Violences sexuelles et sexistes dans le cinéma français
Les violences sexuelles et sexistes dans le cinéma français sont les violences sexuelles et les violences sexistes commises par certains professionnels du cinéma en France.
À la suite de plusieurs affaires sexuelles médiatisées, les institutions du cinéma français ont commencé à organiser la profession pour endiguer celles-ci.
Historique
En 2019, à la suite des accusations d'Adèle Haenel et de la vague #MeToo, le ministre de la culture Franck Riester s'engage, lors des 2es Assises sur la parité, l’égalité et la diversité dans le cinéma, de faire accorder les aides du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) sous réserve du respect de règles contre le harcèlement sexuel [1]. Ainsi le CNC rend obligatoire des formations aux dirigeants des structures (producteurs, distributeurs et vendeurs internationaux), qui lui demandent des aides financières, pour lutter contre le harcèlement sexuel[2].
Pour sa part la télévision publique, va plus loin et s'engage sur un quotas de réalisatrices à partir de 2020, une clause de diversité contractuelle pour l'ensemble de ses productions et la création d'un « référent harcèlement sexuel sur chacun des tournages »[3].
Le CNC publie en 2017 la statistique de féminisation des « petits métiers » du cinéma français soit par exemple : 96 % chez les scriptes, 88,4 % pour les habilleuses ou 74 % pour les coiffeurs-maquilleurs. Interrogées par Virginie Ballet, une journaliste de Libération, certaines témoignent, en 2019, du climat sexiste qu’elles estiment subir sur les tournages. Peu considérées, avec un statut précaire, elles préfèrent « serrer les dents » si elles sont importunées : « Outre une question de domination masculine, c'est aussi une forme de domination sociale qui est à l'œuvre, et qui entraîne une peur de ne pas retravailler, d'être blacklistée » [4].
Lors de la 45e cérémonie des César en février 2020, le César de la meilleure réalisation est attribué à Roman Polanski, accusé et à plusieurs reprises de viol, Adèle Haenel, suivie de Céline Sciamma et d’autres professionnels, quitte la salle en criant « C'est la honte ! La honte ! » [5].
Publié à l’occasion des troisièmes assises du collectif 50/50 en 2020, le livre blanc « pour la prévention et la lutte contre le harcèlement sexuel & les violences sexistes et sexuelles dans l’audiovisuel et le cinéma » est une boîte à outils à l'usage de la profession[6] - [7]. Il est « pensé comme une aide concrète destinée aux professionnels du cinéma et de l’audiovisuel pour définir, sensibiliser, détecter, réagir » et comprend des chiffres clés, des informations légales ou encore des modèles de courriers[8].
Le métier de coordinateur d'intimité commence à prendre de l'ampleur aux États-Unis à partir de 2017. En France, il n'existe pas de formation spécifique à ce nouveau métier du cinéma[9].
Affaires médiatisées
Après Le Dernier Tango à Paris, sorti en 1972, le réalisateur Bernardo Bertolucci admet qu'il a organisé la scène du viol de Maria Schneider, la plupart du temps nue dans le film, sans la prévenir car il attendait une réaction « en tant que femme et pas en tant qu'actrice. Pour obtenir quelque chose, je pense que vous devez être complètement libre. Je ne voulais pas qu'elle joue l'humiliation et la rage, je voulais que Maria la ressente ». Bien que fictive, la sodomie imposée est destructrice pour l'actrice de 19 ans[10].
À la suite du Mouvement #MeToo et de l'affaire Harvey Weinstein, plusieurs personnalités du cinéma français sont impliquées dans des affaires d'abus sexuels [11].
Le producteur et cinéaste Luc Besson est accusé, en mai 2018, de viols par l'actrice Sand Van Roy. Puis huit autre femmes l'accusent de violences sexuelles ou de comportements déplacés. Un non-lieu est prononcé par la juge d'instruction en 2021. Les autres témoignages restent sans suite, souvent prescrits [12].
En août 2018 éclate l'affaire Gérard Depardieu, l'acteur est accusé de « viols » et d'« agressions sexuelles » par une comédienne. Il est mis en examen en 2020. En avril 2023, Mediapart publie le témoignage de 13 femmes qui accusent Gérard Depardieu de violences sexuelles lors de tournages de 11 films entre 2004 et 2022. Celui-ci conteste ces accusations[13] - [14].
En 2019, Adèle Haenel accuse le réalisateur Christophe Ruggia d’« attouchements » et de « harcèlement sexuel » entre 2001 et 2004, alors qu’elle était âgée de 12 à 15 ans [15]. À la suite de ces révélations, Valentine Monnier accuse Roman Polanski d'un nouveau viol qui se serait produit en 1975[16] - [17].
Lors du Festival de Cannes 2023, le film Le Retour de la réalisatrice Catherine Corsini, est présent alors que le procureur de la République est saisi d'allégations d'agressions sexuelles sur le tournage. Pour le collectif 50/50 : « C’est évidemment un signal dévastateur envoyé aux victimes de violences sexistes et sexuelles » [18] - [19].
Références
- « Les professionnels du cinéma vont devoir se former à la prévention des violences sexuelles », sur Le Monde, (consulté le )
- « Harcèlement sexuel : les petits pas du cinéma français », Les Échos, (lire en ligne).
- « Sexisme et abus dans le cinéma : la fin du hors-champ ? », sur Libération, (consulté le )
- « Sexisme dans le cinéma Scriptes, costumières… : « On a peur d’être blacklistées » », sur Libération.fr, (consulté le )
- « Césars : le changement, c’est pas maintenant », sur Libération.fr, (consulté le )
- « Cinéma français : «Certaines injustices persistantes mettent profondément en colère» », sur Libération.fr, (consulté le )
- « Un Livre blanc pour la prévention des violences sexuelles dans le cinéma français », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Assises 50/50 : deux jours de débats passionnants et un “Livre blanc” pour l’égalité », sur Télérama (consulté le )
- « Monia Aït El Hadj, coordinatrice d'intimité, un métier du cinéma post-#MeToo », sur France Culture, (consulté le )
- Thomas Messias, « «Tu t'appelais Maria Schneider», le lent poison du traumatisme », Slate, (lire en ligne, consulté le ).
- « De Polanski à Boutonnat en passant par Berry et Depardieu... Une année aux enfers pour le cinéma français », Le Figaro, (lire en ligne, consulté le ).
- « Luc Besson accusé de viol : le non-lieu confirmé en appel », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
- « Violences sexuelles : ce que l'on sait des nouvelles accusations contre Gérard Depardieu », france Info, (lire en ligne).
- Marine Turchi, « Gérard Depardieu, une complaisance française », Mediapart, (lire en ligne, consulté le ).
- « Adèle Haenel a décidé de porter plainte contre le réalisateur Christophe Ruggia », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
- « Une photographe française accuse Roman Polanski de l’avoir violée en 1975 », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
- (en) Liz Alderman et Elian Peltier, « Roman Polanski Accused of 1975 Rape », The New York Times, (lire en ligne, consulté le ).
- Céline Rouden, « Festival de Cannes 2023 : « Le Retour » de Catherine Corsini en compétition malgré la polémique », sur La Croix, (consulté le )
- Cécile Vargoz, « Le Retour à Cannes fait réagir », sur BoxOffice, (consulté le )
Article connexe
Lien externe
- Kit de prévention à l'égard des violences à caractère sexuel, du harcèlement sexuel et des propos ou comportements sexiste, établi par les CCHSCT des productions audiovisuelle, cinématographique et publicitaire ainsi que Le Collectif 50/50 soutenu par le Centre national du cinéma et de l'image animée, édition de mars 2022.