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Disjoncteur Ă  haute tension

Un disjoncteur à haute tension est destiné à établir, supporter et interrompre des courants sous sa tension assignée (la tension maximale du réseau électrique qu'il protège), selon la définition donnée par la Commission électrotechnique internationale[1]. Il opère à la fois :

  • dans des conditions normales de service, par exemple pour connecter ou dĂ©connecter une ligne dans un rĂ©seau Ă©lectrique ;
  • dans des conditions anormales spĂ©cifiĂ©es, en particulier pour Ă©liminer un court-circuit dans le rĂ©seau provoquĂ© par la foudre (Voir aussi la partie spĂ©cifique) ou d'autres causes.

De par ses caractéristiques, un disjoncteur est l’appareil de protection essentiel d’un réseau à haute tension, car il est seul capable d'interrompre un courant de court-circuit et donc d'éviter que le matériel connecté sur le réseau soit endommagé par ce court-circuit.

Disjoncteur 800 kV au Venezuela

Principe de fonctionnement

La coupure d’un courant électrique par un disjoncteur à haute tension est obtenue en séparant des contacts dans un gaz (air, SF6..) ou dans un milieu isolant (par exemple l'huile ou le vide). Après séparation des contacts, le courant continue de circuler dans le circuit à travers un arc électrique qui s’est établi entre les contacts du disjoncteur.

Arc entre les contacts d'un disjoncteur Ă  haute tension

Ă€ ce jour, les disjoncteurs Ă  haute tension (72,5 kV Ă  1 100 kV) utilisent essentiellement le gaz ou l'huile pour l’isolement et la coupure, la technique de coupure dans le vide est limitĂ©e aux applications en moyenne tension avec quelques dĂ©veloppements rĂ©cents pour une tension assignĂ©e de 84 kV[2].

Dans les disjoncteurs à gaz, le courant est coupé lorsqu’un soufflage suffisant est exercé sur l’arc électrique pour le refroidir et l’interrompre.

Ă€ l’état normal, le gaz contenu dans le disjoncteur est isolant, il permet de supporter la tension du rĂ©seau connectĂ© Ă  ses bornes. Lorsque les contacts du disjoncteur se sĂ©parent, l’intervalle entre les contacts est soumis Ă  un fort champ Ă©lectrique, le courant circule alors Ă  travers un arc qui est un plasma (ou gaz ionisĂ©) composĂ© de molĂ©cules de gaz dĂ©composĂ©es, d'Ă©lectrons et d’ions. La tempĂ©rature de l'arc devient très Ă©levĂ©e, elle peut atteindre 20 000 °C[3] ou plus au cĹ“ur de l'arc. Sous l’action du soufflage exercĂ© sur l’arc lors du fonctionnement du disjoncteur, la tempĂ©rature de l’arc diminue, les Ă©lectrons et les ions se re-combinent et le fluide retrouve ses propriĂ©tĂ©s isolantes. La coupure de courant est alors rĂ©ussie.

Pour les disjoncteurs Ă  haute tension, le principe de coupure retenu est la coupure du courant lorsqu'il passe par zĂ©ro (ceci se produit toutes les dix millisecondes dans le cas d’un courant alternatif Ă  50 Hz). En effet, c'est Ă  cet instant que la puissance qui est fournie Ă  l’arc par le rĂ©seau est minimale (cette puissance fournie est mĂŞme nulle Ă  l’instant oĂą la valeur instantanĂ©e du courant est nulle), on peut donc espĂ©rer, moyennant un soufflage suffisant, mettre Ă  profit cet intervalle de temps pendant lequel le courant est de faible intensitĂ© pour refroidir suffisamment l’arc afin que sa tempĂ©rature diminue et que l’espace entre les contacts redevienne isolant.

Techniques de coupure

Les premiers disjoncteurs à haute tension, introduits à la fin des années 1890 et au début du vingtième siècle, ont utilisé l’huile ou l'air comprimé[4] pour la coupure. Le premier brevet de disjoncteur pour la Haute tension B, basé sur la séparation de deux contacts dans l'huile (et dans l'air), a été déposé par Sebastian Ziani de Ferranti en juillet 1895[5]. Ce principe sera amélioré par la suite et donnera lieu aux disjoncteurs à huile. La coupure dans l’air atmosphérique s'est développée en Haute tension A, l’idée étant alors d’allonger suffisamment l’arc dans l’air afin de provoquer son refroidissement, son extinction et ensuite assurer la tenue de la tension du réseau[6].

La technique de coupure dans l'huile a été ensuite supplantée par la coupure dans l'air comprimé, le SF6 et le vide.

Disjoncteur Ă  huile

Brevet de disjoncteur à eau et huile, déposé en 1923

La coupure dans l’huile s’est imposée en haute tension après avoir été développée en moyenne tension (ou Haute tension A). Sous l’action de l’arc électrique, l’huile est décomposée, plusieurs types de gaz sont produits (essentiellement de l’hydrogène et de l’acétylène) lors de cette décomposition. L’énergie de l’arc est utilisée pour décomposer et évaporer l’huile, ceci permet de refroidir le milieu entre les contacts et par suite d’interrompre le courant à son passage par zéro.

Les premiers disjoncteurs à huile avaient des contacts de coupure qui étaient plongés dans de l’huile contenue dans une cuve métallique au potentiel de la terre, d'où leur nom de Dead tank[7]. Ils sont appelés « disjoncteurs à gros volume d’huile ». Certains sont toujours en service actuellement, par exemple aux États-Unis.

Par la suite, dans les annĂ©es 1950, les « disjoncteurs Ă  faible volume d’huile » ont Ă©tĂ© conçus pour rĂ©duire la quantitĂ© d’huile nĂ©cessaire et surtout limiter le risque d’incendie inhĂ©rent aux disjoncteurs Ă  gros volume d’huile. L’arc se dĂ©veloppe dans un cylindre isolant afin de limiter sa longueur et de contrĂ´ler autant que possible l’énergie contenue dans l’arc. Cette Ă©nergie est utilisĂ©e pour gĂ©nĂ©rer le soufflage par vaporisation de l’huile comme expliquĂ© prĂ©cĂ©demment. Cette technique que l’on appelle par « auto-soufflage » sera reprise plus tard pour les disjoncteurs Ă  SF6. Elle a Ă©tĂ© appliquĂ©e pour des tensions assignĂ©es atteignant 765 kV et des courants de dĂ©faut très Ă©levĂ©s, pouvant atteindre 50 kA[8].

Ces disjoncteurs avaient pour principaux inconvénients de nécessiter de nombreux éléments de coupure en série (pour tenir la tension), et de nécessiter un entretien important et délicat (remplacement de l’huile usagée). Ils ont été supplantés par les disjoncteurs à SF6 qui nécessitent peu de maintenance et ont une longue durée de vie.

Ampoule Ă  vide pour disjoncteur Ă  moyenne tension

Disjoncteurs avec ampoules Ă  vide

Les premières recherches et brevets sur les ampoules (interrupteurs) à vide ont été faites par le California Institute of Technology vers 1926. Les premières applications industrielles ont été réalisées à la fin années 1950 lorsque les difficultés technologiques de mise en œuvre furent résolues, notamment la garantie d'un vide poussé pendant au moins vingt ans, ce qui nécessite une étanchéité parfaite de l'ampoule[9].

Dans un disjoncteur à vide, l'arc est alimenté par les particules issues des contacts. La haute tenue diélectrique obtenue dans un vide poussé permet de tenir la tension transitoire de rétablissement entre contacts après interruption du courant. Le passage du courant dans des contacts de forme appropriée engendre un champ magnétique qui entraîne la rotation de l'arc et évite que ce dernier reste attaché sur la même surface de contact. Il est ainsi possible d'éviter la fusion des contacts d'arc et une production excessive de particules métalliques qui aurait limité la tenue de la tension après l'interruption du courant.

Actuellement des disjoncteurs intĂ©grant des ampoules Ă  vide sont en service jusqu’à 84 kV, au Japon[2], le pouvoir de coupure d'un disjoncteur Ă  vide peut atteindre 63 kA[10]. Des recherches sont en cours pour dĂ©velopper des ampoules Ă  vide de tension supĂ©rieure[11].

Disjoncteur à air comprimé

Disjoncteur à air comprimé

Le gaz contenu dans les disjoncteurs à air comprimé est maintenu sous haute pression (20 à 35 bars) à l’aide d’un compresseur. Cette haute pression permet d’assurer la tenue diélectrique et de provoquer le soufflage de l’arc pour la coupure[12].

Le soufflage intense exercĂ© dans ces disjoncteurs a permis d’obtenir de très hautes performances (courant coupĂ© jusqu’à 100 kA sous haute tension) et avec une durĂ©e d’élimination du dĂ©faut très courte permettant d’assurer une bonne stabilitĂ© des rĂ©seaux en cas de dĂ©faut.

Ils ont eu longtemps le monopole des très hautes performances et furent pendant les années 1960 et 1970 utilisés de préférence dans les réseaux à très haute tension, en particulier en Amérique du Nord.

Un défaut des disjoncteurs à air comprimé est leur bruit très important à l'ouverture. De plus, ils nécessitent un entretien périodique, en particulier de leurs compresseurs, ceci explique qu’ils ont été progressivement supplantés par une autre génération de disjoncteurs, celle des disjoncteurs à SF6 (ou hexafluorure de soufre).

Ă€ noter que la technique Ă  air comprimĂ© est la seule qui permette encore aujourd’hui d’atteindre les pouvoirs de coupure les plus Ă©levĂ©s (275 kA sous 36 kV) qui sont exigĂ©s pour les disjoncteurs de gĂ©nĂ©rateurs[13].

Disjoncteur Ă  haute tension au SF6 (Hexafluorure de soufre)

Historique

L'utilisation du gaz SF6 pour l'isolation a été brevetée aux États-Unis par Franklin Cooper de General Electric en 1938[14], et son utilisation pour l’interruption d’un courant a été revendiquée aussi en 1938 dans un brevet allemand par Vitaly Grosse de AEG (Allgemeine Elektrizitäts-Gesellschaft).

La première application industrielle du gaz SF6 pour la coupure date de 1953, elle a Ă©tĂ© faite par Westinghouse pour des interrupteurs en charge Ă  haute tension 15 kV Ă  161 kV avec un pouvoir de coupure de 600 A[15].

La première rĂ©alisation d'un disjoncteur Ă  gaz SF6 haute tension a Ă©tĂ© faite en 1956 par Westinghouse mais le pouvoir de coupure Ă©tait alors limitĂ© Ă  kA sous 115 kV (1 000 MVA) et cet appareil devait avoir de nombreux Ă©lĂ©ments de coupure en sĂ©rie par pĂ´le pour assurer les performances (six chambres de coupure en sĂ©rie).

Dans le mĂŞme temps, en 1957, les Ateliers de Constructions Électriques de Delle ont rĂ©alisĂ© un disjoncteur 23 kV 250 MVA pour cellules de distribution, puis un disjoncteur Ă  cuve mise Ă  la terre (dead tank) pour une locomotive 25 kV d'une puissance apparente de 200 MVA[16].

Il faut attendre 1959 pour voir la production par Westinghouse du premier disjoncteur Ă  gaz SF6 Ă  grand pouvoir de coupure : 41,8 kA sous 138 kV (10 000 MVA) et 37,6 kA sous 230 kV (15 000 MVA)[17]. Ce disjoncteur tripolaire comprenait trois chambres de coupure en sĂ©rie par pĂ´le. Il fonctionnait avec une pression SF6 de 13,5 bar relatifs (au-dessus de la pression atmosphĂ©rique) pour le soufflage et de 3 bar relatifs pour assurer la tenue diĂ©lectrique. De bonnes performances Ă©lectriques Ă©taient obtenues grâce aux hautes pressions utilisĂ©es ; cependant, ces appareils prĂ©sentaient un risque de liquĂ©faction du SF6 pour des tempĂ©ratures infĂ©rieures Ă  5 °C. Pour certains climats, il fallait donc prĂ©voir un maintien en tempĂ©rature du rĂ©servoir haute pression.

Les très bonnes propriĂ©tĂ©s Ă©lectriques du SF6 ont entraĂ®nĂ© la mise Ă  l'Ă©chelle de la fabrication du SF6 au cours des annĂ©es 1960 et son utilisation pour le dĂ©veloppement de disjoncteurs Ă  fort pouvoir de coupure Ă  des tensions assignĂ©es de plus en plus Ă©levĂ©es. Depuis 2009 en Chine, des disjoncteurs Ă  haute tension Ă  gaz SF6 ont Ă©tĂ© conçus pour des tensions assignĂ©es allant jusqu'Ă  800 kV[18], puis 1 100 kV[19].

Le développement des réseaux haute tension et la nécessité de faire pénétrer ces réseaux à l'intérieur des agglomérations et des zones industrielles ont entraîné la conception de nouveaux types de postes à haute-tension à encombrement réduit du type « blindé » ou « sous enveloppe métallique ». Pour assurer l’isolement, l’air d'origine naturelle a été remplacé par du SF6, qui possède de très bonnes propriétés diélectriques, ce qui a permis de réduire fortement l’encombrement de l’appareillage à haute-tension.

L'application de cette technique en haute tension a permis de rĂ©aliser dès 1966 le premier poste sous enveloppe mĂ©tallique comme prototype expĂ©rimental Ă  220 kV, installĂ© au Plessis-Gassot (près de Paris), et le premier disjoncteur sous enveloppe mĂ©tallique en 1967 Ă  Levallois-Perret, puis en 1969 au poste de Vaise (Lyon, France)[15].

Dans les dernières annĂ©es, les fournisseurs d'Ă©lectricitĂ© multiplient les efforts pour diminuer l'utilisation du gaz SF6 comme milieu isolant pour les disjoncteurs Ă  haute tension. Étant donnĂ© le pouvoir de rĂ©chauffement planĂ©taire (PRP) du gaz SF6 qui est plus de 23 000 celui du dioxyde de carbone, de nouveaux postes sous enveloppe mĂ©tallique sont conçus pour fonctionner avec des gaz d'origine naturelle comme le diazote, principalement pour des raisons environnementales. Dans ce mouvement, le poste Ă©lectrique Ă  110 kV Virkkala en Finlande est actuellement en cours de modernisation pour utilisation de milieux isolants sans gaz Ă  effet de serre nocif.

Disjoncteur autopneumatique

Figure 1 : Principe des disjoncteurs autopneumatiques

Le principe du soufflage autopneumatique s’est développé au cours des années 1970 et au début des années 1980 pour répondre aux spécifications les plus exigeantes et développer des appareils de plus en plus performants[15].

La figure 1 rappelle de manière schématique le principe de fonctionnement de ces appareils.

Lorsque le disjoncteur est en position "fermé", le courant transite par des contacts dits "permanents" qui sont situés sur le diamètre extérieur de la partie active. Lors d'un déclenchement du disjoncteur, la partie mobile se déplace vers le bas, entraînant la séparation des contacts permanents. Le courant passe alors par une autre série de contacts, appelés "contacts d'arc". Quand la partie mobile a fait une course suffisante, les contacts d'arc se séparent, ce qui provoque l'amorçage d'un arc entre ces contacts. Les contacts d'arc sont réalisés avec des matériaux à base de tungstène de manière à pouvoir supporter sans dommage les effets de l'arc électrique.

Pendant la manœuvre d'ouverture, le disjoncteur produit lui-même la compression du gaz nécessaire au soufflage de l'arc. Le déplacement relatif du cylindre de soufflage par rapport au piston fixe crée une surpression dans le cylindre qui s’évacue à l’intérieur de la buse et refroidit l’arc, permettant ainsi son extinction.

La mise au point de nouvelles gĂ©nĂ©rations de disjoncteurs SF6 très performantes a entraĂ®nĂ© dans les annĂ©es 1970 la suprĂ©matie des appareils SF6 dans la gamme 7,2 kV Ă  245 kV.

Ă€ partir de 1983, la rĂ©alisation des disjoncteurs 245 kV mono-coupure (avec un Ă©lĂ©ment de coupure par pĂ´le), et des appareils correspondants 420 kV, 550 kV et 800 kV, a conduit Ă  la domination de la technique SF6 dans l'ensemble de la gamme haute tension[15].

Disjoncteur 115 kV au Canada

Sur le plan technique, plusieurs caractéristiques des disjoncteurs SF6 peuvent expliquer leur succès :

  • la simplicitĂ© de la chambre de coupure qui ne nĂ©cessite pas de chambre auxiliaire pour la coupure (contrairement aux appareils plus anciens Ă  air comprimĂ©) ;
  • l'autonomie des appareils apportĂ©e par la technique autopneumatique (sans compresseur de gaz) ;
  • la possibilitĂ© d'obtenir les performances les plus Ă©levĂ©es, jusqu’à 63 kA, avec un nombre rĂ©duit de chambres de coupure : une seule chambre est nĂ©cessaire en 245 kV, une ou deux en 420 kV et 550 kV, gĂ©nĂ©ralement quatre en 800 kV ;
  • une durĂ©e d’élimination de dĂ©faut courte, de 2 Ă  2,5 cycles en très haute tension ;
  • une grande endurance Ă©lectrique qui permet de garantir une durĂ©e de vie d'au moins 25 ans ;
  • une rĂ©duction de l'encombrement possible avec les postes sous enveloppe mĂ©tallique ;
  • la possibilitĂ© d'Ă©quiper les chambres de rĂ©sistances de fermeture ou d’effectuer des manĹ“uvres synchronisĂ©es afin de limiter les surtensions pendant les manĹ“uvres en très haute tension ;
  • la sĂ©curitĂ© de fonctionnement ;
  • un faible niveau de bruit.

Au début des années 1980, une nouvelle génération de disjoncteurs SF6 à très haute tension a été développée, avec une géométrie simplifiée qui intègre un inséreur de résistance de fermeture dans la chambre de coupure. Dans ce cas, la résistance est située à l’extrémité de la chambre, à l’intérieur d’une enveloppe métallique mais isolée de celle-ci par le SF6 contenu dans le pôle (figure 2). Cette résistance sert à limiter les surtensions sur le réseau pendant l'enclenchement ou le ré-enclenchement de longues lignes à très haute tension.

La réduction du nombre de chambres de coupure a entraîné une grande simplification des appareils par la diminution du nombre de pièces en mouvement, du nombre de joints d'étanchéité, etc. Il en a donc résulté une amélioration de la fiabilité des appareils qui est venue s'ajouter à l'augmentation du pouvoir de coupure.

Disjoncteur Ă  autosoufflage

Figure 3 : Principe des disjoncteurs Ă  autosoufflage

La période 1984–2000 a été marquée par le fort développement des moyens de calcul et de modélisation des disjoncteurs SF6[15]. Grâce à l'utilisation de ces moyens, de nouveaux appareils à faible énergie de manœuvre ont été développés.

Les disjoncteurs à autosoufflage sont caractérisés par l'utilisation importante de l'énergie d'arc pour la coupure : le soufflage par autosoufflage s'est substitué en grande partie au soufflage autopneumatique pour la coupure des forts courants. La coupure des courants faibles est toujours obtenue par un soufflage autopneumatique, l'énergie de l'arc n'étant pas suffisante pour contribuer au soufflage.

La figure 3 montre que pendant la phase de fort courant, l'arc amorcé entre les contacts (7) et (8) transmet une grande partie de son énergie au volume d'expansion thermique Vt. Au passage par zéro du courant, la surpression ainsi créée se vidange à travers la buse isolante (9) et à l'intérieur du contact mobile (7). Ce double soufflage permet de refroidir et d'interrompre efficacement l'arc. Pour la coupure des courants faibles un soufflage autopneumatique d'appoint est effectué dans le volume Vp, le gaz comprimé venant souffler l'arc par l'intermédiaire du volume Vt.

Figure 4 : Principe des disjoncteurs Ă  autosoufflage et double volume

Une évolution des chambres de coupure à autosoufflage a consisté à introduire un clapet (V) entre le volume d'expansion et le volume de compression. Ce principe est illustré par la figure 4.

En coupure de faibles courants le clapet s'ouvre sous l'effet de la surpression générée dans le volume de compression. Le soufflage de l'arc s'effectue comme dans un disjoncteur autopneumatique grâce à la compression de gaz.

Dans le cas d'une coupure de forts courants, l'énergie d'arc produit une forte surpression dans le volume d'expansion, ce qui entraîne la fermeture du clapet (V) et isole le volume d'expansion par rapport au volume de compression. La surpression nécessaire à la coupure est obtenue par une utilisation optimale de l'effet thermique et de « l'effet bouchon » qui se produit lorsque la section de l'arc réduit de manière significative l'échappement du gaz dans la buse.

Figure 5 : Disjoncteur Ă  autosoufflage Ă  double mouvement des contacts

Pour éviter une consommation excessive d’énergie par compression de gaz, une soupape limite la surpression dans le volume de compression à la valeur nécessaire pour la coupure des faibles courants de court-circuit.

Une évolution plus récente des chambres de coupure à autosoufflage a consisté à réduire l'énergie cinétique qui doit être fournie par l'organe de manœuvre pendant l'ouverture du disjoncteur. Ceci est obtenu en déplaçant les deux contacts d'arc en sens opposé, de sorte que la vitesse de chaque partie mobile est la moitié de celle d'un appareil classique. Dans cette configuration, la masse en mouvement est augmentée mais l'énergie de manœuvre est notablement réduite étant donné que l'énergie cinétique varie comme le carré de la vitesse. Ce principe est illustré par la figure 5.

Le principe de coupure Ă  autosoufflage a permis d’utiliser des commandes Ă  ressorts de faible Ă©nergie pour la manĹ“uvre des disjoncteurs haute tension[20]. Les appareils Ă  autosoufflage ont remplacĂ© les appareils autopneumatiques pendant les annĂ©es 1990-2003, tout d'abord en 72,5 kV, puis de 145 kV Ă  800 kV.

Disjoncteurs de générateurs

Disjoncteur de gĂ©nĂ©rateur 17,5 kV 63 kA avec son organe de manĹ“uvre au premier plan

Ces disjoncteurs sont connectés entre un générateur de centrale électrique et le transformateur qui élève la tension avant transport de l'énergie électrique par le réseau.

Les disjoncteurs de gĂ©nĂ©rateurs sont gĂ©nĂ©ralement utilisĂ©s Ă  la sortie des gĂ©nĂ©rateurs de forte puissance (jusqu’à 1 800 MVA, dans le cas de centrales nuclĂ©aires) pour les protĂ©ger de manière sĂ»re, rapide et Ă©conomique.

Ces disjoncteurs ont une conception particulière car ils doivent pouvoir transiter des courants très élevés en service continu (6 300 A à 40 000 A), et être aussi dotés d’un très fort pouvoir de coupure. En outre, ils doivent être capables de couper des forts courants avec une vitesse de rétablissement de la TTR qui est très supérieure à celle des appareils de distribution utilisés dans la même gamme de tension[21].

Les disjoncteurs à coupure dans le SF6 sont utilisés lorsque le pouvoir de coupure ne dépasse pas 160 kA ou 210 kA, au-delà, les disjoncteurs à air comprimé fournissent les pouvoirs de coupure les plus élevés qui peuvent être requis, jusqu’à 275 kA.

Évolution des disjoncteurs à haute tension

L'évolution actuelle des disjoncteurs à haute tension est marquée par:

  • la banalisation de forts pouvoirs de coupure (50 kA et 63 kA),
  • la rĂ©duction des Ă©nergies de manĹ“uvre,
  • la rĂ©duction du nombre de chambres de coupure par pĂ´le,
  • l'introduction de l'Ă©lectronique entre autres pour des fonctions d'autodiagnostic.
  • En ce qui concerne les disjoncteurs au SF6 et compte tenu de l'impact important du SF6 sur l'environnement
    • La rĂ©duction des fuites et des risques de fuites sur les disjoncteurs pendant la conception du système.
    • La mise en place de procĂ©dures de vĂ©rification, de dĂ©tection, de localisation et de rĂ©paration des fuites pendant la periode d'exploitation du produit.
    • Le recyclage des gaz en fin de vie du disjoncteur.

Grâce à la mise en place de ces principes, l'impact[22], déjà faible à l'origine, est maintenant maitrisé.

Performances d’un disjoncteur à haute tension

Les performances des disjoncteurs à haute tension sont définies dans les normes internationales CEI et ANSI/IEEE. Dans ce domaine, les normes CEI sont reconnues dans la plupart des pays au monde, alors que les normes ANSI/IEEE sont utilisées essentiellement en Amérique du Nord (voir liens externes pour plus de renseignements).

La norme CEI 62271-100 est applicable aux disjoncteurs Ă  haute tension[23].

Comme tout appareil électrique à haute tension, un disjoncteur doit avoir un niveau d'isolement assigné et un courant permanent assigné en service continu qui assure que la température de ses pièces ne dépassera pas une valeur normalisée.

De plus un disjoncteur doit avoir un pouvoir de coupure assigné dans les cas suivants:

  • coupure de courants de lignes Ă  vide, câbles Ă  vide ou de batteries de condensateurs;
  • coupure de dĂ©faut aux bornes;
  • coupure de dĂ©faut en ligne;
  • coupure en discordance de phases;
  • coupure de courants de charges inductives pour les disjoncteurs qui manĹ“uvrent des moteurs ou des rĂ©actances shunt.

La performance principale qui caractérise un disjoncteur est son pouvoir de coupure en court-circuit, c’est-à-dire le courant maximal qu’il est capable d’interrompre sous sa tension assignée (tension maximale du réseau où il est utilisé). Les valeurs du pouvoir de coupure en court-circuit, exprimé en valeur efficace, sont comprises typiquement entre 25 kA et 63 kA (exception faite des disjoncteurs de générateurs). Le courant de court-circuit qui peut être interrompu par un disjoncteur dépend fortement de la tension qui se rétablit aux bornes du disjoncteur après interruption du courant. Cette tension se rétablit tout d'abord avec des oscillations à haute fréquence, on l'appelle alors la tension transitoire de rétablissement (TTR), puis elle varie avec la fréquence industrielle du réseau.

Un disjoncteur doit aussi ĂŞtre capable d'Ă©tablir un courant de court-circuit dont la valeur crĂŞte est normalement Ă©gale au produit de son pouvoir de coupure en court-circuit par 2,5 (rĂ©seaux Ă  50 Hz) ou 2,6 (rĂ©seaux Ă  60 Hz).

En outre, les disjoncteurs de lignes à haute tension doivent être capables d'enclencher ou ré-enclencher des lignes sans provoquer de surtensions sur le Réseau électrique. Deux techniques sont utilisées pour limiter les surtensions: l'insertion de résistance à la fermeture ou une manœuvre synchronisée par rapport à la tension, avec dans ce dernier cas un objectif de fermeture du circuit lorsque la tension aux bornes du disjoncteur est minimale.

Ces performances sont vérifiées par des essais effectués en vraie grandeur, suivant les normes CEI 62271 ou IEEE, dans des laboratoires spécialisés. Lorsqu'elles sont supérieures à la puissance des alternateurs du laboratoire, il est nécessaire d'utiliser une méthode, dite synthétique, avec des sources séparées de courant et de tension[24].

Producteurs et utilisateurs

Producteurs/constructeurs

Le nombre de producteurs majeurs de disjoncteurs à haute tension est relativement faible car de nombreux regroupements / acquisitions ont été faits dans les années 1990/2000. Pour la transmission d'énergie, les principaux producteurs sont : ABB, Alstom Grid, Siemens, Toshiba, Mitsubishi et HVB AE Power Systems (ex Hitachi). Dans le domaine de la distribution d'énergie il faut ajouter essentiellement Schneider Electric et Eaton/Cutler-Hammer.

Utilisateurs

Dans la haute tension B, les utilisateurs sont essentiellement des entreprises productrices d'électricité comme EDF ou de transport de l'énergie électrique comme RTE. Des regroupements se sont produits entre utilisateurs d'appareils à haute tension à la suite de la libéralisation du marché de l'énergie électrique, plusieurs marchés nationaux sont restés traditionnellement dominés par quelques sociétés d'État. Parmi les principaux utilisateurs, on peut aussi citer : RWE et E.ON en Allemagne, Tokyo Electric Power au Japon, State Grid Corporation of China[25] en Chine, Power Grid Corporation of India en Inde, Enel et Terna en Italie, Edelca au Venezuela, Furnas au Brésil, ESCOM en Afrique du Sud, Hydro-Québec et BC Hydro[26] au Canada et AEP[27], Tennessee Valley Authority, Bonneville Power Administration (BPA) aux États-Unis[28].

La situation est sensiblement diffĂ©rente dans la haute tension A avec aussi de grandes sociĂ©tĂ©s de distributions d'Ă©lectricitĂ©, e.g. EDF, mais aussi de nombreux industriels qui sont alimentĂ©s sous une tension de 10 Ă  22 kV, ou plus rarement en haute tension B. Les entreprises ferroviaires sont aussi d'importants utilisateurs d'appareillage Ă©lectrique Ă  haute tension.

C'est en Chine que la consommation d'Ă©lectricitĂ© et par suite les besoins en puissance installĂ©e et en disjoncteurs Ă  haute tension augmentent le plus rapidement ; la puissance installĂ©e est de 600 000 MW (mĂ©gawatts) en 2006 et devrait atteindre 1 300 000 MW en 2020[29]. Ă€ titre de comparaison une tranche de centrale nuclĂ©aire fournit environ 1 200 MW. Pour faire face Ă  l'augmentation de leur consommation et transporter l'Ă©nergie Ă©lectrique sur de grandes distances, la Chine a mis en service dès 2009 un rĂ©seau Ă  ultra haute tension 1 100 kV[30].

L'Inde sera aussi Ă  l'avenir un marchĂ© très important en volume pour les disjoncteurs Ă  haute tension, ce pays prĂ©voit un fort dĂ©veloppement de son rĂ©seau 800 kV et vers 2013 la mise en service d'un rĂ©seau 1 200 kV[31].

Notes et références

  1. DĂ©finition CEI: 441-14-20, sur electropedia.org
  2. (en) Insulation characteristics of vacuum interrupter for a new 72/84 kV -GIS, sur ieeexplore.ieee.org
  3. (en) [PDF] Electric arcs and arc interruption, CE Sölver, Lecture at Chalmers University of Technology
  4. (en) Brevet U.S. 1039264 du 24 septembre 1912 (déposé en 1905)
  5. Brevet GB 189513091 Improvement of Electric Switches, sur espacenet.com
  6. (en) CIGRÉ Technical Brochure N°304: Guide for application of IEC 62271-100 and IEC 62271-1, Page 7 : Circuit-breaker history, 2006
  7. (en) Oil Circuit Breakers, sur xnet.rrc.mb.ca
  8. Eugène Maury, Évolution des disjoncteurs des réseaux de transport, 1971, Revue Générale de l'Électricité, septembre 1971, page 106
  9. (en) Leslie Falkingham, A brief history showing trends in vacuum interrupter technology, L.T.Discharges and Electrical Insulation in Vacuum, 1998. Proceedings ISDEIV. XVIIIth International Symposium, Volume 2, Issue, 17-21 Aug 1998, Page(s) : 407 - 414
  10. Exemple de disjoncteur Ă  vide jusqu'Ă  63kA : VAH High Rating, sur omkt.areva-td.com
  11. (en) Research and development on 145 kV/40 kA one break vacuum circuit breaker, sur ieeexplore.ieee.org
  12. (en) Edmond Thuries, Development of air-blast circuit-breakers. CIGRE Session 1972, Rapport 13-09, 1972.
  13. (en) PKG - Generator Circuit Breaker, sur omkt.areva-td.com
  14. (en) Brevet U.S. 2221671 12 novembre 1940 (déposé en 1938)
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Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Disjoncteurs SF6 - Ă©volution de 1959 Ă  1994 ; Denis Dufournet, Revue GĂ©nĂ©rale de l'ÉlectricitĂ© - mai 1994, no 5
  • Un nouvel agent d'extinction pour l'appareillage d'interruption ; Browne Jr (T.E.), Leeds (W.M.) ; CIGRE Session 1960, Rapport no 111
  • Contribution au dĂ©veloppement de l'appareillage Ă  hexafluorure de soufre ; Jacques Vigreux ; Bulletin de la sociĂ©tĂ© Française des Electriciens, octobre 1962
  • Interrupteurs Ă  haute tension Ă  hexafluorure de soufre ; Leeds (W.M.), Friedrich (R.E.), Wagner (C.L.) ; CIGRE Session 1966, rapport no 117
  • Évolution des disjoncteurs des rĂ©seaux de transport, Eugène Maury ; Revue GĂ©nĂ©rale de l'ÉlectricitĂ©, septembre 1971
  • Conception et Ă©volution des disjoncteurs haute et moyenne tension ; Edmond Thuries, Denis Dufournet ; Revue GĂ©nĂ©rale de l'ÉlectricitĂ©, no 11, dĂ©cembre 1992

Liens externes

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