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Sunshine (film, 1999)

Sunshine (titre du film en hongrois : A napfény íze littéralement « Le goût de la lumiÚre du soleil ») est un film coproduit par la Hongrie, l'Autriche, l'Allemagne et le Canada, réalisé par Istvån Szabó et sorti en 1999.

Sunshine

Titre original Sunshine
RĂ©alisation IstvĂĄn SzabĂł
Scénario Istvån Szabó
Israel Horovitz
Musique Maurice Jarre
Acteurs principaux
Sociétés de production Serendipity Point Films
Alliance Atlantis
ISL Film
Studiocanal
Dor Film
Pays de production Drapeau de l'Allemagne Allemagne
Drapeau de l'Autriche Autriche
Drapeau de la Hongrie Hongrie
Drapeau du Canada Canada
Genre Drame
Film historique
Durée 181 minutes
Sortie 1999

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Le scénario du film est écrit par le réalisateur, en collaboration avec Israel Horovitz.

La distribution du film est internationale. On y remarque particuliĂšrement Ralph Fiennes, qui joue les rĂŽles de trois membres de gĂ©nĂ©rations successives d’une famille.

L’accueil du film a Ă©tĂ© trĂšs mitigĂ©, de critiques totalement positives Ă  d’autres totalement nĂ©gatives, surtout en Hongrie, oĂč il a suscitĂ© des polĂ©miques idĂ©ologiques aussi. La critique a Ă©tĂ© plus favorable en Occident, ce qui se reflĂšte dans plusieurs prix remportĂ©s.

Synopsis

Le film met en scĂšne l’histoire de quatre gĂ©nĂ©rations d’une famille juive hongroise, les Sonnenschein. Un prologue montre le jeune Emmanuel Sonnenschein quittant son village pour s’installer dans la capitale hongroise. En effet, la distillerie de son pĂšre a Ă©tĂ© dĂ©truite par une explosion et celui-ci est dĂ©cĂ©dĂ© Ă  la suite de cet accident. Emmanuel emporte Ă  Budapest le prĂ©cieux carnet noir comportant les recettes secrĂštes de son pĂšre. Nous sommes vers la fin du XIXe siĂšcle. Lorsque le film dĂ©bute vraiment, les Sonnenschein se sont enrichis grĂące Ă  une boisson baptisĂ©e en hongrois NapfĂ©ny Ă­ze « GoĂ»t de la lumiĂšre du soleil ». Le film se divise en trois pĂ©riodes historiques : de 1890 Ă  1914, de 1914 Ă  1944 et de 1945 Ă  1989, couvrant donc la fin de la double monarchie austro-hongroise, les deux guerres mondiales et le rĂ©gime communiste. La fin du film mentionne la fin de ce rĂ©gime.

Résumé détaillé

Le film est conçu comme une narration lue aprĂšs avoir Ă©tĂ© Ă©crite vers la fin du XXe siĂšcle[1]. Le narrateur est IvĂĄn, l'ultime descendant de la famille. Le film est composĂ© de parties oĂč les personnages dialoguent et d'autres qui illustrent la narration lue. Parmi celles-ci il y a Ă©galement des fragments de documents cinĂ©matographiques sur des Ă©vĂ©nements historiques importants des plus de 100 annĂ©es couvertes par le film.

L'époque ensoleillée (1890-1914)[2]

Vers la fin du XIXe siĂšcle, l'arriĂšre-grand-pĂšre d'IvĂĄn, Emmanuel « ManĂł » Sonnenschein, part Ă  pied d'un village de l'Empire austro-hongrois pour chercher du travail. Il doit faire vivre sa mĂšre et son frĂšre cadet aprĂšs que son pĂšre, Aron Sonnenschein, propriĂ©taire du bistrot du village, a perdu la vie lors de l'explosion de l'alambic oĂč il distillait de l'eau de vie. C'Ă©tait un homme apprĂ©ciĂ©. Il faisait une boisson avec des plantes mĂ©dicinales qui avait fait du bien a beaucoup de gens. Le cahier oĂč Ă©tait Ă©crite la recette secrĂšte de la boisson a Ă©tĂ© retrouvĂ©e dans les ruines par sa femme. ManĂł a aussi trouvĂ© la montre de gousset de son pĂšre. Le cahier, la montre et une canne sont son seul hĂ©ritage.

ArrivĂ© Ă  Budapest, ManĂł se fait embaucher dans une usine d'alcool. À 25 ans, il a sa propre maison et sa fabrique de liqueurs. Il fait, selon la recette de son pĂšre, une boisson qu'il nomme « vin de soleil ». Il Ă©pouse, sans ĂȘtre amoureux, RĂłza Deutsch, avec qui il a deux enfants, l'un GusztĂĄv, l'autre IgnĂĄc, le futur grand-pĂšre d'IvĂĄn, le narrateur. Sa liqueur a beaucoup de succĂšs et la famille s'enrichit. AprĂšs la mort prĂ©maturĂ©e de son frĂšre, ManĂł adopte sa fillette, ValĂ©ria « Vali », la future grand-mĂšre d'IvĂĄn.

GusztĂĄv, IgnĂĄc et Vali grandissent ensemble. Devenus de jeunes adultes, Vali se passionne pour la photographie, IgnĂĄc fait des Ă©tudes de droit Ă  Vienne et GusztĂĄv – des Ă©tudes de mĂ©decine. Aucun ne s'intĂ©resse Ă  la profession de ManĂł, ce qui ne dĂ©range pas celui-ci, fier des ambitions des jeunes.

IgnĂĄc et Vali s'aiment en secret, mais GusztĂĄv s'en aperçoit et le dit aux parents. Le pĂšre prend IgnĂĄc Ă  partie, en lui disant qu'il doit renoncer Ă  Vali, parce qu'elle est sa cousine germaine. IgnĂĄc se soumet Ă  la volontĂ© de son pĂšre, malgrĂ© Vali. Il continue Ă  l'aimer mais ne rĂ©pond pas Ă  ses lettres. Un jour, Vali lui rend visite Ă  Vienne sans s'ĂȘtre annoncĂ©e, et leur relation devient sexuelle.

AprÚs ses études, Ignåc retourne à Budapest et commence une carriÚre de succÚs en tant que juge. Son pÚre est trÚs fier de lui. Il lui donne la montre dont il a hérité et lui conseille de ne jamais oublier son origine. La relation entre cousins continue en secret.

IgnĂĄc est apprĂ©ciĂ© par son supĂ©rieur, qui lui dit qu'il mĂ©rite d'ĂȘtre promu, mais pour cela il serait souhaitable qu'il change son nom en un autre, hongrois. IgnĂĄc suit son conseil et devient Sors (« destin » en hongrois). GusztĂĄv et Vali suivent son exemple.

Vali tombe enceinte et Ignåc la demande en mariage en présence de la famille. Sa mÚre est révoltée, mais son pÚre ne s'y oppose plus. Il se rappelle qu'il a voulu lui aussi épouser une cousine qu'il aimait, mais sa famille le lui a interdit, il s'est soumis et ainsi il n'a pas connu le bonheur d'un mariage d'amour.

La presse dĂ©voile un cas de corruption parmi des politiciens haut placĂ©s du pouvoir. Les supĂ©rieurs d'IgnĂĄc veulent le charger du jugement de l'affaire de telle sorte, que les suspects s'en tirent. En leur rĂ©pliquant que le procĂšs pourraient finir par la condamnation des suspects, il propose que le dossier soit renvoyĂ© au procureur pour une recherche minutieuse, qui pourrait durer longtemps, le cas pouvant ainsi ĂȘtre oubliĂ©. Sa proposition est acceptĂ©e. IgnĂĄc fait ainsi une compromission : il obtient que le cas soit Ă©touffĂ© sans sa participation, au prix que justice ne soit pas faite, sa carriĂšre restant en mĂȘme temps hors de danger. Vali l'accuse de lĂąchetĂ©, sachant que l'empire est minĂ© par la corruption, mais IgnĂĄc pense que celui-ci, dont il est l'adepte, ne doit pas ĂȘtre affaibli. Il Ă©numĂšre avec colĂšre les aspects entre lesquels il est dĂ©chirĂ© : ce que lui demande Vali, l'esprit de famille, l'esprit religieux, le dĂ©vouement Ă  l'empereur, l'esprit libĂ©ral, le droit romain, le gouvernement, l'opposition, son propre sens de la justice, l'esprit rĂ©volutionnaire de son frĂšre, le conservatisme de son pĂšre.

Ignåc et Vali ont leur premier enfant, Istvån. Ignåc est reçu dans des cercles haut placés. Il participe pour la premiÚre fois à une chasse, tue un cerf et est troublé par la mort de celui-ci.

On propose à Ignåc de participer aux élections sur la liste du parti gouvernemental. Il est tenté et ses parents en sont fiers. Sa mÚre est enthousiasmée mais son pÚre dit que les gens comme eux ne doivent pas viser trop haut. En revanche, Gusztåv, connaissant en tant que médecin la misÚre des ouvriers et ayant des idées socialistes, y est totalement opposé. Vali non plus ne veut pas que son mari participe à un pouvoir corrompu.

Les jeunes époux ont un deuxiÚme enfant, Ádåm, le futur pÚre d'Ivån.

IgnĂĄc annonce Ă  son supĂ©rieur qu'il ne participera pas aux Ă©lections, et celui-ci a Ă©galement quelque chose Ă  lui faire savoir : GusztĂĄv est poursuivi en tant que membre d'une organisation socialiste qui milite pour le renversement de la monarchie. Les deux frĂšres se disputent, IgnĂĄc voulant s'assimiler Ă  la sociĂ©tĂ© et Ă©tant reconnaissant que le pouvoir le lui permette. GusztĂĄv lui rĂ©plique que les Juifs ne seront jamais totalement acceptĂ©s par cette sociĂ©tĂ©-lĂ , et que ce ne sera possible que dans une sociĂ©tĂ© juste, pour laquelle il faut lutter, mĂȘme au prix d'une rĂ©volution sanglante. Vali se situe entre les deux : elle ne veut rejoindre ni les puissants ni les opprimĂ©s, mais seulement ĂȘtre fiĂšre de sa langue maternelle, le hongrois, et voir par la fenĂȘtre le paysage qu'elle connaĂźt et qu'elle aime.

L'Ă©poque des tempĂȘtes (1914-1944)

La PremiĂšre Guerre mondiale Ă©clate. GusztĂĄv est mobilisĂ© comme mĂ©decin militaire et IgnĂĄc devient major juge de cour martiale. Il est trĂšs fier et Ă©mu d'ĂȘtre reçu par l'empereur, qui veut le connaĂźtre. Pendant les quatre annĂ©es que dure la guerre, il rend des verdicts sĂ©vĂšres et ne voit pas sa famille. Il apprend le mĂȘme jour la mort de l'empereur et celle de son pĂšre. Peu de temps aprĂšs, la guerre finit par la dĂ©faite de l'empire, ce que IgnĂĄc ressent comme la fin d'un monde auquel il doit beaucoup.

Lorsqu'il revient chez lui, ses fils sont dĂ©jĂ  des jeunes hommes. Vali lui annonce qu'elle se sĂ©pare de lui, parce qu'il ne l'aime plus depuis qu'il aimait l'empereur, et qu'elle l'aime seulement comme une sƓur. Vers la fin du film elle avouera qu'en fait elle avait un amant. En Hongrie, devenue indĂ©pendante, c'est la RĂ©volution des Asters, d'orientation social-dĂ©mocrate qui Ă©clate, puis les communistes instaurent la RĂ©publique des conseils. GusztĂĄv est membre de son gouvernement. Il essaye de convaincre IgnĂĄc de collaborer avec eux, en l'avertissant qu'il risque d'ĂȘtre lui aussi l'objet de la « juste » vengeance du peuple en tant qu'homme du pouvoir antĂ©rieur. IgnĂĄc refuse et il est assignĂ© Ă  rĂ©sidence. Apprenant cela, Vali revient chez lui.

AprÚs la chute du pouvoir communiste, Gusztåv émigre en France et Ignåc refuse de redevenir juge, étant mis à la retraite. Sa santé se détériore rapidement. L'atmosphÚre de la maison est tendue. Ignåc a des accÚs de colÚre et sa mÚre ne cesse de manifester sa haine envers Vali. Ignåc meurt et, peut de temps aprÚs, sa mÚre aussi. Vali devient la cheffe de famille.

En Hongrie, l'antisémitisme se manifeste de plus en plus. Ádåm est humilié en tant que Juif par ses camarades de faculté. Istvån, son frÚre aßné, pratique l'escrime et conseille à Ádåm de la pratiquer lui aussi, pour pouvoir se défendre. Les deux s'entraßnent dans un club d'escrime civil. Ádåm fait des études de droit, obtient son doctorat mais ne pratique pas sa profession, s'occupant seulement d'escrime et devenant toujours meilleur dans ce sport. Vali devient une photographe de succÚs.

Anselmi, l'entraßneur d'Ádåm, est d'avis que celui-ci devrait passer au club des officiers et en parle au chef de celui-ci, le général Jåkófalvy, mais on n'y reçoit pas de Juifs, c'est pourquoi l'entraßneur conseille à Ádåm de se convertir. Vali et Istvån ne s'y opposent pas, sans vouloir se convertir eux aussi. Ádåm suit des cours de catéchisme.

ÁdĂĄm tombe amoureux de Hanna, une Juive qu'il rencontre au catĂ©chisme et qui devient catholique en mĂȘme temps que lui, parce qu'elle a un fiancĂ© fils d'un propriĂ©taire terrien catholique. ÁdĂĄm lui dĂ©clare son amour d'une façon trĂšs insistante, en sentant que la jeune fille n'est pas amoureuse de son fiancĂ© mais sĂ©duite par ÁdĂĄm.

Ádåm est reçu dans le club d'escrime des officiers. Son entraßneur, le baron Margittay, remarque qu'il est gaucher, bien qu'il combatte avec la droite, et il l'entraßne à combattre avec la gauche. Ádåm gagne le championnat de Hongrie en luttant contre un officier.

Ádåm épouse Hanna. Un an aprÚs, ils ont un fils, Ivån.

Ádåm devient pour la deuxiÚme fois champion national. Le président du club d'escrime civil, un juif, lui offre beaucoup d'argent pour qu'il revenir dans son club, mais il refuse, en s'affirmant hostile à l'esprit mercantile qu'il attribue aux Juifs. Le détachement de ses origines est allé jusqu'à le rapprocher de l'antisémitisme.

En 1936, le chef du club des officiers demande Ă  ÁdĂĄm de proposer les membres de l'Ă©quipe olympique. Il en fait partie mais aussi un officier qui lui est hostile. En fait, il continue d'ĂȘtre dans une situation d'infĂ©rioritĂ©, n'Ă©tant pas officier.

ÁdĂĄm devient champion olympique aux Jeux olympiques d'Ă©tĂ© de 1936, de Berlin. Il y est contactĂ© par un dirigeant de club d'escrime amĂ©ricain, Ă©migrĂ© de Hongrie, qui lui propose de partir pour les États-Unis, mais il refuse par patriotisme. L'AmĂ©ricain l'accuse de complicitĂ© avec le rĂ©gime dictatorial de Hongrie et l'avertit du danger de l'alliance du pays avec l'Allemagne, en lui conseillant de se sauver avant qu'il soit trop tard. À Budapest, il est accueilli en hĂ©ros national, dĂ©corĂ© et nommĂ© officier.

La vie d'ÁdĂĄm se complique du fait que sa belle-sƓur, GrĂ©ta, est amoureuse de lui. Il rĂ©siste pendant quelques annĂ©es Ă  ses insistances mais finalement il lui cĂšde.

Les persĂ©cutions contre les Juifs commencent par l'adoption d'une premiĂšre loi. L'officier chef du club d'escrime lui annonce que son entraĂźneur a quittĂ© la Hongrie. ÁdĂĄm le qualifie de traĂźtre, mais le chef comprend l'entraĂźneur, parce que la femme de celui-ci est juive, et le chef se dĂ©clare contre l'antisĂ©mitisme. D'ailleurs, il est dĂ©mis et remplacĂ© par l'officier hostile Ă  ÁdĂĄm. Bien que cette loi ne se rĂ©fĂšre pas Ă  ÁdĂĄm aussi, il est Ă©liminĂ© du club. GrĂ©ta, avec qui il continue sa relation en secret, insiste pour que toute la famille Ă©migre. Elle dit qu'ils pourraient partir en AmĂ©rique ou en Australie, et vivre en fabriquant le vin de soleil, selon la recette de ManĂł Sonnenschein. Le cahier hĂ©ritĂ© par Vali est quelque part dans la maison mais on ne sait pas oĂč. IstvĂĄn aussi est d'accord pour partir, mais ÁdĂĄm croit que la situation d'alors ne durera pas. Finalement, ils se dĂ©cident tous Ă  partir mais ils ne peuvent plus, car les consulats Ă©trangers n'accordent plus de visas.

C'est la Seconde guerre mondiale. ÁdĂĄm est mobilisĂ© en tant que Juif dans une sous-unitĂ© de travail. L'ancien chef du club d'escrime des officiers lui promet de l'aider autant qu'il pourra, et lui demande pardon de s'ĂȘtre trompĂ© en lui affirmant que l'assimilation Ă©tait la meilleure voie pour ÁdĂĄm.

AprĂšs qu'en mars 1944 la Hongrie est occupĂ©e par des troupes allemandes, Hanna et Vali doivent porter l'Ă©toile jaune et dĂ©mĂ©nager dans le ghetto de Budapest. Vali rĂ©ussit Ă  se cacher dans un grenier, mais Hanna est dĂ©portĂ©e et tuĂ©e. ÁdĂĄm et son fils, IvĂĄn, arrivent ensemble en sous-unitĂ© de travail sur le front russe, gardĂ©e par la police militaire. ÁdĂĄm porte son uniforme d'officier et un brassard blanc que devaient porter les Juifs baptisĂ©s. Le sous-officier commandant des policiers apercevant ce brassard blanc le rosse. Il hurle qu'il n'est qu'un youpin et lui intime qu'il le dise aussi. Mais malgrĂ© les coups qu'il reçoit, ÁdĂĄm s'obstine Ă  rĂ©pondre qu'il est officier de l'armĂ©e hongroise, champion national et olympique d'escrime. Il est torturĂ© jusqu'Ă  ce qu'il meure sous les yeux de son fils, que ses camarades retiennent pour l'empĂȘcher de rĂ©agir.

GrĂ©ta, IstvĂĄn et leur enfant, qui se cachaient, sont dĂ©noncĂ©s, arrĂȘtĂ©s par des membres du Parti des Croix flĂ©chĂ©es au pouvoir et tuĂ©s sur les quais du Danube avec des milliers d'autres Juifs de Budapest, cinq jours seulement avant l'occupation de la ville par l'ArmĂ©e rouge.

Époque du ciel couvert (1945-1989)

Vali, vieillie, revient chez elle, puis KatĂł, la servante de la famille, vieillie elle aussi, revient avec un chariot plein d'objets qu'elle a pu emporter dans son village. GusztĂĄv, le grand-oncle d'IvĂĄn, revient lui aussi d'exil, puis IvĂĄn.

GusztĂĄv participe au nouveau pouvoir communiste et convainc IvĂĄn de s'engager dans l'ÁVH, la police politique, dans l'idĂ©e de contribuer Ă  punir les criminels de l'espĂšce de ceux qui ont tuĂ© son pĂšre. IvĂĄn devient un communiste convaincu, il fait carriĂšre, devient major mais ne peut Ă©chapper Ă  l'amertume. Il plaĂźt Ă  Karola, une collĂšgue mĂšre de famille, major elle aussi. Knorr, son supĂ©rieur direct, l'avertit que le mari de celle-ci peut ĂȘtre dangereux pour lui. IvĂĄn commence tout de mĂȘme une liaison avec elle, sa premiĂšre expĂ©rience sexuelle.

Des purges staliniennes y compris Ă  caractĂšre antisĂ©mite commencent dans l'appareil supĂ©rieur de l'État. Le gĂ©nĂ©ral Kope, commandant de l'ÁVH, une brute, convoque IvĂĄn et lui ordonne de s'occuper d'un prĂ©tendu complot anti-rĂ©gime dirigĂ© par IsraĂ«l, dans lequel beaucoup de Juifs seraient impliquĂ©s, y compris Knorr. Le gĂ©nĂ©ral manifeste ouvertement son antisĂ©mitisme. Il avertit IvĂĄn que lui aussi pourrait ĂȘtre impliquĂ©, Ă©tant un proche de Knorr, et lui ordonne de ne pas travailler avec des Juifs Ă  ce dossier.

IvĂĄn rapporte au gĂ©nĂ©ral que Knorr n'avoue aucune culpabilitĂ© et que lui, il ne croit pas Ă  celle-ci. Le gĂ©nĂ©ral lui dit que Knorr doit ĂȘtre torturĂ© jusqu'Ă  ce qu'il avoue ou, s'il est un vrai communiste, qu'il avoue pour se sacrifier, en rendant ainsi un service Ă  la cause du communisme. Il lui dit aussi qu'il a de la chance que son oncle GusztĂĄv vienne de mourir, car il Ă©tait lui aussi membre du complot.

Ivån continue de soutenir que Knorr est innocent et le général le déssaisit du dossier, en ordonnant qu'il soit interrogé lui aussi, pour le moment en tant que témoin.

Ivån aime Karola mais elle rompt avec lui, en voyant que sa position s'est affaiblie, alors qu'elle a besoin d'un homme fort, avec qui se sentir en sécurité.

AprĂšs la mort de Staline, des luttes pour le pouvoir commencent dans la direction du parti communiste, les crimes de l'Ă©poque stalinienne sont dĂ©voilĂ©s, le gĂ©nĂ©ral est arrĂȘtĂ©. Le rĂ©gime ne change pas pour autant quant Ă  son essence. Knorr, qui est mort lors d'un interrogatoire, est rĂ©habilitĂ©[3], exhumĂ©, identifiĂ© par IvĂĄn et rĂ©-enterrĂ© avec les honneurs. IvĂĄn prononce un bref discours sur sa tombe, dans lequel il s'accuse pour le fait que lui, comme Knorr, ont cru contribuer Ă  crĂ©er un monde meilleur, alors qu'en fait ils ont servi une bande de malfaiteurs assoiffĂ©s de pouvoir, en devenant eux aussi des malfaiteurs. IvĂĄn fait ses adieux Ă  Knorr et Ă  soi-mĂȘme, comme Ă  quelqu'un qui a assistĂ© impuissant Ă  la mort de son pĂšre, et qui n'a rien fait non plus quand Knorr a Ă©tĂ© tuĂ©. Ensuite IvĂĄn dĂ©missionne de sa fonction et devient un dissident.

IvĂĄn est l'un de ceux qui enflamment la foule pendant la RĂ©volution de 1956, il est arrĂȘtĂ© aprĂšs sa dĂ©faite et condamnĂ© Ă  cinq ans de dĂ©tention. Il effectue trois ans de sa peine. À sa libĂ©ration, on lui rend ses effets personnels sans la montre hĂ©ritĂ©e de son arriĂšre-grand-pĂšre.

IvĂĄn retourne chez lui. Avec Vali, il se met Ă  chercher le cahier contenant la recette du vin de soleil, mais Vali a un malaise. À l'hĂŽpital, questionnĂ©e comment elle s'appelle, elle rĂ©pond, lucide, « ValĂ©ria Sonnenschein », et rĂ©pĂšte ce nom quand IvĂĄn lui rappelle qu'elle s'appelle Sors.

Ivån rencontre par hasard Karola dans le métro. Elle lui demande pardon pour sa déposition à charge à son procÚs mais Ivån ne lui en veut pas, il voudrait la revoir. Cependant, elle descend sans lui donner son numéro de téléphone.

Vali meurt à l'hÎpital. Ivån n'en récupÚre que la canne héritée de son arriÚre-grand-pÚre.

Chez lui, IvĂĄn sort dans la rue toutes les vieilleries, meubles, journaux anciens, papiers, etc., pour que les Ă©boueurs les emportent. Alors qu'il sort des papiers d'une boĂźte, le cahier avec la recette du vin de soleil tombe par terre sans qu'il s'en aperçoive. Par contre, il sort d'une enveloppe un texte Ă©crit par son arriĂšre-grand-pĂšre pour IgnĂĄc, lorsque celui-ci est parti faire ses Ă©tudes supĂ©rieures. Pendant qu'il le lit, son arriĂšre-grand-pĂšre, son grand-pĂšre et son pĂšre apparaissent tour Ă  tour, puis, pendant que les Ă©boueurs jettent dans la benne de leur camion des piles de journaux de diverses Ă©poques passĂ©es, on n'entend plus que la voix de l'arriĂšre-grand-pĂšre. Il conseille Ă  IgnĂĄc de ne jamais abandonner la religion des ancĂȘtres ; de ne pas vivre uniquement en s'efforçant d'ĂȘtre acceptĂ©, sinon il sera malheureux ; de ne pas s'attacher aux biens matĂ©riels, car ils peuvent s'Ă©vanouir Ă  tout moment ; de ne pas s'engager Ă  ce qu'il ne peut pas faire, pour ne pas tomber malade Ă  cause de l'angoisse que cela provoque. IvĂĄn garde ce texte. Dans la rue, un Ă©boueur ramasse le cahier et le jette dans la benne du camion.

Ivån fait changer son nom en Sonnenschein, à l'étonnement de la fonctionnaire à laquelle il s'adresse. Pour la premiÚre fois de sa vie, il marche dans la rue sans avoir le sentiment de se cacher, comme avant lui, seul son arriÚre-grand-pÚre pouvait le faire. Ivån se rend compte que le seul sens, la seule possibilité de sa vie est de témoigner.

Jusqu'Ă  ce qu'il ait fini d'Ă©crire l'histoire de sa famille, la troisiĂšme aventure tragique du XXe siĂšcle a pris elle aussi fin. AprĂšs l'empire et la dictature d'extrĂȘme droite, le rĂ©gime communiste aussi est restĂ© dans le passĂ© de la Hongrie.

Fiche technique

Distribution

Légende : Version Québécoise = VQ[5]

Liste complĂšte de la distribution du film sur IMDB.

Production

L’intention initiale des scĂ©naristes IstvĂĄn SzabĂł et Israel Horovitz Ă©tait de rĂ©aliser une sĂ©rie de tĂ©lĂ©vision mais ils n’ont pas rĂ©ussi Ă  trouver le financement nĂ©cessaire[6]. Alors IstvĂĄn SzabĂł a pensĂ© Ă  faire un film de cinĂ©ma et en a proposĂ© l’idĂ©e au producteur canadien Robert Lantos, Juif originaire de Hongrie. Celui-ci avoue que, Ă  la suite d’une discussion de quatre heures avec IstvĂĄn SzabĂł, il a Ă©tĂ© impressionnĂ© jusqu’aux larmes, en se rappelant les rĂ©cits des membres de sa famille et les Ă©vĂ©nements vĂ©cus par lui-mĂȘme, que ses enfants ignoraient[7].

La premiĂšre version du scĂ©nario avait 600 pages. Il a Ă©tĂ© traduit en anglais et abrĂ©gĂ© avec l’aide de plusieurs Ă©crivains. La production du film ne pouvait ĂȘtre que trĂšs coĂ»teuse. À cause de cela, il fallait lui assurer une diffusion adĂ©quate, ce qui rendait nĂ©cessaire d’engager au moins une vedette internationale. On a pensĂ© dĂšs le dĂ©but que ce devait ĂȘtre Ralph Fiennes, qui devrait jouer trois personnages de trois gĂ©nĂ©rations. Il a aussitĂŽt acceptĂ©, mais il avait d’autres contrats Ă  honorer. Les producteurs ont attendu deux ans qu’il devienne libre. La prĂ©production a pris six mois, suivis d’autres six mois de tournage. Cinq ans ont passĂ© au total entre la proposition du film et sa sortie[7].

Le tournage a eu lieu surtout Ă  Budapest. Pour la façade de la maison des Sonnenschein on a utilisĂ© un bĂątiment du quartier FerencvĂĄros. Au-dessus de ses fenĂȘtres on a inscrit le nom de sociĂ©tĂ© EMMANUEL SONNENSCHEIN & TSA. LIQUEUR (TSA. comme tĂĄrsa « associĂ© »). En 2008 on a rĂ©novĂ© le bĂątiment et on a gardĂ© l’inscription. Les intĂ©rieurs de la famille ont Ă©tĂ© filmĂ©s dans un bĂątiment proche[8] - [9]. Pour prĂ©parer les scĂšnes d’escrime, le rĂ©alisateur a sollicitĂ© l’entraĂźneur LĂĄszlĂł Szepesi, qui a aussi jouĂ© un rĂŽle Ă©pisodique d’arbitre aux jeux olympiques. Entre faire faire aux acteurs certains gestes seulement et leur enseigner l’escrime, il a choisi cette derniĂšre solution. De vrais escrimeurs ont aussi participĂ© Ă  cet enseignement, Ă©tant Ă©galement les doublures des acteurs. Le tournage des scĂšnes d’escrime a eu lieu dans plusieurs salles de Budapest, et celui des jeux olympiques dans ce qui est en 2021 la Salle des sports LĂĄszlĂł-Papp[10].

Analyse

Film et réalité

L’action du film se dĂ©roule sur le fond de tous les Ă©vĂ©nements et Ă©poques historiques du XXe siĂšcle qui ont concernĂ© la Hongrie : l’Empire austro-hongrois, la PremiĂšre guerre mondiale, la brĂšve pĂ©riode de rĂ©gime communiste qui l’a suivie, le rĂ©gime autoritaire de MiklĂłs Horthy, la Seconde guerre mondiale, le rĂ©gime communiste stalinien, la RĂ©volution de 1956, le rĂ©gime communiste d’aprĂšs celle-ci. Le film reflĂšte les principaux phĂ©nomĂšnes sociaux, idĂ©ologiques et politiques de ces pĂ©riodes qui ont influencĂ© la destinĂ©e des Juifs : la possibilitĂ© qu’ils s’élĂšvent dans la vie Ă©conomique et, pour certains, jusqu’à certaines sphĂšres modestes du pouvoir, par assimilation, dans la derniĂšre pĂ©riode, relativement libĂ©rale, de l’Empire austro-hongrois ; l’antisĂ©mitisme croissant Ă  mesure que les idĂ©ologies totalitaires de droite gagnaient du terrain ; la Shoah qui a dĂ©cimĂ© les Juifs ; la terreur communiste stalinienne.

À cĂŽtĂ© du reflet de ces rĂ©alitĂ©s, le film s’inspire de quelques personnes et faits rĂ©els. Ainsi, la carriĂšre de ManĂł Sonnenschein, due au GoĂ»t de la lumiĂšre du soleil rappelle celle, rĂ©elle, de la famille juive christianisĂ©e Zwack, avec la liqueur Unicum qu’elle produit encore dans les annĂ©es 2000 selon une recette secrĂšte contenant 40 plantes[11].

Le personnage ÁdĂĄm Sors reflĂšte le destin de deux escrimeurs juifs hongrois[10]. Endre Kabos a gagnĂ© quatre mĂ©dailles olympiques, dont trois d’or, y compris aux Jeux de 1936. Au cours de la guerre, il a Ă©tĂ© mobilisĂ© au travail, on lui a facilitĂ© de rester Ă  Budapest en tant que chauffeur, mais il est mort en 1944, sur le Pont Marguerite, quand on a fait sauter celui-ci[12]. Attila Petschauer a gagnĂ© avec son Ă©quipe la mĂ©daille d’or aux Jeux olympiques d'Ă©tĂ© de 1928, d’Amsterdam, et aux Jeux olympiques d'Ă©tĂ© de 1932, de Los Angeles, ainsi que la mĂ©daille d’argent individuelle Ă  Amsterdam. Il a Ă©tĂ© emmenĂ© en sous-unitĂ© de travail sur le front russe, oĂč il est mort en 1943, dans des circonstances non Ă©lucidĂ©es. ConformĂ©ment Ă  un tĂ©moignage, il a Ă©tĂ© tuĂ© comme ÁdĂĄm dans le film[13].

Le personnage Andor Knorr est lui aussi inspirĂ© d’une personne rĂ©elle, non juive, LĂĄszlĂł Rajk. Il Ă©tait dĂ©jĂ  communiste dans les annĂ©es 1930, devenu ministre des affaires internes et organisateur des premiers procĂšs politiques, puis ministre des affaires Ă©trangĂšres. En 1949 on lui a intentĂ© une parodie de procĂšs, on l’a condamnĂ© Ă  mort et exĂ©cutĂ©. En 1955 il a Ă©tĂ© rĂ©habilitĂ© dans le cadre de la dĂ©stalinisation qui commençait, et rĂ©-enterrĂ© avec les honneurs en 1956, ce qui a constituĂ© l’un des facteurs dĂ©clencheurs de la rĂ©volution de cette annĂ©e-lĂ [14].

ThĂšmes

Le film aborde principalement la destinĂ©e et la question identitaire des Juifs en Hongrie. Le message qui en dĂ©coule est l’échec de l’assimilation, de l’aspiration d’une partie des Juifs Ă  devenir des membres Ă©gaux en tous points avec les autres membres de la sociĂ©tĂ© oĂč ils vivent, au prix de renoncer Ă  leur identitĂ© hĂ©ritĂ©e. Les compromis qu’ils font apparaissent comme ayant pour rĂ©sultat leur possible destruction morale et mĂȘme physique. En tant qu’argument Ă  l’appui de ce message, il apparaĂźt le sentiment d’échec par lequel finit la vie d’IgnĂĄc aprĂšs qu’il a fait jusqu’au compromis de changer de nom, et qu’il a servi l’empereur avec dĂ©vouement et reconnaissance d’avoir pu se rĂ©aliser. À son tour, ÁdĂĄm fait le compromis de renoncer Ă  la religion de ses ancĂȘtres, il est un vrai patriote, il a l’illusion d’ĂȘtre acceptĂ© en tant que Hongrois, et pourtant il est tuĂ© en tant que Juif. D’un dialogue avec sa grand-mĂšre, il ressort que IvĂĄn est devenu communiste parce que seul un État communiste, l’Union soviĂ©tique, semblait exempt d’antisĂ©mitisme. Mais IvĂĄn aussi perd ses illusions sur la disparition de l’antisĂ©mitisme en rĂ©gime communiste, et ne peut plus accepter les crimes de celui-ci. Selon la critique Susan Suleiman, les hommes de la famille Sors prĂ©sentent Ă  des degrĂ©s diffĂ©rents le profil psychologique « du "paria parvenu" qui, une fois acceptĂ©, mĂȘme Ă  contrecƓur, par un groupe ou une institution, devient loyal au point de perdre toute facultĂ© de jugement, et est dĂ©truit dans le processus, moralement et physiquement. » ÁdĂĄm prĂ©sente ce profil au plus haut degrĂ© par la façon dont il refuse de voir la rĂ©alitĂ©, Ă  commencer par son aveuglement devant l’atmosphĂšre prĂ©valant en Allemagne sous Hitler, puis par l’illusion que la persĂ©cution des Juifs est passagĂšre, et jusqu’à son refus de reconnaĂźtre son identitĂ© juive, au prix d’ĂȘtre tuĂ©. L’acte d’IvĂĄn de reprendre le nom de son arriĂšre-grand-pĂšre, ce qui lui donne le sentiment de la libĂ©ration, est prĂ©sentĂ© comme la solution de s’intĂ©grer Ă  la sociĂ©tĂ© sans renoncer Ă  son identitĂ©. En fait c’est l’essence des conseils de son arriĂšre-grand-pĂšre adressĂ©s Ă  son fils IgnĂĄc, que lui et les autres hommes de la famille n’ont pas suivis[15].

Le film reflĂšte Ă©galement la diversitĂ© sociale et idĂ©ologique des Juifs, mĂȘme Ă  l’intĂ©rieur d’une mĂȘme famille. L’arriĂšre-grand-pĂšre devient un capitaliste de succĂšs mais ses enfants ne le sont plus, ils deviennent des intellectuels aux conceptions idĂ©ologiques diamĂ©tralement opposĂ©es. IgnĂĄc est l’adepte de l’ordre Ă©tabli de l’empire, qu’il voit comme libĂ©ral, mais GusztĂĄv est un rĂ©volutionnaire socialiste, puis communiste, tandis que Vali n’adopte aucune idĂ©ologie. L’un des reproches qu’on a faits au film est que ses personnages sont plutĂŽt des types de ces catĂ©gories d’individus, que des ĂȘtres avec une profondeur psychologique[16] - [11].

À commencer par IgnĂĄc, tous les membres de la famille se confrontent Ă  l’antisĂ©mitisme, qui apparaĂźt dans le film avec diverses nuances. La plus douce est l’acceptation des Juifs au prix du renoncement Ă  leur identitĂ©, Ă  l’époque de l’Empire et de la Hongrie des annĂ©es 1920-1930, expĂ©rience que vivent IgnĂĄc, puis ÁdĂĄm. Une autre est l’humiliation des Juifs par des personnes privĂ©es qui ne risquent rien en la pratiquant, comme cela arrive Ă  ÁdĂĄm Ă©tudiant, puis membre du club d’escrime des officiers. Plus grave encore, c’est l’antisĂ©mitisme et la persĂ©cution officialisĂ©s par des lois, en Hongrie Ă  partir de 1938. Cela culmine dans l’extermination en masse au cours de la Seconde guerre mondiale, dont sont victimes tous les membres de la famille Ă  l’exception de GusztĂĄv, Vali et IvĂĄn. Le rĂ©gime communiste des annĂ©es 1950 non plus n’est pas exempt d’antisĂ©mitisme, qui se manifeste par des accusations fantaisistes d’espionnage, comme reflĂ©tĂ© par le destin tragique du personnage Knorr[17] - [11].

Avec leur aspiration Ă  l’assimilation, les membres de la famille Sonnenschein/Sors apparaissent comme des conformistes, sauf GusztĂĄv, jusqu’à ce qu’il devienne lui aussi conformiste par rapport Ă  l’idĂ©ologie communiste. Selon Suleiman, le seul contrepoids subversif, la seule affirmation de soi qu’ils opposent aux normes institutionnelles et politiques est leur sexualitĂ© transgressive. C’est une tentation non rĂ©alisĂ©e de ManĂł amoureux d’une cousine, et rĂ©alisĂ©e par IgnĂĄc avec Vali, ou par ÁdĂĄm avec sa belle-sƓur[18].

Dans la conception du film, les femmes sont celles qui rĂ©ussissent le mieux Ă  saisir la rĂ©alitĂ© et Ă  garder leur identitĂ©, en restant loin du domaine socio-politique. Vali est le centre Ă©thique du film. Elle, qui a immortalisĂ© en photo les beaux moments de la vie, dit Ă  IvĂĄn que ce n’est pas la politique et l’histoire qui comptent le plus dans celle-ci, mais sa beautĂ©, les valeurs individuelles et esthĂ©tiques, malgrĂ© les destructions causĂ©es par l’histoire[19].

Accueil critique

Pour Suleiman, ce film est somptueux et ambitieux, profondĂ©ment Ă©mouvant, trouble et troublant. Son rĂ©alisateur le conçoit comme une Ă©popĂ©e rĂ©aliste mais ne peut Ă©viter un certain schĂ©matisme, Ă  cause de la longueur de la pĂ©riode qu’il couvre. L’esthĂ©tique rĂ©aliste se manifeste par des rĂ©pĂ©titions et des parallĂ©lismes au niveau de l’intrigue et des personnages, ainsi que dans les dĂ©cors, les lumiĂšres et la musique. Par exemple l’évolution de l’appartement de la famille d’un intĂ©rieur bourgeois confortable Ă  la pauvretĂ© d’un appartement plein de vieilleries, oĂč est logĂ©e une famille de gens simples aussi, est parallĂšle avec la dĂ©chĂ©ance de la famille Sonnenschein/Sors. Un exemple de l’utilisation des lumiĂšres est la scĂšne sombre oĂč la famille Ă  peine visible Ă©coute Ă  la radio le texte de la premiĂšre loi anti-juive. En qualitĂ© d’épopĂ©e rĂ©aliste, le film recourt Ă  des rĂ©pĂ©titions et Ă  des parallĂ©lismes jusqu’à la redondance, pour en assurer la cohĂ©sion narrative et souligner ses thĂšmes majeurs, par exemple par l’interprĂ©tation de trois rĂŽles confiĂ©e Ă  un mĂȘme acteur. Selon Suleiman ce n’est pas un point nĂ©gatif, mais d’autres critiques ont considĂ©rĂ© que la redondance rend le film lourd et simpliste[20].

Michael Wilmington, de Chicago Tribune, pense que le film d’IstvĂĄn SzabĂł est incroyablement ambitieux et l’un des plus rĂ©ussis de l’annĂ©e 1999. Il est filmĂ© d’une façon ravissante, Ă©tant une succession de belles images ou qui Ă©voquent d’une maniĂšre simple les phases majeures de l’histoire de la Hongrie, mais il pĂšche par le fait qu’il est trop long, voulant montrer trop et le faisant trop rapidement. Ralph Fiennes joue ses trois rĂŽles avec une comprĂ©hension profonde et un sĂ©rieux sobre, du dĂ©but Ă  la fin, traits qui auraient gagnĂ© Ă  ĂȘtre compensĂ©s par quelque lĂ©gĂšretĂ© ou ironie. Le film aurait Ă©tĂ© meilleur ou plus convaincant, bien que moins populaire, si les rĂŽles principaux avaient Ă©tĂ© jouĂ©s par des acteurs hongrois. Cependant, ce n’est pas un film Ă  rejeter Ă  cause de ses dĂ©fauts, parce qu’il a beaucoup de qualitĂ©s dramatiques et cinĂ©matographiques, il se renouvelle continuellement, il remplit tout le temps ses lacunes. Sunshine est l’une des Ă©popĂ©es familiales cinĂ©matographiques les plus fortes, et l’une des plus belles du point de vue visuel[17].

En Hongrie, le film a suscitĂ© des polĂ©miques passionnĂ©es pendant quelques semaines. Il y a eu des critiques entiĂšrement positives, comme celle d’IldikĂł KĂĄrpĂĄti, de FilmkultĂșra[21], et aussi totalement nĂ©gatives, par exemple celle d’IstvĂĄn MargĂłcsy, dans FilmvilĂĄg[22]. Les polĂ©miques ne se sont pas limitĂ©es aux moyens artistiques du film, mais ont aussi atteint des aspects idĂ©ologiques concernant son message principal, l’échec de l’assimilation[23]. GĂĄbor Köves, de FILMTETT, considĂšre que le fait de provoquer de telles polĂ©miques est peut-ĂȘtre le mĂ©rite principal du film[6].

ErzsĂ©bet Bori, de Magyar Narancs, considĂšre que ce n’est pas un film d’art europĂ©en ni un film d’auteur, comme les premiers films du rĂ©alisateur, et ne s’adresse pas premiĂšrement au public hongrois, mais c’est un bon film de genre, pour un public large. La photographie, les dĂ©cors, les costumes sont beaux et crĂ©dibles. Le scĂ©nario rĂ©ussit Ă  ordonner de façon unitaire les faits au long d’une centaine d’annĂ©es et la vie de plusieurs personnages. En mĂȘme temps, le film est long, non parce qu’il montre beaucoup mais parce qu’il est prolixe et didactique par ci-par lĂ . À la diffĂ©rence de ses films jusqu’aux annĂ©es 1980 y compris, oĂč le rĂ©alisateur partageait ses impressions avec le spectateur, dans ce film il partage ses idĂ©es, Ă©tant trop peu humain[23].

Selon GĂĄbor Köves, la grandeur du budget du film a Ă©tĂ© d’une part un avantage, d’autre part un inconvĂ©nient. Ses rĂ©alisateurs ont eu tout ce qu’ils voulaient pour assurer le cadre matĂ©riel du film mais ont dĂ» s’adresser Ă  un public trĂšs variĂ©, d’une part aux Occidentaux, qui ne connaissent pas les rĂ©alitĂ©s de l’histoire de la Hongrie, d’autres part aux Hongrois, qui les connaissent. Cela nuirait Ă  la qualitĂ© du film par le fait que, Ă  part certaines de ses parties, ce serait un passage en revue trop rapide et didactique des faits, les personnages Ă©tant schĂ©matiques, manquant de profondeur[6].

Distinctions

RĂ©compenses

1999 :

2000 :

2001 :

Notes et références

  1. Section d'aprĂšs le contenu d'image et textuel du film.
  2. Les sous-titres du résumé sont pris dans Suleiman 2003 (p. 134), suggérés par la métaphore météorologique constituée par le titre du film.
  3. Dans les pays communistes, la réhabilitation consistait en l'annulation de la condamnation de prisonniers politiques.
  4. Avec extraits de la Fantaisie en fa mineur (D. 940, op. 103) de Franz Schubert.
  5. « Fiche du doublage québécois du film » sur Doublage Québec, consulté le 17 août 2021.
  6. Köves 2000.
  7. MacDonald 1999.
  8. (hu) « FelĂșjĂ­tottĂĄk A napfĂ©ny Ă­zĂ©bƑl ismert Sonnenschein-hĂĄzat » [« On a rĂ©novĂ© la maison connue comme Sonnenschein, du film Sunshine »], sur Index.hu, (consultĂ© le )
  9. La maison Sonnenschein en 2019, image Google Street (consulté le ).
  10. Szepesi 2009.
  11. BödƑk 2014.
  12. Endre Kabos. Biographical information, Olympedia.org (consulté le ).
  13. Attila Petschauer. Biographical information. Olympedia.org (consulté le ).
  14. Harmat 2015.
  15. Suleiman 2003.
  16. Deåk 2000, cité par Suleiman 2003, p. 137.
  17. Wilmington 2000.
  18. Suleiman 2003, p. 140.
  19. Suleiman 2003, p. 140-141.
  20. Suleiman 2003, p. 137-138.
  21. KĂĄrpĂĄti 2000.
  22. MargĂłcsy 2000.
  23. Bori 2000.
  24. The European Film Academy. 1999. The Winners (consulté le ).
  25. Genie Awards, 2000 Awards, IMDb (consulté le ).
  26. Writers Guild of Canada, 2000 Awards, IMDb (consulté le ).
  27. Political Film Society, USA, 2001 Awards, IMDb (consulté le ).
  28. Satellite Awards, 2001 Awards, IMDb.

Voir aussi

Sources

Liens externes

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