e division blindĂ©e, l'unitĂ© d'Ă©lite de l'armĂ©e syrienne dirigĂ©e par Maher al-Assad, frère du prĂ©sident syrien, serait au centre du trafic de captagon dans les zones contrĂ´lĂ©es par le rĂ©gime[20]. Cette dernière est selon plusieurs rapports impliquĂ©e dans la fabrication de cette drogue de synthèse, et son exportation via les ports de LattaquiĂ© et de Tartous[20], ou encore les poreuses frontières de la Syrie avec le Liban, l'Irak, et la Jordanie[21]. La plupart de ces cargaisons sont destinĂ©es Ă  l'Arabie saoudite ou cette drogue est très demandĂ©e, et vendue entre 1 et 25 dollars le cachet[20].

En 2023, le régime syrien utilise son contrôle du commerce du captagon qui fait des ravages dans la population de certains pays de la région comme l'Arabie saoudite et le Liban, pour obtenir des concessions diplomatiques, notamment sa réintégration dans la Ligue arabe[19]. Le 7 mai, la Syrie est réintégrée dans la Ligue arabe, contre-partie probable des engagement de Damas à renforcer sa coopération avec ses voisins pour endiguer le trafic de captagon[22]. Le lendemain, une frappe de l'armée de l'air jordanienne tue en Syrie Marai al-Ramthan, considéré comme étant le principal trafiquant de captagon dans la région, ainsi que sa femme et ses six enfants[22].

Toutefois, si le régime donne des signes de bonne volonté pour s’arroger les faveurs des pétromonarchies, son implication dans le contrôle du trafic et la sécurisation de la frontière semble en demi-teinte[23]. Plusieurs observateurs et analystes doutent de la sincérité de Damas, soumise à de lourdes sanctions économiques internationales, à renoncer à cette manne financière[23].

Corée du Nord

La Division 39, organisation gouvernementale secrète de la Corée du Nord visant à alimenter la caisse noire de son actuel chef d'État Kim Jong-un, en devises étrangères, générés par des activités légales et illégales telles que la contrefaçon monétaire (Superdollar) et le trafic de drogue[24]. La métamphétamine produite en Corée du Nord, gérée par la division 39, est majoritairement exportée en Corée du Sud et Chine, deux pays dont Pyongyang serait le « fournisseur » principal[25].

Exemples discutables

Colombie

Si le trafic de drogue représente une part importante de l'économie colombienne (qui produit 60 % de la cocaïne du monde), les collusions entre trafiquants et fonctionnaires comme les forces de l'ordres sont limitées à quelques régions périphériques[26]. Mais ça n'a pas toujours été le cas, notamment à l'époque de l'activité de Pablo Escobar[26].

Belgique et Pays Bas

Dans le cas de la Belgique et des Pays-Bas, les deux principales portes d'entrée pour les importations de stupéfiants en Europe via les ports d'Anvers et de Rotterdam, le terme de « narco-État » est parfois utilisé pour caractériser non pas une implication des autorités dans ce trafic, mais leur impuissance ou désintérêt à lutter contre[2] - [27] - [28]. Environ deux-cents tonnes de cocaïne transiterait chaque année par ces deux ports[27].

Les Pays-Bas voisins sont davantage mis en cause en raison de la tolérance particulière des autorités de ce pays, l'un des rares en Europe à avoir légalisé la consommation de cannabis sur son territoire, puis la production de ce dernier en 2020[27]. Hors, loin de dissuader les trafics clandestins de stupéfiant, cette tolérance des autorités hollandaise aurait fait exploser le commerce, ainsi que la fabrication de drogues « dures » : la moitié de la cocaïne consommée en Europe passerait par le port de Rotterdam, tandis que le Royaume serait le principal lieu de fabrication et de conditionnement de drogues de synthèse en Europe[27]. Lorsque des trafiquants sont arrêtés, la lenteur des procédures judiciaires et la faiblesse des peines généralement infligées dans les affaires de drogue – quand elles finissent par aboutir – sont d’autres caractéristiques du système néerlandais[28].

Dans le port belge d'Anvers, on estime que seul 10 % de la drogue importée est saisie par les autorités, tandis 90 % parvient à entrer sur le territoire pour être écoulée sur le marché européen[2]. Le montant total des importations de drogue arrivant par ce port oscillerait entre 50 milliards et 60 milliards d’euros par an, entraînant un décharnement de violence entre les gans impliqués dans ce trafic[2]. Les trafiquants achètent par des pots de vin la collaboration de dockers, de petits commerçants comme des pizzerias ou salon de coiffure pour stocker, écouler la marchandise, ou blanchir l'argent issu de cette dernière, en tente d'obtenir par des incitations financière ou par des menaces et intimidations, la collaboration de fonctionnaires dans les douanes et la police[2]. En 2017, un ancien directeur de la police judiciaire fédérale à Anvers, déclare que des trafiquants auraient réussi à infiltrer ses services[2]. Les craintes, désormais, portent sur le risque d'une infiltration des milieux politiques, de services juridiques, ou de promoteurs immobiliers pour blanchir l'argent[2]. Parallèlement, le manque de moyens mobilisé par les autorités pour lutter contre ce trafic, au regard de l'ampleur de la tâche, est souvent dénoncé par les fonctionnaires chargé de cette lutte[2]. Cette dernière serait aussi impactée par des querelles politiciennes[2]. Mais certains observateurs pointent aussi le fait que la responsabilité de ces deux petits pays parait écrasante, pour lutter contre un problème international dont l'ampleur les dépasse[2].

En janvier 2023, les douanes des deux pays donnent une conférence de presse conjointe, signe de leur coopération, pour annoncer les saisies records faites en 2022 dans les ports d'Anvers et de Rotterdam[29].

Références

  1. Liselotte Mas, Adrien Vande, Marceau Bretonnier et Adrien Sahli, « Vidéo. Enquête vidéo : comment la Guyane est devenue une plaque tournante du trafic de cocaïne », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  2. Jean-Pierre Stroobants, « La Belgique redoute de devenir un « narco-Etat » », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  3. (en) « 2022 Corruption Perceptions Index: Explore the results », sur Transparency.org (consulté le )
  4. « Le Captagon, nouveau nœud gordien dans la normalisation avec le régime syrien », sur L'Orient-Le Jour, (consulté le )
  5. « Enquête. La Guinée-Bissau, un narco-État aux ramifications tentaculaires », sur Courrier international, (consulté le )
  6. Thierry Oberlé, « À Bissau, le naufragedu narco-État guinéen », sur La Figaro, (consulté le )
  7. Patrick Bèle, « Honduras: le président accusé d’aider les narcotrafiquants », Le Figaro,‎ (lire en ligne)
  8. (es) AFP, « Hermano del presidente de Honduras, a juicio en EU por narcotráfico », sur jornada.com.mx, La Jornada, (consulté le )
  9. Angeline Montoya, « Le frère du président hondurien jugé pour trafic de drogue à New York », sur lemonde.fr, Le Monde, (consulté le )
  10. « L’ex-président du Honduras « JOH », réclamé par les Etats-Unis pour trafic de drogue, s’est livré à la police », sur Le Monde.fr, Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  11. « Honduras : l’ancien président Hernandez extradé aux Etats-Unis pour trafic de drogue », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  12. José Luis Solís González, « L'état narco : néolibéralisme et crime organisé au Mexique », Revue Tiers Monde,‎ , p. 15 (lire en ligne)
  13. Guylaine Roujol Perez, « Trafic de drogue : le Venezuela, un narco-État ? », Le Parisien,‎ (lire en ligne)
  14. « Le président du Venezuela Nicolas Maduro inculpé aux États-Unis pour "narco-terrorisme" », sur France 24, (consulté le )
  15. « Venezuela, Hezbollah et cocaïne : le nouveau narcoterrorisme écrit par Washington », sur Middle East Eye édition française (consulté le )
  16. Léa Bello et Adrien Vande Casteele, « Vidéo. De l’opium à l’héroïne, comment l’argent de la drogue a financé les talibans », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  17. Jean-Pierre Filiu, « Comment les Etats-Unis ont consolidé un narco-Etat en Afghanistan », Un si Proche Orient,‎ (lire en ligne, consulté le )
  18. « La culture de l’opium en hausse depuis le retour des talibans en Afghanistan », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  19. « Le captagon, nouvel atout du maître chanteur Bachar el-Assad », sur L'Orient-Le Jour, (consulté le )
  20. « Focus - Trafic de Captagon : comment la Syrie est devenue un narco-État », sur France 24, (consulté le )
  21. « Orient hebdo - Captagon: enquête sur cette drogue, fléau du Moyen-Orient », sur RFI, (consulté le )
  22. « Une frappe aérienne tue un important narcotrafiquant, rapporte l'OSDH », sur L'Orient-Le Jour, (consulté le )
  23. « À la frontière syro-jordanienne, un paradis perdu pour les trafiquants de drogue ? », sur L'Orient-Le Jour, (consulté le )
  24. Michael Breen, Kim Jong-il, Dictateur nord-coréen,p. 199, Saint-Honoré Média, 2004
  25. « Corées. De la métamphétamine venue du Nord », sur Courrier international, (consulté le )
  26. « La Colombie n'est pas devenue un narco-Etat », La Croix,‎ (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le )
  27. « Drogue : pourquoi les autorités françaises qualifient les Pays-Bas de «narco-État» », sur Europe 1,
  28. Jean-Pierre Stroobants, « Pour les policiers néerlandais, les Pays-Bas sont devenus un « État narco » », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  29. « Près de 110 tonnes de cocaïne saisies en 2022 dans le port d'Anvers, nouveau record », sur L'Orient-Le Jour, (consulté le )

Voir aussi

Rapports

Presse et vulgarisation

  • Emmanuel Haddad, « Le captagon, nouveau nĹ“ud gordien dans la normalisation avec le rĂ©gime syrien », L'Orient-Le Jour,‎ (lire en ligne)
  • Emmanuel Haddad, « Le captagon, nouvel atout du maĂ®tre chanteur Bachar el-Assad », L'Orient-Le Jour,‎ (lire en ligne)
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