Laid
Le laid ou la laideur est généralement la caractéristique opposée au beau (jugement esthétique).
Laideur
Une œuvre picturale jugée belle, représentant la laideur visuelle .
Parfois le laid est une caractéristique inspirant le mépris, la désapprobation ; dans cette acception, le laid n'est ainsi pas une valeur esthétique, et peut être opposée au bien (jugement moral).
Le jugement esthétique comme le jugement moral n'étant pas universels, ce qui est laid pour certains peut être beau ou bien pour d'autres.
Étymologie
Le sens primitif de « laid » est « désagréable, outrageant, odieux ». Cette signification est attestée dès le début du XIIe siècle en français et s'est maintenue dans les dérivés dialectaux, comme le normand laidure « outrage » et le manceau laidanger « outrager ».
Exemples d'usages anciens :
- Vers 1100, au sens de « désagréable, horrible, odieux, repoussant (personne) » : « La premere [eschele] est des Canelius les laiz » Roland, éd. J. Bédier, 3238
- Au sens de « causer un préjudice » : « faire grant lait » — dans Philippe de Thaon, Bestiaire, 1104
Le sens esthétique, bien que déjà attesté au tout début du XIIe siècle ne s'est répandu qu'à partir du XIVe siècle, et a fini par évincer le sens premier du mot[1].
Caractéristiques
Au sens esthétique, le laid s'oppose au beau. Mais le laid n'est pas l'absence de beau ; ce non-beau, en tant qu'absence des critères de beauté correspondrait plutôt par exemple au médiocre, au banal, au vulgaire, au commun ou à la fadeur, qui prennent généralement sens comme « ni beau, ni laid ». Le laid s'affirme plutôt comme un contraire du beau, un inverse, un négatif : à travers la présence d'éléments propres définissant la laideur.
Représentation artistique du laid
Dans le domaine de l'art (au sens général : peinture, littérature, etc), une des confusions fréquentes est celle d'assimiler la laideur de l'objet représenté et la laideur de la représentation (l'œuvre). Cette confusion commune est critiquée dès l'Antiquité chez Aristote ; on retrouve la mention ultérieurement chez Nicolas Boileau (XVIIe) et dans de nombreux mouvements artistiques (romantisme, réalisme, etc).
- « La preuve en est dans ce qui arrive à propos des œuvres artistiques; car les mêmes choses que nous voyons avec peine, nous nous plaisons à en contempler l'exacte représentation, telles, par exemple, que les formes des bêtes les plus viles et celles des cadavres. »
- — Aristote, Poétique, Chap. IV
Au sujet de la laideur dans l'art, Kant écrivait dans Critique de la faculté de juger « Les beaux-arts montrent leur supériorité précisément en ceci qu’ils donnent une belle description de choses qui dans la nature seraient laides ou déplaisantes. Les furies, les maladies, les dévastations de la guerre, peuvent en tant que choses nuisibles, être décrites de très belle façon et peuvent même être représentées par des peintures »[2]. Ce qui affirme que la beauté et la laideur diffèrent et dépendent de la création artistique. De même, selon Raymond Polin « L’idée de laideur naît d’une évaluation critique. La même œuvre peut être à la fois, belle et laide pour son créateur, surtout si elle est figurative, car elle peut représenter un objet hideux ou répugnant, même si cette représentation acquiert une terrifiante beauté (…)»[3].
Cinéma
- Frankenstein (1931) et La Fiancée de Frankenstein (1935), de James Whale
- La Monstrueuse Parade, de Tod Browning (1932)
- Quasimodo, de William Dieterle (1939)
- Dumbo, des studios Walt Disney (1941)
- Naïs, de Raymond Leboursier et Marcel Pagnol (1945)
- La Belle et la Bête, de Jean Cocteau, (1946)
- L'Héritière, de William Wyler, (1949)
- Les Yeux sans visage, de Georges Franju (1960)
- Affreux, sales et méchants, d'Ettore Scola (1976)
- Elephant Man, de David Lynch (1980)
- Trop belle pour toi, de Bertrand Blier (1989)
- Cyrano de Bergerac, de Jean-Paul Rappeneau (1990)
- La Fille aux allumettes, de Aki Kaurismäki, (1990)
- L'Homme sans visage, de Mel Gibson (1993)
- Muriel, de Paul John Hogan (1994)
- Sur mes lèvres, de Jacques Audiard, (2001)
- Ouvre les yeux, d'Alejandro Amenábar (1997) ou son remake Vanilla Sky, de Cameron Crowe (2001)
- Vilaine, de Jean-Patrick Benes et Allan Mauduit, (2008)
- Les Beaux Gosses, de Riad Sattouf, (2009)
Notes et références
- Littré laid »
- Kant, Emmanuel, 1724-1804., Critique de la faculté de juger, Philosophique J. Vrin, (OCLC 807312047, lire en ligne), p. 48
- Raymond Polin, Du laid, du mal, du faux., Presses universitaires de France, (OCLC 7675959, lire en ligne), p. 94
Voir aussi
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- Francis de Miomandre, Éloge de la laideur, Paris, Hachette, 1925 ; rééd. Les éditions Cartouche, 2010 (ISBN 9782915842685) [présentation en ligne]
- Murielle Gagnebin, Fascination de la laideur : l'en deçà psychanalytique du laid, Champ Vallon, 1994
- Étienne Souriau, Vocabulaire d'esthétique, PUF, 1990 ; et rééd.
- Umberto Eco (dir.) (trad. de l'italien par Myriam Bouzaher), Histoire de la laideur [« Storia della bruttezza »], Paris, Flammarion, , 450 p. (ISBN 978-2-08-120265-8)
- Karl Rosenkranz, Esthétique du laid, CIRCE, 2004.
- Gwenaëlle Aubry, Le (dé)goût de la laideur, Paris, Mercure de France, 2007.
- Claudine Sagaert, Histoire de la laideur féminine, Imago 2015
- Georg W. F. Hegel, Esthétique, Paris, Librairie générale française, 1997.
- Robert Blanche, Des Catégories esthétiques, Paris, Vrin, 1979.
- Emmanuel Kant, Critique de la Faculté de juger, Paris, Vrin, 1989.
- Gotthold Ephraim Lessing, Laocoon, Paris, Hermann éditeurs des sciences et des arts, 2002.
- Yves Michaud, Critères esthétiques et jugement de goût, Paris, Hachette littérature, coll. Pluriel Arts, 1999.
- Raymond Polin, Du laid, du mal, du faux, Paris, P.U.F., 1948.
Voir aussi la bibliographie de « Beau ».