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Xe Flottiglia MAS

La Xe Flottiglia MAS, ou DECIMA MAS (Xa MAS) est une unité de nageurs de combat de la marine royale italienne qui opérait au cours de la Seconde Guerre mondiale. Elle fut un précurseur en ce domaine au cours de l'ère moderne, et l'une des unités spéciales les plus fameuses de la guerre, avant d'être une division d'infanterie de marine de la République Sociale italienne de 1944 à 1945.

Membres de la Xe Flottiglia MAS (1939).

Son nom signifie Dixième flottille MAS (MAS : Mezzi d'Assalto, « Moyens d'Assaut », voire Motobarca Armata Silurante, motoscafo armato silurante, motoscafo anti sommergibile, motobarca armata SVAN, divers acronymes d'embarcations d'assaut qui seront rapprochés de la devise latine de Gabriele d'Annunzio « Memento audere semper », « Souviens-toi d'oser toujours »)[1] - [2].

La Decima MAS n'a pas de lien organique avec le régiment San Marco (it). Elle combattra jusqu'aux dernières heures de la guerre puis sera définitivement dissoute.

Histoire

Les précurseurs

En , à la fin de la Première Guerre mondiale, deux officiers italiens, le capitaine du génie maritime Raffaele Rossetti et le médecin de 2e classe Raffaele Paolucci, décident de tenter une opération particulièrement audacieuse en vue de couler deux navires de la Marine austro-hongroise, le Viribus Unitis et le Prinz Eugen, dans le port croate de Pula.

Dans la nuit du , à califourchon sur une torpille Mignatta (it) de leur confection, ils se font déposer au large du port par une vedette italienne. Naviguant ensuite au ras des flots, ils s’approchent du dreadnought Viribus Unitis , depuis quelques heures offert au futur État yougoslave[1], et y fixent deux charges de 180 kilogrammes d'explosif. Le navire amiral de la flotte austro-hongroise est le premier visé par l'opération.

Les Maiali

Les Maiali en action.

En 1935, deux officiers italiens reprennent l'idée de la torpille de leurs anciens. C'est ainsi que l'ingénieur de 2e classe des constructions navales Teseo Tesei (it) et le capitaine du génie maritime Elios Toschi vont créer les torpilles humaines qui seront utilisées au cours de la Seconde Guerre mondiale, les siluro a lenta corsa (SLC ou torpille à marche lente), appelées aussi Maiale (« cochon ») en raison de leur fonctionnement capricieux.

La DECIMA MAS

En mai 1939, la marine italienne décide de créer une unité spéciale chargée de saboter les navires de la Royal Navy en Méditerranée. La 1ª Flottiglia Mezzi d'Assalto sera rebaptisée en « Xa Flottiglia MAS »[1].

Le 26 juillet 1941, Teseo Tesei perd la vie lors d'une tentative d'attaque, dans le port de La Valette, Ă  Malte.

Le commandant du sous-marin Scirè, le prince Junio Valerio Borghese, chargé de transporter les hommes de cette unité, prend de facto la tête de ses nageurs de combat et scaphandriers à la fin de 1941 (les plongeurs gamma et les opérateurs de torpilles Maiali). En , le « prince » (c'est son frère ainé qui détient en fait le titre) est nommé commandant de la Decima dans sa totalité (avec en particulier avec les vedettes MTM (it) explosives en plus des nageurs sous-marins)[1] - [3].

De 1940 Ă  1943, l'unitĂ© est engagĂ©e en MĂ©diterranĂ©e, de la Turquie Ă  Gibraltar, en passant par Alexandrie, la Crète et l'Afrique du Nord, causant de lourdes pertes dans les rangs des marines alliĂ©es : les 187 hommes engagĂ©s avant (0,11 % des marins italiens) revendiquent 38 % du tonnage militaire et 15 % du tonnage marchand coulĂ©s par la Regia Marina, 202 762 t Ă  comparer au tonnage coulĂ© par l'U-bootwaffe (477 000 t) en MĂ©diterranĂ©e[1]. L'armĂ©e allemande lui demandera aussi son concours lors du siège de SĂ©bastopol[4]. Sur la trentaine de missions, Ă  hauts risques, effectuĂ©es, l'unitĂ© dĂ©plore 25 tuĂ©s et 53 prisonniers[1]. En plus des nombreux Ă©checs, la Marine royale est incapable d'exploiter, par manque de moyens, les succès sans impact stratĂ©gique : Ă  l'inverse des exploits d'autres forces spĂ©ciales de la Seconde Guerre mondiale, ceux des nageurs de combat italiens n'influencent que peu le cours du conflit. Le rĂ©gime toutefois les utilise pour sa propagande.

Fin de la guerre

Après la chute de Benito Mussolini et la vague d'épuration qui s'ensuit, de nombreuses unités de l'armée italienne disparaissent.

Une partie des plongeurs de l'unité passe du côté des Alliés. Ils participent alors aux opérations de déminage sur les côtes italiennes jusqu'à la fin de la guerre. Luigi Durand de la Penne, qui avait mené le raid contre la flotte britannique à Alexandrie, permettra ainsi aux Britanniques de mener à bien une opération le 22 juin 1944 pour tenter de couler deux croiseurs italiens saisis par les Allemands à la Spezia[5] : le croiseur lourd Bolzano est coulé par un chariot anglais et le croiseur lourd Gorizia est mis hors de combat au sec dans un bassin de radoub.

Après la création de la République sociale italienne, l'unité est reconstituée en comme division d'élite d'infanterie de marine, sous les ordres du capitaine de frégate Borghèse, fasciste convaincu[6].

  • Les barchini

Les barchini, ou motoscafo turismo (en, it) sont de petits canots légers et rapides. Ils emportent uniquement le carburant nécessaire pour la mission ainsi qu'une forte charge d'explosifs. Le pilote dirige alors l'embarcation vers le bateau cible avant de sauter à l'eau à quelques centaines de mètres de la cible.

L'ensemble formé par le moteur et la transmission est très moderne et préfigure les actuels Z drive[7] (Volvo) ou Stern Drive (OMC et Mercury) : moteur dans la coque et transmission/embase d'hélice à l'extérieur, entrainée par un système d'arbre articulé traversant le tableau arrière.

L'embase d'hélice extérieure peut pivoter à 180° dans un plan vertical pour passer au-dessus des obstacles à fleur d'eau, en particulier les filets pare-torpille déployés autour des gros navires au mouillage. Un doublet d'hélices contrarotatives (comme sur les torpilles) élimine les effets de couple parasites et améliore la poussée, un système redécouvert cinquante ans plus tard par Volvo et commercialisé sous l'appellation Duoprop.

Bien que très dangereux, le barchino n'est pas conçu comme une arme suicide à la façon des Kaiten japonais : installé à l'extrême arrière, le pilote dispose d'une sorte de siège éjectable à ressort comportant un petit radeau flottant.

En restant ainsi hors de l'eau après s'être éjecté, le pilote échappe à l'onde de choc mortelle de l'explosion : lors du raid de la baie de Souda qui vit le torpillage du croiseur anglais HMS York par les commandos italiens, les six pilotes de barchini survivront.

Un SLC, ou Maiale, exposé à Rome.

Les Maiali (cochons en italien) sont des « torpilles humaines », de leur nom officiel SLC, pour siluro a lenta corsa (it), « torpille Ă  vitesse lente »[5]. ChevauchĂ©s par un ou deux plongeurs, ces propulseurs de plongĂ©e doivent s'approcher des bateaux afin que les plongeurs y fixent la charge explosive vissĂ©e en tĂŞte de la torpille. Ils ont une autonomie de 28 km Ă  une vitesse de croisière (4 km/h) et peuvent atteindre 8 km/h[5]. Ils sont propulsĂ©s par un moteur Ă©lectrique, ce qui Ă©vite toute Ă©mission de bulles[5]. Les torpilles sont fixĂ©es dans des conteneurs sur le pont de sous-marin et peuvent ĂŞtre larguĂ©es Ă  15 mètres de profondeur[5], les plongeurs sortant par un sas. Le surnom de « cochon » avait Ă©tĂ© donnĂ© Ă  la suite du caractère un peu rĂ©tif de l'engin[5].

  • Les gamma

Les gamma sont des nageurs de combat équipés de chaussures lestées de scaphandriers pieds-lourds ou de palmes. Ils marchent sur le fond ou palment pour atteindre leurs objectifs.

Les pilotes de Maiali et les gamma utilisaient des appareils Ă  circuit fermĂ© (recycleur) de type ARO (AutoRespiratore Ossigeno, auto-respirateur Ă  oxygène mis au point par la sociĂ©tĂ© Pirelli et fonctionnant Ă  l'oxygène pur ou au mĂ©lange suroxygĂ©nĂ©. Cet appareil recycle la respiration du plongeur, Ă©vitant ainsi toute Ă©mission de bulles et permettant une grande autonomie[5]. L'air expirĂ© passe au travers d'un filtre Ă  chaux qui piège le gaz carbonique et alimente un sac dans lequel le plongeur inspire. Ce sac est alimentĂ© en oxygène par une petite bouteille d'oxygène pur mais Ă©galement par l'oxygène non consommĂ© rejetĂ© par le plongeur[5]. Mais l'appareil est dangereux Ă  plus de 6 mètres de profondeur, la pression rendant l'oxygène toxique[5].

Ces nageurs pouvaient alors transporter deux types de charges :

  • la sangsue : charge de kg d'explosifs dans une enveloppe mĂ©tallique Ă©quipĂ©e d'une ventouse de fixation ; leur flottabilitĂ© nulle permettait aux nageurs d'en porter 3 ou 4 sur un baudrier dĂ©diĂ© ;
  • la mallette : charge plus importante, elle Ă©tait Ă©quipĂ©e d'un dispositif Ă  hĂ©lice tournant lorsque la vitesse du bateau atteignait 5 nĹ“uds. Après un certain nombre de tours d'hĂ©lice programmĂ© par le plongeur, le système de dĂ©clenchement Ă  horlogerie se mettait en marche. L'explosion se produisait donc en dehors du port, pouvant laisser croire Ă  la rencontre avec une mine sous-marine.
  • Plaque de manche de la Decima Flottiglia MAS, arborant son symbole d'un crâne avec une rose entre les dents, rĂ©fĂ©rence au commandant Todaro qui estimait que la mort au combat est une belle chose parfumĂ©e comme une rose.
    Plaque de manche de la Decima Flottiglia MAS, arborant son symbole d'un crâne avec une rose entre les dents, référence au commandant Todaro qui estimait que la mort au combat est une belle chose parfumée comme une rose.
  • Le bataillon d'infanterie de marine Barbarigo de la Decima MAS est passĂ© en revue par un gĂ©nĂ©ral de la Luftwaffe en mars 1944 avant son dĂ©part pour le front d'Anzio-Nettuno.
    Le bataillon d'infanterie de marine Barbarigo de la Decima MAS est passé en revue par un général de la Luftwaffe en avant son départ pour le front d'Anzio-Nettuno.
  • Équipement de scaphandre autonome des plongeurs Gamma.
    Équipement de scaphandre autonome des plongeurs Gamma.
  • Teseo Tesei en tenue de scaphandrier.
    Teseo Tesei en tenue de scaphandrier.
  • Le commandant de la Decima MAS, capitaine de frĂ©gate Junio Valerio Borghese. Il est dĂ©corĂ©, entre autres, de la mĂ©daille d'or pour la valeur militaire (la plus haute dĂ©coration militaire italienne) et de la croix de fer allemande de 1re classe.
    Le commandant de la Decima MAS, capitaine de frégate Junio Valerio Borghese. Il est décoré, entre autres, de la médaille d'or pour la valeur militaire (la plus haute décoration militaire italienne) et de la croix de fer allemande de 1re classe.

Bibliographie

  • Prince Junio Valerio Borghese, Les Hommes-Torpilles attaquent, Paris, Amiot et Dumont, collection Bibliothèque de la mer, 1953, traduction par RenĂ© Jouan et Albert Vulliez, titre original Decima flottiglia Mas.
  • Enzo et Laurent Berrafato, "La Decima MAS, les nageurs de combat italiens de la Grande Guerre Ă  Mussolini", Histoire et Collections, 2001.

Voir aussi

Notes et références

  1. « Decima MAS : l'Italie invente les nageurs de combat », S&V - Guerres et Histoire, vol. 34,‎ , p. 75 (ISSN 2115-967X).
  2. XÂŞ Flottiglia MAS.
  3. Decima Flottiglia MAS.
  4. Cf. l'ouvrage du Prince Borghèse, Les Hommes-Torpilles attaquent, Paris, Amiot et Dumont, collection Bibliothèque de la mer, 1953, chapitre XIII: "La Xe M. A. S. en mer noire au siège de Sébastopol", p. 159-168.
  5. "Tour de cochon pour homme grenouille", Pierre Grunberg, Guerres & Histoire n° 7, juin 2012.
  6. Titulaire de la croix de fer de première classe, le « prince noir » est considéré comme le « Skorzeny italien ».
  7. « L'embase Z-drive », sur www.moteurboat.com (consulté le ).

Sources

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