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Maurice Rajsfus

Maurice Rajsfus, pseudonyme de Maurice Plocki, né le dans le 10e arrondissement de Paris et mort le à Antony (Hauts-de-Seine), est un écrivain, journaliste et militant français.

Maurice Rajsfus
Maurice Rajsfus à Orléans (maison des associations), en septembre 2005.
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs
(Ă  92 ans)
Antony
SĂ©pulture
Nom de naissance
Maurice Plocki
Nationalité
Activités
Fratrie

Il est auteur de nombreux livres dans lesquels il a abordé les thÚmes du génocide des juifs en France, de la police et des atteintes aux libertés. En 1994, il a cofondé l'Observatoire des libertés publiques[1] - [2], qu'il préside.

Biographie

NĂ© en 1928 dans le 10e arrondissement de Paris[3], Maurice Plocki — qui prendra comme pseudonyme le nom de sa mĂšre[4] — est le fils de Nushim[5]Plocki (nĂ© le 22 janvier 1992 Ă  Radom en Pologne[5]) et Riwka Rajsfus (Rajcfus[5]) (nĂ©e le 16 novembre 1900 Ă  Dembow, en Pologne[5]), Juifs polonais arrivĂ©s en France au dĂ©but des annĂ©es 1920. Ils ont Ă©tĂ© mariĂ©s par le maire d'Aubervilliers, Pierre Laval, « alors encore avocat pacifiste »[6]. Ses parents gagnent alors leur vie comme marchands forains, vendant des bas et des chaussettes dans les villes de la banlieue Nord de Paris[4].

RescapĂ© de la rafle du VĂ©l’ d'hiv’

En , alors qu'il a 14 ans, il est arrĂȘtĂ© avec ses parents et sa sƓur aĂźnĂ©e, EugĂ©nie/Jenny, 16 ans, lors de la rafle du VĂ©lodrome d'Hiver par un policier « un temps voisin de palier [
]. Lorsque, en 1988, Rajsfus tentera de l'approcher (« pour comprendre »), le retraitĂ© l'Ă©conduira d'un brutal : « Ça ne m'intĂ©resse pas ! » Il n'a cessĂ© depuis d'incarner cette « police de Vichy au passĂ© trop prĂ©sent, sans remords et sans mĂ©moire »[6]. Maurice Rajsfus est relĂąchĂ© avec sa sƓur Ă  la suite d'un ordre alĂ©atoire excluant les enfants juifs français de 14 Ă  16 ans de la rafle[6] ; ses parents ne reviendront pas[7]. Ils sont dĂ©portĂ©s par le Convoi No. 11, en date du 27 juillet 1942, de Drancy vers Auschwitz[5].

Au lendemain de la guerre, il est « "Jeune communiste" à 16 ans, et participant aux Brigades de travail en Yougoslavie, puis exclu à 18 ans pour "hitléro-trotskisme", militant de la IVe Internationale avant 1950, puis du groupe Socialisme ou barbarie avec Lefort et Castoriadis, mobilisant le mouvement des Auberges de jeunesse contre la guerre d'Algérie dÚs 1955 et président de Ras l'front de 1991 à 1999 »[6].

Créateur de l'Observatoire des libertés publiques

Un an aprĂšs que, le , MakomĂ© M’BowolĂ© a Ă©tĂ© tuĂ©[8] - [9] - [10] d'« une balle dans la tĂȘte Ă  bout touchant »[11] alors qu'il Ă©tait interrogĂ©, menottĂ©, au commissariat des Grandes CarriĂšres (18e arrondissement de Paris)[6], Maurice Rajsfus fonde l'Observatoire des libertĂ©s publiques, qui publie un bulletin mensuel, Que fait la police ?. Il y dĂ©montre par l’exhaustivitĂ© des faits que ces meurtres ne sont ni des dĂ©rapages fortuits ni des accidents, mais l’aboutissement d’une violence systĂ©mique et quotidienne, toujours exercĂ©e au nom du maintien de l’ordre public.

Pour lui, le lien entre passĂ© et prĂ©sent est constant, notamment dans la surveillance de la police : « Ils ont volĂ© des annĂ©es de vie Ă  mes parents. Tous ont participĂ© aux rafles quand ils Ă©taient requis. Pratiquement pas un seul n’a dĂ©missionnĂ©. Si la police française ne s’était pas mise aux ordres, jamais il n’y aurait eu autant de dĂ©gĂąts. Il y a eu 250 000 dĂ©portĂ©s de France, dont 76 000 Juifs, les autres Ă©tant, pour l’essentiel, des communistes et des gaullistes
 Et que dire de ce policier qui, rendant compte Ă  la prĂ©fecture de sa mission, ose Ă©crire, le 22 juillet : "Le VĂ©l’ d’Hiv’ est Ă©vacuĂ©. Il restait 50 Juifs malades et des objets perdus, le tout a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© Ă  Drancy" »[12].

AprĂšs 20 ans de recherches et prĂšs de 6 000 « faits divers » policiers relatĂ©s[13], Maurice Rajsfus met fin au bulletin Que fait la police ? en .

Antisioniste

DĂ©finissant le sionisme comme un « projet prĂ©sentĂ© comme "gĂ©nĂ©reux" par ses initiateurs », il considĂšre qu'il « a rapidement dĂ©rivĂ© en une entreprise Ă©galement raciste »[14]. En parallĂšle, il dĂ©nonce l'utilisation de l'accusation d'antisĂ©mitisme qui est, selon lui, devenue « une arme brandie contre tous ceux qui s’opposent au sionisme, idĂ©ologie active qui ne saurait souffrir la moindre critique »[15].

Il publie, en 1990, Palestine : chronique des événements courants, 1988-1989 et L'Ennemi intérieur : Israël-Palestine, livres dans lesquels il décrit Israël comme « une démocratie sous haute surveillance » et dénonce les exactions de l'armée israélienne[16].

Études et recherches

N'ayant longtemps eu que le certificat d’études, puisqu'il quitta le collĂšge Ă  14 ans, Maurice Rajsfus a cependant passĂ© un doctorat en sociologie en 1992[17].

Il a Ă©tĂ© Ă  plusieurs reprises membre du jury des Big Brother Awards France, et a prĂ©facĂ© le livre Big Brother Awards. Les surveillants surveillĂ©s (2008)[18]. Toutefois, il n'a pas une formation acadĂ©mique dans le domaine de l'Histoire. Pierre Vidal-Naquet note dans sa prĂ©face du livre de Maurice Rajsfus consacrĂ© Ă  l'Union gĂ©nĂ©rale des israĂ©lites de France (UGIF) que « Entre Maurice Rajsfus et moi, il y a, dois-je ajouter, une autre diffĂ©rence. Je suis, il n'est pas un "historien de profession" », et il estime qu'« Il y a parfois Ă  discuter sur la façon dont Maurice Rajsfus aborde le matĂ©riel historique, mais "Messieurs les Historiens" − et je ne m'excepte pas du lot − auraient dĂ» commencer »[19].

DĂ©cĂšs

Maurice Rajsfus meurt le Ă  Antony[20]. Les Éditions Libertalia, qui l'avaient Ă©ditĂ©, annoncent : « Maurice Rajsfus vient de nous quitter aprĂšs un combat inĂ©gal de six semaines contre la maladie. Nous poursuivrons ses combats pour la justice et l'Ă©mancipation. Ami, ta rage n'est pas perdue ! »[21]. Il est inhumĂ© le 18 juin 2020 dans le cimetiĂšre communal de Cachan[22], en prĂ©sence notamment, outre ses enfants Michelle et Marc et ses petites-filles, de l'adjoint au Logement de Paris, Ian Brossat, de l'ancien candidat du parti NPA (alors LCR) Ă  l'Ă©lection prĂ©sidentielle Olivier Besancenot, du journaliste David Dufresne ou encore de la maire de Cachan, HĂ©lĂšne de Comarmond.

Publications

  • Des Juifs dans la collaboration, L'UGIF (1941-1944), prĂ©face de Pierre Vidal-Naquet, Ă©d. Études et Documentation Internationales, 1980 (ISBN 2-85139-057-0 et 978-2851390578).
  • Des Juifs dans la collaboration : Une terre promise ? (prĂ©f. Pierre Vidal-Naquet), vol. 2 : Des Juifs dans la collaboration : l'UGIF (1941-1944) : prĂ©cĂ©dĂ© d'une courte Ă©tude sur les Juifs de France en 1939, Paris, EDI : Études et documentation internationales (BNF 34637339), puis l'Harmattan (BNF 35080365), , 403 p., contient un choix de tĂ©moignages et documents (ISBN 2-85139-057-0, EAN 978-2851390578, OCLC 6892798, BNF 36255558, lire en ligne).
  • Sois Juif et tais-toi ! 1930-1940 – Les Français « IsraĂ©lites » face au nazisme, Ă©ditions de l'Atelier, 1981 (ISBN 978-2851390646).
  • Retours d'IsraĂ«l, , Ă©ditions L'Harmattan, 1987[23]
  • Jeudi noir, Paris, Ă©ditions L'Harmattan, 1988 (ISBN 2-7384-0039-6) (sur la rafle du VĂ©lodrome d'Hiver).
  • Les Silences de la police – -, avec Jean-Luc Einaudi, Ă©d. L'Esprit frappeur, 2001 (ISBN 2-84405-173-1), sur la rafle du Vel' d'Hiv' et le massacre des AlgĂ©riens Ă  Paris du 17 octobre 1961.
  • Palestine, chronique des Ă©vĂ©nements courants, 1988/ 1989, Ă©ditions L'Harmattan.
  • Le travail Ă  perpĂ©tuitĂ© : De la galĂšre au journalisme, Manya, 1993.
  • N'oublie pas le petit JĂ©sus ! – L'Église catholique et les enfants juifs (1940-1945), Manya, 1994 (ISBN 2-87896-096-3).
  • La Police de Vichy, Les forces de l'ordre françaises au service de la Gestapo 1940-1944, Le Cherche midi, 1995 (ISBN 2-86274-358-5).
  • La police hors la loi – Des milliers de bavures sans ordonnances depuis 1968, Le Cherche midi, 1996 (ISBN 2-86274-466-2).
  • Les Français de la dĂ©bĂącle – Juin-, un si bel Ă©tĂ©, Le Cherche midi, 1997.
  • Mai 68 – Sous les pavĂ©s, la rĂ©pression, Le Cherche midi, 1998.
  • La Censure militaire et policiĂšre 1914-1918, Le Cherche midi, 1999.
  • Souscription pour l'Ă©dification d'un monument au Policier Inconnu, L'Esprit frappeur, 1999.
  • De la victoire Ă  la dĂ©bĂącle 1919-1940, Le Cherche midi, 2000.
  • La Rafle du VĂ©l’ d’Hiv’, coll. « Que sais-je ? », Ă©ditions PUF, 2002.
  • 1953, un sanglant, collection « Moisson Rouge », AgnĂšs ViĂ©not Ă©ditions, 2003.
  • La LibĂ©ration inconnue – À chacun sa rĂ©sistance, Le Cherche midi, 2004 (sur la LibĂ©ration et la RĂ©sistance).
  • Drancy, un camp de concentration trĂšs ordinaire, 1941-1944, Le Cherche midi, 2005 (ISBN 2-86274-435-2), sur le camp de Drancy.
  • Le Chagrin et la colĂšre, Le Cherche midi, 2005.
  • La France Bleu Marine – De Marcellin Ă  Sarkozy (-), L’Ésprit frappeur, 2005.
  • Moussa et David, dessin de Jacques Demiguel, Tartamudo, 2006.
  • Candide n'est pas mort, Le Cherche midi, 2008.
  • Portrait physique et mental du policier ordinaire, Ă©d. AprĂšs la Lune, 2008 (ISBN 2352270448 et 978-2352270447).
  • Les mercenaires de la RĂ©publique, Éditions du Monde libertaire, 2008, (BNF 41269779), (OCLC 234041168).
  • À vos ordres ? Jamais plus !, Éditions du Monde libertaire, 2009.
  • 17, rue Dieu et autres cris de colĂšre, Le Temps des cerises, 2009 (ISBN 978-2-84109-750-0).
  • L'Intelligence du Barbare, Éditions du Monde libertaire, 2010 (ISBN 978-2-915514-36-0).
  • Le Petit Maurice dans la tourmente, 1940-1944 – Quatre ans parmi les sous-hommes (bande dessinĂ©e), dessin de Mario et Michel D’Agostini, avec le soutien du MĂ©morial de la Shoah, Ă©d. Tartamudo, 2010.
  • Je n'aime pas la police de mon pays – L'aventure du bulletin Que fait la police ? (1994-2012), illustrations de SinĂ©, Faujour et Tignous, Ă©ditions Libertalia, collection « À boulets rouges », 2012 (ISBN 978-2918059240).
  • La Rafle du VĂ©l' d'Hiv (adaptation thĂ©Ăątrale de Philippe Ogouz), Ă©d. Le Cherche midi, 2003 (ISBN 978-2749101583).
  • Avec Daniel Giraud, Patrick Schindler, RenĂ© SchĂ©rer, Criminalisation de l'immigration, rĂ©pression policiĂšre : arguments pour l'Ă©mancipation sociale, Éditions du Monde libertaire, 2006, (OCLC 470536333).

Bibliographie

Notes et références

  1. David Dufresne, « Une pétition «contre la haine raciste de policiers armés». L'Observatoire des libertés publiques est l'auteur de l'appel », sur Libération.fr, (consulté le )
  2. Observatoire des libertés publiques.
  3. Insee, « Fichier des personnes décédées », sur data.gouv.fr, (consulté le ).
  4. Jean-Paul Salles, « Rajsfus Maurice (Plocki Maurice) », sur Le Maitron, (consulté le ).
  5. Voir, Klarsfeld, 2012
  6. Pierre Marcelle, « Rage de raison », portrait de Maurice Rajsfus » dans Libération, 28 avril 2002.
  7. « Maurice Rajsfus ; la rafle du Vel d'hiv » [vidéo], sur ina.fr, Patrice Gélinet, Les Jours du siÚcle, France Inter, (consulté le ).
  8. Renaud Leblond, « ScÚnes de haine ordinaire à Paris 18e », sur L'Express, (consulté le ).
  9. Patricia Tourancheau, « Avril 93, un mort au commissariat. Le policier Compain est jugé à Paris pour « homicide volontaire », sur liberation.fr, Libération, (consulté le ).
  10. L'inspecteur qui l'a tué fut condamné à huit ans de prison. Sources : Cathy Capvert, « Début du procÚs du policier qui avait tué le jeune Makomé », L'Humanité, ; « ProcÚs Makomé : un « énorme gùchis », selon SOS Racisme », L'Humanité, 16 février 1996.
  11. « PrĂ©sentation de l’Observatoire des libertĂ©s publiques », dans Que fait la police ?, Maurice Rajsfus et Alexis Violet, mai 1999.
  12. Jean Morawski, « Vel' d'Hiv. Vincennes, 1942 : cent « disparus », L'Humanité, 16 juillet 2002.
  13. « QUE FAIT LA POLICE ? » Blog Archive » QUE FAIT LA POLICE ? – Chronique anti-autoritaire de Maurice Rajsfus – 1er avril 2014 » (consultĂ© le )
  14. Citation dans Wikiquote.
  15. Maurice Rasjfus, Vous avez dit antisémitisme ?, 1er novembre 2000.
  16. L'Ennemi intérieur : Israël-Palestine, éditions de l'Atelier, 1987 (ISBN 978-2851390875) [aperçu en ligne].
  17. « Entretien avec Maurice Rajsfus », Barricata, no 15,‎ (lire en ligne).
  18. Big Brother Awards. Les surveillants surveillés, éditions Zone
  19. Rajsfus 1980, p. 13
  20. Patrick Roger, « La mort de Maurice Rajsfus, recenseur de la « rĂ©pression policiĂšre » », Le Monde, no 23462,‎ , p. 31 (lire en ligne).
  21. Disparition de l’écrivain et historien Maurice Rajsfus, Le Parisien avec AFP, 13 juin 2020.
  22. Lucile Métout, « Val-de-Marne : les adieux poings levés à Maurice Rajsfus, figure de l'antifascisme », sur Le Parisien, (consulté le ).
  23. Stéphane Dupont, Maurice Rajsfus. Retours d'Israël (compte-rendu), Politique étrangÚre, Année 1987, 52-4, p. 1021-1022

Annexes

Cinéma

  • L'An prochain, la rĂ©volution, un film de FrĂ©dĂ©ric Goldbronn, prod. et dist. Cauri Films, 2010 - vidĂ©o couleur, 71 min.

Théùtre

Une adaptation théùtrale, La Rafle du Vél' d'Hiv, a été réalisée et jouée en 2004 par Philippe Ogouz d'aprÚs trois livres de Maurice Rajsfus : Opération étoile jaune (Le Cherche midi), Chroniques d'un survivant (Noésis), La Rafle du Vél' d'Hiv, (PUF).

Articles connexes

Liens externes

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