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Sciences participatives

Les sciences participatives, parfois appelĂ©es sciences citoyennes ou sciences collaboratives, sont « des formes de production de connaissances scientifiques auxquelles des acteurs non-scientifiques-professionnels — qu’il s’agisse d’individus ou de groupes — participent de façon active et dĂ©libĂ©rĂ©e »[1].

Une arche naturelle effondrée dans le Twelve Apostles National Maritime Park, Australie.
Support d'appareil photo pour suivre l'effondrement de l'arcade insulaire. Le panneau propose au visiteur de poser son appareil photo sur le support, prendre une photo de l'arcade insulaire et l'envoyer par email au comité de gestion du parc afin qu'il puisse suivre au fil du temps la vitesse d'effondrement de la structure rocheuse.

Elles se sont notamment dĂ©veloppĂ©es dans le domaine des sciences naturelles, oĂč, dans le fil des sociĂ©tĂ©s savantes des siĂšcles passĂ©s, une grande partie du travail se faisait sur le terrain sans nĂ©cessiter de moyens coĂ»teux ni de laboratoire. Des non-professionnels contribuaient aux avancĂ©es en matiĂšre de connaissance et d'inventaires. Avec l'amĂ©lioration des technologies, les sciences participatives ont peu Ă  peu investi d'autres domaines comme la mĂ©decine, l'astronomie ou la physique, mais aussi les sciences sociales.

Histoire

AprĂšs le succĂšs puis le dĂ©clin des sociĂ©tĂ©s savantes, des campagnes d'acquisition de donnĂ©es, favorisĂ©es par l'amĂ©lioration des tĂ©lĂ©communications, se sont organisĂ©es Ă  grande Ă©chelle en impliquant un grand nombre de participants. C'est ainsi qu'a Ă©tĂ© initiĂ© vers 1900, Ă  l'Ă©chelle de toute l'AmĂ©rique du Nord, le Christmas bird count' (comptage d'oiseaux dans les 15 jours suivant NoĂ«l, chaque annĂ©e, sous l'Ă©gide de la fondation Audubon)[2]. Ce suivi implique aujourd’hui environ 50 000 citoyens. En 1965, un autre suivi ornithologique, dit Breeding bird survey (en), a Ă©tĂ© menĂ© en mai et juin (coordonnĂ© par le U.S. Geological Survey). Un autre suivi (Projet FeederWatch par le Cornell Lab of Ornithology, consistant dĂšs les annĂ©es 1970 Ă  relever les espĂšces dans les mangeoires de l'Ontario) a Ă©tĂ© Ă©largi Ă  toute l’AmĂ©rique du Nord en 1988[2]. L'apparition de nombreux logiciels, outils et approches informatiques utiles permet d'Ă©largir les domaines accessibles aux sciences participatives (ex : OpenStreetMap pour la cartographie collaborative).

Principes

Graphe prĂ©sentant les liens entre grands acteurs susceptibles d'ĂȘtre concernĂ©s par des programmes ou projets de sciences citoyenne. Ce sont des acteurs potentiels de la gouvernance de ces projets et de l'utilisation des rĂ©sultats des Ă©tudes.
Graphe prĂ©sentant les liens entre grands acteurs susceptibles d'ĂȘtre concernĂ©s par des programmes ou projets de sciences citoyenne. Ce sont des acteurs potentiels de la gouvernance de ces projets et de l'utilisation des rĂ©sultats des Ă©tudes.

Le concept de sciences citoyennes est nĂ© aux États-Unis. Il a Ă©tĂ© crĂ©Ă© au dĂ©but des annĂ©es 1970 sous le terme « citizen science » par deux physiciens : JoĂ«l Primack (chercheur en astrophysique) et Frank von Hippel[3] directeur d’un institut de recherche sur l'Ă©nergie et l'environnement Ă  l'UniversitĂ© de Princeton et aujourd'hui codirecteur du PSGS (Program on Science and Global Security (en)).

Mycle Schneider, nommé dans le directoire de la fondation japonaise Takagi Fund for Citizen Science[4] en 2001, a repris cette définition des sciences citoyennes[5] :

« La science citoyenne peut ĂȘtre dĂ©finie comme l'effort participatif et combinĂ© de recherche, d’analyse et d’éducation publique qui poursuit strictement, comme principe de base, l'objectif de bien-ĂȘtre collectif des gĂ©nĂ©rations prĂ©sentes et futures d’ĂȘtres humains sur la planĂšte et de la biosphĂšre.

Le scientifique citoyen, Ă  travers ses capacitĂ©s particuliĂšres de recherche et d’analyse, doit participer Ă  la protection de la sociĂ©tĂ© contre des modes de dĂ©veloppement qui placent l'intĂ©rĂȘt de l'État ou l’intĂ©rĂȘt corporatif au-dessus du bĂ©nĂ©fice collectif. Le scientifique citoyen est donc un contre-expert par excellence. »

Cette nouvelle définition a abouti en à la création de la Fondation Sciences Citoyennes[6], une association française prÎnant une vision trÚs différente des sciences citoyennes basée sur un contrÎle de la recherche scientifique par les citoyens avec des visées politiques.
Les citoyens sont encouragés à lancer des alertes lorsqu'ils considÚrent qu'ils sont en danger (exemple des antennes téléphoniques
) et peuvent ainsi faire la demande d'une expertise scientifique, qui appuiera ou non leurs craintes à ce sujet.

Le document Green Paper on Citizen Science: Citizen Science for Europe[7] les décrit dans ces termes (traduction libre) :

« ... des activitĂ©s de recherche scientifique auxquelles des citoyens contribuent activement par un effort intellectuel ou par l'apport de connaissances pertinentes, d'outils ou de ressources. Les participants fournissent des donnĂ©es et des lieux de recherche, soulĂšvent de nouvelles questions ; ils collaborent avec les chercheurs Ă  la crĂ©ation d'une nouvelle culture scientifique. Tout en effectuant des activitĂ©s Ă  la fois intĂ©ressantes et utiles, ces chercheurs bĂ©nĂ©voles acquiĂšrent de nouvelles connaissances et compĂ©tences, ainsi qu'une meilleure comprĂ©hension du travail scientifique. Ces pratiques en rĂ©seau, ouvertes et transdisciplinaires, amĂ©liorent les interactions science-sociĂ©tĂ©-politique et favorisent une recherche plus dĂ©mocratique, oĂč la prise de dĂ©cision se fonde sur les rĂ©sultats des recherches[8]. »

C'est un des aspects d'une gouvernance plus collaborative et citoyenne du bien commun que constituent les ressources naturelles[9], qui semble pouvoir se dĂ©velopper dans le contexte du Web 2.0. Ces sciences participatives peuvent aussi ĂȘtre un moyen pour les citoyens de retrouver ou conserver un contact avec la faune et la flore qui les entourent, tout en contribuant Ă  leur restauration et Ă  leur protection [10].

Un grand nombre de personnes, amateurs parfois, dispersées dans le monde contribuent au repérage des étoiles, galaxies et évÚnements astronomiques. C'est un exemple de crowdsourcing.

On retrouve trois grands types de programmes de sciences citoyennes :

  1. des programmes initiés par des scientifiques, qui ont besoin de citoyens volontaires (experts, spécialistes, amateurs ou néophytes du domaine scientifique concerné) pour les aider à collecter un grand nombre de données, ou encore des données sur un vaste territoire ou sur une longue durée ;
  2. des projets d'initiative citoyenne, auxquels des scientifiques ou des équipes scientifiques se sont associés et intégrés ;
  3. des programmes initialement coconstruits entre scientifiques et citoyens intĂ©ressĂ©s par un mĂȘme sujet d'Ă©tude ou objectif.

Dans tous les cas, les citoyens volontaires peuvent - en respectant un protocole prĂ©parĂ© ou validĂ© par des scientifiques - effectuer des observations, des mesures, des Ă©chantillonnages ou comptages et transmettre ces donnĂ©es (brutes ou prĂ©parĂ©es) afin qu'elles soient traitĂ©es et analysĂ©es par les scientifiques. À titre d'exemple, en 2010, environ 200 000 personnes ont contribuĂ© Ă  la surveillance des cours d'eau proches de chez eux pour la journĂ©e mondiale de l'Ă©valuation de la qualitĂ© des cours d'eau « World Water Monitoring Day »[11].

Le suivi d'habitats, espĂšces ou Ă©cosystĂšmes via des indicateurs qui semblent pour la plupart indiquer une situation en dĂ©clin[12] doit ĂȘtre fait Ă  large Ă©chelle, notamment pour Ă©valuer le chemin qui reste Ă  faire pour atteindre les objectifs de l'ONU en matiĂšre de biodiversitĂ©[13]. Certains indicateurs, concernant les poissons ou les oiseaux[14] donnent aussi des informations sur l'impact phĂ©nologique du dĂ©rĂšglement climatique[15]. Souvent un suivi temporel long et/ou sur de vastes territoires est nĂ©cessaire. Les scientifiques peuvent alors se faire assister, par des publics d'amateurs, des usagers ou des associations. La motivation de ces acteurs (parfois nommĂ©s « observ'acteur »[16] peut ĂȘtre dĂ©terminante pour l'ampleur et la qualitĂ© de certaines Ă©tudes[17].
On parle parfois de « parataxonomistes »[18] pour dĂ©crire des personnes n'ayant pas de formation scientifique mais employĂ©es comme assistant de chercheur sur le terrain. Ces parataxonomistes sont par exemple des Ă©tudiants, des Ă©covolontaires ou membres de populations locales qui assistent des chercheurs dans leur tĂąche. Selon les cas ils peuvent ĂȘtre formĂ©s ou non, ou bĂ©nĂ©ficier d'une petite formation initiale. Ils sont surtout utilisĂ©s en zone tropicale pour inventorier la biodiversitĂ© qui est particuliĂšrement riche alors que les spĂ©cialistes capables de dĂ©terminer ces espĂšces sont rares.

Aspects organisationnels et juridiques

L'esprit de ces projets est généralement participatif, scientifiquement trÚs ouvert et non concurrentiel, mais ils peuvent parfois aussi associer des citoyens à des structures privées ou publiques juridiquement contraintes par leurs statuts

  • Les budgets de ces projets Ă©tant souvent rĂ©duits, leurs auteurs utilisent souvent des logiciels libres ou les produisent pour les besoins du programme Ă  partir d'outils open source, de formats ouverts, tout en recherchant une grande interopĂ©rabilitĂ©, voire une standardisation de prĂ©sentation des donnĂ©es (nĂ©cessaire Ă  l'interopĂ©rabilitĂ©, des SIG par exemple). Ils recherchent aussi une simplicitĂ© d'usage pour les non-spĂ©cialistes associĂ©s aux Ă©tudes. De mĂȘme, ces projets produisent et utilisent volontiers des sources scientifiques dites « open access » (libre d'accĂšs pour les francophones).
  • Ces programmes peuvent toutefois aboutir Ă  la production de donnĂ©es potentiellement commercialisables, ce qui pose des questions juridiques particuliĂšres (il serait par exemple difficile d'imaginer imposer des clauses de confidentialitĂ© Ă  des citoyens volontaires pour ce seul motif).
  • Les donnĂ©es « brutes » (primaires), « secondaires » (Il peut y avoir une protection juridique des bases de donnĂ©es agrĂ©gĂ©es, vĂ©rifiĂ©es, triĂ©es, et commentĂ©es quand la rĂ©alisation de la base a nĂ©cessitĂ© des investissements humains, financiers ou en temps substantiels) ou « interprĂ©tĂ©es » (et alors Ă  forte valeur ajoutĂ©e) acquises par un groupe d'individu qui mutualisent leurs temps et certains moyens, peuvent avoir divers statuts juridiques, que ce soit dans un contexte de sciences participatives ou dans d'autres domaines collaboratifs[19]. Ce statut concernera notamment les droits de propriĂ©tĂ©, protection, diffusion ou rĂ©utilisations[19]. La donnĂ©e Ă©laborĂ©e relĂšve souvent du droit d'auteur car via l'interprĂ©tation et la subjectivitĂ© de l'auteur (ou des auteurs) elle prĂ©sente une originalitĂ©. Des croquis ou photographies naturalistes peuvent aussi prĂ©senter un caractĂšre artistique. Enfin, le droit des marques peut ĂȘtre Ă©voquĂ© quand l'auteur ou les auteurs (ONG, laboratoires, etc.) disposent d'une marque dĂ©posĂ©e.
    Un Livre blanc[20] a été publié à ce sujet par l'Office des données naturalistes d'Alsace (ODONAT).

IntĂ©rĂȘts

  • Les sciences citoyennes permettent d'obtenir des donnĂ©es sur de vastes espaces gĂ©ographiques et de longues pĂ©riodes de temps, ce qui est particuliĂšrement important dans les sciences de la nature (Ă©cologie, biologie des populations, biologie de la conservation..) et du climat (phĂ©nologie).
  • Les programmes de sciences citoyennes sont souvent Ă©conomiquement plus viables car rĂ©sistant mieux aux alĂ©as des programmes de financement de la recherche.
  • Les citoyens reprĂ©sentent une force importante de travail, de compĂ©tences.
  • Les citoyens peuvent contribuer au dĂ©veloppement de la recherche et enrichir les connaissances scientifiques. En retour, les scientifiques leur font part des rĂ©sultats obtenus.
  • Cette recherche collaborative contribue Ă  une accumulation de connaissances pour tous types d'acteurs : collectivitĂ©s territoriales, rĂ©serves naturelles, associations, etc. Ces connaissances sont ensuite mobilisĂ©es pour mettre en place des actions ciblĂ©es de protection[21].
  • Lorsque les scientifiques sont actifs, les programmes de science citoyenne sont des processus de mĂ©diation scientifique privilĂ©giĂ©s, rapprochant le citoyen du scientifique et l'invitant Ă  comprendre les enjeux liĂ©s au thĂšme des Ă©tudes auxquelles il participe.
    Comme le suggĂ©rait Jean-Michel Cornu[22], consultant international et expert europĂ©en dans le domaine des Nouvelles Technologies et de la SociĂ©tĂ© de l'information et directeur scientifique de la Fondation Internet Nouvelle GĂ©nĂ©ration (FING), impliquer les citoyens dans la rĂ©alisation mĂȘme de la science est un moyen privilĂ©giĂ© pour les sensibiliser aux mĂ©thodes et Ă  la dĂ©marche scientifique. Le processus engendrĂ© par les programmes de sciences citoyennes irait donc au-delĂ  d'une simple diffusion des connaissances. Il rendrait la science plus concrĂšte, mieux comprise et plus proche de la vie quotidienne.
  • Les sciences citoyennes permettent d'amĂ©liorer la surveillance de la biodiversitĂ©[23] Ă  moindre coĂ»t pour les États qui s'appuient de plus en plus sur des naturalistes bĂ©nĂ©voles, en plus des scientifiques et bureaux d'Ă©tudes financĂ©s par exemple pour la surveillance de la biodiversitĂ© ;
    La Convention sur la diversitĂ© biologique (CDB) impose aux États signataires de produire des indicateurs Ă©valuant leur performance en termes de frein Ă  la perte de la biodiversitĂ© (16 indicateurs clĂ©s ont Ă©tĂ© identifiĂ©s pour le suivi des objectifs de la CDB). Un seul, intitulĂ© «Tendances dans l’abondance et la rĂ©partition d’espĂšces indicatrices» (Trends in the abundance and distribution of selected species) » est un indicateur global direct de suivi de la biodiversitĂ© « non exploitĂ©e »[24].
    En France, cette surveillance est entiĂšrement basĂ©e sur les donnĂ©es collectĂ©es par des bĂ©nĂ©voles. Le temps de travail consacrĂ© Ă  ce suivi correspond Ă  une Ă©conomie en coĂ»ts administratifs. Des chercheurs (du MusĂ©um et d'Ifremer) l'ont estimĂ©e en 2010 entre 678 523 â‚Ź/an et 4 415 251 â‚Ź/an (selon les scĂ©narios retenus et rien que pour l'administration française)[24].
    La motivation des volontaires et leur nombre, ainsi que leur large rĂ©partition sur le terrain, compense et limite le risque de biais et de moindre neutralitĂ© (non confirmĂ©e dans la littĂ©rature) dans les Ă©valuations, bien qu’il faille sans cesse continuer Ă  amĂ©liorer les protocoles, les valider et mieux utiliser les nouveaux outils (collaboratifs et informatiques notamment, qui permettent maintenant Ă  des personnes de mieux contribuer Ă  ce type de travail, en rĂ©seau, et sans formation spĂ©cialisĂ©e de longue durĂ©e. La formation des universitaires Ă  la taxonomie a reculĂ© faute de budget ou de prioritĂ© dans les pays de l'OCDE, et les bĂ©nĂ©voles spĂ©cialistes des espĂšces, de l'identification, la taxonomie et recensement sont maintenant beaucoup plus nombreux que les professionnels[25].
    À titre d’exemple, pour recueillir un mĂȘme type d'information (indicateurs pour l’évaluation de la biodiversitĂ© en Europe), les Ă©quipes sont constituĂ©es de 83 % de bĂ©nĂ©voles en moyenne en Allemagne (et de 0 % en Pologne)[25].

Limites

Les sciences citoyennes ne semblent pas adaptées à tous les sujets :

  • l'objet Ă©tudiĂ© ne doit pas ĂȘtre dangereux ;
  • il doit idĂ©alement ĂȘtre assez accessible, et pouvoir ĂȘtre apprĂ©hendĂ© et observĂ© par un nĂ©ophyte ou amateur, si possible dans son environnement proche ;
  • certains domaines comme l'Ă©pidĂ©miologie ou l'Ă©co-Ă©pidĂ©miologie n'utilisent pas ce type d'approches, notamment pour des raisons de confidentialitĂ© des donnĂ©es relatives aux personnes malades et Ă  leur vie privĂ©e.

États des lieux

Programmes internationaux

RĂ©flexion et concertation

En octobre 2009, une premiÚre rencontre nationale sur les sciences citoyennes a fait écho à Montpellier aux nouvelles pratiques associant scientifiques et citoyens[26]. Ce colloque a présenté divers programmes de « recherche citoyenne ». Il a permis à des porteurs de projets, scientifiques, observateurs, citoyens et représentants de collectivités de partager leurs attentes et réfléchir à la définition et aux enjeux des sciences citoyennes. En , la Société française d'écologie (SFE) a ouvert une plate-forme multimédia qui se veut aussi une tribune libre ouverte aux échanges d'idées et débats sur les thÚmes « Quelle place pour la science participative ? Quelles interactions entre « experts » et observateurs ? Quels résultats ? Quel avenir ? »

En 2016, François Houllier (directeur gĂ©nĂ©ral de l'INRA) a rendu Ă  Najat Vallaud-Belkacem (ministre de l’Éducation Nationale, de l'Enseignement SupĂ©rieur et de la Recherche) et Ă  Thierry Mandon (SecrĂ©taire d'État chargĂ© de l'Enseignement SupĂ©rieur et de la Recherche) un rapport sur "Les Sciences Participatives en France", construit en trois parties (Ă©tat des lieux, bonnes pratiques et recommandations). Ce travail co-Ă©crit avec Jean-Baptiste Merilhou-Goudard (conseiller du PDG de l'Inra) traite du travail collaboratif ainsi que des moyens techniques, financiers et rĂ©glementaires[27].

Programmes

Le Collectif National Sciences Participatives-BiodiversitĂ© a Ă©tĂ© crĂ©Ă© en 2012. Il rassemble des programmes de sciences participatives, et est co-animĂ© par la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l'Homme (FNH) et l'Union Nationale des Centres Permanents d'Initiatives pour l'Environnement (UNCPIE). Il a notamment pour objectifs de structurer et rĂ©unir les acteurs de sciences participatives, recenser leurs initiatives, soutenir la contribution des sciences participatives auprĂšs des instances politiques ou encore alimenter chaque annĂ©e l’indicateur de l’Observatoire national de la biodiversitĂ©[28]. En , le collectif crĂ©e le site internet OPEN (Observatoires Participatives des EspĂšces et de la Nature), qui recense les initiatives de sciences participatives en France[29] - [30] - [31] - [32].

En 2015 a été initié le collectif Vigie-Mer afin structurer le réseau des acteurs des sciences participatives en milieux marin et littoral, en explosion depuis les années 2000, en améliorant la visibilité et faciliter le lien avec chercheurs et gestionnaires d'aires marines protégées, mutualiser les méthodes et travailler sur la complémentarité des données[33].

Le Muséum national d'histoire naturelle porte de nombreux programmes de sciences participatives en biodiversité, à la fois via INPN espÚces, programme d'inventaire participatif ayant pour objectif de compléter la répartition des espÚces françaises et sous le chapeau Vigie-Nature, né en 1989 à partir du Suivi Temporel des Oiseaux Communs[34] - [35], mais également en astronomie via le programme FRIPON de détection des bolides célestes [36].

En ce qui concerne la biodiversitĂ©, les associations botaniques et ornithologiques sont particuliĂšrement actives, notamment via le rĂ©seau Visionature, Tela Botanica, Migraction, etc., et les actions de nombreuses associations locales sur le territoire. Outre ces programmes, des protocoles existent Ă©galement pour aider des groupes de naturalistes amateurs Ă  s'organiser par eux-mĂȘmes pour exploiter leurs donnĂ©es : cette approche a notamment rencontrĂ© le succĂšs Ă  la RĂ©union[37].

Québec

Au Québec, il existe plusieurs programmes de science citoyenne, notamment :

  • iPapillon;
  • Mission monarque, un programme nord-amĂ©ricain pour documenter la rĂ©partition et l'utilisation des habitats de reproduction du monarque (Danaus plexippus)[38];
  • Banque de donnĂ©es ÉPOQ (Étude des populations d'oiseaux du QuĂ©bec) remplacĂ© depuis 2013 par eBird QuĂ©bec;
  • Atlas des oiseaux nicheurs du QuĂ©bec ;
  • Atlas des amphibiens et des reptiles du QuĂ©bec.

Perspectives

Parfois loin des institutions, les sciences citoyennes se sont discrÚtement développées dans les années 1990-2000, dans une nouvelle dynamique, profitant notamment des progrÚs de l'informatique et des outils qui ont dopé les potentialités du travail collaboratif.

L’étude et le suivi de la biodiversitĂ©, qui sont des domaines de prĂ©dilection pour l’application des principes de sciences citoyennes (du fait d'une quantitĂ© de donnĂ©es Ă  recueillir considĂ©rable sur l'ensemble du territoire, d'espaces « hors laboratoires », c'est-Ă -dire accessibles Ă  tous (Michel Callon et al., 2001[39]) sont ainsi Ă  l'honneur lors de cet Ă©vĂ©nement.

La démocratisation de l'accÚs au GPS, permet via un simple téléphone portable de contribuer à des inventaires de la biodiversité, par exemple dans le cadre du projet InterregRINSE[40] qui a développé une application smartphone dite « Th@s Invasive » ; gratuite, disponible en français ou en anglais, et facilement téléchargeable[41] permettant à chacun de recenser et cartographier un grand nombre d'espÚces exotiques envahissantes, en prenant une photo de l'espÚce en question, qui sera géoréférencée par le GPS du smartphone et envoyé par le logiciel une fois confirmation faite par l'écocitoyen participant à cet inventaire général et permanent qui vise à limiter les impacts négatifs des espÚces dites « invasives ».
À partir d'une telle base de donnĂ©es, on peut ensuite extraire (Ă©ventuellement de maniĂšre automatisĂ©e) des informations phĂ©nologiques d'intĂ©rĂȘts climatique ou Ă©cologique sur les dates de germination, floraisons, fructification, reproduction, migration, etc. Il est aussi possible d'avoir des informations sur la taille de l'animal photographiĂ© (si l'on met par exemple une piĂšce de 1 euro Ă  cĂŽtĂ© du poisson photographiĂ©), ce qui apporte chez certaines espĂšces des indications sur l'Ăąge, le nombre d'Ɠufs potentiellement pondus, ou parfois sur le sex-ratio; qui lui-mĂȘme peut apporter des informations sur une possible pollution par des perturbateurs endocriniens). Il serait aussi possible de dĂ©tecter d'Ă©ventuels effets de co-invasivitĂ© ou des facteurs favorisant ces espĂšces qui n'auraient pas encore Ă©tĂ© compris.
La colonisation de nouveau secteur gĂ©ographique pourra ĂȘtre dĂ©tectĂ©e plus vite, voire anticipĂ©e, ce qui permettra aux gestionnaires de milieux et d'espĂšces de mieux limiter certains des effets nĂ©gatifs de ces phĂ©nomĂšnes de pullulation.

Ce type d'approche a Ă©tĂ© rendue possible par un travail prĂ©alable (depuis les annĂ©es 1990) sur l'aide Ă  l'identification interactive par clĂ© d'identification visuelle de plantes non indigĂšnes pouvant (potentiellement) reprĂ©senter une menace pour la biodiversitĂ©, notamment dans l’écozone qui inclut l'Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique et le grand Nord-Ouest de la France[42]. Ce travail d'identification peut aussi ĂȘtre utile pour les autres rĂ©gions et pays, notamment oĂč ces espĂšces seraient rĂ©glementĂ©es ou lĂ  oĂč elles peuvent ĂȘtre recherchĂ©es par les douanes comme "contaminants d'exportations commerciales" (exemple : « contamination par des graines dans de la nourriture pour oiseaux, mauvaises herbes dans des bonsaĂŻs »[42]... Hormis pour les algues et mousses, ces clĂ©s interactives sont liĂ©es aux informations sur les espĂšces de la « Q-bank Invasive Plants database » (fiches descriptives et informatives, cartes d'aire de rĂ©partition mondiale, barcode molĂ©culaire lorsque disponible, etc.). Ces informations sont disponibles en ligne[42].

Notes et références

  1. François Houllier, Sciences Participatives en France. Etats des lieux, bonnes pratiques et recommendations, , 122 p. (DOI 10.15454/1.4606201248693647E12, lire en ligne)
  2. « Sciences participatives et biodiversitĂ© ; implication du public, portĂ©e Ă©ducative et pratiques pĂ©dagogiques associĂ©es »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?), Les livrets de l'IfrĂ©e (no 2) ; (ISBN 978-2-913284-16-6) ; (ISSN 2112-4965), dĂ©cembre 2010.
  3. Frank Von Hippel (en), Citizen Scientist: Collected Essays (Springer, 1991).
  4. « About Us/Takagi Fund », sur www.takagifund.org (consulté le )
  5. Mycle Schneider, De l’expertise indĂ©pendante Ă  la science citoyenne, mars 2002.
  6. Site officiel de la Fondation Sciences Citoyennes.
  7. (en) « Green paper on Citizen Science for Europe: Towards a society of empowered citizens and enhanced research | Shaping Europe’s digital future », sur digital-strategy.ec.europa.eu (consultĂ© le )
  8. Socientize Project (2013-12-01), « Green Paper on Citizen Science: Citizen Science for Europe - Towards a better society of empowered citizens and enhanced research »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?) [PDF], Socientize consortium, .
  9. Ostrom E. 2010. La Gouvernance des biens communs : pour une nouvelle approche des ressources naturelles. PlanĂšte en jeu, de Boek.
  10. Miller J.R., 2006. Restoration, reconciliation, and reconnecting with nature nearby. Biological Conservation, 127, 356–361.
  11. « Rapport 2010 World Water Monitoring Day »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?).
  12. Butchart S.H.M. et al., 2010. Global biodiversity indicators of recent decline. Science 328, 1164-1168.
  13. De Heer M., Kapos V. & B.J.E. ten Brink, 2005. Biodiversity trends in Europe : development and testing of a species trend indicator for evaluating the progress towards the 2010 target. Phil. Trans. R. Soc. B 360 : 297-308.
  14. Gregory R., van Strien A. et al., 2005. Developing indicators for European birds. Phil. Trans. R. Soc. B, 360, 269-288.
  15. Julliard R., Jiguet F. & D. Couvet, 2004. Common birds facing global changes: what makes a species at risk? Global Change Biology, 10, 148–154.
  16. « 24H pour la biodiversitĂ© »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?) (2014), Seine-Saint-Denis.
  17. Danielsen F. et al., 2010. Environmental monitoring : The scale and speed of implementation varies according to the degree of people’s involvement. Journal of Applied Ecology 47, 1166-1168.
  18. Selon Basset (2004), ce mot viendrait du nĂ©ologisme anglais parataxonomist inventĂ© par des naturalistes anglo-saxons devant inventorier les invertĂ©brĂ©s de forĂȘts tropicales amĂ©ricaines.
  19. Pierre-Yves GuihĂ©neuf (DialTer) La propriĂ©tĂ© des donnĂ©es dans les programmes de science participative : Ă©tat des lieux des pratiques et du droit, Note de travail Ă©tablie pour l’association PlanĂšte Mer avec l’appui de la Fondation de France) dĂ©cembre 2012, 10p, PDF.
  20. https://www.odonat-grandest.fr/wp-content/uploads/2017/12/ODONAT_Livre_Blanc_Donnees_naturalistes_Alsace.pdf Livre Blanc ; Principes d'échange des données naturalistes du monde associatif - PremiÚres propositions.
  21. Programme Comédie, page Expériences : Science, environnement et participation : fiches d'expériences de science participative en France.
  22. (fr) Le Blog de Jean-Michel Cornu, Diffuser la science et la recherche dans la société.
  23. Voir « Sciences participatives et biodiversitĂ© », dans la collection « les livrets de l’IfrĂ©e » en ligne.
  24. Harold Levrel, BenoĂźt Fontaine, Pierre-Yves Henry, FrĂ©dĂ©ric Jiguet, Romain Julliard, Christian Kerbiriou, Denis Couvet ; Balancing state and volunteer investment in biodiversity monitoring for the implementation of CBD indicators: A French example ; Ecological Economics 69 (2010) 1580–1586.
  25. Schmeller, D.S., Henry, P.-Y., Julliard, R., Clobert, J., Gruber, B., Dziock, F., Lengyel, S., Nowicki, P., DĂ©ri, E., Budrys, E., Kull, T., Tali, K., Bauch, B., Settele, J., van Swaay, C., Kobler, A., Babij, V., Papastergiadou, E., Henle, K., 2009. Advantages of volunteer-based biodiversity monitoring in Europe. Conservation Biology 23 (2), 307–316.
  26. Site du colloque « Sciences Citoyennes et Biodiversité ».
  27. Sur le site de l'INRA : SynthĂšse du rapport Sciences participatives - FĂ©vrier 2016 et version imprimable (PDF) ; Rapport de la mission Sciences participatives - FĂ©vrier 2016 & sa version imprimable (PDF) ; Annexes au rapport de la mission Sciences participatives - FĂ©vrier 2016 & leur version imprimable Annexes (PDF) en version imprimable.
  28. « COLLECTIF NATIONAL DES SCIENCES PARTICIPATIVES - BIODIVERSITÉ - Observer la biodiversitĂ© - portail OPEN », sur Participatives.org (consultĂ© le ).
  29. Aude Massiot, « Et si on comptait les animaux cet été ? », sur liberation.fr, (consulté le )
  30. Romain Garrouste, Claire Villemant, Jean-Lou Justine et Quentin Rome, « Dépasser sa peur des espÚces invasives grùce à la science citoyenne », sur theconversation.com, (consulté le ).
  31. « Le Collectif National Sciences participatives-Biodiversité », sur naturefrance.fr (consulté le )
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Voir aussi

Bibliographie

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