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Tentative de coup d'État de 1981 en Espagne

La tentative de coup d'État du 23 fĂ©vrier 1981 en Espagne, connu en Espagne sous le numĂ©ronyme de 23-F[1], perpĂ©trĂ© en Espagne par des officiers de l'armĂ©e, a Ă©tĂ© marquĂ© par l'assaut du CongrĂšs des dĂ©putĂ©s par un groupe d'officiers et de sous-officiers de la Guardia Civil - Ă©quivalent en Espagne de la gendarmerie en France - qui fut filmĂ© par la tĂ©lĂ©vision espagnole. Ce coup d'État (qui s'est soldĂ© par un Ă©chec) a eu lieu au moment de l'Ă©lection de Leopoldo Calvo-Sotelo, membre de l'Union du centre dĂ©mocratique (UCD), Ă  la prĂ©sidence du gouvernement espagnol.

Coup d'État du 23 fĂ©vrier 1981 en Espagne
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Antonio Tejero armé dans l'hémicycle
Informations générales
Date -
Lieu CongrÚs des députés, Cortes Generales, Madrid et Valence
Issue Arrestation des putchistes
Belligérants
Militaires franquistes putchistes
Royaume d'Espagne

CongrÚs des députés


Soutenus par :
Drapeau de l’Union europĂ©enne CEE
Drapeau du Royaume-Uni Royaume-Uni

Drapeau du Vatican Vatican
Commandants
Antonio Tejero, lieutenant-colonel de la Garde civile
Jaime Milans del Bosch, général de l'armée de terre
Alfonso Armada, général de l'armée de terre
Juan Carlos Ier, roi d'Espagne
Adolfo Suårez, président du gouvernement
José Antonio Såenz de Santa María, directeur général de la Police
Forces en présence
200 gardes civils Ă  Madrid
1800 militaires Ă  Valence
Plusieurs chars et véhicules militaires
EntiÚreté des forces armées espagnoles et de la police
Pertes
Arrestation de tous les putschistesAucun

Transition démocratique espagnole

CoordonnĂ©es 40° 24â€Č 57″ nord, 3° 41â€Č 48″ ouest

Les prémices

Le coup d'État de 1981 est Ă©troitement liĂ© aux Ă©vĂ©nements qui se sont dĂ©roulĂ©s pendant la transition dĂ©mocratique espagnole. Quatre facteurs engendrent une tension permanente, que le gouvernement d'Union du centre dĂ©mocratique (UCD) ne rĂ©ussit pas Ă  contenir : les consĂ©quences de la crise Ă©conomique ; les difficultĂ©s de mise en Ɠuvre d'une nouvelle organisation territoriale de l'État ; les actions terroristes de l'ETA et les rĂ©sistances de certains secteurs de l'armĂ©e Ă  accepter un systĂšme dĂ©mocratique[2].

Les premiers symptĂŽmes du malaise de l'armĂ©e apparaissent en avril 1977, lorsqu'Ă  la suite de la lĂ©galisation du Parti communiste d'Espagne (PCE), le 9, l'amiral Gabriel Pita da Veiga (es), ministre de la Marine, dĂ©missionne et que le Conseil supĂ©rieur de l'armĂ©e Ă©met une note oĂč il manifeste sa dĂ©sapprobation[3]. En novembre 1978 a lieu le dĂ©mantĂšlement de l'opĂ©ration Galaxia, une premiĂšre tentative de coup d'État contre la transition vers la dĂ©mocratie qui s'annonce,menĂ©e par diffĂ©rents officiers et dont le chef est Antonio Tejero. Deux officiers sont arrĂȘtĂ©s, le lieutenant-colonel de la garde civile Antonio Tejero, et le capitaine de police Ricardo Saenz de Ynestrillas et jugĂ©s en 1980[4] - [5]. Antonio Tejero est seulement condamnĂ© Ă  sept mois de prison[6] et Ă  une assignation Ă  domicile[5].

Alors que la volontĂ© putschiste s'accroĂźt dans l'armĂ©e et du cĂŽtĂ© de l'extrĂȘme droite, le gouvernement fait face Ă  une crise profonde, qui atteint en 1980 son paroxysme. Parmi les principaux Ă©vĂ©nements majeurs de cette pĂ©riode, on peut citer la dĂ©mission, le 15 janvier, du ministre de la Culture, Manuel Clavero ArĂ©valo[7]; le remaniement du gouvernement le 3 mai ; la motion de censure dĂ©posĂ©e contre Adolfo SuĂĄrez par le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) en mai[8] ; la dĂ©mission, le 22 juillet, du vice-prĂ©sident du gouvernement, Fernando Abril Martorell, qui donne lieu Ă  un nouveau remaniement du gouvernement en septembre[9], et l'aggravation du terrorisme avec des assassinats Ă  Barcelone et au Pays Basque[9].

La faiblesse croissante de SuĂĄrez au sein de son propre parti rend de plus en plus probable sa dĂ©mission comme prĂ©sident du gouvernement et de l'UCD, il est effectivement amenĂ© Ă  renoncer fin janvier 1981[10], puis les Ă©vĂ©nements se prĂ©cipitent. Le 1er fĂ©vrier, le collectif « Almendros » publie dans le journal El AlcĂĄzar (en) un article clairement putschiste ; du 2 au 4 fĂ©vrier, le couple royal voyage au Pays basque, oĂč les dĂ©putĂ©s du parti Herri Batasuna les accueillent par des huĂ©es ; le 6 fĂ©vrier l'ingĂ©nieur de la centrale nuclĂ©aire de LemĂłniz, sĂ©questrĂ© depuis quelques jours, est dĂ©couvert assassinĂ©[11] alors qu'on reste sans nouvelles d'un autre industriel sĂ©questrĂ©, LuĂ­s Suñer. Au milieu de ce climat tendu, la succession de SuĂĄrez se met en marche[2]. Entre les journĂ©es du 6 et 9 fĂ©vrier se dĂ©roule le 2e congrĂšs de l'UCD Ă  Majorque, oĂč le parti apparaĂźt divisĂ© et oĂč AgustĂ­n RodrĂ­guez SahagĂșn est Ă©lu prĂ©sident de circonstance : le 10 fĂ©vrier Leopoldo Calvo Sotelo est choisi comme candidat Ă  la prĂ©sidence du gouvernement.

Les tensions sont dĂ©jĂ  trĂšs fortes lorsque, le 13 fĂ©vrier, est rendue publique la mort, dans la prison madrilĂšne de Carabanchel, du militant basque indĂ©pendantiste Jose Ignacio Arregui[12], victime des tortures infligĂ©es par des policiers de la Direction gĂ©nĂ©rale de la sĂ»retĂ© (ancienne dĂ©nomination du secrĂ©tariat d'État Ă  la SĂ©curitĂ©). Cela engendre au Pays basque une grĂšve gĂ©nĂ©rale et au CongrĂšs une dispute entre les groupes parlementaires. À la suite de cela, le gouvernement destitue plusieurs chefs de la police, tandis qu'ont lieu au ministĂšre de l'IntĂ©rieur des dĂ©missions en signe de solidaritĂ© avec les torturĂ©s.

C'est dans ce cadre que le 18 fĂ©vrier, Leopoldo Calvo-Sotelo prĂ©sente son gouvernement, mais lors du vote du 20 fĂ©vrier, il n'obtient pas la majoritĂ© nĂ©cessaire. Cette situation impose un nouveau vote qui est planifiĂ© le 23 fĂ©vrier. C'est le jour que choisissent les putschistes. Ces putschistes rĂ©unissent les partisans d'un coup d'État brutal, imposant une nouvelle dictature militaire, prĂŽnĂ© par Antonio Tejero et le capitaine gĂ©nĂ©ral Jaime Milans del Bosch, et ceux d'un coup d'État plus soft, amenant le roi Ă  prendre la tĂȘte d'un gouvernement temporaire de salut public, prĂŽnĂ© par le gĂ©nĂ©ral Alfonso Armada, homme de confiance du roi.

Le coup d’État

Impacts de balles dans le plafond de l'hémicycle

Lors de la tentative du coup d’État du 23 fĂ©vrier 1981, les divers complots putschistes distincts qui se tramaient depuis le commencement de la transition convergent de façon coordonnĂ©e.

Ce jour-lĂ , le prĂ©sident du CongrĂšs des dĂ©putĂ©s ouvre le second vote d'investiture du prĂ©sident du gouvernement. À 18h 21, un groupe d'officiers et de sous-officiers membres de la Guardia Civil, sous le commandement du lieutenant-colonel Antonio Tejero, fait irruption dans l'hĂ©micycle, interrompt le vote et ordonne Ă  toutes les personnes prĂ©sentes de s'allonger et ne pas bouger[13]. Instinctivement, le gĂ©nĂ©ral de division de l'armĂ©e de terre Manuel GutiĂ©rrez Mellado, premier vice-prĂ©sident du gouvernement et officier le plus gradĂ© dans la salle, se lĂšve, se dirige vers la tribune oĂč se tient Antonio Tejero et lui ordonne de dĂ©poser les armes. Un groupe d'une dizaine de soldats sera nĂ©cessaire pour le maĂźtriser, malgrĂ© ses 70 ans.

Les gardes civils ouvrent alors le feu à l'arme automatique vers les plafonds de la salle des séances. AussitÎt, l'intégralité des députés et ministres se couchent dans les travées, à l'exception du secrétaire général du Parti communiste Santiago Carrillo, qui reste assis et du président du gouvernement sortant Adolfo Suårez, ainsi que le général Mellado[14].

Pedro Francisco Martín (es), opérateur de la Télévision espagnole, continue de filmer la séance pendant une demi-heure, apportant un témoignage exceptionnel sur les événements du 23 février[15].

En prenant le contrĂŽle du CongrĂšs et en retenant prisonniers dĂ©putĂ©s et ministres, les putschistes cherchent Ă  instaurer un « vide institutionnel », dont doit profiter un nouveau rĂ©gime franquiste pour se mettre en place. Quatre personnes sont alors mises Ă  l'Ă©cart : SuĂĄrez, Carrillo, le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du PS Felipe GonzĂĄlez et son adjoint Alfonso Guerra.

Peu aprĂšs, le capitĂĄn general de la IIIe RĂ©gion militaire Jaime Milans del Bosch se soulĂšve. Il fait sortir les chars dans les rues de Valence et proclame l'Ă©tat d’exception en tentant de convaincre les autres militaires de soutenir l'action. À 21 h 00, un communiquĂ© du ministĂšre de l'IntĂ©rieur informe que les secrĂ©taires d'État et sous-secrĂ©taires des ministĂšres forment une commission permanente, chargĂ©e d'exercer les fonctions gouvernementales, sous la prĂ©sidence du directeur gĂ©nĂ©ral de la SĂ©curitĂ© de l'État, Francisco LaĂ­na et en contact Ă©troit avec les gĂ©nĂ©raux, chefs d'Ă©tat-major[16]. Entretemps, un autre gĂ©nĂ©ral putschiste, Torres Rojas, Ă©choue dans son essai de supplanter le gĂ©nĂ©ral, Ă  la tĂȘte de la division blindĂ©e Brunete, considĂ©rĂ©e comme la meilleure division blindĂ©e espagnole. Cela marque l'Ă©chec de la tentative d'occupation des points stratĂ©giques de la capitale, parmi eux le siĂšge de la radio et de la tĂ©lĂ©vision, et la diffusion d'un communiquĂ© relatant le succĂšs du coup d'État.

Le refus du roi Juan Carlos Ier de soutenir le coup d'État le fait avorter dans la nuit. Le monarque lui-mĂȘme s'assure par sa gestion personnelle et celle de ses collaborateurs de la fidĂ©litĂ© des commandants militaires. L'attitude du prĂ©sident de la GĂ©nĂ©ralitĂ© de Catalogne, Jordi Pujol, est remarquable aussi : peu avant 22 h, il diffuse Ă  toute l'Espagne sur Radio Nacional et Radio Exterior une allocution oĂč il appelle au calme.

Jusqu'Ă  1 h du matin, des nĂ©gociations ont lieu Ă  l'hĂŽtel Palace, situĂ© Ă  deux pas du CongrĂšs et centre des opĂ©rations choisi par le gĂ©nĂ©ral Aramburu Topete, directeur gĂ©nĂ©ral de la Garde civile, et le gĂ©nĂ©ral JosĂ© Antonio SĂĄenz de Santa MarĂ­a, directeur gĂ©nĂ©ral de la Police nationale. De mĂȘme s'y trouve le gĂ©nĂ©ral Alfonso Armada, pourtant putschiste et qui, sous couvert de nĂ©gocier, prĂ©tend se proposer comme solution de compromis entre le roi et Tejero. Son plan secret, inspirĂ© par l'exemple de Charles de Gaulle, Ă©tait de former un gouvernement dont feraient partie des socialistes et des communistes. À minuit, il se prĂ©sente au CongrĂšs avec un double objectif : convaincre le lieutenant-colonel Tejero de renoncer et assumer lui-mĂȘme les fonctions de prĂ©sident du Gouvernement aux ordres du roi, une attitude clairement anticonstitutionnelle. Mais il n'est pas « l'autoritĂ© militaire compĂ©tente » attendue par Antonio Tejero, qui est partisan d'un rĂ©gime franquiste, et ce dernier le congĂ©die violemment. Plus tard, ses plans sont dĂ©couverts et il est relevĂ© de ses fonctions de chef d'Ă©tat-major adjoint de l'armĂ©e de terre.

À une heure du matin, Juan Carlos Ier intervient Ă  la tĂ©lĂ©vision, en uniforme de capitaine gĂ©nĂ©ral des armĂ©es pour s'opposer au coup d'État, dĂ©fendre la Constitution et relever le gĂ©nĂ©ral Jaime Milans del Bosch. À partir de ce moment, le coup d'État est considĂ©rĂ© comme avortĂ©. À cinq heures, isolĂ©, Milans del Bosch renonce Ă  ses plans et est arrĂȘtĂ©. Antonio Tejero rĂ©siste jusqu'Ă  midi le 24 fĂ©vrier, mais les dĂ©putĂ©s sont libĂ©rĂ©s dans la matinĂ©e[17].

Les réactions internationales

Peu aprĂšs l'assaut du CongrĂšs, le coup d’État est condamnĂ© avec force par les pays de la CEE, avec qui l'Espagne Ă©tait en nĂ©gociation pour une adhĂ©sion qui se produira finalement en 1986. Au Royaume-Uni , le Premier ministre Margaret Thatcher qualifie le soulĂšvement militaire d'« acte terroriste »[18] .

Pour leur part, les États-Unis se maintiennent officiellement neutres au cours de ce processus, bien qu'existent divers indices qui semblent indiquer que l'administration Reagan Ă©tait au courant, grĂące aux informations de la CIA, de l'imminence du coup d'État. Parmi les attitudes douteuses qu'ont eues les États-Unis, on peut noter la rĂ©ception de futurs militaires putschistes espagnols Ă  Washington en 1980, l'accroissement des mouvements militaires nord-amĂ©ricains dans le dĂ©troit de Gibraltar au cours des jours prĂ©cĂ©dents et l'Ă©tat d'alerte dĂ©crĂ©tĂ© sur la base aĂ©rienne de TorrejĂłn de Ardoz depuis le dimanche qui prĂ©cĂ©dait le coup d'État. Antonio Tejero lui-mĂȘme, assis au banc des accusĂ©s lors du procĂšs qui suivra le coup d'État, affirme sans difficultĂ© qu'« aussi bien le gouvernement des États-Unis que le Vatican avaient Ă©tĂ© sondĂ©s par le gĂ©nĂ©ral Armada ». AprĂšs l'entrĂ©e d'Antonio Tejero dans l'hĂ©micycle, le secrĂ©taire d'État amĂ©ricain, le gĂ©nĂ©ral Alexander Haig, se limite Ă  dĂ©clarer que « l'assaut du CongrĂšs des dĂ©putĂ©s est une affaire interne concernant les Espagnols », ce qui lui vaut de sĂ©vĂšres critiques internationales ; une fois le coup d'État Ă©chouĂ©, il change ses dĂ©clarations pour un surprenant « Nous devons nous fĂ©liciter qu'en Espagne la dĂ©mocratie ait triomphĂ© »[19]. Depuis les accords de Madrid de 1953 , les liens sont troubles entre Washington et l'armĂ©e espagnole.

Pour sa part, le Vatican Ă©tait rĂ©uni le jour mĂȘme, le 23 fĂ©vrier, en une AssemblĂ©e Ă©piscopale et il ne fera de ce fait pas de dĂ©claration avant le 24, lorsqu'il condamne le coup d'État dĂ©jĂ  Ă©chouĂ©.

Le procĂšs et les consĂ©quences du coup d’État

CommĂ©moration du 30e anniversaire de l'Ă©chec du coup d'État, le .

Deux jours aprĂšs cette tentative de coup d’État, Leopoldo Calvo-Sotelo obtient son investiture comme nouveau prĂ©sident du gouvernement, Ă  la majoritĂ© absolue des suffrages[20].

AprĂšs le coup d'État demeurent quelques interrogations, spĂ©cialement au sujet du rĂŽle jouĂ© par chacun des principaux putschistes et particuliĂšrement les intentions et appuis du gĂ©nĂ©ral Armada. Les consĂ©quences les plus notables sont le dĂ©but du processus d'Ă©volution autonomiste (LOAPA) et un puissant renforcement de l'image de la monarchie parmi la population et les mĂ©dias politiques.

Lors du procĂšs postĂ©rieur devant le Conseil suprĂȘme de Justice militaire, connu en tant que procĂšs de Campamento, Milans del Bosch, Alfonso Armada et Antonio Tejero Molina sont condamnĂ©s Ă  trente ans de rĂ©clusion, comme principaux responsables du coup d’État[21].

La trame civile du coup d'État ne sera jamais instruite de maniĂšre rigoureuse, l'unique civil condamnĂ© Ă©tant l'ex-dirigeant des Syndicats verticaux franquistes Juan GarcĂ­a CarrĂ©s.

AccusĂ©s du coup d'État du 23-F, demandes de peines qu'a rendues le MinistĂšre public, sentences du Conseil suprĂȘme de justice militaire (es) et sentences dĂ©finitives du Tribunal suprĂȘme
Nom des accusĂ©s MinistĂšre public Conseil suprĂȘme de justice militaire Tribunal suprĂȘme
Jaime Milans del Bosch 30 ans 30 ans 30 ans
Alfonso Armada y Comyn 30 ans 6 ans 30 ans
Antonio Tejero Molina 30 ans 30 ans 30 ans
Luis Torres Rojas 15 ans 6 ans 12 ans
Diego Ibåñez Inglés 15 ans 5 ans 10 ans
José Ignacio San Martín López 15 ans 3 ans et 1jour 10 ans
Ricardo Pardo Zancada 15 ans 6 ans 12 ans
Miguel Manchado GarcĂ­a 12 ans 3 ans et 1 jour 8 ans
José Luís Cortina Prieto 12 ans acquitté acquitté
Juan García Carrés (l'unique civil inculpé) 10 ans 2 ans 2 ans
Pedro Mas Oliver 8 ans 3 ans 6 ans
Vicente GĂłmez Iglesias 8 ans 3 ans 6 ans
José L. Abad Gutiérrez 7 ans 3 ans et 1 jour 5 ans
JesĂșs Muñecas Aguilar 7 ans 3 ans et 6 mois 5 ans
Carlos Álvarez-Arenas Pardina 6 ans 3 ans 3 ans
José Pascual Gålvez 6 ans 3 ans 3 ans
Francisco Acera MartĂ­n 5 ans 2 ans 3 ans
Juan PĂ©rez de la LastraTormo 5 ans 2 ans 3 ans
Carlos LĂĄzaro Corthay 5 ans 2 ans 3 ans
Enrique Bobis GonzĂĄlez 5 ans 2 ans 3 ans
F. Javier Dusmet GarcĂ­a-Figueras 5 ans 2 ans 2 ans
José Cid Fortea 5 ans 2 ans 2 ans
Camilo Menéndez Vives 4 ans 1 an 1 an
César Álvarez Fernåndez 4 ans acquitté 1 an
JosĂ© NĂșñez Ruano 3 ans et 1 jour acquittĂ© 1 an
Pedro Izquierdo Sånchez 3 ans et 1 jour acquitté 1 an
Vicente Ramos Rueda 3 ans et 1 jour acquitté 1 an
Manuel Boza Carranco 3 ans et 1 jour acquitté 1 an
Santiago Vecino NĂșñez 3 ans et 1 jour acquittĂ© 1 an
Juan Batista Gonzålez 3 ans acquitté acquitté
JesĂșs Alonso HernĂĄiz 2 ans acquittĂ© 1 an
Vicente Carricondo Sånchez 2 ans acquitté 1 an
Francisco Ignacio Romån 1 an et 6 mois acquitté acquitté

Théories alternatives

Le dĂ©roulement sans effusion de sang mais apparemment chaotique du coup d'État, la plĂ©thore de questions sans rĂ©ponse quant Ă  son dĂ©roulement, l'allĂ©geance monarchiste farouche de deux principaux conspirateurs (Armada et Milans del Bosch) et la longue absence du roi avant qu'il ne fasse finalement une allocution Ă  la tĂ©lĂ©vision publique en fin de soirĂ©e ont alimentĂ© le scepticisme et les thĂ©ories du complot pendant le procĂšs Campamento et sont restĂ©es actives depuis[22].

Ces thĂ©ories mettent en doute la sincĂ©ritĂ© de la dĂ©fense de la dĂ©mocratie par le roi et qualifient le coup d'État d'exemple de realpolitik coercitive poussĂ©e Ă  son paroxysme. En substance, cette version des Ă©vĂ©nements prĂ©tend que le coup d'État lui-mĂȘme a Ă©tĂ© orchestrĂ© par les services secrets espagnols, de connivence avec le roi et la maison royale, ainsi qu'avec des reprĂ©sentants des principaux partis politiques et des mĂ©dias grand public, entre autres. La piĂšce maĂźtresse du complot et sa motivation apparente Ă©taient l'opĂ©ration Armada, un coup d'État en douceur inspirĂ© de l'opĂ©ration orchestrĂ©e en mai 1958 par les partisans du gĂ©nĂ©ral de Gaulle et visant Ă  mettre en place un gouvernement d'unitĂ© nationale dirigĂ© par Armada lui-mĂȘme et composĂ© d'une sĂ©rie de ministres issus de tous les principaux partis politiques. Le premier objectif Ă©tait d'Ă©vincer le premier ministre SuĂĄrez, qui avait Ă©tĂ© critiquĂ© sans relĂąche par les mĂ©dias et l'Ă©lite politique pendant des mois et dont on disait qu'il avait mĂȘme perdu les bonnes grĂąces du roi, en partie Ă  cause de l'ambitieux programme rĂ©formiste de SuĂĄrez, qui avait vraisemblablement dĂ©rapĂ©. Le second objectif du prĂ©tendu coup d'État en douceur Ă©tait une consĂ©quence du premier : il s'agissait de presser les institutions publiques espagnoles encore balbutiantes de remplir les critĂšres de convergence pour lesquels la nation Ă©tait prĂ©parĂ©e, Ă  savoir l'adhĂ©sion future Ă  la CEE et la consolidation d'une monarchie parlementaire effectivement bipartisane et idĂ©ologiquement modĂ©rĂ©e. Selon le raisonnement qui sous-tendait la thĂ©orie, cet objectif exigeait Ă  la fois de purger les forces armĂ©es de leurs Ă©lĂ©ments les plus rĂ©actionnaires et d'effrayer l'Ă©lecteur ordinaire pour qu'il accepte la monarchie et le systĂšme bipartite comme une solution institutionnelle par dĂ©faut[22].

Un autre objectif encore, plus concret, aurait Ă©tĂ© de neutraliser un coup d'État imminent et dur prĂ©vu plus tard dans l'annĂ©e, trĂšs probablement le 2 mai. Une clique ou un sous-groupe important parmi les instigateurs de ce prĂ©tendu coup d'État Ă©tait le groupe dit des Colonels, dirigĂ© par l'ancien chef du CESID, JosĂ© Ignacio San MartĂ­n. Deux raisons ont Ă©tĂ© invoquĂ©es pour expliquer pourquoi ce prĂ©tendu complot Ă©tait considĂ©rĂ© comme particuliĂšrement dangereux : les relations de San MartĂ­n avec les services de renseignement et le fait que ce sont les colonels et les lieutenants-colonels, plutĂŽt que les gĂ©nĂ©raux, qui avaient le contrĂŽle direct des troupes[22].

Selon ces thĂ©ories, le Premier ministre SuĂĄrez a eu vent de l'opĂ©ration Armada longtemps Ă  l'avance, d'oĂč sa dĂ©mission soudaine afin de l'Ă©viter - Ă©tant donnĂ© que le coup d'État devait avoir lieu pendant la motion de censure de son gouvernement, prĂ©vue quelques semaines plus tard. Le plan a Ă©tĂ© mis en Ɠuvre malgrĂ© la dĂ©mission de SuĂĄrez, mais l'incapacitĂ© de Tejero Ă  comprendre ses ramifications, sa croyance infidĂšle qu'il Ă©tait au cƓur d'un complot de coup d'État pur et dur, la journĂ©e mĂ©diatique provoquĂ©e par son entrĂ©e violente dans les chambres du CongrĂšs (et son comportement et son langage grossiers et sans maniĂšres, qui ont Ă©tĂ© captĂ©s par des microphones et des camĂ©ras dans le bĂątiment et plus tard ridiculisĂ©s par la presse) et son refus d'accepter le gouvernement multipartite proposĂ© par Armada, ont entraĂźnĂ© l'avortement simultanĂ© du coup d'État "dur" et du coup d'État "mou" par ceux qui les avaient planifiĂ©s[22].

L'ancien chef des opĂ©rations spĂ©ciales du CESID, JosĂ© Luis Cortina Prieto, l'un des trois officiers militaires acquittĂ©s au cours du procĂšs, joue un rĂŽle omniprĂ©sent dans ces thĂ©ories, dont certaines le placent comme un acteur majeur de la conspiration ainsi que comme l'homme responsable de la fusion de tous les diffĂ©rents complots de coup d'État en un seul, puis de leur neutralisation simultanĂ©e. Cortina, diplĂŽmĂ© de l'AcadĂ©mie de Saragosse dans la mĂȘme cohorte que le roi, avait Ă©tĂ© nommĂ© aux services de renseignement de l'Ă©tat-major interarmĂ©es sous le gouvernement Carrero et aiderait ensuite son frĂšre Ă  crĂ©er le groupe de rĂ©flexion Gabinete de OrientaciĂłn y DocumentaciĂłn S. A. , qui serait le germe du principal parti conservateur du pays. Il a Ă©tĂ© allĂ©guĂ©[26][28][29][30][31] que pendant une pause dĂ©jeuner dans le cadre du procĂšs " 23-F " , et aprĂšs avoir Ă©tĂ© soumis Ă  une sĂ©ance de grillage particuliĂšrement intense par le procureur, Cortina a saisi un tĂ©lĂ©phone et a Ă©tĂ© entendu dire : "Como siga este tĂ­o asĂ­, saco a relucir lo de Carrero" ("si ce type continue Ă  me mettre la pression comme ça, je vais cracher le morceau sur ce qui est arrivĂ© Ă  Carrero"). L'interrogatoire du procureur aurait perdu beaucoup d'intensitĂ© lorsque le tribunal a repris aprĂšs la pause dĂ©jeuner, et Cortina a finalement Ă©tĂ© acquittĂ©.

On peut soutenir que, jusqu'Ă  la diffusion en 2014 d'un documentaire par la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision La Sexta, l'Ɠuvre de JesĂșs Palacios et le livre La gran desmemoria de Pilar Urbano, ces thĂšses n'ont jamais fait leur chemin dans la conscience dominante, bien que les sous-entendus et les implications subtiles ne soient pas inhabituels. Certaines de ces implications peuvent ĂȘtre involontaires. La biographie autorisĂ©e du Roi par JosĂ© Luis de Vilallonga contient l'extrait d'interview suivant :

« Si je devais rĂ©aliser une opĂ©ration au nom du Roi mais sans son consentement, mon premier geste aurait Ă©tĂ© de l'isoler du reste du monde et de l'empĂȘcher de communiquer avec quiconque Ă  l'extĂ©rieur. Eh bien, c'est loin d'ĂȘtre le cas : Cette nuit-lĂ , j'ai pu entrer et sortir de ma rĂ©sidence Ă  volontĂ© ; et concernant les lignes tĂ©lĂ©phoniques, j'ai reçu plus d'appels en quelques heures que je n'en avais reçu en un mois entier ! De mon pĂšre, qui se trouvait Ă  Estoril (et qui Ă©tait aussi trĂšs surpris de pouvoir me contacter par tĂ©lĂ©phone), de mes deux sƓurs Ă  Madrid, et de chefs d'État amis qui m'ont encouragĂ© Ă  rĂ©sister. »

Sabino Fernåndez Campo, chef de la Maison Royale, aurait expurgé ceci de l'édition espagnole[22].

Notes et références

Références

  1. Le numéronyme 23-F renvoie à la date du 23 février.
  2. (es) Roberto Muñoz Bolaños, El 23- F y los otros golpes de Estado de la Transición, Barcelone, Espasa, (ISBN 978-84-670-6131-4)
  3. « L'armĂ©e espagnole et les communistes La prise de position du Conseil militaire n'alarme pas M. Suarez », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  4. « Le procĂšs des officiers de droite impliquĂ©s dans un complot en novembre 1978 s'est ouvert Ă  Madrid », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  5. (en) Bill Cemlyn-Jones, « King Orders army to crush coup », The Guardian,‎ (lire en ligne)
  6. (es) Juan Francisco Fuentes, 23 de febrero de 1981. El golpe que acabó con todos los golpes, Barcelone, Taurus, coll. « La España del siglo XX en 7 días », (ISBN 978-84-306-2273-3), p. 45
  7. « M. de la Cierva remplace M. Clavero au ministĂšre de la Culture », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  8. « Espagne. Les socialistes ont dĂ©posĂ© une motion de censure au Parlement », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  9. « En dĂ©pit d'une crise de plus en plus profonde, le remaniement du gouvernement n'impliquerait pas un changement de cap Ă©conomique », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  10. « M. Adolfo Suarez : plus dure sera la chute », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  11. « L'ingĂ©nieur de la centrale nuclĂ©aire de Lemoniz a Ă©tĂ© assassinĂ© par l'ETA militaire », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  12. (en) James M. Markham, « Basque's Death in Jail Brings call For Mass Strike », The New York Times,‎ (lire en ligne)
  13. (es) « 23-F en directo 35 años despuĂ©s », El PaĂ­s,‎ (lire en ligne)
  14. « 23 fĂ©vrier 1981, chronique d’un coup d’État annoncĂ© », L'HumanitĂ©,‎ (lire en ligne)
  15. (es) Sara Pulido, « Testigos del 23-F », AcademiaTV, no 109,‎ , p. 36 (lire en ligne)
  16. (es) « Al amanecer se derrumbarĂĄn », El Comercio,‎ (lire en ligne)
  17. (en) « Spanish Coup Attempt Fails », Iowa City Press–Citizen, no 73,‎ , p. 1 (lire en ligne)
  18. (es) « Thatcher y su visiĂłn de España », Hoy,‎ (lire en ligne)
  19. (es) Pablo Sebastian, « Haig rectificĂł en Madrid su primera reacciĂłn al intento de golpe de Estado », El PaĂ­s,‎ =1981 (lire en ligne)
  20. « Le dĂ©bat d'investiture aux CortĂšs. M. Calvo Sotelo a obtenu la majoritĂ© absolue », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  21. (en) McLaren, Lauren, Constructing democracy in Southern Europe: a comparative analysis of Italy, Spain, and Turkey, Routledge, , p. 210.
  22. (es) Pilar Urbano, La gran desmemoria : Lo que SuĂĄrez olvidĂł y el Rey prefiere no recordar Tapa dura, Editorial Planeta,

Annexes

Bibliographie

  • Amadeo MartĂ­nez InglĂ©s, 23-F : El golpe que nunca existiĂł, 2001 (ISBN 84-95440-13-X) (en espagnol).
  • JesĂșs Cacho, El negocio de la libertad, 1999 (ISBN 84-930481-9-4) (en espagnol).
  • Julio de Busquets, Miguel A. Aguilar et Ignacio Puche, El Golpe: anatomĂ­a y claves del asalto al congreso, 1981 (en espagnol, Ă©crit quelques jours aprĂšs le coup d'État).
  • Javier Cercas, Anatomie d'un instant, Acte Sud, 2010 (ISBN 978-2-7427-9215-3).

Articles connexes

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