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Cour suprĂȘme d'Argentine

La Cour suprĂȘme d'Argentine (en espagnol : Corte Suprema de Justicia de la NaciĂłn littĂ©ralement Cour suprĂȘme de justice de la nation) est la plus haute cour de justice de la RĂ©publique argentine. Elle a Ă©tĂ© inaugurĂ©e le 15 janvier 1863. Pendant une grande partie du XXe siĂšcle, la Cour et le systĂšme judiciaire argentin en gĂ©nĂ©ral ont manquĂ© d'autonomie par rapport au pouvoir exĂ©cutif. La Cour a Ă©tĂ© rĂ©formĂ©e en 2003 par le dĂ©cret 222/03.

Cour suprĂȘme d'Argentine
Image illustrative de l’article Cour suprĂȘme d'Argentine
Logo de la Cour
Nom officiel Corte Suprema de Justicia de la NaciĂłn Argentina
Sigle CSJN
Juridiction Nationale
Type Nomination présentielle et confirmation par le Sénat d'Argentine (juges)
Ministres de la Cour suprĂȘme (prĂ©sident)
Création 15 janvier 1863
SiĂšge Talcahuano 550 Buenos Aires
CoordonnĂ©es 34° 36â€Č 08″ sud, 58° 23â€Č 10″ ouest
Voir aussi
Site officiel http://www.csjn.gov.ar/

La Cour suprĂȘme fonctionne comme un tribunal de dernier recours. Ses dĂ©cisions sont sans appel. Elle statue Ă©galement sur les affaires portant sur l'interprĂ©tation de la constitution (par exemple, elle peut annuler une loi votĂ©e par le CongrĂšs si elle la juge inconstitutionnelle).

Les membres de la Cour suprĂȘme sont nommĂ©s par le PrĂ©sident avec l'accord d'au moins les deux tiers des membres actuels du SĂ©nat lors d'une session convoquĂ©e Ă  cet effet, et ne peuvent ĂȘtre rĂ©voquĂ©s que par une procĂ©dure de destitution appelĂ©e juicio polĂ­tico (procĂšs politique), initiĂ©e par la Chambre des dĂ©putĂ©s et exĂ©cutĂ©e par le SĂ©nat, exclusivement pour des raisons de mauvaise conduite.

BĂątiment

Le palais de justice a été conçu par l'architecte français Norbert Maillart en 1906 et a été inauguré en 1910. Les travaux ultérieurs, à la fois logistiques et esthétiques, se sont poursuivis jusqu'en 1942, et parmi ses monuments les plus remarquables sont Justice, de Rogelio Yrurtia, et José de San Martín, de Luis Perlotti .

Juges actuels

La composition actuelle de la Cour suprĂȘme est la suivante:

  • PrĂ©sident : Dr Carlos Fernando Rosenkrantz .
  • Vice-prĂ©sident : Dr Elena Highton de Nolasco .
  • Juges : Dr Juan Carlos Maqueda, Dr Ricardo Lorenzetti et Dr Horacio Daniel Rosatti

Histoire

Jusque dans les annĂ©es 2000, la Cour a manquĂ© d'indĂ©pendance par rapport Ă  l'exĂ©cutif dans de nombreux cas. Plusieurs de ses juges ont Ă©tĂ© accusĂ©s de former une «majoritĂ© automatique», qui a toujours Ă©tĂ© d'accord sur les votes ayant trait aux intĂ©rĂȘts de l'administration. Les auteurs ont soulignĂ© une sorte de « systĂšme des dĂ©pouilles », entraĂźnant des changements dans la composition de la Cour Ă  chaque nouvelle majoritĂ© politique[1]. La Cour suprĂȘme a Ă©tĂ© caractĂ©risĂ©e Ă  la fois par « une instabilitĂ© dans sa composition» et par une incohĂ©rence dans ses dĂ©cisions[1]. Cependant, les rĂ©formes de 1994 et 2003 ont amĂ©liorĂ© le caractĂšre dĂ©mocratique de la Cour.

De la décennie infùme à la réforme de 1994

Le Palais de Justice, site de la Cour suprĂȘme.

Au dĂ©but du XXe siĂšcle, la Cour Ă©tait composĂ©e de cinq magistrats[1]. À la suite du coup d'État militaire de 1930 de JosĂ© FĂ©lix Uriburu, qui a lancĂ© la dĂ©cennie infĂąme, les cinq juges ont reconnu les nouvelles autoritĂ©s et officialisĂ© la rupture de l'ordre constitutionnel crĂ©ant ainsi un prĂ©cĂ©dent qui affecterait une grande partie de l'histoire de l'Argentine[1].

Pendant la prĂ©sidence de Juan PerĂłn, la Cour suprĂȘme a approuvĂ© des dĂ©crets qui n'avaient pas Ă©tĂ© votĂ©s par le CongrĂšs[1]. En 1947, aprĂšs la phase conservatrice du rĂ©gime militaire, le gĂ©nĂ©ral Juan PerĂłn a lancĂ© un procĂšs contre trois des juges de la Cour suprĂȘme et le quatriĂšme a dĂ©missionnĂ©[1]. Ainsi, un seul des juges prĂ©cĂ©dents est restĂ© en place. De 1946 Ă  1955, le systĂšme judiciaire en gĂ©nĂ©ral Ă©tait en accord avec les politiques officielles du parti justicialiste[1].

À la suite de la RĂ©volution libĂ©ratrice catholico-nationaliste de 1955, les cinq magistrats de la Cour suprĂȘme ont Ă©tĂ© destituĂ©s par les militaires au pouvoir[1].

Lorsque le gouvernement constitutionnel d'Arturo Frondizi (UCRI) est arrivĂ© au pouvoir en 1958, trois juges ont dĂ©missionnĂ©[1]. Pendant le mandat de Frondizi, le nombre de juges de la Cour suprĂȘme a Ă©tĂ© augmentĂ©, tandis que tous les juges pĂ©ronistes du systĂšme judiciaire ont Ă©tĂ© rĂ©voquĂ©s[1].

En 1963, le gouvernement dĂ©mocratique suivant, d'Arturo Illia (UCRP), a Ă©galement tentĂ© d'augmenter la composition numĂ©rique de la Cour suprĂȘme[1]. Cependant, le coup d'État militaire de Juan Carlos OnganĂ­a (connu sous le nom de Dictature de la rĂ©volution argentine) a destituĂ© Arturo Illia avant la mise en Ɠuvre de la rĂ©forme[1]. DĂšs que les militaires sont arrivĂ©s au pouvoir, ils ont fait pression sur les juges de la Cour suprĂȘme pour qu'ils dĂ©missionnent. Ces derniers n'ont renoncĂ© Ă  leurs fonctions que peu de temps avant le retour de l'ordre constitutionnel en 1973[1].

Un tribunal ad hoc a Ă©tĂ© formĂ© le 24 mai 1973[1]. Les cinq nouveaux juges Ă©taient tous pĂ©ronistes et aucun d'entre eux ne venait de la famille judiciaire, ni n'avait fait carriĂšre dans les tribunaux[1]. AprĂšs le coup d'État militaire de mars 1976, la junte militaire a tentĂ© de destituer tous les magistrats de la Cour suprĂȘme[1]. Ce dernier, cependant, a acceptĂ© l'imposition d'une loi formulant les objectifs du soi-disant « processus de rĂ©organisation nationale », qui a abouti Ă  une rĂ©pression illĂ©gale venant de l'État et Ă  la disparition de 30 000 personnes durant la pĂ©riode appelĂ©e la Guerre sale[1].

À la suite de la transition dĂ©mocratique, les militaires les plus hauts responsables de la dictature ont Ă©tĂ© traduits en justice dans le cadre du procĂšs des juntes en 1985. Cependant, ce procĂšs n'a pas Ă©tĂ© supervisĂ© par la Cour suprĂȘme, mais par la Cour d'appel pĂ©nale fĂ©dĂ©rale.

AprĂšs l'Ă©lection de Carlos Menem Ă  la prĂ©sidence, le systĂšme judiciaire argentin a Ă©tĂ© la cible de nombreuses pressions du pouvoir exĂ©cutif. En 1989, Carlos Menem a augmentĂ© de cinq Ă  neuf membres les juges de la Cour suprĂȘme et a choisi les quatre nouveaux juges[1]. Le SĂ©nat a approuvĂ© son choix le 19 avril 1990, lors d'une session parlementaire secrĂšte qui a durĂ© 7 minutes et Ă  laquelle l'opposition n'a pas Ă©tĂ© invitĂ©e[1]. La dĂ©mission du juge BacquĂ© a assurĂ© une majoritĂ© absolue aux partisans de Carlos Menem[1].

La Cour suprĂȘme depuis 1994 et la rĂ©forme de 2003

Justice, par Rogelio Yrurtia

La réforme constitutionnelle de 1994 a légÚrement modifié le mode de nomination des juges: bien qu'ils soient toujours proposés par le pouvoir exécutif et approuvés par le Sénat, la majorité absolue n'est plus nécessaire, 2/3 des voix des parlementaires actuels étant suffisant pour approbation[1]. Elle a également introduit les notions juridiques amparo, habeas corpus et habeas data, visant à la protection des données personnelles.

Dans les années 2000, depuis la présidence intérimaire d' Eduardo Duhalde et surtout pendant le mandat de Néstor Kirchner qui a débuté en 2003, tous les membres de la majorité de Menem ont démissionné ou ont été révoqués. Le Dr Antonio Boggiano, le dernier d'entre eux, a été destitué le 29 septembre 2005. Tous les juges n'ont pas été remplacés, il restait donc deux postes vacants.

La procĂ©dure d'amicus curiae, permettant Ă  des tiers Ă  une affaire de dĂ©poser un texte Ă©crit devant la Cour pour dĂ©fendre l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral, a ensuite Ă©tĂ© officialisĂ©e[1]. Le processus a Ă©tĂ© utilisĂ© en 2001, lorsque la justice espagnole a envoyĂ© un mandat d'arrĂȘt international contre les responsables des violations des droits de l'homme en Argentine[1]. Une ONG a ensuite dĂ©posĂ© un texte, en tant que tierce partie, devant le tribunal argentin, exposant les arguments judiciaires nĂ©cessaires pour extrader ou juger les suspects de violations des droits de l'homme (une alternative connue sous le nom de compĂ©tence universelle subsidiaire[1]).

Ce changement a constitué une étape importante dans la décision de 2005 qui déclarait que les crimes de disparition forcée étaient des crimes contre l'humanité (Caso Simon)[1]. Deux ans plus tÎt, le CongrÚs avait déclaré inconstitutionnelles les lois d'amnistie ( Loi du Point Final de 1986 et Ley de Obediencia Debida de 1987), ouvrant ainsi la voie aux procÚs des suspects de violations des droits de l'homme pendant la dictature.

Une autre rĂ©forme importante a eu lieu en 2003. En effet, depuis le 19 juin 2003, par dĂ©cret prĂ©sidentiel, les candidats Ă  un siĂšge Ă  la Cour suprĂȘme doivent ĂȘtre prĂ©sentĂ©s par le pouvoir exĂ©cutif pour examen. Les curriculum vitae des candidats doivent ĂȘtre rendus publics et annoncĂ©s par le ministĂšre de la Justice, et peuvent ĂȘtre discutĂ©s dans les mĂ©dias et ailleurs par les ONG, les associations de droit professionnel, les groupes universitaires et de dĂ©fense des droits de l'homme et tous les citoyens en gĂ©nĂ©ral[1]. AprĂšs trois mois, le prĂ©sident, avec cet avis, peut alors choisir de prĂ©senter le candidat au SĂ©nat argentin, qui doit se prononcer sur la nomination, nĂ©cessitant au moins une majoritĂ© des deux tiers pour un vote positif.

Par ailleurs, le 2 juillet 2003, le Sénat a approuvé une réforme qui contraint sa Commission à faire connaßtre ses choix concernant la confirmation des nominations des magistrats de la justice et du ministÚre public[1].

Enfin, à la suite d'un colloque organisé par l'ONG CELS en 2003, le juge en chef Petracchi a accepté de publier les décisions de la Cour[1] - [2].

Plus récemment vers la fin de 2006, plusieurs juges se sont plaints que le retard du Président dans la nomination des deux siÚges vacants à la Cour était problématique, car une Cour de neuf membres nominal avait besoin d'une majorité de cinq pour signer des décisions consensuelles, et ont exigé que des remplaçants soient nommés pour les anciens juges Augusto Belluscio et Antonio Boggiano (comme l'exige la loi), ou que le CongrÚs adopte une loi réduisant la Cour à sept juges (réduisant ainsi la majorité à quatre)[3]. Le 9 novembre 2006, la sénatrice Cristina Fernåndez de Kirchner, épouse du président, a présenté un projet de loi abrogeant la loi 24774, qui imposait de passer à neuf juges, afin de revenir finalement au nombre initial de cinq. La plupart des membres de la Cour ont salué ce projet[4].

Liste des présidents

  • Francisco de las Carreras (1863–1870)[5]
  • Salvador Maria del Carril (1870–1877)[5]
  • JosĂ© BenjamĂ­n Gorostiaga (1877–1887)[5]
  • Benjamin Victorica (1887–1892)[5]
  • BenjamĂ­n Paz (1892–1902)[5]
  • Abel BazĂĄn (1903)[5]
  • Antonio Bermejo (1904–1929)[5] - [6]
  • JosĂ© Figueroa Alcorta (1929–1931)[5]
  • Roberto Repetto (1932–1946)[5]
  • Antonio Sagarna (1946–1947)[7]
  • Tomas DarĂ­o Casares (1947–1949)[7]
  • Felipe Santiago PĂ©rez (1949)
  • Luis Ricardo Longhi (1949–1952)
  • Rodolfo Guillermo Valenzuela (1952–1955)
  • Alfredo Orgaz (1955–1960)[8] - [9] - [10]
  • BenjamĂ­n Villegas Basavilbaso (1960–1964)
  • AristĂłbulo Donato ArĂĄoz de Lamadrid (1964–1966)
  • Eduardo Ortiz Basualdo (1966–1973)[11]
  • Miguel Ángel Bercaitz (1973–1976)
  • Adolfo R. Gabrielli (1976–1983)[12]
  • Genaro R. CarriĂł (1983–1985)[11]
  • Ricardo Levene (1990–1993)[13]
  • Julio Nazareno (1993–2003)
  • Carlos Fayt (2003–2004)
  • Enrique Santiago Petracchi (2004–2007)
  • Ricardo Lorenzetti (2007–2018)
  • Carlos Rosenkrantz (2018–prĂ©sent)

Évaluation

Le renouvellement de la Cour suprĂȘme dans les premiĂšres annĂ©es de l'administration Kirchner a Ă©tĂ© annoncĂ© et est gĂ©nĂ©ralement reconnu comme une Ă©tape positive, apportant plus d'indĂ©pendance au pouvoir judiciaire et abordant les questions de prĂ©jugĂ© idĂ©ologique[14] - [15].

Jusqu'Ă  la mi-2004, tous les juges Ă©taient des hommes. Ils Ă©taient considĂ©rĂ©s comme conservateurs, car la plupart Ă©taient des catholiques fervents[16]. En revanche, les deux juges les plus rĂ©cemment nommĂ©es, Elena Highton et Carmen Argibay, sont des femmes. Carmen Argibay, ancienne juge Ad litem au Tribunal pĂ©nal international pour l'ex-Yougoslavie et ancienne prĂ©sidente de l'Association internationale des femmes juges, est une fĂ©ministe et athĂ©e autoproclamĂ©e, qui soutient la lĂ©galisation de l'avortement en Argentine[17]. Eugenio Zaffaroni, premier Ă  ĂȘtre dĂ©signĂ© par le biais de la mĂ©thode de nomination publique, est considĂ©rĂ© comme un dĂ©fenseur de la Justice politiquement de centre-gauche, et aussi un Ă©rudit en criminologie critique.

Lectures complémentaires

Références

  1. Yanina Guthmann, La reforma del sistema de Justicia : una mirada critica (en espagnol), (jornadasjovenesiigg.sociales.uba.ar)
  2. (es) « Pågina/12 :: El país :: Un Petracchi caliente en la presentación del CELS », sur www.pagina12.com.ar (consulté le )
  3. ClarĂ­n, 9 November 2006. Desde el Senado, el kirchnerismo respondiĂł a las quejas de la Corte.
  4. ClarĂ­n, 11 November 2006. "El proyecto de Cristina Kirchner es un salto en la calidad institucional".
  5. TANZI, HÉCTOR JOSÉ, HISTORIA IDEOLÓGICA DE LA CORTE SUPREMA DE JUSTICIA DE LA NACIÓN (1930–1947), Universidad del Salvadore : Facultad de Ciencias Jurídicas; Facultad de Filosofía, Historia y Letras., (lire en ligne)
  6. (es) Rosendo Fraga, La Argentina en default, Nueva MayorĂ­a.com, (lire en ligne)
  7. « Grandes jueces de la Corte Suprema de Justicia de La Nación »
  8. (es) « Al estilo de Alfredo Orgaz », sur www.lanacion.com.ar (consulté le )
  9. (es) Jurisprudencia argentina, (lire en ligne)
  10. (es) Argentina Corte Suprema de Justicia de la NaciĂłn, Fallos de la Corte Suprema de Justicia nacional, con la relaciĂłn de sus respectivas causas, Mosconi, (lire en ligne)
  11. BARRANCOS y VEDIA, FERNANDO N., La corte suprema de justicia en historia constitucional argentina (lire en ligne), PDF
  12. (es) « Falleció el ex presidente de la Corte Suprema Adolfo R. Gabrielli », sur www.lanacion.com.ar (consulté le )
  13. (es) Diario El Dia de La Plata www.eldia.com, « Diario El Dia de La Plata www.eldia.com », sur www.eldia.com (consulté le )
  14. (en) C. Levey, D. Ozarow et C. Wylde, Argentina Since the 2001 Crisis: Recovering the Past, Reclaiming the Future, Springer, (ISBN 9781137434265, lire en ligne)
  15. (en) Karen Ann Faulk, In the Wake of Neoliberalism: Citizenship and Human Rights in Argentina, Stanford University Press, (ISBN 9780804783910, lire en ligne)
  16. (en) Hugo, « Argentina y el Liberalismo Ausente », Academia,‎ (lire en ligne)
  17. Diana Cariboni, « Single Woman, Atheist, Heads to Seat on High Court »

Liens externes

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