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Sanhadja

Les Sanhadja ou Iznagen ou Zenaga (en tamazight : ⵉⵥⵏⴰⴳⵏ, Iẓnagen, sing. ⴰⵥⵏⴰⴳ Aẓnag, en arabe : صنهاجة Senhaja ou زناگة Znaga, sing. صنهاجي Senhaji ou زناگي Znagi) forment l'une des trois grandes confédérations tribales berbères (avec les Zénètes et les Masmoudas), divisée en différentes tribus et sous-tribus.

Sanhaja
ⵉⵥⵏⴰⴳⵏ
زناگة / صنهاجة
Description de cette image, également commentée ci-après
Groupe de danseurs de la tribu des Reguibat dans le Sahara occidental lors du Festival national des arts populaires de Marrakech.
Populations importantes par région
Autres
Langues Berbère
Arabe
Religions Islam (majoritaire)
Ethnies liées Sahraouis (Reguibat, Tekna, Oulad Tidrarin, Laaroussien), Chleuhs, Jbalas[1], Kabyles[2], Maures, Rifains[3], Sanhadja de Srayr, Touaregs[4], Zayanes

Ils ont eu une influence majeure sur l'histoire de l'Afrique du Nord et dans une moindre mesure sur celle de l'Espagne.

Ethnonymie

On trouve aussi les variantes : Ifnayen, Znaga, Zenaga, Sanaga, Senaja, Senhaji, Sanhaji, Sanhaja, Çanhaja[note 1], Sinhâja[note 2].

Les Sanhaja se nomment eux-mêmes Iznagen, « les fils de Znag » en berbère.

Leur nom se perpétue aujourd'hui dans celui des Zenagas, confédération de tribus amazighes de la Mauritanie du Sud-Ouest et du Nord du Sénégal parlant le zenaga[5]

Plusieurs tribus au Maroc portent encore le vocable Sanhaja ou Zenaga, on citera notamment les Sanhadja de Srayr ou les Zenaga de l'Anti-Atlas.

On retrouve également les Zenaga dans la toponymie des lieux au Maroc, comme avec Ksar Zenaga à Figuig, une oasis du nord-est marocain.

Une hypothèse prétendrait que les Sanhajas seraient à l'origine du nom Sénégal, par l'intermédiaire du portugais Sanaga[6] (voir Étymologie du nom Sénégal), alors que d'autres prétendent que le nom Sénégal procéderait de la déformation de l'expression wolof suñu gaal, « notre pirogue »..

Étymologie

Le nom « Iznagen » (ⵉⵣⵏⴰⴳⵏ) est le pluriel du mot « Aznag » (ⴰⵣⵏⴰⴳ), et est composé de « Azn » (ⴰⵣⵏ) qui signifie « envoyer, expédier » et « Ag » (ⴰⴳ)[7] qui signifie « Fils », en langue berbère sanhadjienne. Le suffixe -en, et le remplacement de la première lettre du mot au singulier en A- par un I- sont utilisés pour marquer le pluriel.

« Iznagen » signifie ainsi en langue berbère sanhadjienne « Ceux qui envoient leurs fils ».

Populations

Selon Ibn Khaldoun, les Sanhaja constituaient une des sept grandes tribus des Branès, Branès serait le fils de Mazigh, l'ancêtre de tous les Berbères[8]. La déformation du nom Iznagen en Isenhadjen vient des auteurs arabes du Moyen Âge qui n'arrivaient pas à prononcer des sons berbères comme le G (« gueu » avalé ) qui n'existe pas en arabe.

Selon Émile Janier, les Sanhaja se divisaient en deux branches : les sédentaires habitant les Kabylies, c'est-à-dire les montagnes du Tell, et les nomades, hommes au litham habitant le Sahara[9] - [10].

Ziri ibn Menad, ancêtre des dynasties Zirides et Hammadides qui ont régné dans le Maghreb central et en Ifriqiya, est issu de la tribu des Telkata[11].

Les Sanhaja sahariens étaient nomades, et sont régis par une organisation matrilinéaire de la parenté contrairement aux autres sociétés berbères. Les hommes portent le voile du visage, le litham, d'où leur nom de « voilés »[12]. Parmi ces tribus Sanhaja sahariennes voilées[13], on retrouve : les Djoddala ou Gadala qui occupaient la partie sud-occidentale du Sahara au nord du Sénégal, les Lemtuna (ou Lemtouna), et les Messoufa ou Massoufa. Ces tribus sont à l'origine de la dynastie des Almoravides[13].

Le chroniqueur musulman, Al Bakri écrit au XIe siècle : « Ce sont des nomades qui errent dans le désert, ils parcourent une contrée qui s’étend en l’espace de deux mois de marche, tant en longueur qu’en largeur, et qui sépare le pays des terres d’Islam »[14].

Selon les auteurs d'expression arabe, les massifs du Sahara central étaient habités par la branche Targa des Sanhaja, qui sont les ancêtres des Touaregs.

Aussi, les caravanes commerciales qui transitaient de la boucle du Niger jusqu'au Sahara septentrional notamment d'Ouargla et du Djebel Nefoussa étaient protégées par les Touaregs[15] - [16].

Au Maroc

Les tribus Sanhaja peuplent actuellement une grande partie du territoire du Maroc et se trouvent principalement dans les régions suivantes :

  • Le sud-est du Maroc où les deux grandes confédérations berbères Aït Atta et Aït Yafelman sont Sanhaja
  • Le Moyen-Atlas avec la célèbre confédération des Zayanes réputée pour ses batailles et dont la célèbre figure historique Mouha Ou Hammou Zayani fait partie
  • La partie orientale du Haut Atlas où la confédération des Aït Izdeg d'origine Sanhaja forme la majorité de la population
  • Une partie des tribus chleuh de l'Anti-Atlas est de la même manière Sanhaja (où la tribu des Znaga ou Iznagen porte encore le nom de la tribu mère)
  • Dans l'oasis de Figuig où un des ksar de l'oasis porte leur nom (ksar Zenaga) et dont l'origine est lointaine
  • Au Sahara, avec les tribus des Ouled Tidrarine, des Ahl Barikallah ou encore des Ait Oumribet, vivant pour cette dernière entre l'Anti Atlas et le Sahara, réputée descendante des Almoravides.

Les Sanhaja de langue occupent notamment aujourd'hui au Maroc une longue bande de territoire, sensiblement orientée nord-sud, qui a son unité linguistique et qui s'étend de Rabat, de Meknès et de Fès jusqu'au Sahara. C'est ce qui forme le pays des Aït Mguild (Aït Mgild), des Zemmour, des Gerwan et des Zayyan.[17]

Histoire

Préhistoire et Antiquité

Selon Léon l'Africain, les Zanaga sont des Numides[18]. Toutefois sa description de la Numidie ne correspond pas à la Numidie romaine. Il évoque plutôt une bande de terrain au nord du Sahara. Strabon en fait des voisins méridionaux des Garamantes[19]. Il est possible que le nom des Gétules ait été conservé dans celui de la tribu Sanhadja des Djoddala, également connue sous les noms de Gadala, Gudâla ou Guezula[20].

À la fin de l'Antiquité, les Sanhaja fondent la ville d'Aoudaghost.

Période des dynasties berbères

À partir du IXe siècle, les rameaux sanhaja du Sahara occidental en phase d'islamisation, Lemtuna de l'Adrar mauritanien, Gadala et Messoufa nomadisant entre le Haut Niger et le Sénégal, constituent une nouvelle confédération pour contrôler le commerce transsaharien et concurrencer les royaumes païens du Sahel saharien[12]. Mais cette unité reste fragile. En 990, le royaume du Ghana s'empare d'Aoudaghost. Au début du XIe siècle, une nouvelle confédération se constitue pour reconquérir le commerce et déclarer la guerre sainte pour convertir les Noirs[12].

Ibn Khaldoun rapporte que le territoire des Sanhaja s’étend, dans le Maghreb central, des environs de Miliana jusqu’à la Mitidja et d'Achir dans le Titteri jusqu’au sud de Béjaïa[21]. Les tribus Sanhaja sont des sédentaires agriculteurs au nord de l’Atlas blidéen et nomades ou semi-nomades au Sud, entre l’Ouarsenis, le Titteri et le Sud des Bibans[21]. Le pays des Sanhaja abrite plusieurs villes importantes dont M'Sila, Alger, Médéa, Achir et Miliana[21].

En 971, Bologhine ibn Ziri, chef des Sanhaja habitant entre M'Sila et Alger[22], est investi gouverneur du Maghreb central par les Fatimides, en raison du rôle de son père Ziri ibn Menad, ancêtre de la dynastie des Zirides, lors des révoltes kharidjites d'Abu Yazid et expéditions contre les Zénètes en Oranie[11]. Bologhine construit sa capitale Achir et plusieurs villes dans le Maghreb central : Alger, Miliana et Médéa[22]. Devenus émirs, les Zirides s'emparent de l'Ifriqiya. Hammad ibn Bologhine, un des fils des Bologhine, fonde en 1015 la dynastie des Hammadides qui règne sur le Maghreb central depuis la nouvelle capitale construite en 1007, Kalâa des Béni Hammad[22], puis à partir de 1090 Béjaia[23].

Une autre dynastie issue des tribus Sanhaja règne aux XIe siècle et XIIe siècles sur l'Ouest du Maghreb et le pays d'Al-Andalus : les Almoravides. À l'origine, la dynastie almoravide est un mouvement religieux initié chez les Sanhaja sahariens par Yahya Ibn Ibrahim, chef gadala, et Abdellah ben Yassin, prédicateur rencontré par Yahya Ibn Ibrahim au retour de La Mecque[13].

Ces dynasties règnent sur le Maghreb (et al-Andalus) jusqu'en 1152. Elles sont défaites par les Almohades.

Au XIVe siècle, l'arrivée des Banu Hassan provoque le déclin des tribus Iznaguen. La domination des Hassaniya sur les Sanhaja est entérinée par la défaite des seconds au terme de la guerre de Char Bouba[24].

Période moderne

La langue Sanhaja a donné plusieurs variantes dont les principales sont aujourd'hui le kabyle en Algérie, le sanhaji de Srayr parlé dans le Sud-Ouest du Rif, le Tamazight du Moyen-Atlas marocain, le Tachelhit (ou chleuh) dans la région de Souss au sud du Maroc[25] et le zenaga parlé au Sénégal[26] et au sud de la Mauritanie par les Zenagas, minorité ethnique berbérophone[27] comptant de 2.000 à 25 000 locuteurs[27] - [28]. On notera que les Beidanes parlant le hassaniyya sont issus d'un mélange de tribus arabes et berbères Sanhaja[29].

Notes et références

Notes

  1. Çanhaja orthographe adoptée dans Charles-André Julien, Histoire de l'Afrique du Nord. Des origines à 1830, Paris, Payot, coll. « Grande bibliothèque Payot », (1re éd. 1931), 866 p. (ISBN 978-2-228-88789-2)
  2. Sinhâja orthographe adoptée dans Ibn Khaldûn (trad. de l'arabe par Abdesselam Cheddadi), Le livre des exemples, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », , 1560 p. (ISBN 2-07-011425-2), p. 621, (arabe : الصنهاجيون, al-ṣinhājīyūn)

Références

  1. Quelques hypothèses sur les dynamiques de peuplement du Rif occidental, Grigori Lazarev, p158-159
  2. G. Camps, « Branès », Encyclopédie berbère, no 11, , p. 1609–1610 (ISSN 1015-7344, DOI 10.4000/encyclopedieberbere.1836, lire en ligne, consulté le )
  3. Mohamed El- Moubaraki, Marocains du Nord: Entre la mémoire et le projet, L'Harmattan, , 255 p. (lire en ligne), p.29.
  4. Éditions Larousse, « Touareg - LAROUSSE », sur www.larousse.fr (consulté le )
  5. (fr)« L'oasis de Figuig », sur www.ville-figuig.info (consulté le )
  6. Imago Mundi, le Soudan occidental et central, lire en ligne
  7. S. Chaker, « Ag- (agg-). "Fils (de)" (touareg)(Voir Parenté) », Encyclopédie berbère, no 2, , p. 228 (ISSN 1015-7344, DOI 10.4000/encyclopedieberbere.897, lire en ligne, consulté le )
  8. G. Camps, « Branès », in Encyclopédie berbère, 11 | Bracelets – Caprarienses En ligne, mis en ligne le , consulté le 20 mai 2013.
  9. Émile Janier, « Les Bettiwa de Saint-Leu », Revue africaine, Société historique algérienne, Of. Pub. Univ. Alger, vol. 89, nos 402-403, , p. 245 (lire en ligne)
  10. « Le Royaume de Tigidda », sur www.ingall-niger.org (consulté le )
  11. Gilbert Meynier, L’Algérie, cœur du Maghreb classique : De l’ouverture islamo-arabe au repli (698-1518), Paris, La Découverte, , 358 p. (ISBN 978-2-7071-5231-2), p. 43
  12. Gilbert Meynier, L’Algérie, cœur du Maghreb classique... op. cit., p. 76.
  13. G. Camps, « Gudâla/Guezula », in Encyclopédie berbère, 21 | Gland – Hadjarien En ligne, mis en ligne le 01 juin 2011, consulté le 20 mai 2013.
  14. Bernard Nantet, Le Sahara : Histoire, guerres et conquêtes, Paris, Tallandier, , 399 p. (ISBN 979-10-210-0239-5), p. 41
  15. Bernard Nantet, Le Sahara : Histoire, guerres et conquêtes, Paris, Tallandier, , 399 p. (ISBN 979-10-210-0239-5), p. 62
  16. Encyclopædia Universalis, « MAURITANIE », sur Encyclopædia Universalis (consulté le )
  17. Lieutenant De La Chapelle, « Le Sultan Moulay Isma'il et les Berbères Sanhaja du Maroc central », Archives marocaines, vol. XXVIII, , p. 14 (lire en ligne)
  18. Jean-Léon l'Africain, Description de l'Afrique, traduction par A. Épaulard, Librairie d'Amérique et d'Orient, 1981.
  19. Strabon, Géographie, XVII, 3, 19.
  20. G. Camps, « Gudâla/Guezula », Encyclopédie berbère, 21, Edisud, 1999.
  21. R. Bellil, « Kabylie : La région dans les écrits arabes », in Encyclopédie berbère, 26 | Judaïsme – Kabylie En ligne, mis en ligne le , consulté le 20 mai 2013.
  22. Collectif coordonné par Hassan Ramaoun, L'Algérie : histoire, société et culture, Alger, Casbah Editions, , 351 p. (ISBN 9961-64-189-2), p. 19
  23. L'Algérie : histoire, société et culture..., op. cit., p. 20
  24. La Mauritanie, Christine Dauré-Serfaty, éditions L'Harmattan, 1993 - 239 pages, p.50.
  25. « Institut royal de la culture amazighe (IRCAM) », sur www.ircam.ma, (consulté le )
  26. Librairie du Congrès
  27. Roland Breton, Atlas des minorités dans le monde, Autrement (Editions), coll. « Tout un monde en cartes », , 64 p. (ISBN 978-2-7467-3158-5), p. 35
  28. Selon (en) Fiche langue[zen]dans la base de données linguistique Ethnologue.
  29. (ar)عماد الميغري, « L’État et la question ethnique en Mauritanie. Conséquences sur la fécondité et le comportement reproductif des minorités », Insaniyat'd / إنسانيات En ligne, 32-33 | (ou chleuh) 2006, mis en ligne le 06 août 2012, consulté le 19 mai 2013.

Annexes

Bibliographie

  • (en) John Mercer, Spanish Sahara, George Allen & Unwid Ltd, 1976 (ISBN 0-04-966013-6)
  • (en) Anthony G. Pazzanita, Historical Dictionary of Western Sahara, Scarecrow Press, 2006
  • (en) Virginia Thompson et Richard Adloff, The Western Saharans. Background to Conflict, Barnes & Noble Books, 1980 (ISBN 0-389-20148-0)

Articles connexes

Liens externes

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