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Hypnos monopterygius

Hypnos monopterygius est une espèce de raies Ă©lectriques endĂ©mique aux cĂ´tes australiennes qui se rencontre frĂ©quemment dans les profondeurs infĂ©rieures Ă  80 m. Il s'agit de l'unique membre de son genre et de la sous-famille Hypninae au sein de la famille Torpedinidae, que certains taxinomistes choisissent de considĂ©rer dans la famille plus large Hypnidae. Cette petite espèce atteint gĂ©nĂ©ralement 40 cm de longueur. Les nageoires pectorales dĂ©veloppĂ©es, la très courte queue ainsi que la taille rĂ©duite des nageoires dorsales et caudales situĂ©es sur l'arrière du corps donnent au poisson une forme de poire caractĂ©ristique. La face supĂ©rieure du corps prĂ©sente diffĂ©rentes teintes de marron ; les yeux sont minuscules alors que la gueule est grande et largement extensible.

Hypnos monopterygius
Description de l'image Coffin ray (Hypnos monopterygius), Parsley Bay, Sydney.jpg.

Genre

Espèce

Hypnos monopterygius
Shaw, 1795

Synonymes

  • Hypnos subnigrum DumĂ©ril, 1852
  • Lophius monopterygius Shaw, 1795

Statut de conservation UICN

( LC )
LC [1] : Préoccupation mineure

Répartition géographique

Description de l'image Hypnos monopterygius rangemap.png.

Cette raie lĂ©thargique et nocturne habite des fonds marins sableux ou vaseux qui lui permettent de s'enterrer pendant la journĂ©e. Ses mĂ©canismes d'attaque et de dĂ©fense gĂ©nèrent un choc Ă©lectrique atteignant 200 volts ; un tel choc est douloureux quoique non lĂ©tal pour l'homme. Ce prĂ©dateur vorace se nourrit principalement de poissons osseux benthiques qui ont souvent une taille similaire voire supĂ©rieure Ă  Hypnos monopterygius. Cependant, des invertĂ©brĂ©s ainsi que de petits manchots et mĂŞme des rats font partie Ă  l'occasion du rĂ©gime alimentaire de l'espèce. La reproduction est ovovivipare : lors du dĂ©veloppement intra-utĂ©rin, les embryons se nourrissent de vitellus puis d'un liquide histotrophe, une sorte de « lait utĂ©rin ». La femelle donne naissance Ă  4 Ă  8 petits en Ă©tĂ©. Très robuste et dĂ©nuĂ© de valeur commerciale, le poisson survit gĂ©nĂ©ralement Ă  la capture puis Ă  la remise Ă  l'eau. L'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) range cette espèce dans la catĂ©gorie « PrĂ©occupation mineure » : en effet, les populations sont stables et ne semblent pas menacĂ©es par les activitĂ©s humaines.

Description

Hypnos monopterygius est reconnaissable grâce à son grand disque formé par les nageoires pectorales et à sa petite queue.

La forme semblable à une poire de Hypnos monopterygius est inhabituelle et distingue cette espèce de toutes les autres raies. Son corps mou présente deux organes électriques en forme de rein de chaque côté de la tête. Les nageoires pectorales forment un disque à peu près aussi long que large : celui-ci est épais au centre et fin sur les bords. Le bord le plus important du corps est droit ou légèrement concave. Les yeux sont minuscules et supportés par de courts pédoncules. Juste derrière les yeux sont les stigmates d'une taille légèrement supérieure ; chez certains spécimens, les stigmates sont surmontés de papilles. Les narines se trouvent juste devant la gueule et y sont reliées par une paire de grandes fentes. Un rabat de peau qui chevauche la gueule est situé entre les narines. Cette gueule d'une grande contenance forme un arc très long et large ; les fines mâchoires se distendent considérablement sans être pour autant particulièrement protrusibles. Les adultes disposent d'une soixantaine de rangées de petites dents dans chaque mâchoire ; chaque dent comprend trois grandes cuspides. Cinq paires de fentes branchiales sont situées sur la partie inférieure du disque que forment les nageoires pectorales[2] - [3].

Les nageoires pelviennes sont relativement grandes et rejoignent Ă  l'avant le disque des nageoires pectorales : un disque secondaire grossièrement circulaire est ainsi formĂ©. Les deux nageoires dorsales ressemblent Ă  des lobes et sont situĂ©es très près de la nageoire caudale : celle-ci est d'une taille similaire et dispose d'une bordure arrondie et presque symĂ©trique. La queue est si courte que la nageoire caudale ne dĂ©passe que de peu le disque des nageoires pelviennes[4]. La peau est entièrement dĂ©pourvue d'Ă©cailles placoĂŻdes et peut ĂŞtre froissĂ©e par endroits. Hypnos monopterygius prĂ©sente une teinte dorsale qui s'Ă©tend du marron sombre ou rougeâtre Ă  des nuances grises, roses ou jaunes ; il arrive que des marques irrĂ©gulières de coloris plus clairs ou plus sombres recouvrent partiellement cette face du corps. La surface ventrale est pale, tout comme les papilles[2] - [3]. Les raies de cette espèce peuvent atteindre une longueur de 70 cm, voire 92 cm, mĂŞme si la plupart mesure autour de 40 cm[5] - [3].

Biologie et Ă©cologie

Hypnos monopterygius se dĂ©place de façon lente et saccadĂ©e. Cet animal nocturne passe la majeure partie de la journĂ©e enfoui dans les sĂ©diments en ne laissant voir que ses stigmates. Quand il est dĂ©rangĂ©, le poisson a Ă©tĂ© observĂ© en train d'effectuer ce qui pourrait s'apparenter Ă  un comportement de dĂ©fense dans lequel il surgit de sa cachette et dĂ©crit un cercle en nageant tout en gardant sa gueule grande ouverte. Il arrive qu'un spĂ©cimen s'Ă©choue Ă  marĂ©e descendante mais ce poisson peut survivre plusieurs heures hors de l'eau[6] - [7]. Ses organes Ă©lectriques sont composĂ©s d'Ă©lectrocytes : ce sont des cellules particulières dĂ©rivĂ©es des fibres musculaires remplies d'une substance gĂ©latineuse. Ces Ă©lectrocytes sont empilĂ©es en colonnes verticales, plusieurs colonnes formant finalement un organe Ă©lectrique ; ce système est comparable Ă  des piles reliĂ©es au sein d'un circuit. La raie peut ainsi dĂ©livrer un choc pouvant atteindre une puissance de 200 volts ; en dix minutes, 50 chocs de plus en plus faibles peuvent ĂŞtre Ă©mis. Cette capacitĂ© est utilisĂ©e pour maĂ®triser les proies et dissuader les prĂ©dateurs[8] - [6].

Il est fréquent que des spécimens s'échouent sur le rivage.

Le rĂ©gime alimentaire de l'espèce se compose principalement de poissons osseux benthiques mais comprend Ă©galement des cĂ©phalopodes et, plus rarement, des crustacĂ©s ainsi que des vers polychètes. Des manchots et des rats ont Ă©tĂ© retrouvĂ©s dans l'estomac de spĂ©cimens. Le poisson attrape ses proies en chassant Ă  l'affĂ»t depuis les sĂ©diments marins : il les avale en entier la tĂŞte la première avant de se rĂ©enfouir. Les proies sont souvent d'une taille extrĂŞmement importante comparĂ©e Ă  celle d'Hypnos monopterygius ; un individu de 60 cm de long a Ă©tĂ© observĂ© en train d'avaler un poisson-crocodile de 70 cm de long, la queue de la proie dĂ©passant encore de la gueule du prĂ©dateur. Il semblerait que des spĂ©cimens ait Ă©tĂ© retrouvĂ©s morts après s'ĂŞtre Ă©touffĂ©s en tentant d'avaler une proie trop grande[3] - [6] - [9]. Hypnos monopterygius est ovovivipare : lors du dĂ©veloppement intra-utĂ©rin, les embryons se nourrissent de vitellus puis d'un liquide histotrophe, une sorte de « lait utĂ©rin » sĂ©crĂ©tĂ© par la mère[5]. La femelle donne naissance Ă  4 Ă  8 petits en Ă©tĂ© : ceux-ci mesurent entre 8 et 11 cm de long. Les mâles comme les femelles atteignent la maturitĂ© sexuelle quand ils mesurent entre 40 et 48 cm de long[2] - [6]. Les parasites connus pour cette espèce sont les vers Acanthobothrium angelae[10] et Lacistorhynchus dollfusi[11] ainsi que le nĂ©matode Echinocephalus overstreeti[12].

Répartition géographique et habitat

Hypnos monopterygius est rĂ©partie sur un territoire vaste mais disjoint dans les eaux tropicales et tempĂ©rĂ©es chaudes d'Australie. La partie occidentale de sa distribution s'Ă©tend du Golfe Saint-Vincent en Australie-MĂ©ridionale jusque Broome en Australie-Occidentale ; pour la partie orientale, l'espèce est prĂ©sente depuis Eden dans la Nouvelle-Galles du Sud jusque l'ĂŽle HĂ©ron dans le Queensland. L'espèce n'est prĂ©sente ni au large de l'État de Victoria, ni au large de la Tasmanie. Ce poisson commun et dĂ©mersal se rencontre gĂ©nĂ©ralement près de la cĂ´te, Ă  des profondeurs infĂ©rieures Ă  80 m, mĂŞme si sa prĂ©sence a Ă©tĂ© rĂ©pertoriĂ©e jusqu'Ă  240 m[1] - [2]. Hypnos monopterygius affectionne les habitats sableux ou vaseux : les plages, les estuaires, les baies ou encore au sein d'herbiers marins ou Ă  proximitĂ© de rĂ©cifs coralliens ou rocheux[3] - [6].

Taxonomie et phylogénie

La première rĂ©fĂ©rence scientifique s'appliquant Ă  Hypnos monopterygius est l’œuvre du zoologue et botaniste anglais George Shaw et accompagne les illustrations d'un spĂ©cimen Ă©chouĂ© effectuĂ©es par Frederick Polydore Nodder dans l'ouvrage The Naturalist's Miscellany, publiĂ© en 1795. Shaw assimile le spĂ©cimen Ă  une baudroie et le nomme « baudroie Ă  nageoire unique » ou Lophius monopterygius en latin[13]. En 1852, le zoologue français Auguste DumĂ©ril dĂ©crit une nouvelle espèce de raie Ă©lectrique dans un volume de la revue scientifique Revue et Magasin de Zoologie en s'appuyant sur deux spĂ©cimens recueillis au large de la Nouvelle-Galles du Sud. Il nomme cette espèce Hypnos subnigrum ; le nom du genre provient du terme grec pour « sommeil », cela renvoie Ă  la capacitĂ© que possède cette raie d'induire l'engourdissement[14]. Cependant, l'ichtyologiste australien Gilbert Percy Whitley dĂ©couvre que le poisson qu'a illustrĂ© Nodder est celui dĂ©crit par DumĂ©ril : le nom binominal devient alors Hypnos monopterygius. En 1902, l'ichtyologiste australien Edgar Ravenswood Waite propose de remplacer le nom du genre Hypnos par Hypnarce par crainte d'une confusion avec Hypna, un genre de papillons. NĂ©anmoins, le Code international de nomenclature zoologique (CINZ) ne paraĂ®t pas rĂ©clamer le changement et Hypnarce demeure considĂ©rĂ© comme un synonyme plus rĂ©cent[8].

Appelé « coffin ray » en anglais, ce poisson ne dispose pas de nom vulgaire reconnu en français[5]. Le nom anglais renvoie à la forme de cercueil (coffin) que prennent les spécimens morts échoués dont le corps est enflé[2]. Des études phylogénétiques s'appuyant sur la morphologie ont démontré que le genre Hypnos est très étroitement lié au genre Torpedo. Ainsi, certains taxonomistes classent l'espèce dans le genre Torpedo, au sein de la famille Torpedinidae (et dans sa propre sous-famille, Hypninae). D'autres taxonomistes considèrent en revanche que le genre Hypnos est assez singulier pour disposer de sa propre famille, Hypnidae[2] - [15].

Relations avec l'homme

La raie a tendance à rester immobile et dissimulée sur le fond marin quand on l'approche. Ainsi, de nombreux plongeurs et nageurs ont subi le choc électrique en touchant un spécimen par mégarde[3] - [7]. Si le choc n'est pas mortel, il peut tout de même être relativement sérieux. Ce choc électrique est perceptible en versant de l'eau de mer sur le poisson[2]. Hypnos monopterygius n'a aucune valeur commerciale[3]. En 1883, le zoologue Edward Pierson Ramsay remarque qu'il s'agit de la seule raie présente à Port Jackson qui ne soit pas comestible[16]. Souvent involontairement pris dans les chaluts, ce poisson est suffisamment robuste pour être remis à la mer vivant[1]. Le poisson est aussi attrapé dans des casiers à homards et plus rarement en pêche sous-marine[3]. Puisque la population de l'espèce est répandue, l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) classe cette espèce dans la catégorie « Préoccupation mineure » sur sa liste rouge[1]. Cette raie peut être observée en captivité dans des aquariums publics mais elle continue cependant à se nourrir de proies vivantes[9].

Annexes

Références taxinomiques

Genre
Espèce

Notes et références

  1. (en) « Fiche de Hypnos monopterygius sur le site de l'UICN. », sur iucnredlist.org (consulté en )
  2. (en) Last, P.R.; Stevens, J.D., Sharks and Rays of Australia, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, , 324–325 p. (ISBN 978-0-674-03411-2 et 0-674-03411-2)
  3. (en) Compagno, L.J.V.; Last, P.R., FAO Identification Guide for Fishery Purposes. The Living Marine Resources of the Western Central Pacific, Food and Agricultural Organization of the United Nations, , 1447–1448 p. (ISBN 92-5-104302-7), « Hypnidae. Coffin rays »
  4. (en) Dianne J. Bray, « Coffin Ray, Hypnos monopterygius (Shaw & Nodder 1795) », sur fishesofaustralia.net.au, (consulté le )
  5. (en) « Hypnos monopterygius (Shaw, 1795) Australian numbfish », sur FishBase (consulté le )
  6. (en) Michael, S.W., Reef Sharks & Rays of the World, Sea Challengers, , 79–80 p. (ISBN 0-930118-18-9)
  7. (en) « Coffin Ray », sur elasmodiver.com (consulté le )
  8. (en) Bigelow, H.B. and W.C. Schroeder, Fishes of the Western North Atlantic, Part 2, Sears Foundation for Marine Research, Yale University, , 80–96 p.
  9. (en) « Coffin Ray, Hypnos monopterygius (Shaw & Nodder 1795) », sur australianmuseum.net.au, (consulté le )
  10. (en) Campbell, R.A.; Beveridge, I., « The genus Acanthobothrium (Cestoda : Tetraphyllidea : Onchobothriidae) parasitic in Australian elasmobranch fishes », Invertebrate Systematics, vol. 16, no 2,‎ , p. 237–344
  11. (en) Beveridge, I.; Sakanari, J.A., « Lacistorhynchus dollfusi sp. nov.(Cestoda: Trypanorhyncha) in elasmobranch fishes from Australian and North American coastal waters », Transactions of the Royal Society of South Australia, vol. 111, nos 3–4,‎ , p. 147–154
  12. (en) Beveridge, I., « Echinocephalus overstreeti Deardorff & Ko, 1983 (Nematoda: Gnathostomatoidea) from elasmobranchs and molluscs in South Australia », Transactions of the Royal Society of South Australia, vol. 3, nos 1–2,‎ , p. 79–92
  13. Shaw, G.; Nodder, F.P. (1789–1813). The Naturalist's Miscellany. Planches 202–203.
  14. (en) Duméril, A.H.A., « Monographie de la famille des torpédiniens, ou poissons plagiostomes électriques, comprenant la description d'un genre nouveau, de 3 espèces nouvelles, et de 2 espèces nommées dans le Musée de Paris, mais non encore décrites », Revue et Magasin de Zoologie, (Sér. 2), vol. 4,‎ , p. 176–189, 227–244, 270–285
  15. (en) McEachran, J.D.; Aschliman, N., Biology of Sharks and Their Relatives, CRC Press, , 79–113 p. (ISBN 0-8493-1514-X), « Phylogeny of Batoidea »
  16. (en) Ramsay, E.P., Notes on the food fishes and edible mollusca of New South Wales, etc., etc., exhibited in the New South Wales Court, W. Clowes and Sons, , p. 33
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