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Conversion au christianisme

La conversion au christianisme est le processus par lequel une personne devient chrétienne. Elle implique un repentir des péchés, une acceptation de Jésus comme sauveur et un engagement à suivre ses enseignements inspirés du Nouveau Testament.

Certaines branches du christianisme associent le rituel du baptĂȘme Ă  la conversion, mais il peut aussi suffire d’une profession de foi publique[1]. Une pĂ©riode d’étude et d'instruction religieuse prĂ©cĂšde gĂ©nĂ©ralement la reconnaissance publique de la conversion.

La conversion a joué un rÎle important dans le christianisme dÚs ses débuts et la littérature chrétienne antique contient de nombreux récits de conversion[2] - [3].

Fondements bibliques

La notion de conversion est prĂ©sente dans l’Ancien Testament ; les prophĂštes emploient le verbe hĂ©breu choub (Ś©Ś•Ś‘) qui signifie « un revirement soit au sein d’une collectivitĂ© soit chez un individu », pour dĂ©signer l’acte de revenir Ă  Dieu lorsque le peuple Lui a Ă©tĂ© infidĂšle[4]. Ainsi, le mot teshouva de la mĂȘme racine dĂ©signe l'acte de ce « retour » dans la repentance. Voir notamment : «  Lorsque tu [IsraĂ«l] reviendras Ă  l’Éternel ton Dieu de tout ton cƓur et de toute ton Ăąme » (DeutĂ©ronome 30,10)[5], «  Que le mĂ©chant abandonne sa voie, et l'homme d'iniquitĂ© ses pensĂ©es ; qu'il retourne Ă  l'Éternel, qui aura pitiĂ© de lui, Ă  notre Dieu, qui ne se lasse pas de pardonner. » (IsaĂŻe 55,7). Voir aussi Psaume 51,12, ÉsaĂŻe 6,10, etc.

Dans le Nouveau Testament, c’est le mot grec Ă©pistrophĂȘ (ጔπÎčστρoÏ†áŒŁ), du verbe Ă©pistrĂ©-phein signifie « se tourner en sens contraire, revenir sur ses pas, rentrer en soi-mĂȘme » ; il s'agit d'opĂ©rer une conversion qui fait que l’on se dirige de nouveau vers le point dont on s’éloignait[4]. Voir notamment :

  • Lors de l’épisode du reniement de Pierre, JĂ©sus dit Ă  ce dernier : « Quand tu seras converti » (c’est-Ă -dire rentrĂ© en toi-mĂȘme et inĂ©branlable dans mon service), « affermis tes frĂšres » (Luc 22,32). Les larmes versĂ©es par Pierre illustrent le fait que le repentir est la voie d'accĂšs Ă  la conversion (Matthieu 26,75).
  • Dans la parabole de l'Enfant prodigue (Luc 15), JĂ©sus nous fournit le type mĂȘme de la conversion : Ă©garement, dĂ©chĂ©ance, souffrance, repentance, d’oĂč jaillit une dĂ©cision intĂ©rieure : « Je me lĂšverai et j’irai vers mon PĂšre ! »
  • Dans Matthieu 18,3 (« Je vous le dis en vĂ©ritĂ©, si vous ne vous convertissez et si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux. »), JĂ©sus met l’accent sur l’un des caractĂšres essentiels de la conversion religieuse en demandant Ă  ses disciples de renoncer Ă  leurs ambitions Ă©goĂŻstes.

Au sens biblique, la conversion est donc assez Ă©loignĂ©e de la notion d’un simple changement de systĂšme religieux, c’est un processus, au sens propre, de « retournement ». Comme l’écrit le pasteur Alexandre Westphal, « elle a pour raison d’ĂȘtre la dĂ©chĂ©ance de l’homme, pour mobile la conviction de pĂ©chĂ©, pour fruit la rĂ©gĂ©nĂ©ration »[4].

Conversions célÚbres

L’apître Paul sur le chemin de Damas

Le chapitre 9 du livre des Actes des ApĂŽtres rapporte la spectaculaire conversion de Saul de Tarse alors qu’il se rendait Ă  Damas pour y dĂ©noncer et y poursuivre les premiers chrĂ©tiens. Il est interpellĂ© par une voix cĂ©leste que tous ses compagnons entendent et est aveuglĂ© par une vive lumiĂšre qu’il est le seul Ă  voir et qui le laisse aveugle. C’est un chrĂ©tien de Damas, Ananie, qui est appelĂ© par une voix cĂ©leste Ă  rencontrer Saul qui lui rend la vue par imposition des mains. Paul recouvre la vue puis reçoit trĂšs rapidement le baptĂȘme. Ce rĂ©cit a donnĂ© lieu Ă  l’expression « trouver son chemin de Damas » qui signifie soit se convertir au christianisme, soit avoir une rĂ©vĂ©lation soudaine entraĂźnant un changement profond[6].

La conversion de saint Augustin, Fra Angelico (v. 1430-1435), tempera sur bois, musée Thomas-Henry, Cherbourg.

Augustin, l'Ă©vĂȘque d'Hippone

La conversion d'Augustin est plus complexe. Le professeur en Études religieuses Darrol Bryant observe qu’elle suit un double schĂ©ma temporel : d’une part, le temps court, celui de la rĂ©vĂ©lation dans le jardin de Milan, moment marquĂ© par une forte Ă©motion causĂ©e par son conflit intĂ©rieur[7]. D’autre part, il y a le temps long qui remplit toute la vie d’Augustin : une vie entiĂšre de recherche et de conversion qui occupe l’ensemble des Confessions, alternant les dĂ©sordres, les expĂ©riences spirituelles et les brĂšves illuminations de la rĂ©vĂ©lation. L’originalitĂ© de la combinaison de ces trois Ă©lĂ©ments dans une mĂȘme narration en fait une construction narrative archĂ©typale qui deviendra un grand classique de la spiritualitĂ© chrĂ©tienne[8] - [9].

DĂ©buts du christianisme

Au cours des IIe et IIIe siĂšcles de notre Ăšre apparaissent un grand nombre d’Actes des apĂŽtres apocryphes, tels les Actes de Jean, de Paul, de Pierre de Thomas ou d'AndrĂ©, qui racontent les voyages missionnaires de ces apĂŽtres dans le but d'attirer la sympathie de leurs lecteurs et de les inciter Ă  se convertir Ă  leur tour. En gĂ©nĂ©ral, les activitĂ©s des apĂŽtres consistent en des miracles, dont des guĂ©risons physiques et spirituelles, et en des discours qui provoquent soit conversions soit rejets. Ces rejets finissent par causer leur martyre. Par exemple, les Actes d’AndrĂ©, qui ont probablement Ă©tĂ© rĂ©digĂ©s entre 150 et 200 de notre Ăšre par un membre d'une communautĂ© proche d’Alexandrie, racontent la conversion par AndrĂ© d'une femme nommĂ©e Maximilla, femme du proconsul romain ÉgĂ©ate, ainsi que sa servante Iphidama. Depuis que Maximilla a rencontrĂ© AndrĂ©, elle se refuse Ă  son mari, passant tout son temps avec l’apĂŽtre et son groupe de disciples. ÉgĂ©ate, trĂšs amoureux de sa femme, ressent cela comme une infidĂ©litĂ© et fait crucifier AndrĂ© avant de se suicider. Auparavant, AndrĂ© a fait la connaissance du frĂšre d'ÉgĂ©ate, StratoclĂšs, qui veut se consacrer Ă  la philosophie. Au contact d'AndrĂ©, StratoclĂšs se convertit Ă©galement au christianisme[2].

Cette abondante littĂ©rature chrĂ©tienne est trĂšs diffusĂ©e dans l'AntiquitĂ© autour de la MĂ©diterranĂ©e. Les modĂšles prĂ©sentĂ©s, notamment fĂ©minins, ont une grande force de persuasion car ils montrent que la conversion permet de surmonter la faiblesse du corps, mais aussi de l'Ăąme (en raison des supposĂ©es faiblesses physique et de caractĂšre que l'on prĂȘte aux femmes Ă  cette Ă©poque)[2]. Comme l'Ă©crit Christian DĂ©cobert, "la conversion chrĂ©tienne se raconte. Elle est un drame qui casse une vie en deux, qui dispose un avant et un aprĂšs, selon une suite de sĂ©quences qui semblent dĂ©filer dans une logique serrĂ©e jusqu’à l’identification de soi et la reconnaissance du sens du monde."[9]

Convertis célÚbres du judaïsme au catholicisme

Dans la culture populaire

Dans Le Retournement, Vladimir Volkoff met en scÚne la conversion inattendue d'un major du KGB lors d'une visite dans une église orthodoxe. Ce chapitre du livre a donné lieu à son adaptation pour le théùtre par Robert Bourseiller. La piÚce est créée en 1982 avec pour titre La conversion du major Igor Maksimovitch Popov du KGB au Théùtre Marie Stuart à Paris (mise en scÚne de Nicolas Peskine, le major Popov : Boudjema Boutada, le pope : Marc Ayraud). Elle est reprise en 1993 au Nouveau théùtre Mouffetard sous le titre de Retournements (mise en scÚne de Maurice Chevit, le major Popov : Marie-Pierre de Gerando, le pope : Michel Orphelin)[10].

Analyse du processus

Point de vue de la science sociale

Le processus est provoquĂ©, dans un contexte social et culturel particulier, par des motifs personnels qui dĂ©clenchent une crise et la recherche d’une rĂ©ponse Ă  cette crise. Les causes et les circonstances de cette rupture avec le passĂ© ou avec sa vision du monde initiale sont diverses et cumulatives.

La deuxiĂšme phase est celle de la rencontre d’une nouvelle rĂ©alitĂ© religieuse au travers de contacts sociaux. Plusieurs Ă©tudes soulignent l’importance des liens affectifs avec d’autres convertis.

La troisiĂšme phase de la conversion rĂ©sulte de l’interaction entre le converti potentiel et son nouveau milieu : instruction religieuse et participation aux rituels du nouveau groupe religieux, rĂ©cits, appels Ă  rompre avec ses anciennes croyances et/ou son ancienne maniĂšre de vivre. La rhĂ©torique et le langage spĂ©cifiques au nouveau groupe religieux aident le converti Ă  conceptualiser les changements qui accompagnent sa conversion et Ă  se construire une nouvelle identitĂ© et de nouveaux liens affectifs. Le converti commence alors Ă  utiliser ce mĂȘme langage, incorporant ainsi dans sa vie le vocabulaire de la transformation propre au groupe et un nouveau systĂšme interprĂ©tatif du monde[2].

Concepts voisins

Les concepts suivants doivent ĂȘtre soigneusement distinguĂ©s de celui de« conversion au christianisme » :

Prosélytisme

HÎpital de la mission prosélyte anglaise pour la « promotion du christianisme auprÚs des Juifs », fondée en 1843, Jerusalem

Christianisation

La christianisation est un terme culturel trĂšs large qui dĂ©signe gĂ©nĂ©ralement une campagne organisĂ©e pour convertir massivement au christianisme une rĂ©gion ou une culture entiĂšre, comme ce fut notamment le cas par l'action des Ă©glises anglo-saxonnes pour la conversion des Juifs de Palestine et d'ailleurs, dĂšs 1838 par l'Église d'Écosse, pour se conformer aux Écritures[11] - [12].

Adoption d’une culture sociale chrĂ©tienne

Il convient de faire la distinction entre la « reformulation des relations sociales, des significations culturelles et de l'expérience personnelle en termes d'idéaux chrétiens (communément acceptés ou supposés) » et la conversion[13].

« Conversion » au sein de la famille chrétienne

Par un abus de langage extrĂȘmement courant, le terme de conversion est aussi utilisĂ© pour dĂ©signer le passage d’une branche du christianisme Ă  une autre. Ce glissement sĂ©mantique est intervenu dans le cadre de la lutte contre les hĂ©rĂ©sies. DĂšs l’antiquitĂ©, certaines croyances ont Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©es non conformes au cadre gĂ©nĂ©ral du christianisme et ont Ă©tĂ© combattues par la prĂ©dication et l’apologĂ©tique. Au cours de l’histoire, l’Église catholique a considĂ©rĂ© le protestantisme comme une hĂ©rĂ©sie[14]. Le mĂȘme langage de conversion est dĂšs lors appliquĂ© aux protestants comme aux non-chrĂ©tiens, tĂ©moin la « PriĂšre pour la conversion des hĂ©rĂ©tiques, des infidĂšles et de tous les pĂ©cheurs » de Mgr FĂ©lix Dupanloup (1802-1878)[15] ou encore la « PriĂšre de Conversion des Protestants au Catholicisme » due Ă  la plume de Paul Pellisson-Fontanier (1624-1693), acadĂ©micien protestant qui abjura en 1670 pour un bĂ©nĂ©fice ecclĂ©siastique et une place d'historiographe de Louis XIV[16]. Bossuet s’est employĂ© Ă  la « conversion » des protestants et a par exemple obtenu l’adhĂ©sion au catholicisme de Turenne Ă  la fin de sa vie.

Notes et références

  1. .
  2. Anne Pasquier, « ItinĂ©raires de conversion dans le christianisme ancien », Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, no 9,‎ (ISSN 1760-5776, DOI 10.4000/cerri.869, lire en ligne, consultĂ© le ).
  3. (en) Peter G. Stromberg, Language and Self-Transformation : A Study of the Christian Conversion Narrative (Langage et autotransformation : une étude du récit de la conversion chrétienne), Cambridge University Press, , 168 p. (ISBN 978-0-521-03136-3 et 0-521-03136-2, lire en ligne).
  4. « conversion », sur le site du Dictionnaire biblique Westphal (consulté le ).
  5. [Tous passages de la Bible sont extrait de la traduction Louis Segond, vérifiables ici:.
  6. « article sur le mot « chemin de Damas » », sur wiktionary (consulté le ).
  7. Les Confessions, Livre VIII, chapitre VIII et suivants.
  8. (en) Darrol Bryant, Religious Conversion : Contemporary Practices and Controversies, A&C Black, , 348 p. (ISBN 978-0-8264-3713-6, lire en ligne), p. 181-184.
  9. Christian DĂ©cobert, « Conversion, tradition, institution », Archives de Sciences sociales des Religions, no 116 (octobre-dĂ©cembre),‎ , p. 67-90 (lire en ligne, consultĂ© le ).
  10. Lydwine Helly, Vladimir Volkoff : Les dossiers H, ISSN 0339-4654, L'Age d'Homme, , 409 p. (ISBN 978-2-8251-3630-0, lire en ligne), p. 177.
  11. (en) Richard Fletcher, The Barbarian Conversion : From Paganism to Christianity (La conversion barbare : du paganisme au christianisme), University of California Press, (ISBN 0-520-21859-0).
  12. Les juifs d'Europe et de Palestine: voyage de M.M. Keith, Black, Bonar et Mac Cheyne envoyĂ©s par l'Église d'Écosse (trad. Louis Gaussen), L.-R. Delay, , 471 p. (lire en ligne)
  13. (en) Robert W. Hefner, Conversion to Christianity : Historical and Anthropological Perspectives on a Great Transformation (La conversion au christianisme : perspectives historiques et anthropologiques sur une grande transformation), University of California Press, . .
  14. Le Droit canon demeure trĂšs clair Ă  ce sujet : « On appelle hĂ©rĂ©sie la nĂ©gation obstinĂ©e, aprĂšs la rĂ©ception du baptĂȘme, d'une vĂ©ritĂ© qui doit ĂȘtre crue de foi divine et catholique, ou le doute obstinĂ© sur cette vĂ©rité  »« Code de Droit Canonique, livre III, la fonction d'enseignement de l’Église canon 751 », sur le site du Vatican (consultĂ© le ).
  15. « Écoutez, ĂŽ Dieu de MisĂ©ricorde, les vƓux que nous Vous prĂ©sentons humblement pour tous les ennemis de votre Église, et en gĂ©nĂ©ral pour tous les pĂ©cheurs. Regardez-les en pitiĂ© pour l'amour de votre Fils JĂ©sus-Christ ; brisez les cƓurs endurcis; convertissez les rebelles; illuminez les aveugles ; levez le voile qui est sur leurs yeux, et qui leur couvre Vos vĂ©ritĂ©s saintes, et ramenez tous les Ă©garĂ©s au troupeau dont Vous ĂȘtes le saint Pasteur. Ainsi soit-il. » Mgr FĂ©lix Philibert Dupanloup (1802-1878) - « Manuel des CatĂ©chismes », p. 460, « PriĂšre pour la conversion des ennemis de l’Église Catholique », sur le site "site-catholique.fr" (consultĂ© le ).
  16. « Ô Sainte TrinitĂ©, il n'appartient qu'Ă  Vous de rĂ©unir au grand et vĂ©ritable Corps des ChrĂ©tiens tous ceux qui Vous adorent et Vous invoquent. (...) » Paul Pellisson, « PriĂšre de Conversion des Protestants au Catholicisme », sur le site "site-catholique.fr" (consultĂ© le ). Rien n'indique que ces priĂšres soient considĂ©rĂ©es comme obsolĂštes.

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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