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Tribunal militaire international pour l'ExtrĂȘme-Orient

Le Tribunal militaire international pour l'ExtrĂȘme-Orient, en abrĂ©gĂ© TMIEO[N 1], aussi nommĂ© Tribunal de Tokyo, Tribunal militaire de Tokyo, est crĂ©Ă© le pour juger les grands criminels de guerre japonais de la Seconde Guerre mondiale lors du procĂšs de Tokyo.

Le Tribunal militaire international pour l'ExtrĂȘme-Orient dans le quartier d'Ichigaya Ă  Tokyo.

L'origine de sa création

La création du TMIEO n'est qu'une des piÚces d'un ensemble plus vaste de mesures prises pour réprimer les crimes de guerre[N 2]. On doit citer d'abord le cas du général Tomoyuki Yamashita, condamné à mort le et exécuté aux Philippines le ; on parle d'un précédent en jurisprudence internationale, dénommé « responsabilité du commandement » ou « norme Yamashita ». Le général Masaharu Honma, extradé aux Philippines, y fut également exécuté le . Au Japon, des criminels de guerre de classe B (comme Soemu Toyoda) et C[2] furent jugés à Tokyo et à Yokohama[3]. Hiroshi Tamura fut condamné à huit ans de prison en février 1949.

Entre janvier 1946 et décembre 1948, les Britanniques conduisirent 304 procÚs, concernant 909 accusés qui aboutirent à 222 condamnations à mort.

Les grands textes

DĂšs 1942, par la dĂ©claration de Saint-James, les reprĂ©sentants de dix-huit nations avaient affirmĂ© leur volontĂ© de poursuivre les criminels de guerre dans le cadre d'une juridiction internationale. Mais cette dĂ©claration, toute de principe, n'avait en vue que les crimes commis par les troupes nazies sur le thĂ©Ăątre d'opĂ©ration europĂ©en, ce qui fit rĂ©agir le reprĂ©sentant chinois Ă  Londres. À l'occasion de la dĂ©claration de Moscou, les ministres des Affaires Ă©trangĂšres des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de l'URSS rĂ©affirment cette volontĂ© de justice. Les crimes perpĂ©trĂ©s par les armĂ©es japonaises n'y sont toujours pas pris en considĂ©ration. La dĂ©claration de Moscou pose toutefois un principe qui soutiendra ultĂ©rieurement la crĂ©ation du tribunal militaire international pour l'ExtrĂȘme-Orient : il y Ă©tait en effet prĂ©cisĂ© que ceux qui avaient commis des crimes sans localisation prĂ©cise devraient ĂȘtre punis par une dĂ©cision conjointe des AlliĂ©s. Une commission des crimes de guerre des Nations-Unies est d'ailleurs mise en place Ă  cette Ă©poque pour rĂ©pertorier les criminels de guerre ; mais ce n'est qu'au printemps 1944 que la Commission spĂ©cialement dĂ©diĂ©e Ă  l'ExtrĂȘme-Orient et au Pacifique commencera Ă  Ă©tablir la liste des suspects[N 3].

C'est finalement Ă  la proclamation de Potsdam du , que les reprĂ©sentants des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de la Chine, rendant publiques les conditions d'une reddition du Japon, firent spĂ©cifiquement connaĂźtre leur intention de conduire en justice les criminels de guerre japonais (l'URSS, toujours liĂ©e au Japon par un traitĂ© de non-agression, s'Ă©tait abstenue de prendre part Ă  cette dĂ©cision).

Le c'est le bombardement d'Hiroshima, le , c'est celui de Nagasaki et l'entrĂ©e en guerre de l'Union SoviĂ©tique contre le Japon ; le le Japon fait savoir qu'il accepte les termes de la dĂ©claration de Potsdam Ă  l'exception des dispositions qui viseraient l'empereur ; le 14 le Japon fait connaĂźtre sa pleine acceptation de la dĂ©claration de Potsdam : le 15 c'est l'allocution de l'empereur (Gyokuon-hƍsƍ).

Le la Commission des crimes de guerre des Nations unies — UNWCC — avait publiĂ© ses recommandations concernant la poursuite des criminels de guerre japonais Draft Summary of Recommandations concerning Japanese War Crimes and Atrocities[4]. Au sein de l'UNWCC, le ComitĂ© pour l'ExtrĂȘme-Orient fut Ă  l'origine de la crĂ©ation d'un sous-comitĂ© chargĂ© de la poursuite des criminels de guerre japonais ; crĂ©Ă© en mai 1944, celui-ci s'Ă©tablit Ă  Chungking/Chongqing le [5], puis Ă  Nankin ; ce sous-comitĂ© - sur lequel on ne dispose que de peu d'informations - dressa lui-mĂȘme une liste de suspects, qui fut augmentĂ©e des noms d'autres personnes signalĂ©es par les diverses autoritĂ©s militaires ; il publia trente-six listes portant en tout sur 3 147 suspects World War II in Asia and the Pacific and the War's aftermath, with general themes de Loyd E. Lee[6].

Le , dans le cadre du document qui devait dĂ©finir la politique gĂ©nĂ©rale des États-Unis au Japon, le ComitĂ© Interarmes (State War Navy Coordinating Committee — SWNCC —) Ă©voque la poursuite des criminels de guerre. Ce document — SWNCC150/4 — sera approuvĂ© par Truman le 6 septembre, et rendu public le 22 US Initial Post-Surrender Policy for Japan (en).

Alors que les premiers éléments avancés des forces américaines ont pris pied au Japon le 30 août, la reddition japonaise est signée le 2 septembre[N 4] sur l'USS Missouri. Les actes de capitulation du Japon évoquent la question des crimes de guerre.

La mise en place du tribunal

Les Américains entrent à Tokyo le 8 septembre[7].

Le , le Commandant suprĂȘme des forces alliĂ©es (ou SCAP, Supreme Commander of the Allied Power), Douglas MacArthur, fait procĂ©der Ă  l'arrestation de trente-neuf suspects dont le gĂ©nĂ©ral Hideki Tojo[N 5]. Ce mĂȘme jour il ordonne la dissolution du Quartier GĂ©nĂ©ral de l'ArmĂ©e Japonaise — mais le ministĂšre de la guerre est encore maintenu ; la veille la censure avait Ă©tĂ© instaurĂ©e par la directive SCAPIN 16 (connue sous le nom de "Freedom of Speech and Press" directive) : dans les jours qui suivirent, le SCAP s'opposera Ă  la publication de la liste des personnes recherchĂ©es pour crime de guerre dans les journaux japonais[8] - [N 6]).

Le 6 octobre 1945 (on trouve aussi le 8 octobre) le ComitĂ© Interarmes enjoint Ă  MacArthur de mettre en place les moyens de juger les criminels de guerre les plus importants[9] ; cela visait les personnes suspectĂ©es d'avoir elles-mĂȘmes planifiĂ© la guerre, violĂ© des traitĂ©s ou qui ont participĂ© Ă  une conspiration visant Ă  la rĂ©alisation de ces mĂȘmes crimes. La directive prĂ©cisait Ă©galement que les faits examinĂ©s en vue du jugement pourraient remonter jusqu'au 4 juin 1928, date de l'assassinat de Chang Zolin[N 7]. Ces instructions adressĂ©es au SCAP, ainsi que le mĂ©morandum qui y Ă©tait joint, ne furent communiquĂ©s aux alliĂ©s que vers la fin octobre[10].

Les 12 et 14 novembre 1945 la Commission des crimes de guerre Ă©tablit une liste de personnes suspectes.

Le 19 novembre, MacArthur ordonne une série d'arrestations[N 8].

Le Joseph Keenan est nommĂ© Procureur en chef par le prĂ©sident Truman. ArrivĂ© Ă  Tokyo le 6 dĂ©cembre — accompagnĂ© de trente-neuf collaborateurs — Keenan recueille documents et tĂ©moignages ; c'est aussi lui qui Ă©labore la Charte du Tribunal militaire international pour l'ExtrĂȘme-Orient.

Le , publication des rÚgles devant régir le procÚs des personnes accusées de crime de guerre[11].

Le 3 dĂ©cembre, MacArthur fait procĂ©der Ă  une troisiĂšme vague d'arrestation. Parmi les personnes arrĂȘtĂ©es figurent notamment des membres de la cour impĂ©riale, ce qui fit forte impression au Japon[N 9]. Devançant sa probable arrestation, le prince Fumimaro Konoe se suicida le 16 dĂ©cembre. À la fin de l'annĂ©e 1945, parmi les 1200 personnes arrĂȘtĂ©es dans le cadre de cette procĂ©dure, ce sont 80 personnes qui devaient rĂ©pondre d'accusation de crime de guerre de catĂ©gorie A.

Le , une dĂ©claration des ministres des Affaires Ă©trangĂšres des États-Unis, du Royaume-Uni et de l'URSS reconnaissent au SCAP l'entiĂšre autoritĂ© pour mener Ă  bien les dispositions arrĂȘtĂ©es par l'acte de reddition[12].

La Charte

Le , la Charte est promulguĂ©e par le Commandement suprĂȘme des forces alliĂ©es.

Des juges du Tribunal reprĂ©sentant la Grande-Bretagne, les États-Unis, l'Australie (juge en chef Webb), la Chine et l'URSS

Pour juger des crimes de guerre majeurs

En son article premier, la charte pose que Tribunal militaire international pour l'ExtrĂȘme Orient est Ă©tabli afin de procĂ©der au jugement rapide et Ă©quitable[N 10], des criminels de guerre majeurs ; son siĂšge permanent Ă©tant Ă  Tokyo.

La nature des crimes soumis Ă  la juridiction du tribunal est prĂ©cisĂ©e dans son article 5. Si le Tribunal pourra juger de toute accusation de crime de guerre, les prĂ©venus qui lui seront prĂ©sentĂ©s devront nĂ©cessairement ĂȘtre accusĂ©s de crime de guerre de classe A[N 11].

Cette classification est quasiment identique à celle établie par la Charte de Londres du Tribunal militaire international qui faisait l'objet de l'Accord de Londres du 8 août 1945 et qui avait été conçue pour le ProcÚs de Nuremberg

En matiÚre de crime contre l'humanité, les définitions s'appliquant à Nuremberg et à Tokyo diffÚrent : alors qu'à Nuremberg il ne concernait que les populations civiles, à Tokyo, cette précision a disparu : les prisonniers de guerre sont ainsi également « couverts » par cette définition.

Une autre différence avec Nuremberg : l'absence de poursuites contre des organisations en tant que telles.

La notion de crime contre l'humanité fut précisée par la résolution des Nations-Unies du : crime commis en exécution d'un plan concerté visant à détruire une communauté dans son ensemble. Par ailleurs, parallÚlement au procÚs qui se met en place, le SCAP organise l'épuration de la société japonaise par la directive[13] du .

Un collĂšge de juges et de procureurs internationaux

Les 11 juges le 29 juillet 1946.

L'article 2 de la Charte dĂ©finit la composition du collĂšge des juges. LimitĂ© d'abord Ă  neuf juges - autant que des pays signataires de l'Acte de reddition – le nombre de juges fut portĂ© Ă  onze[N 12]. Ce mĂȘme jour, la FEC demande que l'Inde et les Philippines soient reprĂ©sentĂ©es chacune par un juge au tribunal (le , le secrĂ©tariat du tribunal prenant acte de cette dĂ©cision demandera Ă  ces deux pays de dĂ©signer chacun un juge ; l'article II de la Charte sera amendĂ© en consĂ©quence le 26 avril[14] Ă  11 juges pour inclure l'Inde et les Philippines.

À la suite de la promulgation de la Charte, MacArthur enjoignit aux membres de la Commission d'ExtrĂȘme-Orient de lui proposer le nom d'un juge et d'un procureur adjoint avant le . Les propositions concernant les juges lui parviendront le : MacArthur les dĂ©signe le jour mĂȘme. Il s'agit de Higgins (remplacĂ© ensuite par Myron Cramer) pour les États-Unis, Zarayanov pour l'Union SoviĂ©tique, Lord Patrick pour le Royaume-Uni, Henri Reimburger[N 13] (remplacĂ© ensuite par Henri Bernard[N 14]) pour la France, Röling (en) pour les Pays-Bas, MeiJu Hao pour la Chine, William Webb (en) pour l'Australie, Erima Northcroft (en) pour la Nouvelle-ZĂ©lande et Stuart Mac Dougall pour le Canada. Enfin, le , il nomme le juge Webb prĂ©sident du tribunal.

Devant les protestations de l'Inde et des Philippines, qui ne sont pas reprĂ©sentĂ©es au tribunal (membres de la Commission d'ExtrĂȘme Orient, ces pays n'Ă©taient pas signataires de l'acte de reddition — pour la bonne raison qu'ils n'accĂ©dĂšrent Ă  l'indĂ©pendance qu'en 1947 et 1946), MacArthur promulgue un amendement Ă  la Charte le qui fixe le nombre de juges Ă  onze et non plus Ă  neuf : Radhabinod Pal reprĂ©sentera l'Inde et Delfin Jaranilla (en) les Philippines.

La Charte prĂ©cisait, dans son article 8, que toutes les nations ayant Ă©tĂ© en guerre contre le Japon avaient la facultĂ© de dĂ©signer un procureur adjoint. Seules les onze nations de la Commission d'ExtrĂȘme-Orient le feront : Arthur Comyns Carr (G.B.), Hsiang Che-Chun (Chine), Frederick Borgerhoff-Mulder (Pays-Bas), Robert Oneto (France), Alan Mansfield (Australie), Henri Nolan (Canada), Ronald Quillian (Nouvelle ZĂ©lande), P. Govinda Menon (Inde), Pedro Lopez (Philippines) et enfin Sergei Alexandrovitch (URSS). Ainsi, de trente-neuf AmĂ©ricains, le pool de procureurs connu sous le nom de International Prosecution Section put passer Ă  un groupe multinational de cinq cents personnes (juristes, stĂ©nographes et employĂ©s confondus).

Sadao Araki, ministre de l'ArmĂ©e, ministre de l'Éducation dans le cabinet Konoe et l'un des principaux thĂ©oriciens du rĂ©gime shĂŽwa.

Vingt-huit prévenus

Le Tribunal visait trois catégories de personnes différentes :

  • les hauts responsables ;
  • les officiers militaires ;
  • les officiers de grades infĂ©rieurs.

Plusieurs personnes ne comparurent pas devant le tribunal, en raison de leurs appuis ou des informations qu'ils détenaient.

Les procureurs adjoints et des reprĂ©sentants de l'administration amĂ©ricaine formĂšrent un comitĂ© exĂ©cutif chargĂ© de choisir parmi les 80 prĂ©venus lesquels seraient prĂ©sentĂ©s au tribunal. Au bout de dix semaines et de longs dĂ©bats, le ComitĂ© arrĂȘta d'abord une liste de vingt-six personnes, qui dut ĂȘtre modifiĂ©e devant l'insistance du procureur soviĂ©tique tardivement intĂ©grĂ© au ComitĂ©. RĂ©clamĂ©s par les soviĂ©tiques, le gĂ©nĂ©ral Umezu et le ministre Shigemitsu — signataires de l'acte de reddition — seront arrĂȘtĂ©s et internĂ©s Ă  la prison de Sugamo : ce seront donc 28 personnes qui devront comparaĂźtre devant le Tribunal (19 militaires et 9 civils) :

Au début de la procédure il était prévu de présenter au tribunal (au moins) un autre groupe de prévenus. Cependant dÚs décembre 1946 cela ne sembla plus envisageable. La décision officielle de s'en tenir à ces 28 personnes fut prise immédiatement aprÚs la fin du procÚs[16].

L'empereur préservé

DĂšs avant la fin du conflit, les questions de la responsabilitĂ© de l'empereur d'une part et de l'institution impĂ©riale en tant que telle d'autre part, avaient Ă©tĂ© l'objet de rĂ©flexions et de dĂ©bats par diffĂ©rentes autoritĂ©s amĂ©ricaines mais aussi alliĂ©es (il y avait d'ailleurs eu un prĂ©cĂ©dent cĂ©lĂšbre Ă  la suite de la PremiĂšre Guerre mondiale : celui de Guillaume II que le traitĂ© de Versailles avait voulu, en vain, faire comparaĂźtre devant des juges). De leur cĂŽtĂ©, les diplomates japonais Ă  la recherche d'une issue furent longtemps opposĂ©s Ă  une reddition sans condition notamment par crainte de mettre en danger ainsi l'empereur et l'institution impĂ©riale (Ă  cet Ă©gard, l'acte de reddition, s'il appelait Ă  la reddition inconditionnelle aux Puissances AlliĂ©es du Quartier gĂ©nĂ©ral impĂ©rial japonais, de toutes les forces armĂ©es japonaises et de toutes les forces armĂ©es sous contrĂŽle japonais, mĂ©nageait habilement l'avenir en posant : Dans la direction de l'État, l'autoritĂ© de l'Empereur et du Gouvernement japonais sera subordonnĂ©e Ă  celle du Commandant SuprĂȘme des Puissances AlliĂ©es
 ce qui n'excluait pas d'envisager le maintien de l'institution impĂ©riale)[N 15] - [17].

Les AmĂ©ricains Ă©taient encore trĂšs partagĂ©s sur ces points non seulement au moment mĂȘme de la reddition, mais aussi dans les mois qui suivirent[18] : des dĂ©clarations, des directives officielles contradictoires furent publiĂ©es, tandis que des discussions officieuses se dĂ©roulaient. L'opinion de MacArthur sur ces points semble s'ĂȘtre formĂ©e dĂšs mai 1945[19] aussi son entretien informel avec Hirohito Ă  l'ambassade amĂ©ricaine le 27 septembre, tout important qu'il fut, n'aura fait que confirmer son opinion. Du cĂŽtĂ© japonais, seuls les communistes appelaient au jugement de Hirohito (et mĂȘme de l'impĂ©ratrice) ; plusieurs voix cependant Ă©voquaient l'abdication de l'empereur, comme Naruhiko Higashikuni ou encore Fumimaro Konoe (qui voyaient dans l'abdication un moyen pour Hirohito d'Ă©chapper Ă  un Ă©ventuel jugement[19]). Le prince Higashikuni accorda notamment une entrevue au Yomiuri-HĂŽchi, reprise en mars 1946 dans le New York Times, au cours de laquelle il dĂ©clara avoir suggĂ©rĂ© Ă  l’Empereur « trois moments propices » pour son abdication et que le prince Nobuhito Takamatsu, frĂšre de Hirohito, servira probablement comme rĂ©gent jusqu’à la majoritĂ© du prince hĂ©ritier Akihito en raison de la maladie du prince Yasuhito Chichibu[20].

Finalement, c'est le point de vue de MacArthur — proposĂ© depuis longtemps par d'autres personnes et notamment par Hugh Borton au DĂ©partement d'État — qui devait prĂ©valoir[N 16] - [21]. Cela fut encore Ă©voquĂ© dans la presse le 18 janvier 1946[22] : le maintien de l'empereur Ă©tant considĂ©rĂ© comme nĂ©cessaire Ă  la stabilitĂ© du Japon dĂ©vastĂ© et occupĂ©[N 17], non seulement l'empereur ne serait pas accusĂ©, mais il ne devrait mĂȘme pas comparaĂźtre comme tĂ©moin au tribunal. En Ă©change, et comme un premier pas vers la redĂ©finition des pouvoirs de l'empereur que devra prĂ©voir la nouvelle Constitution du Japon alors encore Ă  l'Ă©tat de projet, il fut obtenu de l'empereur qu'il renonce Ă  son statut divin (dĂ©claration du ).

Pour rendre acceptable cette non-inculpation de l'empereur — qui ne fut connue du public que le par une dĂ©claration officielle du procureur en chef Keenan — il fut dĂ©cidĂ© de le prĂ©senter comme une autoritĂ© purement symbolique, tenu Ă  l'Ă©cart des affaires du monde, sans aucun pouvoir de dĂ©cision : cela exigea une certaine coopĂ©ration des accusĂ©s eux-mĂȘmes, tout autant que la non-comparution des proches de l'empereur dont certains pourtant s'Ă©taient trĂšs directement compromis.

Ainsi, en raison d'un pacte de collaboration conclu entre MacArthur et l'empereur Hirohito, ce dernier conserva son poste en dĂ©pit de nombreuses pressions d'abdication provenant mĂȘme de membres de sa famille[N 18] - [23]. En vertu de cet accord, des membres de la famille impĂ©riale impliquĂ©s dans la commission de crimes de guerre ou dans la conduite des opĂ©rations militaires ne furent pas inquiĂ©tĂ©s : les frĂšres de l'empereur, Yasuhito Chichibu, maĂźtre d'Ɠuvre de l'opĂ©ration Lys d'or, et Nobuhito Takamatsu ou encore des parents plus Ă©loignĂ©s comme le prince Hiroyasu Fushimi, le prince Naruhiko Higashikuni, le prince Yasuhiko Asaka, instigateur du massacre de Nankin et le prince Tsuneyoshi Takeda.

Ce souci de la prĂ©servation de l'empereur, tout partagĂ© qu'il pĂ»t ĂȘtre par les accusĂ©s eux-mĂȘmes — du moins assurĂ©ment par certains d'entre eux[N 19] — demandait Ă  ce qu'aucun des tĂ©moignages lors des sĂ©ances du Tribunal ne laisse supposer que l'empereur ait pu prendre part aux dĂ©cisions.

Hirohito et l'étalon impérial Shirayuki.

L'unité 731 occultée

De plus, les membres de l'unité de recherche bactériologique Unité 731, comme Shiro Ishii, ne furent pas inquiétés en échange d'informations sur les résultats de leurs « travaux »[24] dont il ne fut fait mention devant le tribunal qu'à une trÚs brÚve occasion et de façon trÚs lacunaire.

La preuve de la poursuite effleura le dossier des armes bactériologiques lorsqu'un procureur déposa en preuve un affidavit du soldat déserteur Hataba, ancien membre de l'unité 1644. Cet affidavit censuré contenait une mention de trois phrases relatives à l'injection de sérum empoisonné à des civils de Nanjing. Questionné par le Président du Tribunal, le juge Webb, qui s'inquiéta de la portée de cette affirmation, et réalisant son erreur d'inattention, le procureur déclara ne pas avoir de preuve supplémentaire à offrir sur cette allégation. Conséquemment, la mention fut donc retirée du procÚs-verbal à la demande de la défense par le juge Webb[N 20].

En 1981, le Bulletin of the Atomic Scientists publia un article par John W. Powell expliquant en dĂ©tail les expĂ©rimentations de l'UnitĂ© 731 et les tests Ă  l'air libre sur les populations civiles. Cet article Ă©tait accompagnĂ© d'un mot du juge nĂ©erlandais B. V. A. Röling, dernier survivant du Tribunal, qui notait : « Comme membre du Tribunal, c'est pour moi une expĂ©rience amĂšre d'ĂȘtre informĂ© aujourd'hui que des actes criminels de la nature la plus abjecte, ordonnĂ©s par le gouvernement central du Japon, ont Ă©tĂ© tenus Ă  l'Ă©cart de la Cour par le gouvernement des États-Unis »[25].

Autres exemptions

De nombreux criminels ont bĂ©nĂ©ficiĂ© des rivalitĂ©s entre les forces nationalistes de Chiang et les communistes de Mao pour Ă©chapper Ă  la justice. Mentionnons parmi eux le gĂ©nĂ©ral Yasuji Okamura, instigateur des maisons de confort oĂč Ă©taient employĂ©es les femmes de rĂ©confort et maĂźtre d'Ɠuvre de la Politique des Trois Tout (äž‰ć…‰äœœæˆŠ, Sankƍ Sakusen, « tue tout, brĂ»le tout, pille tout »), une stratĂ©gie de la terre brĂ»lĂ©e, ou encore Masanobu Tsuji, instigateur du massacre de Singapour et complice de la marche de la mort de Bataan.

Le déroulement du procÚs

Le tribunal Ă©tait localisĂ© au centre de Tokyo — quartier d'Ichigaya — dans les anciens bĂątiments de l'acadĂ©mie militaire qui avait accueilli pendant la guerre le quartier gĂ©nĂ©ral de l'ArmĂ©e de terre. La disposition de la salle du tribunal Ă©tait semblable Ă  celle de Nuremberg. La premiĂšre audience se tient le . Les audiences Ă©taient publiques.

Le crime contre la paix : une innovation qui fit débat

La dĂ©fense contesta rapidement — mais finalement en vain — les fondements juridiques de cette accusation : ce crime n'ayant pas d'existence juridique avant la crĂ©ation du tribunal, le principe de la non-rĂ©troactivitĂ© des lois aurait dĂ» interdire qu'on s'en servit contre les prĂ©venus. Il leur fut opposĂ© divers traitĂ©s internationaux : la Seconde confĂ©rence de La Haye de 1907, le TraitĂ© de Versailles de 1919, le Pacte Briand-Kellog de 1928 (qu'avait signĂ© le Japon).

Tous les accusés furent reconnus coupables de ce crime, pour l'une ou l'autre des guerres entreprises par le Japon.

L'Ă©tablissement de la preuve

Étant donnĂ© la raretĂ© des documents Ă©crits, en raison notamment des destructions opĂ©rĂ©es par les autoritĂ©s japonaises juste avant l'arrivĂ©e des AmĂ©ricains, furent admis comme preuves des documents Ă  l'authenticitĂ© parfois contestables comme le mĂ©morandum Tanaka (1927) par exemple.

Les Japonais et le procĂšs

Le gouvernement amĂ©ricain et le SCAP Ă©taient attentifs aux rĂ©actions de l'opinion publique japonaise — tout encadrĂ©e qu'elle ait pu ĂȘtre — Ă  la nouvelle du procĂšs et au procĂšs lui-mĂȘme.

La tentative de suicide de Tojo fit sensation. Loin de susciter la compassion ou la rĂ©volte de la population, ce geste ratĂ© — et donc honteux au regard des sentiments d'honneur communĂ©ment partagĂ©s — fut plutĂŽt cause d'incomprĂ©hension et d'anxiĂ©tĂ©. Les Japonais auraient compris que Tojo se suicidĂąt Ă  l'annonce de la reddition ; qu'il le fĂźt au moment oĂč il Ă©tait en position de dĂ©fendre le Japon Ă  la barre d'un tribunal fut vĂ©cu comme un dangereux abandon pouvant placer l'empereur exposĂ© en premiĂšre ligne. À mesure que la presse — soumise Ă  la censure amĂ©ricaine depuis le 11 septembre — rapportait les crimes perpĂ©trĂ©s par les troupes japonaises, se rĂ©pandit dans la population le sentiment d'avoir Ă©tĂ© trompĂ©e par les militaires et les bureaucrates : les nouvelles des arrestations n'excitĂšrent pas la passion des foules par ailleurs aux prises avec un quotidien trĂšs difficile[26].

L'attachement Ă  la personne de l'empereur Ă©tait trĂšs fort (les opinions activement Ă©mises par les communistes japonais n'ayant qu'une faible audience). Le gouvernement de Naruhiko Higashikuni voulut s'appuyer sur ce sentiment pour enrayer le mouvement de libĂ©ralisation impulsĂ© par les AmĂ©ricains : Ă  la suite de l'Ă©moi suscitĂ© par la publication dans la presse d'une photo prĂ©sentant l'empereur et MacArthur (lors de leur cĂ©lĂšbre entrevue du 27 septembre), le ministre de l'intĂ©rieur Yamazaki Iwao tenta, le 29 septembre, de saisir les journaux en cause. Les AmĂ©ricains rĂ©agirent fortement en Ă©mettant une directive — SCAPIN 66 — antidatĂ©e du 27 septembre — mettant fin notamment au crime de lĂšse-majestĂ© encore en vigueur[27] ; de plus, ils exigĂšrent la dĂ©mission de Yamazaki Iwao ; le 4 octobre la directive SCAPIN 93 prolongea les dispositions prises le 27 septembre[N 21]. Naruhiko Higashikuni prĂ©senta alors la dĂ©mission de son gouvernement le 5 octobre[28].

Les sentiments Ă  l'Ă©gard de Tojo Ă©voluĂšrent favorablement car s'attachant Ă  dĂ©fendre la politique menĂ©e par le Japon il ne centrait pas sa dĂ©fense directement autour de ses intĂ©rĂȘts personnels Ă  la diffĂ©rence des autres accusĂ©s.

En fait, comme l'exposa un rapport produit par les autoritĂ©s amĂ©ricaines en aoĂ»t 1948[26], l'acceptation du ProcĂšs par les Japonais, loin de tĂ©moigner d'une rĂ©Ă©valuation critique du passĂ© rĂ©sultait plus d'un trait culturel largement partagĂ© voulant que le vaincu soit totalement soumis au vainqueur
 trait qui avait justement Ă©tĂ© prĂ©cĂ©demment la cause de bien des horreurs (ainsi que le releva le juge Röling Ă  l'issue du ProcĂšs).

Le verdict

DĂ©fendeurs au Tribunal militaire international pour l'ExtrĂȘme-Orient : (premiĂšre rangĂ©e, de gauche Ă  droite) Premier ministre japonais Tojo Hideki, l'amiral Oka Takazumi, (derniĂšre rangĂ©e, de gauche Ă  droite) PrĂ©sident du Conseil privĂ© du Japon Hiranuma Kiichiro, ministre des Affaires Ă©trangĂšres du Togo Shigenori

Si les dĂ©bats prirent fin le , il fallut plusieurs mois aux juges pour rĂ©diger leur jugement qu'ils rendirent public du 4 au . Yƍsuke Matsuoka et Osami Nagano Ă©tant morts de causes naturelles (tuberculose, attaque cardiaque) pendant le procĂšs, Okawa Shumei ayant Ă©tĂ© internĂ© pour troubles mentaux dĂšs le dĂ©but de la procĂ©dure, le verdict ne concerna que 25 accusĂ©s sur les 28. Tous furent dĂ©clarĂ©s coupables (Ă  Nuremberg, il y eut des acquittements). Des cinquante-cinq chefs d'accusation — soit par insuffisance de preuves soit par amalgame de charges voisines — seuls dix furent Ă©voquĂ©s dans le verdict (huit au titre de guerre d'agression, deux au titre d'atrocitĂ©s).

AussitĂŽt, les dĂ©fenseurs introduisent un recours auprĂšs du gĂ©nĂ©ral MacArthur (au titre de l'article 17 de la Charte) qui, aprĂšs consultation du Conseil InteralliĂ© pour l'ExtrĂȘme-Orient le 22 novembre, confirme finalement la dĂ©cision du tribunal le 24 novembre[16]. Sept condamnĂ©s tentĂšrent encore de saisir la Cour suprĂȘme des États-Unis, qui se dĂ©clara finalement incompĂ©tente le 20 dĂ©cembre.

L'exécution des sept condamnés à la peine de mort suivit aussitÎt. Ils furent pendus le dans la prison de Sugamo[29]. Il s'agissait de :

Aucune photographie de l'exécution ne fut permise ; les corps des condamnés furent incinérés et leurs cendres dispersées par avion au-dessus de la baie de Tokyo afin de prévenir toute commémoration ultérieure autour d'une tombe. Une source japonaise plus tardive prétend toutefois qu'une partie des cendres, soustraite à cette dispersion, aurait été enterrée prÚs de Nagoya en 1960[30].

Tous les autres prĂ©venus furent condamnĂ©s Ă  des peines d'emprisonnement de 7 ans (Mamoru Shigemitsu), 20 ans (Shinegori Togo), ou Ă  perpĂ©tuitĂ© (Sadao Araki, Kingoro Hashimoto, Shunroku Hata, Kiichiro Hiranuma, Naoki Hoshino, Okinori Kaya, Kƍichi Kido, Kuniaki Koiso, Jiro Minami, Takazumi Oka, Hiroshi Oshima, Kenro Sato, Shigetaro Shimada, Toshio Shiratori, Teiichi Suzuki, Yoshiro Umezu). Kuniaki Koiso, Toshio Shiratori, Yoshijiro Umezu et Shigenori Tƍgƍ moururent en prison durant leur peine.

Le 24 dĂ©cembre 1948, Ă  la suite d'une dĂ©cision du gouvernement amĂ©ricain mais contre l'avis de MacArthur, dix-neuf prĂ©venus accusĂ©s de crime de guerre de classe A furent libĂ©rĂ©s (six autres Ă©taient morts en dĂ©tention — comme le gĂ©nĂ©ral Hayao Tada — ou avaient Ă©tĂ© libĂ©rĂ©s plus tĂŽt[N 22]) : les juristes pensaient qu'il y avait peu de chances qu'ils soient condamnĂ©s au titre de crime de guerre de classe A suivant la jurisprudence Ă©tablie par le procĂšs de Tokyo (deux d'entre eux furent toutefois ultĂ©rieurement poursuivis de nouveau, cette fois pour crimes de guerre conventionnels)[30]. Okawa Shumei, qui avait recouvrĂ© ses esprits depuis longtemps, fut Ă©galement libĂ©rĂ© de son asile une semaine aprĂšs ces exĂ©cutions[31].

Certains des hommes politiques suspectĂ©s de crime de guerre qui ne furent pas jugĂ©s par le tribunal purent reprendre une vie politique, aprĂšs la fin de l'interdiction de participation aux affaires publiques, en 1952, comme Nobusuke Kishi qui fut premier ministre en 1957, ou Ryƍichi Sasakawa.

Les suites du procĂšs

En 1949, la ville de Khabarovsk sera le lieu des ProcĂšs de Khabarovsk, oĂč furent jugĂ©s douze criminels de guerre japonais, anciens membres de l'ArmĂ©e japonaise du Guandong pour l'utilisation d'armes biologiques produites par l'UnitĂ© 731 dans la rĂ©gion de Changde pendant la Seconde Guerre mondiale.

Le premier fĂ©vrier 1950, les SoviĂ©tiques appellent les États-Unis et leurs alliĂ©s Ă  instituer un tribunal d'exception pour juger l'empereur ainsi que quatre gĂ©nĂ©raux japonais, dont Ishii, au titre de crime contre l'humanitĂ©. Un refus leur est notifiĂ© par le biais d'un communiquĂ© de presse en date du 3 fĂ©vrier[30].

Le 7 (17) mars 1950 le commandement américain publie la circulaire no 5 Clemency for War Criminals prévoyant la libération anticipée de prisonniers ayant fait preuve de bonne conduite. Mamoru Shigemitsu profite de cette disposition : il est relùché sur parole le .

Par le TraitĂ© de San Francisco — signĂ© le , qui prendra effet le — le Japon s'est engagĂ© Ă  respecter le verdict du tribunal (en comparaison, l'attitude du gouvernement de la RĂ©publique fĂ©dĂ©rale d'Allemagne sera beaucoup plus ambiguĂ« concernant le ProcĂšs de Nuremberg ; Ă  l'inverse, le gouvernement allemand conduira lui-mĂȘme quelques procĂšs aprĂšs son indĂ©pendance, ce que ne fit pas le Japon)[32].

Dans les années 1950 s'exprima un mouvement demandant l'aménagement des peines prononcées, voire l'amnistie des condamnés. Plus de dix millions de personnes pétitionnÚrent en faveur des criminels de guerre emprisonnés[33].

Le , le baron Kiichiro Hiranuma est libéré sur parole pour raisons de santé[34].

Le , le Président Harry Truman émet l'ordre exécutif no 10393 instituant un comité chargé d'examiner les demandes d'atténuation des peines formulées par le gouvernement japonais[35] - [36].

À compter de 1954, les condamnĂ©s furent libĂ©rĂ©s par le nouveau Parti libĂ©ral dĂ©mocrate et le retour au pouvoir d'anciennes personnalitĂ©s influentes du rĂ©gime shĂŽwa comme Ichiro Hatoyama et Nobusuke Kishi. En 1954, Hashimoto KingorĂŽ, Hata Shunroku, Minami JirĂŽ, et Oka Takazumi furent libĂ©rĂ©s sur parole. Araki Sadao, Hoshino Naoki, Kaya Okinori, Kƍichi Kido, Ôshima Hiroshi, Shimada ShigetarĂŽ, et Suzuki Teiichi le furent en 1955. SatĂŽ KenryĂŽ, pourtant un des condamnĂ©s dont la condamnation Ă©tait la plus discutĂ©e, ne fut libĂ©rĂ© qu'en mars 1956. Cette libĂ©ration permit Ă  certains criminels d'occuper Ă  nouveau des postes trĂšs importants dans l'administration japonaise, comme Mamoru Shigemitsu qui fut ministre des Affaires Ă©trangĂšres du gouvernement.

Ces libĂ©rations anticipĂ©es (ainsi que les cas non traitĂ©s, comme la responsabilitĂ© de Hirohito) furent le reflet de la politique ambiguĂ« des États-Unis vis-Ă -vis du Japon. La guerre froide battant son plein (avec la guerre de CorĂ©e), il fallait faire du Japon un pays alliĂ© et le meilleur moyen Ă©tait de tourner la page le plus rapidement possible. Cela favorisa certainement la montĂ©e d'un rĂ©visionnisme japonais sur les crimes de guerre commis par le Japon.

En 1978 les « ùmes » de 14 personnes exécutées comme criminels de guerre de classe A furent « accueillies » dans le sanctuaire Yasukuni[N 23].

Un procÚs critiqué

Certaines critiques furent formulĂ©es par les juges eux-mĂȘmes. En effet, le jour mĂȘme du prononcĂ© du jugement, pas moins de cinq juges - sur onze - exprimĂšrent des jugements sĂ©parĂ©s : le juge indien Radhabinod Pal (qui avait arrachĂ© ce droit d'Ă©mettre un jugement sĂ©parĂ©, initialement non prĂ©vu par la Charte, et dĂ©clara qu'il fallait acquitter tous les prĂ©venus), le juge français Henri Bernard, le juge hollandais B. V. A. Röling, le juge philippin Delfin Jaranilla[N 24] et mĂȘme le prĂ©sident du tribunal, le juge Webb.

Pour Dower, « mĂȘme les pacifistes japonais qui ont endossĂ© les idĂ©aux de Nuremberg et de Tokyo et qui ont travaillĂ© Ă  documenter et Ă  publiciser les atrocitĂ©s du rĂ©gime shĂŽwa, ne peuvent justifier la façon dont les procĂšs sur les crimes de guerre ont Ă©tĂ© menĂ©s ; pas plus qu'ils ne peuvent dĂ©fendre la dĂ©cision amĂ©ricaine d'exonĂ©rer l'empereur de sa responsabilitĂ© pour la guerre et ensuite, au sommet de la guerre froide, de libĂ©rer et peu aprĂšs d'embrasser des criminels de guerre d'extrĂȘme-droite accusĂ©s comme le futur premier ministre Nobusuke Kishi »[37].

Plusieurs historiens critiquent cette dĂ©cision d'exonĂ©rer l'Empereur et la famille impĂ©riale de poursuites criminelles[38]. Selon l'historien John W. Dower, « la campagne menĂ©e Ă  bien pour absoudre l'Empereur de sa responsabilitĂ© Ă  l'Ă©gard de la guerre ne connut pas de limite. Hirohito ne fut pas seulement prĂ©sentĂ© comme Ă©tant innocent de tout action formelle qui aurait pu le rendre susceptible d'une inculpation comme criminel de guerre, il fut transformĂ© en une sorte d'icone sainte ne portant mĂȘme aucune responsabilitĂ© morale pour la guerre »[39]. Selon Herbert P. Bix, « les mesures rĂ©ellement extraordinaires entreprises par MacArthur pour sauver Hirohito d'un jugement comme criminel de guerre eurent un impact persistant et profondĂ©ment distordant dans la comprĂ©hension des Japonais Ă  l'Ă©gard de la guerre perdue », ImmĂ©diatement Ă  son arrivĂ©e au Japon, (le brigadier-gĂ©nĂ©ral) Bonner Fellers se mit au travail pour protĂ©ger Hirohito du rĂŽle qu'il avait jouĂ© pendant et Ă  la fin de la guerre », et « permit aux principaux criminels de coordonner leur version des faits afin que l'empereur Ă©chappe Ă  une inculpation »[40].

Ce qu'apporta ce tribunal

Tout comme le Tribunal de Nuremberg, le tribunal de Tƍkyƍ fut trĂšs politique mais il permit de juger de nombreux criminels ; avec ses 11 juges, 12 procureurs, sa durĂ©e (2 ans et demi), son jugement de 1 200 pages[N 25], ses comptes rendus de 124 volumes, il eut une ampleur supĂ©rieure Ă  celui de Nuremberg par certains aspects[41]. Ces deux tribunaux participĂšrent Ă  l'effort pour l'Ă©tablissement d'une justice internationale pĂ©nale (voir l'article sur la Cour pĂ©nale internationale).

Les premiÚres initiatives des Nations unies en la matiÚre furent d'ailleurs contemporaines du procÚs de Tokyo : d'abord, les résolutions du 11 décembre 1946 adoptÚrent comme fondement le statut et la juridiction du Tribunal de Nuremberg. En 1947, Henri Donnedieu de Vabres, le représentant français auprÚs de la « commission pour le développement progressif du droit international et sa codification » nouvellement créée soumit, en vain, un mémorandum contenant son Projet de création d'une juridiction criminelle internationale. Une résolution du confia à une Commission du droit international (CDI) le soin d'élaborer un code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité[42].

La Charte du Tribunal militaire international de Tokyo n'a été ni ratifiée, ni publiée en France[43].

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Annette Wieviorka (dir.), Les ProcĂšs de Nuremberg et de Tokyo, Ă©d. Complexe, 1999
  • Paul-Yanic Laquerre, Les ProcĂšs de Tokyo; une Justice de Façade, 2e Guerre Mondiale n° 31, fĂ©vrier-mars 2010, p. 62-73
  • Étienne Jaudel, Le procĂšs de Tokyo : Un Nuremberg oubliĂ©, Odile Jacob, coll. « Sciences humaines », , 160 p. (ISBN 978-2-7381-9885-3, lire en ligne)
  • Franck Michelin, Le procĂšs des criminels de guerre japonais, in L'Histoire, no 271, p. 54-62

Filmographie

  • 2006 : The Tokyo Trial de Gao Qunshu vu sous l'angle du juge chinois Ju-Ao Mei.
  • 2016
    • La mini sĂ©rie Tokyo Trial en quatre Ă©pisodes produite par la NHK et NETFLIX retrace le procĂšs en suivant les juges et leurs travaux, en mĂ©langeant images d'archives et de fiction[44].
    • Le rĂ©alisateur Tim Toidze tourne un documentaire sur le procĂšs intitulĂ© De Nuremberg Ă  Tokyo.
  • 2020 : L'Ă©pisode 1946. Le long procĂšs de Tokyo de MystĂšres d'archives revient sur ce procĂšs.

Liens externes

Notes et références

Notes

  1. Le sigle anglais IMTFE a parfois Ă©tĂ© utilisĂ© dans une acception large qui englobe non seulement le procĂšs de Tokyo lui-mĂȘme, mais aussi tous les tribunaux militaires ayant eu Ă  juger des criminels de guerre dans le sud est asiatique[1].
  2. Dans la rĂ©gion une cinquantaine des tribunaux militaires sous direction alliĂ©e jugent plus de 5 000 criminels de guerre « mineurs ».
  3. De mĂȘme, ce n'est que le que le Garde des Sceaux du Gouvernement provisoire de la RĂ©publique Française initie la crĂ©ation d'un service de renseignement concernant les crimes de guerre commis par les Japonais en Indochine Le juge Henri Bernard au procĂšs de TokyĂŽ.
  4. Ce n'est toutefois que le 3 septembre que le commandement japonais pour les Philippines fera formellement acte de reddition ; pour les forces de Corée ce sera fait le 9 septembre, pour l'Asie du sud-est ce ne sera signé que le 12 septembre ; ces dates expliquent en partie pourquoi MacArthur attendit le 11 septembre avant de lancer son ordre d'arrestation, comme il s'en expliqua à la presse qui lui avait reproché sa lenteur.
  5. Par cet ordre (Ltr, GHQ USAFPAC, to CG Eighth A, 11 Sep 45, sub: Apprehension and Detention of Certain Individuals. In AG 383.7 (CI)), seront arrĂȘtĂ©s le 11 septembre : le gĂ©nĂ©ral Suzuki, Okinobu Kaya, Hiroyasu Ino, Michiyo Iwamura, le colonel Hashimoto, le lieutenant-GĂ©nĂ©ral Homma, Shozo Murata, le Capitaine Tokuda, le colonel Suzuki, le sergent Tabata, Paratrap/Pratap Mahendra, James Sakaki, Shigenori Kuroda, le PrĂ©sident Jose Laurel, son fils Jose ainsi que Benigno S. Aquino, Yashitaka Ueda (n° 24 sur la liste), le gĂ©nĂ©ral Kunihiko Hashida et le gĂ©nĂ©ral Koizumi se suicidĂšrent juste avant leur arrestation (le premier par empoisonnement, le second rituellement par seppuku) ; Shigemori Togo malade du cƓur se livrerait ultĂ©rieurement ; Nobosuke Kishise se livrera lui-mĂȘme le 16/17 septembre ; quant Ă  Hirota, son statut, Ă  cette date, est incertain ; le vice-amiral Terashima Ă©tait alors le seul membre du cabinet de guerre Tojo Ă  ĂȘtre encore en libertĂ©. Furent Ă©galement arrĂȘtĂ©s : le major Charles Cousens, Heinrich Stahmer, General Stretchmer, Dr Maung, le colonel Josef A Meisinger/Meisenger, Wathakan Wichit, Colonel Kira Tagahama, Lieutenant-Colonel Seiichi Ohto, Josias van Dienst, Aung Than, Mark Lewis Streeter, John Holland (alias David Lester), Iva Toguiri (alias Tokyo Annie, alias Tokyo Rose) enfin Jorge B. Vargas et ses deux fils. C'est, semble-t-il, un simple oubli qui fit que les noms de Naoki Hoshino et de Michio Yuzawa - du cabinet Tojo - ne figurĂšrent pas sur la liste du 11 septembre ; Seiichi Ohta et un certain Honashi Takeuchi qui figuraient sur cette liste seront arrĂȘtĂ©s le 19 septembre ; Ă  cette date, sur les 39 recherchĂ©s seuls 7 Ă©taient encore manquants. Cf .
  6. Un contrÎle de l'information existait toutefois avant le 11 septembre : dÚs le le SCAP avait pris des dispositions en ce sens notamment au sujet des Japonais faits prisonniers : « No praise or pity should be expressed for Japanese into custody by Allied authority » .
  7. et date de la publication du mémorandum Tanaka.
  8. Sont arrĂȘtĂ©s : le gĂ©nĂ©ral Koiso, Yosuke Matsuoka, le gĂ©nĂ©ral Iwane Matsui, le gĂ©nĂ©ral Sadao Araki, le gĂ©nĂ©ral Honjo — qui se suicida — Funanonsuke Kuhara, le gĂ©nĂ©ral Minami, Toshio Shiratori, Yoshihisa Kuzuu/Kuzuo et Kzaunobu Kanokogi (ou plutĂŽt : Kazunobu Kanokogi ?) cf. The Argus Mardi 20 novembre 1945.
  9. Les personnes arrĂȘtĂ©es ce 3 dĂ©cembre : deux membres de la famille impĂ©riale : le marquis Kƍichi Kido et le prince Nashimoto, mais aussi des industriels comme Kiyoshi Goko, ancien prĂ©sident de Mitsubishi ou Seihin Ikeda — de la banque Mitsui et gouverneur de la Banque du Japon —, Chikuhei Nakajima — industrie aĂ©ronautique —, des militaires comme les amiraux Soemu Toyoda et Sankichi Takahashi ou encore le marĂ©chal Shunroku Hata, des hommes de l'Information comme Inosuke Foruno — Domei agency — ou Matsutaro Shoriki — prĂ©sident du Yomiuri Shimbun —, enfin des politiciens tels Eiji Amau et Masayuki Tani. Parmi la liste on trouve aussi : Koki Hirota (qui avait figurĂ© sur les listes d'arrestations de septembre avant d'en ĂȘtre rayĂ©, le baron Kiichiro Hiranuma, .
  10. La spécification, en son article premier, de l'exigence d'équité - qui a pu se heurter à l'exigence également affirmée de promptitude - ne fut pas sans conséquences ; elle eut d'abord des effets sur les moyens dévolus à la défense (qui demeurÚrent toutefois trÚs relatifs comparés à ceux dévolus à l'accusation) ; enfin les critiques du ProcÚs questionneront cette déclaration de principe au regard du régime de preuves adopté par ailleurs.
  11. Le jugement des criminels de guerre dits mineurs - la qualification de « crimes mineurs » peut ĂȘtre trompeuse en cela qu'elle peut couvrir des faits d'une ampleur et d'une horreur trĂšs importantes - Ă©choira Ă  des tribunaux militaires non couverts par la Charte, au Japon (Tokyo et Yokohama) mais aussi Ă  l'Ă©tranger.
  12. Le , la Commission pour l'ExtrĂȘme-Orient (Far Eastern Commission) fixe des lignes de conduite dans un document intitulĂ© Apprehension, Trial and Punishment of War Criminals in the Far East https://www.jstor.org/pss/2703596.
  13. Conseiller juridique au ministÚre de la France d'outre-mer, il démissionne pour raisons personnelles[15].
  14. Avocat général à Bangui, Bernard a fait toute sa carriÚre en Afrique francophone[15].
  15. La nomination Ă  la tĂȘte de l'exĂ©cutif japonais du Prince Naruhiko Higashikuni, oncle de Hirohito, tĂ©moignait d'une volontĂ© de perpĂ©tuation de l'institution impĂ©riale. Higashikuni allait s'employer Ă  prĂ©server l'empereur de toute Ă©ventuelle accusation, comme lors de son discours Ă  la DiĂšte du 5 septembre 1945.
  16. Les Australiens, tout comme les Néozélandais, insisteront longtemps pour que l'empereur soit déféré devant la justice.
  17. MacArthur ayant peur d'une guerre civile, il prévint le Président Harry S. Truman qu'il lui faudrait un million de soldats supplémentaires pour maintenir l'ordre au Japon si l'Empereur était déféré.
  18. Les rumeurs concernant la volonté d'abdication de l'empereur furent prises suffisamment au sérieux par MacArthur pour qu'il initie des démarches afin de la prévenir. Ce n'est que le 12 novembre 1948 - soit à l'issue de l'énoncé du verdict - que Yoshida fera parvenir à MacArthur une lettre de Hirohito par laquelle celui-ci faisait savoir qu'il n'abdiquerait pas.
  19. Tojo par exemple qui avait par inadvertance laissé entrevoir la responsabilité de Hirohito lors d'une audition, le 31 décembre 1947, revient sur son témoignage le 6 janvier 1948 à la suite de démarches effectuées auprÚs de lui par des proches de l'empereur.
  20. Paul-Yanic Laquerre, Les ProcÚs de Tokyo; une Justice de Façade, 2e Guerre Mondiale #31, février-mars 2010, p. 70.
  21. Ces deux directives, connues sous le nom de « freedom orders » (jiyu no shirei) ouvrirent la voie à la nouvelle Constitution du Japon adoptée en novembre 1946, alors que le ProcÚs était encore en son mitan.
  22. Le prince Nashimoto et Goko Kiyoshi par exemple avaient été relùchés le 13 avril 1946 ; la grùce toucha l'amiral Tawahashi, Eiji Amau, Masouki Tanai, le général Nishio, le général Tada, Yoshihisa Kuzu, Ryoichi Sasakawa et sept autres membres du cabinet Tojo, cf. :The Canberra Times < Saturday 25 December 1948.
  23. Hideki Tojo, Kenji Doihara, Iwane Matsui, Heitaro Kimura, Koki Hirota, Seishiro Itagaki, Akira Muto, Yosuke Matsuoka, Osami Nagano, Toshio Shiratori, Kiichiro Hiranuma, Kuniaki Koiso,... et Yoshijiro Umezu.
  24. Lui-mĂȘme victime lors de la Marche de la mort de Bataan, il ne siĂ©gea pas lorsque ce crime fut Ă©voquĂ©.
  25. En prenant en compte les diffĂ©rentes traductions, les États-Unis ont dĂ» affrĂ©ter un avion pour alimenter le procĂšs en papier.

Références

  1. (en) Major Mark D. Pollard, « Judgement at Tokyo: The Japanese War crimes Trials », The Military Law Review, vol. 171,‎ , p. 221-225 (lire en ligne)
    Critique de l'ouvrage de Timothy P. Maga de 2001.
  2. .
  3. .
  4. Voir : The Legal Regime of the International Criminal Court : Essays in Honour of
 par José Doria, Hans-Peter Gasser, M. Cherif Bassiouni.
  5. National Archives Collection of World War II War Crimes Records.
  6. Voir : World War 2 in Asia and the Pacific
 - Google Livres.
  7. MacArthur n'y déménagera son QG de Yokohama que le 17 septembre.
  8. The Canberra Times Wednesday 12 September 1945.
  9. Directive on the Identification, Apprehension and Trial of Persons Suspected of War Crimes, pas de date ou de N° de série, joint à FEAC 8, 24 October 1945, dossier n°. EA 2 106/3/22, Part 1, Archives New Zealand cf .
  10. Policy of the United States in regards to the apprehension and punishment of War Criminals in the Far East. US Department of State .
  11. (Regulations Concerning the Trial of Accused War Criminals).
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  13. (en) BibliothĂšque nationale de la DiĂšte SCAPIN 550.
  14. ).
  15. Jaudel 2010.
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  20. Paul-Yanic Laquerre, Les ProcÚs de Tokyo; une Justice de Façade, 2e Guerre Mondiale #31, février-mars 2010, p. 62.
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  24. Hal Gold, Unit 731 Testimony, 2003, p. 108-113.
  25. Daniel Barenblatt, A Plague upon Humanity, 2004, p. 222.
  26. Awaya Kentaro, « The Tokyo Tribunal, War Responsibility and the Japanese People » (consulté le ).
  27. (en) Thomas W. Burkman et al., The Occupation of Japan : arts and culture : the proceedings of the sixth symposium sponsored by the MacArthur Memorial, Old Dominion University, General Douglas MacArthur Foundation, 18-19 October 1984, , 252 p. (OCLC 18839688, lire en ligne).
  28. LW Beer, The Present Constitutional System of Japan in Meryll Dean, Japanese Legal System, Cavendish Publishing, 2002, p. 474 lire en ligne.
  29. « Document detailing war criminal execution procedures found »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?), Kyodo (The Mainichi) 8/6/2013.
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  34. The Mercury; Tuesday 17 June 1952.
  35. Establishment of the Clemency and Parole Board for War Criminals.
  36. .
  37. Dower, ibid., p. 562.
  38. John W. Dower, Embracing Defeat, 1999, Herbert P. Bix, Hirohito and the Making of Modern Japan, 2000.
  39. Dower, ibid. p. 326.
  40. Bix, ibid. p. 545, 583.
  41. Dans l'ombre de Nuremberg, le procĂšs de Tokyo, Ă©mission Le bien commun de France Culture le 25 septembre 2010.
  42. .
  43. [PDF] .
  44. (en) Tokyo Trial (TV Mini-Series 2016– ), IMDb.
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