Plan Tanaka
Le plan Tanaka (ç”°ä¸ä¸ŠĺĄŹć–‡, Tanaka Josobun) est un supposĂ© plan stratĂ©gique japonais datant de 1927 et dans lequel le premier ministre du Japon Tanaka Giichi prĂ©sente une stratĂ©gie Ă l'empereur Hirohito pour conquĂ©rir le monde. Aujourd'hui, les historiens occidentaux et japonais admettent gĂ©nĂ©ralement qu'il s'agit d'un faux[1].
Contexte
Le plan Tanaka commença à faire parler de lui après sa première publication en 1929 à Nankin dans une version traduite en chinois par un journal nationaliste chinois[2] :
Avant de conquérir le monde, nous devons conquérir la Chine,
Avant de conquérir la Chine, nous devons conquérir la Mandchourie et la Mongolie,
Si nous réussissons à conquérir la Chine, le reste des pays asiatiques et de la mer du Sud nous craindront et se rendront à nous.
Alors le monde réalisera que l'Asie orientale est nôtre.
Une traduction en anglais de ce document fut en circulation avant et fut le sujet de la page de couverture de la première édition du The Plain Truth (en) publié par Herbert W. Armstrong (en) en février de la même année[3], bien qu'il fût déjà apparu dans le beaucoup moins connu Communist International en 1931.
Le plan Tanaka fut repris abondamment par la propagande américaine comme l'équivalent japonais du Mein Kampf nazi. Dans la série américaine Pourquoi nous combattons (Why We Fight) de Frank Capra, récompensée aux Oscars, les épisodes La Bataille de Chine (en) et Prélude à la guerre présentent le Mémorandum Tanaka comme le plan japonais pour la guerre contre les États-Unis[4]. Dans l'épisode La Bataille de Chine, les quatre étapes du plan de conquête japonais sont :
- ConquĂŞte de la Mandchourie
- ConquĂŞte de la Chine
- Établissements de bases dans le Pacifique
- Conquête des États-Unis
Même si les historiens d'aujourd'hui considèrent ce document comme un faux, le Mémorandum Tanaka était considéré comme authentique dans les années 1930 et 1940 à cause des actions du Japon qui correspondaient à celles décrites dans le plan. L'incident de Mukden de 1931, la seconde guerre sino-japonaise commencée en 1937, l'attaque de Pearl Harbor en 1941 et la guerre du Pacifique qui s'ensuivit semblaient confirmer ces soupçons[5]. Plusieurs historiens, comme Edwin Palmer Hoyt, affirmaient sans équivoque que "...le Mémorandum Tanaka était réél. C'était tout simplement une copie de ce que le premier ministre Tanaka Giichi avait dit et ce que les supernationalistes avaient répété pendant des mois"[6]. D'autres, comme Meirion Harries, affirmaient tout autant sans équivoque que le plan Tanaka "...était l'une des "ruses malsaines" les plus réussies du vingtième siècle - un faux document si brillamment conçu que trente ans plus tard, les Occidentaux le croient toujours authentique"[2]. De la même manière, l'historien WG Beasley déclarait que "...la nature de ce document, publié successivement en anglais et en chinois, n'apportait pas la certitude de son authenticité"[7]. Le Dr. Haruo Tohmatsu, professeur de diplomatie et de l'histoire militaire des relations internationales à l'académie nationale de défense du Japon, déclare que "le plan Tanaka n'a jamais existé, mais la conférence de Darin a adopté la même année des résolutions qui reflétaient ces idées"[8].
Léon Trotski, bien qu'étant un adversaire de l'URSS et du parti communiste chinois, soutint l'authenticité du document dans un de ses derniers travaux[9].
Spéculation de falsification
Du au [10], Tanaka convoqua une « conférence de l'extrême-orient » avec des membres du ministère des Affaires étrangères, celui de la Guerre, celui de la Marine et celui des Finances. Mais au lieu de présenter un plan pour conquérir le monde, le résultat de la conférence fut la décision du Japon de soutenir le gouvernement du Kuomintang contre les communistes chinois, tant que les Japonais pourraient convaincre le général Zhang Zuolin de consolider ses bases dans une Mandchourie virtuellement autonome qui servirait d'état tampon, mais qui serait en fait sous domination japonaise[11]. Il est allégué que le « Mémorandum Tanaka » fut présenté secrètement pendant cette conférence.
Lorsqu'après la guerre, les Alliés recherchèrent des documents pour prouver les crimes de guerre du Japon, aucun brouillon ni copie ne correspondait au « plan Tanaka ». Un « original » en japonais ne fut jamais découvert malgré d'intenses recherches.
L'origine du mémorandum est toujours incertain. Parce que la première édition connue le fut en chinois, beaucoup d'historiens l'ont attribué à des Chinois, et plus particulièrement aux Chinois communistes[11] .
L'Union soviétique mettait en doute l'authenticité du document pour encourager la guerre entre la Chine et le Japon, et ainsi avancer les intérêts soviétiques[12]. Les deux théories ne sont pas mutuellement exclusives, étant donné que parti communiste chinois était une branche de l'Internationale communiste contrôlée par l'Union soviétique et que la politique soviétique des années 1930 était de mener une propagande de guerre contre l'expansionnisme japonais. Aussi, la première traduction du mémorandum en anglais fut réalisée par le parti communiste américain et publiée en décembre 1931 dans le Communist International. Il fut plus tard imprimé en livre[13].
En 1939, Peter Fleming déclara avoir réalisé une « mise à jour » du « plan Tanaka » en écrivant un rapport imaginaire sur une conférence stratégique alliée secrète à laquelle assista Tchang Kaï-chek qui en parla aux Japonais. Cela indiquait que le mémorandum était considéré comme un faux par les Britanniques avant la Seconde Guerre mondiale[14].
Les journaux et les manuels scolaires de la république populaire de Chine mentionnent toujours le « plan Tanaka » comme authentique. Cependant, les historiens japonais soutiennent que le document est faux[15].
En 1995, Vitaliy Pavlov, un agent du NKVD à la retraite écrivit sur le « plan Tanaka » dans le journal russe Novosti Razvedki I Kontrrazvedki (« Nouvelles de l'espionnage et du contre-espionnage »). Pavlov affirmait que le document était un faux réalisé par l'Union soviétique en 1931 pour provoquer un sentiment antijaponais aux États-Unis et en Europe[12].
Le , le journal japonais Tokyo Shimbun rapportait qu'un groupe d'historiens chinois considéraient le « plan Tanaka » d'authenticité douteuse et suggéraient que les autres historiens chinois considèrent le document comme un faux lors d'une réunion de recherche conjointe tenue en .
Notes et références
- (en) John J. Stephen, « The Tanaka Memorial (1927): Authentic or Spurious? », Modern Asian Studies nol. 7, no 4, 1973, p. 733-745.
- Harries, Soldiers of the Rising Sun, p. 162.
- The Plain Truth, Cog Home School, , PDF (lire en ligne).
- Dower, War Without Mercy, p. 22.
- Coble, Parks M. Facing Japan: Chinese politics and Japanese imperialism, 1931–1937 p. 36. Harvard University Press, 1991. (ISBN 0674775309).
- Hoyt, Edwin P. (2001). Japan's War The Great Pacific Conflict. Cooper Square Press, 62. (ISBN 0-8154-1118-9).
- Beasley, Japanese Imperialism 1894–1945, p. 185.
- Haruo Tohmatsu, A Gathering Darkness (2004) SR Books, p. 18
- Trotsky, Tanaka, Marxists, (lire en ligne).
- (en) Bevin Alexander, « Japan Begins the March to Disaster » (consulté le )
- Jansen, The Making of Modern Japan, p. 525.
- Romerstein and Breindel, 2001, pp. 520–521
- Schecter, Shared Secrets, p. 8.
- Holt, The Deceivers, p. 298.
- Stephan, The Tanaka Memorial (1927), p. 740.
Voir aussi
Bibliographie
- (en) Beasley, William G., Japanese Imperialism 1894–1945, Oxford University Press, , 279 p. (ISBN 978-0-19-822168-5, lire en ligne)
- (en) Iris Chang, The Rape of Nanking : The Forgotten Holocaust of World War II, Londres, Penguin, , 290 p., poche (ISBN 978-0-14-027744-9)
- (en) John W. Dower, War Without Mercy : Race and Power in the Pacific WarWar Without Mercy : Race and Power in the Pacific War, Pantheon, , 399 p. (ISBN 978-0-394-75172-6)
- (en) Gordon, Andrew, A Modern History of Japan : From Tokugawa Times to the Present, New York, Oxford University Press, , 384 p., poche (ISBN 978-0-19-511061-6)
- (en) Meirion Harries, Soldiers of the Sun : The Rise and Fall of the Imperial Japanese Army, New York, Random House; Reprint edition, , 1re Ă©d., 569 p., poche (ISBN 978-0-679-75303-2)
- (en) Thaddeus Holt, The Deceivers : Allied Military Deception in the Second World War, New York, Skyhorse Publishing, , 1148 p. (ISBN 978-1-60239-142-0)
- (en) Jansen, Marius B., The Making of Modern Japan, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, , 871 p. (ISBN 0-674-00334-9 et 9780674003347, OCLC 44090600)
- (en) Herbert Romerstein, The Venona Secrets, Exposing Soviet Espionage and America's Traitors, Washington, Regniery Publishing, , 1re Ă©d., 608 p. (ISBN 978-0-89526-225-7)
- (en) Leona Schecter, Sacred Secrets : How Soviet Intelligence Operations Changed American History, Washington, Potomac Books, , 1re Ă©d., 403 p., poche (ISBN 978-1-57488-522-4)
- Stein, Gordon Encyclopedia of Hoaxes, Gale Group, 1993. (On itself) (ISBN 0-8103-8414-0)
- Stephan, John T. "The Tanaka Memorial (1927): Authentic or Spurious?", Modern Asian Studies 7.4 (1973) p. 733–745.
- Allen S. Whiting, China Eyes Japan, University of California Press, 1989. (ISBN 0-520-06511-5)
Articles connexes
Liens externes
- The Tanaka Memorial – Japan's Dream of World Empire – 1942 English translation, on the Internet Archive
Ces sources contestent l'authenticité du mémorandum :
- encyclopedia.com
- « Japan Speaks about Conspiracy of Japan in 1932 »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le ) (revealed by Kiyoshi Kawakami)
- « Conspiracy of Japan in the Tokyo Trial »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le )
Ces sources appuient l'authenticité du mémorandum :
- « Profound lessons in past incidents »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le ) (a mirror of Chinese statement page of 1997)
- Prelude to War download on the Internet Archive
- Leon Trotsky, an opponent of the USSR and CPC vouches for authenticity of the Memorial 1940
Source de la traduction
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Tanaka Memorial » (voir la liste des auteurs).