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Armada espagnole de 1596

La seconde Armada espagnole, Ă©galement connue sous le nom d'Armada espagnole de 1596[9] - [13], est une opĂ©ration navale menĂ©e pendant la guerre anglo-espagnole. Une autre invasion de l'Angleterre ou de l'Irlande est tentĂ©e Ă  l'automne 1596 par Philippe II d'Espagne[14]. Dans une tentative de venger le sac de Cadix par les Anglais en 1596, Philippe ordonne immĂ©diatement une contre-attaque dans l'espoir d'aider les rebelles irlandais Ă  se soulever contre la couronne anglaise[5]. La stratĂ©gie consiste Ă  ouvrir un nouveau front, obligeant les troupes anglaises Ă  s'Ă©loigner de la France et des Pays-Bas, oĂč ils se battent Ă©galement[15] - [16].

Armada espagnole de 1596
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Philippe II dans sa vieillesse, ordonne l'Armada de 1596 pour se venger de l'attaque anglaise sur Cadix
Informations générales
Date –
Lieu Cap Finisterre, Atlantique
Issue

Échec de l'Espagne[1] - [2] - [3]

  • Armada brisĂ©e par la tempĂȘte[4] - [5]
  • Énormes pertes navales et Ă©conomiques pour l'Espagne[6] - [7]
  • Report de l'invasion[8] - [9]
Pertes
inconnu
1 Flyboat capturé[10]
TempĂȘtes/Maladie :
5 galions coulés[11]
38 autres bateaux coulés ou mis en fuite[5]
5 000 morts[12]

Batailles

Terre ferme espagnole des Amériques

Açores et ßles Canaries

Eaux européennes

Allemagne et Pays-Bas

France

Irlande

L'Armada, commandĂ©e par l'Adelantado MartĂ­n de Padilla (en), se rĂ©unit Ă  Lisbonne, Vigo et SĂ©ville et dĂ©marre en octobre. Avant son dĂ©part des eaux espagnoles, des tempĂȘtes frappent la flotte au large du cap Finisterre. Ces tempĂȘtes dĂ©truisent l'Armada : causant d'importants dĂ©gĂąts, elles obligent les navires Ă  regagner leur port d'attache. PrĂšs de 5 000 hommes meurent, touchĂ©s par la tempĂȘte ou la maladie, et 38 navires sont perdus, ce qui est suffisant pour un report Ă  long terme de l'entreprise irlandaise. Les pertes matĂ©rielles et financiĂšres s'ajoutent Ă  la banqueroute du royaume espagnol, Ă  l'automne de 1596[15].

Contexte

L’Espagne et l’Angleterre sont en guerre depuis prĂšs de douze ans et aucune des deux parties n’a pris le dessus[17]. Le rĂ©sultat de l'intervention de Philippe II dans la guerre de religion en France en faveur de la Ligue catholique est que les forces espagnoles ont Ă©tabli des garnisons cĂŽtiĂšres le long des cĂŽtes française et flamande Ă  la fin des annĂ©es 1580[18]. Ces bases ont une Ă©norme valeur stratĂ©gique, car elles placent l'Angleterre sous la menace rapprochĂ©e de la flotte et des troupes espagnoles. L'Angleterre, de son cĂŽtĂ©, est Ă©galement intervenue en France, mais Ă  l'appui de Henri IV, Ă  la suite du traitĂ© de Greenwich de 1591[19]. Les Espagnols se sont emparĂ©s de Calais en 1596 (en), ce qui signifie qu'une attaque contre l'Angleterre est potentiellement rĂ©alisable[20]. AprĂšs des demandes françaises dĂ©sespĂ©rĂ©es pour les empĂȘcher de signer la paix avec l'Espagne, les Anglais signent une Triple Alliance (en) avec la RĂ©publique nĂ©erlandaise et la France[21].

L'Angleterre envoie une armada sous les ordres de Robert Devereux et Charles Howard Ă  Cadix, qui est capturĂ©e, renvoyĂ©e et tenue pendant deux semaines Ă  l'Ă©tĂ© de 1596[22]. Peu de temps aprĂšs, Philippe prend en considĂ©ration la dĂ©fense de la pĂ©ninsule mais est surtout motivĂ© par la vengeance, mĂȘme si cela implique de vendre tout ce qu'il a[23].

Le principal exilé jésuite anglais en Espagne, Robert Persons, rencontre Philippe dans une audience, dans l'espoir de tirer parti de la situation afin de pousser le roi à l'action[24]. Persons plaide pour une attaque pendant l'hiver quand la reine s'y attendra le moins[5]. Cela implique une armée de taille modérée plutÎt qu'une vaste Armada, qui donnerait un élément de surprise, et pour laquelle des personnes firent référence à l'armada ratée de 1588[25].

Person explique que le point d'entrĂ©e pour les Espagnols devrait ĂȘtre l'Écosse, le Kent ou Milford Haven au pays de Galles, faisant rĂ©fĂ©rence Ă  Henry VII qui y avait rĂ©ussi Ă  une invasion en 1485[25]. On s'attend Ă  ce que les Espagnols trouvent Ă  cet endroit un vaste rĂ©servoir de soutien catholique[24]. Des cartes dĂ©taillĂ©es des ports d'Angleterre et du pays de Galles sont Ă©tablies ; d'autres projets suggĂšrent d'occuper l'Ăźle de Wight[25] - [26]. Un certain nombre de conseillers du roi considĂšrent toutefois l'invasion de l'Irlande comme un meilleur moyen de dĂ©stabiliser l'Angleterre[16]. L'idĂ©e d'utiliser l’Irlande comme tremplin d’une invasion de l'Angleterre n’est pas nouvelle ; Le marquis de Santa Cruz, le premier commandant de l'Armada espagnole, avait prĂ©conisĂ© un dĂ©barquement Ă  Cork ou Ă  Wexford en 1586[24]. Le plan ne fut annulĂ© qu'en raison des retards causĂ©s par le raid de Drake sur Cadix l'annĂ©e suivante.

Philippe commence par ordonner Ă  MartĂ­n de Padilla (en), comte de Santa Gadea, l'Adelantado, de constituer une nouvelle flotte destinĂ©e Ă  dĂ©barquer en Irlande, dans l'espoir d'amplifier la rĂ©bellion dirigĂ©e par Hugh O'Neill, comte de Tyrone[16]. DĂšs 1595, O'Neill et Hugh Roe O'Donnell Ă©crivent Ă  Philippe pour demander de l'aide et lui proposent de devenir ses vassaux[24]. Il propose Ă©galement que son cousin l'archiduc Albert soit nommĂ© prince d'Irlande. Ces discussion ne dĂ©bouchent cependant sur rien de concret[27]. Philippe rĂ©pond par des encouragements en janvier 1596, Ă  conserver la foi en la religion catholique, leur intervention en Espagne, et Ă  ne pas faire la paix avec Élisabeth[28]. Pour les Espagnols, la stratĂ©gie est simple : la guerre en Irlande crĂ©e un nouveau front, qui devrait obliger les Anglais Ă  dĂ©placer des troupes des combats dans les Provinces-Unies pour les envoyer combattre en Irlande[5]. Aux yeux de l'Espagne, les Anglais n'avaient simplement pas les moyens de se battre simultanĂ©ment sur ces deux fronts[23].

Hugh Ó Neill, 2e comte de Tyrone

Philippe II place beaucoup d'espoir dans la nouvelle Grande Armada organisĂ©e Ă  Lisbonne[29]. Elle comprend quinze galions de Castille et neuf du Portugal, 53 bateaux flamands et allemands saisis, six pinasses et une caravelle, avec 10 790 hommes[25]. 2 500 soldats doivent partir de SĂ©ville Ă  bord de 30 flibots pour rejoindre la flotte Ă  Lisbonne[30]. Au nord, Ă  Vigo, 41 autres navires de diffĂ©rents tonneaux attendent, avec environ 6 000 hommes[29]. L'effectif total de l'Adelantado consiste en 11 000 fantassins malades et mal Ă©quipĂ©s et de 3 000 cavaliers, auxquels s'ajoutaient 5 500 marins[25].

À cĂŽtĂ© de l'Adelantado, les principaux dirigeants sont Carlos de Arellano, le major-gĂ©nĂ©ral Sancho MartĂ­nez de Leyva (es) et le gĂ©nĂ©ral amiral Diego Brochero (en)[25]. Les rumeurs vont bon train et bien avant son dĂ©part effectif, les autoritĂ©s espagnoles sont informĂ©es du dĂ©barquement de leurs troupes sur le territoire de O'Neill[29]. À Lisbonne, Cornelius O'Mulrian suit avec intĂ©rĂȘt les intenses prĂ©paratifs de la nouvelle Armada[24]. Selon les informations que le nonce envoie Ă  Rome, l'invasion de l'Irlande est imminente[30]. Il souhaite envoyer O'Mulrian, ainsi que de nombreux jĂ©suites et autres PrĂȘtres, pour organiser la restauration catholique en Irlande[28].

En juillet, le comte d'Essex est informĂ© par des espions et des marchands qu'il y a quarante-six navires Ă  Lisbonne et que de nouveaux navires de guerre sont en construction Ă  de nombreux endroits sur la cĂŽte de Biscay[23]. Cette information est transmise Ă  la reine Élisabeth, mais elle est Ă©galement informĂ©e que rien ne se produira pas en raison des tempĂȘtes d'automne prĂ©vues. NĂ©anmoins, des prĂ©paratifs sont faits et la marine est mise en alerte ; des renforts sont envoyĂ©s pour protĂ©ger l'Ăźle de Wight, Falmouth et mĂȘme l'embouchure du Medway oĂč, Ă  Chatham,la flotte anglaise est Ă  quai[30]. Les inquiĂ©tudes principales du commandant de campagne anglais Lord Willoughby concernent toutefois l’Irlande, l’Écosse et les villes cautionnĂ©es (en) nĂ©erlandaises telles que Flushing[26].

Localisation du cap FinistĂšre

Au dĂ©but du mois d'octobre, l'Armada n'est toujours pas en Ă©tat de partir. Le manque de nourriture et d'argent ainsi qu'une potentielle mutinerie retardent de force l'expĂ©dition, ce qui exaspĂšre Philippe. L'Adelantado a pour prioritĂ© principale la prĂ©paration de l'Armada, mais il demande bientĂŽt Ă  ĂȘtre relevĂ© de son commandement pour se dĂ©fendre, ce que Philippe refuse[29]. En place, Philippe annule subitement l’entreprise irlandaise ; les causes desa dĂ©cision sont les mauvaises conditions mĂ©tĂ©orologiques, la saison tardive et la maladie parmi les Ă©quipages des navires. Au lieu de cela, l'Adelantado doit se rendre Ă  La Corogne, oĂč il doit recevoir l'ordre de s'emparer du port français de Brest qu'ils a briĂšvement occupĂ© en 1594, avant d'ĂȘtre vaincu par les troupes anglo-françaises qui sy'installent[31]. Brest est choisie principalement parce que la ville est plus proche de l'Espagne, mais aussi parce qu'elle pourrait servir de base pour attaquer l'Angleterre et aider les rebelles irlandais.

Exécution

Le 24 octobre au matin, les conditions mĂ©tĂ©orologiques permettent finalement Ă  l'Armada, qui compte 81 navires, de quitter le port de Lisbonne[29]. La flotte ainsi que l'armĂ©e partent de Lisbonne le 25 octobre en direction de La Corogne et naviguent en toute sĂ©curitĂ© jusqu'Ă  Viana do Castelo oĂč elles doivent mouiller et attendre le vent[30]. Quand le vent arrive, elles s'approchent du cap Finisterre, qui se termine au nord-ouest de la pĂ©ninsule espagnole[28]. Ce devait ĂȘtre leur point le plus Ă©loignĂ© et presque immĂ©diatement ils rencontrent une tempĂȘte inattendue[15]. Les autres navires qui ont rĂ©ussi Ă  traverser le cap sont dispersĂ©s dans les ports du golfe de Gascogne ; beaucoup d'entre eux sont endommagĂ©s. L'ensemble de la force espagnole a cessĂ© d'exister en tant que flotte de combat efficace[26]. Seuls quarante navires endommagĂ©s ont rĂ©ussi Ă  faire demi-tour et Ă  entrer dans le port de Ferrol. L’Adelantado est Ă  leur bord sur le navire amiral San Pablo.

Le 1er novembre, ce qui reste de la flotte est de retour et le coût de l'opération est estimé ; l'Adelantado informe le tribunal de la catastrophe à la grande tristesse de Philippe[32].

Entre-temps, des informations selon lesquelles le dĂ©barquement d'une Armada Ă©tait en prĂ©aparation commencent Ă  filtrer en Angleterre. Selon une autre rumeur d'origine irlandaise, 1500 Espagnols devaient arriver en Irlande tandis que l'Ăźle entiĂšre searit entrĂ©e simultanĂ©ment en rĂ©bellion[10]. Charles Howard envoie une puissante flotte comprenant 13 galions pour retrouver les restes dĂ©membrĂ©s de l'armada, mais ne trouve que des Ă©paves et des corps flottants[33]. Un flibot espagnol est toutefois capturĂ© avec 200 membres de son Ă©quipage, ce qui permet de dĂ©couvrir et connaitre l'Ă©tendue de l'Armada[30] - [32].

Aucun des navires espagnols n’atteint la Manche et Brest, l’Irlande et l’Angleterre sont ainsi Ă©tĂ© Ă©pargnĂ©s[15].

Conséquences

Au dĂ©but, les dĂ©gĂąts semblent minimes et Philippe espĂšre qu'une fois que l'Adelantado aura rassemblĂ© ses navires, il pourra continuer son voyage, mais avec le temps, l'Ă©normitĂ© du dĂ©sastre devient Ă©vidente. Les pertes subies par l'Armada Ă  El Ferrol sont importantes. Le dĂ©sastre cause une atmosphĂšre de confusion gĂ©nĂ©rale et de tristesse Ă  la cour. À la mi-novembre, le nonce envoie un rĂ©sumĂ© douloureux des faits : trente navires sont perdus, treize se sont Ă©crasĂ©s dans les rĂ©cifs et il y a eu beaucoup de morts parmi les hauts gradĂ©s portugais. Dix-huit des navires coulĂ©s sont des hourques soumises Ă  un embargo, dont la perte peut facilement ĂȘtre comblĂ©e, mais cinq des principaux navires du roi appelĂ©s les apĂŽtres ont sombrĂ©, la perte la plus grave Ă©tant celle du galion Santiago de 900 tonnes, qui transportait 330 soldats ainsi que des marins ; seuls vingt-trois de ces hommes survivent. La maladie a ravagĂ© les navires depuis leur arrivĂ©e au port[28]. Ceux-ci ne peuvent pas ĂȘtre remplacĂ©s aussi facilement et il y a peu de survivants chez les autres. En tout, prĂšs de 5 000 hommes pĂ©rissent dans des naufrages ou meurent ou sont malades[15].

Alors que l'ampleur de la catastrophe est de mieux en mieux connue, Philippe annule l'entreprise Ă  contrecƓur le 13 novembre. Le dĂ©sastre est ruineux en termes de finances, car les navires La Capitana de Levante et Santiago qui transportent chacun des caisses de paiement de 30000 ducats, sont perdus. Le reste de l'Armada doit hiverner en Espagne et partir le printemps suivant, sans autres diversion ou reports[9]. En janvier 1597, une grande crainte s'empare de la Galice quant Ă  l'Ă©ventualitĂ© que la marine anglaise pourrait se prĂ©senter Ă  tout moment, situation similaire Ă  celle de 1589. L'Armada est reconstruite Ă  El Ferrol, avec une artillerie de remplacement, et de l'argent rĂ©cupĂ©rĂ© des Ă©paves[28]. Les autoritĂ©s espagnoles sont davantage prĂ©occupĂ©es par la dĂ©fense de la pĂ©ninsule.

Le choc de la catastrophe rĂ©sonne dans tous les coins des dominions de Philippe, relĂąchant partout les liens dĂ©chirĂ©s de son systĂšme, et menaçant de complĂ©ter ce que la campagne rĂ©ussie d'Essex Ă  Cadiz avait laissĂ©e sans suite[26]. AprĂšs la dĂ©faite de Cadix, le roi d’Espagne est confrontĂ© Ă  une banqueroute : Ă  la suite de l'effondrement de l’Armada, il est contraint de suspendre le paiement de ses crĂ©anciers. Philippe dĂ©clare alors la troisiĂšme faillite majeure de son rĂšgne. Le roi souhaite dĂ©sespĂ©rĂ©ment un report de l'action de l'Armada, et pas un abandon. Il est alors contraint d'emprunter encore plus d'argent, mais cette fois auprĂšs de ses avoirs fonciers italiens[34].

Les dirigeants irlandais en exil continuĂšrent de croire que l'Armada Ă©tait destinĂ©e Ă  l'Irlande[24]. Un an plus tard, une autre tentative est faite, mais cette fois-ci, aprĂšs de nombreux changements de stratĂ©gie, c'est l'Angleterre qui est choisie, combinĂ©e Ă  la destruction de la flotte anglaise qui revenait du l'expĂ©dition Essex-Raleigh (en). L'Armada de 1597 est envoyĂ©e Ă  l'automne et malgrĂ© la tempĂȘte qui disperse la flotte, certains navires rĂ©ussissent Ă  atteindre et, dans certains cas, Ă  dĂ©barquer des troupes en Cornouailles et au pays de Galles[35]. Avec la majoritĂ© de la flotte dispersĂ©e et peu de cohĂ©sion entre les navires, l'Adelantado ordonnera cependant Ă  la flotte de se retirer en Espagne, perdant un certain nombre de navires au profit de la flotte anglaise de retour que les espagnols n'ont pas rĂ©ussi Ă  dĂ©truire[36].

Voir Ă©galement

Références

Citations
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Bibliographie

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