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DĂ©pendance au smartphone

La dépendance ou l'addiction au smartphone est un phénomène qui apparaît depuis la large diffusion des smartphones. Il relève, du moins en partie, de la cyberaddiction (dépendance à Internet) qui peut se développer, notamment dans le cadre du nomadisme numérique, ou révèle souvent d'autres addictions[1]. Il peut ajouter à la dépendance au téléphone et à l'information disponible sur l'Internet une autre dépendance, à certains des réseaux sociaux qui se sont développés grâce à l'internet.

Des utilisateurs de smartphone.

Ce trouble est classé dans les pathologies communicationnelles ; troubles psychologiques entraînant chez le « mobinaute »[2], un besoin excessif, incontrôlable voire obsessionnel d'utiliser un téléphone au point d'y consacrer tant de temps et d'énergie, que l'objet et son utilisation finissent par interférer négativement avec la vie quotidienne, professionnelle ou affective du sujet[3] qui peut développer une anxiété, parfois phobique ou une dépression[4] qui vont indirectement aussi affecter son entourage. Cette dépendance se résout parfois d'elle-même, et dans ce cas, à la différence des dépendances chimiques elle n’entraînerait pas ou peu de séquelles physiques et psychiques pour la santé, affirmation que seules des études épidémiologiques de long terme pourront confirmer.

Cette nouvelle addiction semble tendre, pour partie au moins, Ă  se substituer Ă  l'addiction Ă  la tĂ©lĂ©vision. Elle touche davantage les jeunes[5] ; selon une Ă©tude parue en 2013, 7 % des 50 millions de Sud-CorĂ©ens (dans l'un des pays les plus « câblĂ©s Â» au monde), prĂ©sentent « un risque Ă©levĂ© » d'addiction Ă  l'internet, mais ce taux triple en grimpant Ă  près de 20 % chez les adolescents (gĂ©nĂ©ration nĂ©e et ayant grandi avec internet), les Ă©tudiants de haut niveau ne sont pas les moins touchĂ©s[4] - [6]. 240 000 adolescents seraient susceptibles d'ĂŞtre touchĂ©s par ce phĂ©nomène en CorĂ©e rien qu'en 2013[7].

Histoire

Pour la plupart des gens sondés le téléphone puis le smartphone sont d'abord un outil qui facilite la vie[8]. Il a pu exister des cas de dépendance au téléphone puis au téléphone portable, mais c’est surtout à partir de 2007 environ[9] avec la diffusion du smartphone que cette addiction s’est durcie et a pu évoluer vers l'addiction numérique (avec un mésusage de l'Internet que certains experts ont pressenti et décrit dès la diffusion de l'internet grand-public dans le monde au milieu des années 1990[10]).

Avec le passage du simple téléphone au mobile puis au smartphone[11], la « victime » est passée d'un besoin de presque constamment parler, à celui d’écrire ou recevoir des textos, à celui d'être en ligne ou dans l'Internet presque en permanence. Le téléphone sert en effet de moins en moins à téléphoner et de plus en plus à se connecter à Internet, photographier, filmer, donner l’heure, servir de GPS, etc. : les mails et les chats ou les visio-chats tendent par exemple à être remplacés par d'autres activités.

Ce phénomène de dépendance entre alors dans la catégorie cyberdépendance (ou cyberaddiction), qui induit des symptômes et troubles décrits comme usage problématique d'Internet (UPI), usages problématiques des TIC, ou trouble de dépendance à Internet (TDI).

La dépendance peut être entretenue ou exacerbée par des systèmes d'alerte de messagerie, mais aussi par la publicité ciblée permise par l'exploitation de données collectées et revendues par certains moteurs de recherche ou sites de réseautage social. Certaines applications récentes visent à faire du smartphone un véritable coach personnel.

Les consultations de psychologues et psychiatres continuent à accueillir des jeunes addicts aux jeux vidéo, mais aussi de plus en plus d'accros aux réseaux sociaux et aux vidéos en ligne (YouTube).

Ce phénomène d' « asservissement volontaire » ou « subi » à cet objet connecté particulier a d'abord été détecté en Asie dans les pays où les smartphones sont les plus utilisés, mais est également signalé aux États-Unis et en Europe (dont en France[12]). Les États-Unis envisagent de l'introduire dans leurs guides de diagnostic et statistiques des troubles mentaux (il pourrait être dénommé “internet use disorder”).

Les études scientifiques peu à peu produites sur le phénomène montrent aussi des tendances très différentes selon les générations et selon les pays et les cultures. Et les auteurs attirent souvent l'attention sur le caractère émergent du phénomène, qui doit faire considérer leurs résultats avec une certaine prudence, alors qu'un internet 3.0 semble se préparer. Les tests psychologiques devraient en outre être complétés de recherches de preuves neurologiques ou biologiques selon Mok& al[13].

Le cas de l'Asie

Le syndrome dénommé Internet Addiction Disorder semble avoir émergé dans plusieurs pays asiatiques ou avoir été plus rapidement reconnu dans ces pays (Corée et Japon notamment).

En 2006, dans plusieurs pays des comportements compulsifs jugés pathologiques liés à l’usage de l’internet sont détectés chez les collégiens et lycéens[14], notamment au Japon.

Les consultations psychiatriques pour addiction Ă  l’internet ont augmentĂ© au Japon des annĂ©es 1990 Ă  2000[15] alors que le pays devient celui oĂą le haut dĂ©bit est le plus Ă©levĂ© et le moins cher. Selon le ministère japonais de la SantĂ©, du Travail et des Affaires sociales, en 2007 environ 60 900 personnes passaient une grande partie de leur nuit sur l'Internet ou dans un manga-cafĂ© (5400 personnes au Japon dĂ©clarent rĂ©gulièrement passer toute une nuit sur l’Internet ou dans des manga cafĂ©s). En 2007 les collĂ©giens japonais Ă©taient dĂ©jĂ  9 % Ă  souffrir d’un syndrome de cyberdĂ©pendance (l’un des taux les plus Ă©levĂ©s au monde)[16], mais des indices laissent penser que la dĂ©pendance au smartphone est bien pire (il dĂ©crit le cas de deux Ă©tudiants sombrant dans la dĂ©pression alors qu’ils ne pouvaient plus s’empĂŞcher d’envoyer plus de 100 emails par jour)[16]... En outre, selon lui la dĂ©pendance aux jeux en ligne devient aussi un « grave problème au Japon » " le seul centre d’aide aux Ă©lèves absentĂ©istes basĂ© Ă  Nagoya "a reçu 327 demandes d'aide concernant la dĂ©pendance aux jeux en ligne en 6 mois (janvier Ă  juillet 2006)[16].

Constats et enjeux

Psychiatres et psychologues constatent une frĂ©quence croissante de troubles : l'usage intensif du tĂ©lĂ©phone peut amener des troubles musculo-squelettiques et notamment articulaires de certains doigts fortement mobilisĂ©s par le clavier ou l'Ă©cran tactile. Par ailleurs, la fascination du surf sur internet, notamment chez les adolescents et les jeunes adultes, pourrait parfois conduire Ă  une difficultĂ© Ă  distinguer le rĂ©el du virtuel[17] (que Fourati en 2013[12] dĂ©crit comme « rĂ©elisation Â» du virtuel et « virtualisation Â» du rĂ©el).

Avec la diffusion très rapide des smartphones dans le monde au début du XXIe siècle cette dépendance est jugée préoccupante par un nombre d'auteurs et d'études scientifiques. Ainsi, dans les pays ou les régions riches émergents d'Asie comme Singapour, Hongkong,Corée du Sud ou Taïwan, on a vu qu'en 2014 « Singapour et Hong Kong détiennent le record régional du plus grand nombre d'utilisateurs de smartphones par habitant », selon le cabinet d'étude Nielsen. 87 % des 5,4 millions d'habitants de Singapour ont un téléphone multifonction (contre 65 % aux États-Unis) via lequel ils passent en moyenne 38 minutes par session sur Facebook, « soit presque deux fois plus que les Américains », selon la société Experian[5].

Certains chercheurs estiment que le monde partiellement virtuel et facilement accessible par le smartphone pourrait être un lieu et un temps d'échappatoire à une réalité vécue comme difficile. Certains y voient aussi un exutoire à des pulsions impossibles ou plus difficiles à assouvir dans le monde réel, ce qui devient problématique quand l'addictivité traduit une immaturité socio-affective ou entretient l’impossibilité de se construire une identité psychosociale plus ancrée dans l'environnement social réel de la personne. La dépendance peut être amplifiée par la coexistence d’un sentiment de faible valeur personnelle, de non-reconnaissance[18].

Différences homme-femme

Comme pour d’autres addictions[19], il existe des différences remarquables de comportement selon le sexe. Ainsi, les jeunes filles semblent globalement bien mieux résister que les jeunes garçons aux formes les plus aiguës de cyberaddictions sur l'Internet, tout en étant inversement nettement plus attachées qu'eux à leur smartphone[13]. Une équipe de chercheurs en déduit que les études portant sur l'addiction au smartphone et au Web devraient porter sur des groupes masculins et féminins séparés[13].

Les garçons sont par exemple nettement plus nombreux à passer une partie de leur nuit sur l'Internet et à participer à des thérapies ou programmes de « cyberdésintoxiation » (par exemple dans le programme de l’hôpital Kanagawa au Japon, plus de 70 % des patients sont des jeunes, souvent scolaires ou étudiants et la plupart sont des garçons). Un documentaire relatif aux centres chinois de désintoxification à l'internet (centres payants et géré par des militaires) ne montre que des garçons victime de ce syndrome en Chine (qui semble avoir été le 1er pays à classer la dépendance à l'internet comme une maladie et à mettre en place un programme de mesures fortes).
82,6 % des personnes déclarant au Japon régulièrement passer la nuit sur internet sont des hommes[16]. Il a été constaté que les filles sont plus nombreuses dans les communautés passionnées de Fanfiction (entre 75 et 80 % de femmes[20] - [21]). Le public originel de la fanfiction était d'abord majoritairement masculin et porté sur la science-fiction, mais un public féminin s'est ensuite développé dans ces communautés d'écriture[22], sans preuves à ce jour cependant de forte cyberaddictivité dans cette pratique.

Selon Mok et al. (2014), malgré ces différences, il existe des tendances communes aux deux sexes en termes de traits et facteurs psychosociaux : chez les garçons, comme chez les filles, les niveaux d'anxiété et les traits de personnalité névrotiques sont corrélés à la gravité de la dépendance[13]. Cependant, ajoutent les auteurs, les résultats au test de l'échelle de mensonge sont inversement proportionnels au niveau de gravité de la dépendance[23], laissant supposer un biais de non-sincérité dans les réponses des personnes faiblement dépendantes, mais confirmant surtout un moindre souci d'intégration sociale chez les personnes addictives à l'Internet (effet qui avait déjà été signalé en 2007 par une étude ayant porté sur des étudiants chinois[24].

Éléments de contextes et d'explications

Au dĂ©but du XXe siècle, le tĂ©lĂ©phone a supprimĂ© les distances et attĂ©nuĂ© les barrières gĂ©ographiques. RĂ©cemment, en devenant « mobile Â», ce vecteur a changĂ© de nature et d'usage.

Le smartphone supprime en effet également certaines barrières temporelles, notamment grâce à sa capacité de mémorisation d'agendas et d'agenda électroniques, éventuellement partagé et interopérable. Et grâce aux traducteurs automatiques, il peut déjà atténuer certaines barrières linguistiques. Il a ainsi pu susciter des comportements communicationnels totalement inédits[25] - [26], y compris dans les pays dits pauvres où le smartphone joue un rôle croissant dans les échanges interpersonnels, mais aussi économiques[27].

C'est un lien qui rassure et fait se sentir plus puissant et efficace.

Le smartphone est en outre de plus en plus omniprésent ; il devient difficile de s’en passer (même si l'on ne s'en servait que pour téléphoner ; en raison de la disparition progressive du service public qu’offraient les cabines téléphoniques). Par rapport à un ordinateur, son coût d'achat est faible (malgré un coût élevé de fabrication et une forte empreinte écologique). Le smartphone semble moins intrusif que les anciens téléphones (grâce au remplacement de la sonnerie par le vibreur), mais il attire ou détourne néanmoins ainsi l'attention de son propriétaire qui souvent n'attend plus le signe d'une communication pour le consulter. Selon Michel Lejoyeux (2007), Sa disponibilité permanente « induit un manque dès que la communication s’interrompt ». Tisseron le compare même à « un cordon ombilical »[28] et Biagini, C. (2012) à un « doudou pour adulte ».

Le smartphone est aussi porté par un marketing omniprésent, voire agressif, soutenu par des slogans laissant croire que sans lui on serait déconnecté du monde et des autres (Smartphone ; «Life Companion»[29]) ou impuissant («Pas de Smartphone, pas de gloire!»[30]). S'est ainsi constituée selon L Allard (2009) une mythologie du portable[31], sans doute entretenue par la publicité commerciale.

Une partie de l'addiction au smartphone peut naître d'un conditionnement opérant[32] créé (volontairement ou non) par les concepteurs de l'outil et les concepteurs d'application, ainsi que par la communauté d'utilisateurs, ou provenant de la richesse de l'internet. Ce conditionnement grandit chaque fois que l'utilisation est agréable et enrichissante[32], pouvant préparer le terrain de l'addiction et de la dépendance notamment quand la communication par le smartphone se substitue trop aux relations de face à face ou diminue le bien-être. C'est alors que des facteurs de personnalité jouent un rôle majeur, notamment la capacité d'autorégulation des comportements, et la capacité de résistance au stress social (qui est liée à notre capacité à communiquer et donc à l'intelligence émotionnelle (IE)[32].

Terminologie

Le mot « addiction » est souvent utilisé. Quelques auteurs comme le Dr Fionnbar Lenihan[33] préfèrent le réserver à des dépendances qui induisent non seulement des souffrances psychologiques mais aussi des dégâts dommages somatiques importants (ex : cirrhose du foie chez l’alcoolique). D’autres précisent le mot dans l’expression « addictions sans toxiques » et d’autres encore parleront plutôt d’« usage problématique d’internet »[34].

Le mot « nomophobie » (contraction a anglophone de "no mobile-phone phobia") décrit l’équivalent du « manque » ressenti par le drogué : il désigne la phobie de se retrouver sans téléphone mobile ou smartphone[35]. Elle ne doit pas être confondue avec la simple crainte du vol de portable qui génère l'angoisse (plus explicable) de perdre un grand nombre de données personnelles qui en outre seraient alors "visibles" par des inconnus, ou bien même par des personnes mal intentionnées

Caractérisation de la dépendance (et de seuils ?)

Comme l'addiction à l'Internet est un phénomène relativement récent pour le monde médical et les sociologues (phénomène scientifiquement décrit pour la première fois en 1996 par la psychologue Kimberly Young, lors d'un colloque de l’American Psychological Association (APA) à Toronto), sa nature et les risques qu'elle induit sont encore en partie discutés. Certains, comme le Dr Ivan K. Goldberg, estiment qu'il s'agit d'un symptôme plus que d'un trouble psychique, comme dans le cas - selon lui - de la dépendance aux jeux d'argent ou de hasard, et depuis que le web a évolué vers le Web 2.0, les personnes y sont plus actives, ce qui le rendrait selon certains auteurs peut-être moins dangereux pour le cerveau et la psychée que les usages addictifs de la télévision[5].

Cette forme d'addiction relève de ce qu'Otto Fenichel décrivait déjà en 1949 comme des « toxicomanies sans drogues » et fait intervenir une technologie innovante a priori libératrice et émancipatrice, potentiellement utile à l’épanouissement des individus, mais qui montre pour de nombreux usagers un réel pouvoir d'addiction.

L’addiction ou la compulsion ne se jugent pas au nombre d’heures d’utilisation du médium, mais à son influence sur le comportement et à l’existence d’une pulsion irrésistible d’utilisation. Pour Romain Cally « sur le web, la compulsion apparaît lorsque l'internaute ne juge plus son comportement normal, mais ne peut pour autant éviter de se connecter. Si l'individu ne faisait pas cette action, son anxiété en deviendrait difficilement soutenable, voire insupportable »[36].

Selon le psychologue américain, Ivan K. Goldberg, « la dépendance à Internet peut déterminer la négation ou l’évitement d’autres problèmes de la vie courante »[37].

Ce type de dépendance correspond à un jeu pathologique du manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-IV)[38] du TDI.

Une échelle d'addiction au smartphone a été développée et testée par Kwon M & al. et proposée en 2013 dans la revue PLoS One[39].

Durée/réversibilité de la dépendance

Comme le note Michael Stora à propos des adolescents dans un ouvrage intitulé Les écrans ça rend accro…[40] « les comportements excessifs sont le propre de leur âge et peuvent cesser spontanément du jour au lendemain ».

Addictions secondaires

Ce sont des addictions qui s'exprimeraient probablement sans le médium qu'est le téléphone mobile, mais qui peuvent être révélées ou amplifiées par lui.

Le smartphone peut ainsi révéler ou faciliter

  • une oniomanie, c'est-Ă -dire une tendance Ă  acheter compulsivement (dans ce cas en ligne, par exemple sur les sites d'enchère ;
    Probablement sous l’effet de la publicité et des stratégies commerciales des fabricants, le propriétaire de ce terminal informatique portable tend à en changer de plus en plus souvent. Parfois, l'utilisateur peut devenir « addict » aux nouveaux moyens de le personnaliser ou compulsivement rechercher les nouvelles applications à la mode ou lui convenant[41] dont certaines peuvent rendre le smartphone encore plus « envahissant » dans la vie de son utilisateur ;
  • une addiction pour les jeux de hasard ; Au Canada en 2012 « un Ă©lève sur 10 dit avoir dĂ©jĂ  jouĂ© en ligne pour de l’argent »[42]).
  • le besoin compulsif de se signaler ou de se faire reconnaitre, par exemple en laissant des messages sur de nombreux forums, Ă©ventuellement agressivement (trollisme et cyberdĂ©sinformation)
  • une addiction pour des activitĂ©s sexuelles en ligne (type sextos ; qui selon le PEW Internet & 'American Life Project, sont envoyĂ©s (en 2012) par 4 % des 12-17 ans, alors que 15 % dĂ©clarent en avoir dĂ©jĂ  reçu ; ces pourcentages Ă©tant en augmentation respectivement de 8 % et 30 % pour les jeunes âgĂ©s de 17 ans[43]. Une Ă©tude europĂ©enne faite par NetValue (sociĂ©tĂ© de mesure d'audience sur Internet) met Ă  mal certaines idĂ©es reçues sur la frĂ©quence et les auteurs de ces pratiques, qui semblent beaucoup varier selon les pays et les cultures[44]) ;
  • une cyberdĂ©pendance Ă  l’information, Ă©ventuellement associĂ©e Ă  un syndrome de collectionnisme virtuel : Le collectionneur compulsif peut sur le net devenir « cyberamasseur Â»[45], passant alors un temps considĂ©rable Ă  rechercher et amasser des liens, des images, des montages ou des vidĂ©os dans le cyberespace qui semble infini et sans cesse grandissant).

Quand l'addiction est uniquement professionnelle, elle relève alors plutôt du « workoolisme » (l'addiction au travail).

Signes et manifestations

Ils doivent ĂŞtre interprĂ©tĂ©s avec prudence, d'autant que certains de ces signes Ă©voluent et continueront d'Ă©voluer (dans l'espace et dans le temps) au rythme de l'apparition de nouveaux usages et services permis par le tĂ©lĂ©phone dit « intelligent Â».

L'usage immodéré ou compulsif du téléphone portable puis du smartphone[46] peut conduire à anormalement détourner l'attention de la personne, notamment quand elle se consacre à des activités en ligne telles que :

  • lire, envoyer ou rediriger des textos, et plus rĂ©cemment des courriels puis des tweets[47], ou des interactions de type rĂ©seautage social en ligne[48] ;
  • penser très souvent, sans raisons apparentes Ă  son smartphone ou le consulter plusieurs fois par heure (En France, selon un sondage IFOP de 2013, les propriĂ©taires (de plus de 18 ans) d’un smartphone le consultaient 3 fois plus souvent plusieurs fois par heure que ceux qui possèdent un simple tĂ©lĂ©phone mobile. Et seuls 3 % des utilisateurs de smartphone le consultaient moins d’une fois par jour, alors que les utilisateurs d’un mobile simple Ă©taient 17 % dans ce cas)[49]. Ce mĂŞme sondage rĂ©vèle que plus de 50 % des utilisateurs de smartphone s’estiment assez dĂ©pendants (45 %) Ă  très dĂ©pendants (13 %) de ce smartphone (contre respectivement 22 et 4 % chez les usagers d’un simple tĂ©lĂ©phone portable) ;
  • consulter compulsivement ses boites de messagerie web ou la messagerie instantanĂ©e ;
  • consulter et entretenir très frĂ©quemment sa page Facebook ou d'autres pages de prĂ©sentation et Ă©changes sur des rĂ©seaux sociaux ;
  • la lecture de textes, de contenus (en zappant frĂ©quemment) ou de vidĂ©os en ligne (qui s'enchainent spontanĂ©ment par les mĂ©canismes du Web), contenus que la personne reconnait elle-mĂŞme comme futiles voire inintĂ©ressants ;
  • la consultation compulsive de contenus pornographiques ;
  • les jeux vidĂ©o personnels ou en ligne[50], (quand ils interfèrent nĂ©gativement avec la vie quotidienne ou la santĂ©). Un documentaire montre que de jeunes Chinois allaient jusqu'Ă  porter des couches pour ne pas cesser leur jeu en ligne[51].

SymptĂ´mes

Cette forme de dépendance évolue vers la cyberdépendance caractérisé par une relation homme-machine où l'outil informatique n'est plus maitrisable et où son utilisation finit par avoir des effets négatifs et destructeurs sur la santé physique ou psychique de l'utilisateur.

Il est généralement question de dépendance à l'outil ou à l'Internet si les symptômes[52] suivants apparaissent :

Symptômes psychologiques (par ordre de gravité)

  • sentiment de profond bien-ĂŞtre voire d'euphorie, de puissance et d'ubiquitĂ© quand le tĂ©lĂ©phone est utilisĂ©, et inversement sentiment d'anxiĂ©tĂ© et Ă©ventuelle irritabilitĂ© quand le smartphone est dĂ©chargĂ© ou indisponible ;
  • besoin de frĂ©quemment toucher, vĂ©rifier ou utiliser son tĂ©lĂ©phone ; Faire semblant de pianoter sur le clavier ou l’écran ou l'activer pour fuir une situation embarrassante ou donner l'impression qu'on est occupĂ© ;
  • difficultĂ© de concentration (au travail, Ă  l'Ă©cole, lors d'activitĂ© de bricolage, voire durant l'usage du tĂ©lĂ©phone) ;
  • tolĂ©rance marquĂ©e pour un usage intense, long et frĂ©quent du smartphone ;
  • besoin de constamment augmenter le temps d'utilisation d'Internet et difficultĂ© Ă  arrĂŞter de surfer (en empiĂ©tant alors sur le temps des repas, du sommeil, de l'hygiène, de la vie familiale, amicale, sociale et des loisirs), et au dĂ©triment d'activitĂ©s physiques et souvent associĂ© Ă  des insomnies ;
  • mensonges Ă  l'entourage pour passer plus de temps sur l'Internet ;
  • dĂ©pression ou irritabilitĂ© quand la personne est privĂ©e du tĂ©lĂ©phone ou de l'accès Ă  l'Internet ;
  • Ă©checs rĂ©pĂ©tĂ©s dans le contrĂ´le de ces comportements, malgrĂ© la prise de conscience de consĂ©quences nĂ©gatives significatives.

SymptĂ´mes physiques

Parmi les symptômes physiques allégués[53] - [54] figurent :

  • syndrome du canal carpien ;
  • trouble de la vision ;
  • syndromes du « text-neck » et l'« iNeck Â», qui dĂ©signent maintenant les douleurs de nuque et maux de dos induites par une mauvaise position du corps lors de l'utilisation d'un tĂ©lĂ©phone ou d'autres terminaux mobiles.

Tests de dépendance

Des signes comportementaux précoces d'addiction existent dans de nombreux domaines et apparaissent dans les années 2010 pour l'addiction au smartphone[55].

Des tests quantitatifs visent aussi à détecter et/ou évaluer les comportements dits obsessionnels liés à 'internet[56] - [57].

Un test dit Internet stress scale a été publié en français par la revue Toxibase en 2002[58].

Les résultats de ces tests sont à exploiter avec prudence car le téléphone portable est un outil multifonction de plus en plus polyvalent et une partie de ses usages a des effets positifs ou neutres sur la santé. Les seuils pathologiques de son usage sont parfois difficiles à établir.

Dangers avérés ou suspectés

Les risques et dangers de l’addiction aux terminaux portables ont fait l'objet de nombreuses études dans le monde et diverses Agences et ONG s'y intéressent aussi, bien au-delà des démarches de vérification de contenus violents, mensongers, etc. Ils sont en France notamment étudiés par un Observatoire des Mondes Numériques en Sciences Humaines (OMNSH) créé par un groupe de psychologues et psychanalystes[59]

Les applications visant à faire du smartphone un Assistant personnel voire un véritable coach surveillant proactivement notre santé, notre sommeil, nos performances, doté de « moteurs de suggestion » de plus en plus perfectionnés pourrait encore exacerber cette dépendance voire pousser certaines personnes à un certain abandon de leur libre arbitre et autonomie.

Les dangers de l'addiction au smartphone cités par la littérature sont de deux ordres :

1. Dangers psychosociaux :

  • Le smartphone peut modifier la manière d’être au monde, les relations interpersonnelles et Ă  nous-mĂŞmes. L’abus de certains de ses usages peut crĂ©er et maintenir des illusions (sur soi-mĂŞme, les autres, la vie sociale , etc. et notamment donner un faux sentiment de contrĂ´le de l’environnement, ce qui est pour certains auteurs un danger pour la sociĂ©tĂ© ;
  • Il donne accès presque en tous temps et tous lieux Ă  des programmes/activitĂ©s/jeux/ressources dont certains ont des effets hypnotiques, qui vont de la fascination (devant le spectaculaire) jusqu’à une forme de sidĂ©ration ou de surcharge informationnelle ;
  • Il capte chez l'usager compulsif un temps et une Ă©nergie considĂ©rable, en affectant Ă©ventuellement aussi l'entourage.
    Michel Lejoyeux, spécialiste de l’addiction note que - comme dans d’autres contextes de dépendance - l'entourage peut aussi devenir anxieux quand la personne s’isole (ici devant ses écrans) ; « il n’est pas rare que des parents inquiets me demandent un avis ou une aide à propos d’un jeune rivé à son écran. Les plaintes sont presque toujours les mêmes : il ne leur parle plus, il délaisse ses études et ses amis. Il ne veut plus partir en vacances ni même sortir de chez lui »[60].

2. Dangers biologiques pour l'organisme

  • Via l'utilisation compulsive d'Internet par les adolescents, il semble associĂ©e Ă  des changements morphologiques, structurels et fonctionnels du cerveau (dont changements de densitĂ© de matière grise[61]. Une autre Ă©tude a en 2011 rĂ©vĂ©lĂ© une diminution locale du volume de matière grise mais aussi des changements dans la substance blanche, dont l'importance semble corrĂ©lĂ©s Ă  la durĂ©e du phĂ©nomène de cyberdĂ©pendance.
    En raison de la grande plasticité du cerveau, ces travaux doivent être utilisés avec précaution car ces changements peuvent en partie refléter des types nouveaux d'apprentissage, de compétence et d’optimisations cognitives face aux nouveaux outils numériques. Mais des indices forts plaident aussi des troubles associés, de la mémoire à court terme, avec certaines pertes de capacités (dont à désirer explorer et expérimenter le monde réel plutôt que privilégier le monde virtuel où la prise de décision n’a pas les mêmes conséquences psychoaffectives et sociales).
  • Une Ă©tude statistique[62] confirme qu'en 2012 le smartphone interfère avec la qualitĂ© du sommeil d'un grand nombre de personnes : 1/3 des propriĂ©taires interrogĂ©s ont dit qu'ils prĂ©fĂ©reraient abandonner le sexe plutĂ´t que leur smartphone. 95 % surfent sur le Web, lisent sur Ă©cran ou regarder un Ă©cran de tĂ©lĂ©vision avant d'essayer de dormir. 90 % des 18-29 ans disent dormir avec leur tĂ©lĂ©phone ou le laisser très près du lit et 25 % ne l'Ă©teignent pas avant de se coucher (10 % se disent ainsi rĂ©veillĂ©s la nuit plusieurs fois par semaine par des appels, textos ou courriels). 50 % vont immĂ©diatement consulter leur tĂ©lĂ©phone s'ils se rĂ©veillent la nuit sans raison. Et 63 % des participants Ă  cette Ă©tude reconnaissent que leurs besoins de sommeil n'ont pas Ă©tĂ© respectĂ©s dans la semaine.
    Une autre Ă©tude[63], faite par le Lighting Research Center (LRC) Rensselaer Polytechnic a montrĂ© que deux heures d'exposition Ă  la lumière d'un Ă©cran rĂ©troĂ©clairĂ© (de tablette ou tĂ©lĂ©phone regardĂ© de près, ou Ă©cran TV) peut diminuer la sĂ©crĂ©tion de mĂ©latonine d'environ 22 %[64]. Utiliser un Ă©cran le soir repousse la sensation de fatigue et d’endormissement, mais prive d’un sommeil rĂ©parateur[65].
  • Enfin, tĂ©lĂ©phoner ou utiliser les autres fonctions d’un smartphone en conduisant (ou lors d'activitĂ©s dangereuses) est une source d'accident grave et parfois mortel.

Prévention et traitements

Selon Sarah Kershaw (2005) dans le New York Times l'addiction à l'internet est souvent moins grave qu'à la télévision et selon ses travaux sur les addicts à lInternet, ceux-ci ont peu à peu limité leur temps d'accès, montrant qu'il existe un apprentissage et une capacité à autoréguler sa consommation[66].

L'éducation (dans la famille, à l’école ou via les pairs) joue un rôle important dans l'apprentissage d'un usage raisonné et socialement acceptable des outils numériques. Et selon Trisha Lin[67] - comme pour la télévision - un smartphone ou une tablette ne devraient pas « être mis dans les mains de leurs jeunes enfants pour les occuper ou les faire taire ».

Cette éducation ou prévention aux comportements numériques excessifs, chroniques ou addictifs de nouvelles terminologies sont employées, sont l'objet de la désintoxication numérique.

Les pistes de solutions ou « traitements Â» Ă©voquĂ©s par la littĂ©rature incluent:

Notes et références

  1. Bailly D & Venisse J.L (1994) Dépendance et conduites de dépendance, Paris, Masson.
  2. terme utilisé par Cédric Biagini (2012)
  3. (en) Archer, D. (2013). « Smartphone addiction Â» Psychology Today.
  4. (en) Myeong-ok Yu, Sejin Ju & Joo Hyun Kim (2014). « A Study on Smartphone Addiction, Mental health and Impulsiveness For High School Students at Korea Â» 디지털정책연구, 12(4), 409-418 (rĂ©sumĂ©).
  5. « La dĂ©pendance au smartphone, un mal croissant chez les jeunes Â», Le Parisien avec AFP, 15 juin 2014.
  6. (en) Ha JH, Chin B, Park DH, Ryu SH, Yu J. « Characteristics of excessive cellular phone use in Korean adolescents Â» Cyberpsychol Behav. 2008 Dec; 11(6):783-4.
  7. (en) Kim AY. « 240 thousand adolescents are in danger of smartphone addiction Â» Naeil Shinmun ; Korean ; 3 juillet 2013
  8. ex. : Sondage Médiamétrie avril 2012 : Question : Motifs de l’appréciation des français de leurs Smartphones : 83 % des répondants affirment que le smartphone permet de « gérer et simplifier sa vie », 46 % lui donnant néanmoins aussi « une valeur affective » ; voir aussi le sondage AFOM et TNS Sofres avril 2010 qui compare le mobile et le smartphone chez 1217 personnes de 12 ans et plus : http://www.tns-sofres.com/_assets/files/2010.10.19-afom.pdf
  9. Année de diffusion du premier iPhone
  10. Schere K. College life on-line: healthy and unhealthy Internet use. J of College Student Development. 1997;38:655–665
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Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

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Liens externes

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