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Racisme antinoir

Le racisme antinoir est une forme de l'idéologie raciste dirigée spécifiquement à l'égard de la communauté noire ou les personnes de peau noire, perçues comme telles.

DĂ©finition et utilisation du concept

Le terme « racisme antinoir » est notamment utilisé par des groupes luttant spécifiquement contre le racisme à l'égard des personnes de peau noire, comme le Conseil représentatif des associations noires de France (CRAN), qui utilisent parfois comme synonyme le terme de « négrophobie », comme le fait la Brigade anti-négrophobie.

Le terme afrophobie, de l'anglais « afrophobia », est utilisĂ© par le RĂ©seau europĂ©en contre le racisme (voir European Network Against Racism)[1]. Le racisme antinoir peut parfois se parer de motivations bibliques, par exemple chez certains calvinistes et Ă©vangĂ©liques qui, s’appuyant sur une interprĂ©tation littĂ©rale de la malĂ©diction de Canaan dans le livre de la GenĂšse (9:25 Ă  27) et de la « Table des peuples », ont justifiĂ© l’esclavage, la sĂ©grĂ©gation et l’apartheid, encouragĂ©s par les doctrines raciales de l’anthropologie du XIXe siĂšcle[2] - [3], hĂ©ritĂ©es d'Arthur de Gobineau Ă  qui l’on doit le premier livre en français s'appuyant sur la science pour tenter de prouver la hiĂ©rarchie des races dans son Essai sur l’inĂ©galitĂ© des races humaines[4].

Le mot « nÚgre » aujourd'hui devenu emblématique du racisme antinoir en français.

Dans le monde

Mauritanie

En Mauritanie, l'esclavage, officiellement aboli en 1980 et criminalisĂ© en 2007, persiste avec un fondement raciste. Les employeurs d'esclaves arabes utilisent des esclaves noirs et la race est une source premiĂšre de division[5] - [6]. La persistance de l’esclavage, en Mauritanie, s’explique par de multiples causes que seuls de profonds changements institutionnels, de mentalitĂ© et une volontĂ© politique peuvent changer[7].

La société mauritanienne est minée par les divisions ethniques et la hiérarchie selon la couleur de peau[8]. Le gouvernement a été suspecté de chercher à exclure une partie des Négro-Mauritaniens de la nationalité mauritanienne[9].

Soudan

Au Soudan, avant la scission du Soudan du Sud, l'adoption imposée de la culture islamique et arabe dans les institutions nationales a entraßné l'exclusion des musulmans africains, des chrétiens africains et animistes[10] - [11]. La constitution plaçait les non-musulmans dans une situation d'infériorité dans leur pays[12].

Les institutions publiques au Soudan se caractĂ©risent par des signes extrĂȘmes de racisme, qui sont ancrĂ©s dans les institutions nationales et visent la population des Africains noirs. Par exemple, les habitants qui vivent dans des ghettos autour de Khartoum sont pour la plupart des personnes qui ont Ă©tĂ© expulsĂ©s de leur lieu d'origine. Le gouvernement dirigĂ© par le prĂ©sident Al-Bashir a intensifiĂ© les expulsions de ces groupes spĂ©cifiques. Il autorisait pour cela la police Ă  dĂ©porter des populations noires dans des lieux dĂ©solĂ©s[11].

L'esclavage est toujours pratiqué au Soudan[13]. Les esclavagistes arabes choisissent leurs victimes en fonction de leur race, de leur ethnie et de leur religion et considÚrent les Noirs du Sud comme des infidÚles inférieurs[14] - [15].

Le Soudan a Ă©tĂ© le thĂ©Ăątre de la seconde guerre civile soudanaise qui a notamment vu, selon certains analystes, les populations civiles noires du Sud ĂȘtre victimes d'une politique du pouvoir arabe de Khartoum d'inspiration raciste et totalitaire sous la forme d'une guerre d'extermination[16].

La guerre du Darfour, conflit ayant dĂ©butĂ© en 2003, est prĂ©sentĂ©e comme opposant[17] des tribus arabes dont sont issus les Janjawids et des tribus noires non-arabophones[18]. Pour le spĂ©cialiste du Soudan Marc Lavergne, le conflit ne serait pas racial[19] mais les gouvernements qui se sont succĂ©dĂ© depuis l’indĂ©pendance auraient ignorĂ© les provinces pĂ©riphĂ©riques de la capitale, dont le Darfour, et instrumentaliseraient des miliciens Ă  des fins Ă©conomiques[20]. Selon GĂ©rard Prunier, spĂ©cialiste de l'Afrique de l'Est, la cause du conflit au Darfour est « racioculturelle ». Selon ce chercheur, les « Arabes sont minoritaires au Soudan » et « les islamistes ne sont que l’ultime incarnation historique de leur domination ethnorĂ©gionale »[21]. Selon un certain nombre d’observateurs kenyans, un racisme systĂ©matique est Ă  l'origine des violences et la cause profonde de la volontĂ© arabe d’élimination systĂ©matique des Noirs au Darfour[22].

Historique

Selon le rapport 2019 de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) « le racisme anti-Noirs est imprĂ©gnĂ© par le racisme d’exploitation pratiquĂ© pendant des siĂšcles dans le cadre des traites nĂ©griĂšres et de l’esclavage. Ce dernier a Ă©mergĂ© Ă  partir de la fin du XVIe siĂšcle puis s’est poursuivi aux XVIIe et XVIIIe siĂšcles avec le dĂ©veloppement de thĂ©ories sur la hiĂ©rarchie des races humaines justifiant l’exploitation de celles classĂ©es comme infĂ©rieures. Des caractĂ©ristiques anthropomorphiques et intellectuelles ont alors Ă©tĂ© attribuĂ©es aux personnes noires, assignĂ©es en consĂ©quence aux emplois et positions sociales infĂ©rieurs »[23]. La TĂȘte noire, piĂšce de thĂ©Ăątre de foire d'Alain-RenĂ© Lesage et Jacques-Philippe d'Orneval (1721)[24], tĂ©moigne du racisme latent de l'Ă©poque.

Code noir

Dans le contexte de l'esclavage, le Code noir est le titre donnĂ© Ă  l’Ordonnance royale ou Édit royal de mars 1685 touchant la police des Ăźles de l'AmĂ©rique française de 1718, puis aux Ă©dits similaires de 1723 sur les Mascareignes et de 1724 sur la Louisiane, et enfin, Ă  partir du milieu du XVIIIe siĂšcle, aux recueils de textes juridiques relatifs aux territoires français d'outre-mer oĂč l'esclavage Ă©tait pratiquĂ©. Cet ensemble de textes lĂ©gislatifs institutionnalise et marque du sceau de la lĂ©galitĂ© des pratiques de domination, d'exploitation et de sĂ©grĂ©gation que l'esclavage avait fait Ă©merger[25].

Le Code noir est ainsi un « instrument juridique coercitif qui, tout en encadrant les pratiques trop arbitraires des maĂźtres, fait de l'esclave une personne de non-droit, un objet, un "bien meuble" »[26][27]. Les historiens Gilles Havard et CĂ©cile Vidal attestent en outre de l'Ă©laboration d'un racisme d'État, reposant sur le concept de la puretĂ© du sang, en AmĂ©rique française au XVIIIe siĂšcle[28].

Montesquieu, dans son texte « De l’esclavage des nĂšgres » de De l'esprit des lois critique ironiquement le systĂšme esclavagiste et sa nĂ©grophobie, en utilisant des arguments de plus en plus absurdes commençant par: « Si j’avais Ă  soutenir le droit que nous avons eu de rendre les nĂšgres esclaves, voici ce que je dirais : Les peuples d’Europe ayant exterminĂ© ceux de l’AmĂ©rique, ils ont dĂ» mettre en esclavage ceux de l’Afrique, pour s’en servir Ă  dĂ©fricher tant de terres. Le sucre serait trop cher, si l’on ne faisait travailler la plante qui le produit par des esclaves. Ceux dont il s’agit sont noirs depuis les pieds jusqu’à la tĂȘte ; et ils ont le nez si Ă©crasĂ©, qu’il est presque impossible de les plaindre. »[29].

Code de l'indigénat

Le terme de Code de l'indigénat renvoie non pas à un code juridique unifié, mais à une législation d'exception et un ensemble de pratiques disparates utilisées dans les territoires du second empire colonial français depuis le milieu du XIXe siÚcle jusqu'aprÚs la Seconde Guerre mondiale. En février 1944, la conférence de Brazzaville recommande la suppression de l'indigénat, qui est aboli en Algérie par l'ordonnance du 7 mars 1944. Cependant, certaines pratiques perdurent jusqu'aux indépendances[30].

Cette législation d'exception est étudiée par plusieurs historiens : Gilles Manceron la décrit comme un « racisme républicain », Carole Reynaud-Paligot comme une « République raciale », alors qu'Olivier Le Cour Grandmaison insiste sur une « législation discriminatoire et raciste ». Pour Emmanuelle Saada, dans les colonies françaises et avec l'indigénat, « le droit a été une des instances de production de la race »[30] - [31].

L'historien Laurent Dornel indique qu'en mĂ©tropole et pendant la PremiĂšre Guerre mondiale, la main-d'Ɠuvre coloniale a vĂ©cu une quadruple exclusion, raciale, sociale, sexuelle et politique, sans que l'on puisse pour autant parler d'un racisme d'État[d 1] : « cette politique officielle française s'est appuyĂ©e sur une conception raciale de la culture, de l'Ă©conomie ou des rapports sociaux, qui a justifiĂ©, par l'Ă©troite corrĂ©lation entre ethnicitĂ© et emploi, un quasi-asservissement Ă©conomique. Pendant ces annĂ©es de guerre se sont dessinĂ©s les contours de ce que sera, bientĂŽt, "l'immigrĂ©" : un corps-machine, sans visage, en mĂȘme temps qu'un dĂ©racinĂ© dont il faut toujours se mĂ©fier »[d 2].

Époque contemporaine

Le rapport 2019 de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) sur la lutte contre le racisme, l'antisĂ©mitisme et la xĂ©nophobie, publiĂ© en juin 2020, comporte une focalisation sur le racisme antinoir. Il reprend notamment le constat effectuĂ© dans le rapport 2018, selon lequel les personnes noires constitueraient une des minoritĂ©s parmi les plus touchĂ©es par les discriminations, tout en Ă©tant paradoxalement parmi les minoritĂ©s les plus acceptĂ©es dans les sondages sur la tolĂ©rance vis-Ă -vis des minoritĂ©s[32] - [33]. Il affirme que « l'ampleur du racisme anti-Noirs est dĂ©noncĂ©e depuis longtemps par les associations dĂ©fendant ces minoritĂ©s – associations noires, afro-fĂ©ministes, africaines, afro-caribĂ©ennes tout comme par les associations universalistes mobilisĂ©es dans la lutte contre le racisme ». Il cite l’enquĂȘte Trajectoires et Origines (TeO), qui porte sur les descendants d’immigrĂ©s Ă©tablis en France, qui indiquerait que les descendants de Subsahariens ont 1,3 fois plus de risque de subir des traitements inĂ©galitaires ou des discriminations que la « population majoritaire » et que les Noirs, aux cĂŽtĂ©s des MaghrĂ©bins, subissent plus de discriminations que le reste de la population.

Selon le rapport, le racisme anti-Noirs « s’ancre dans une symbolique des couleurs dans laquelle le sombre est synonyme de mal, par opposition Ă  une supposĂ©e puretĂ© du blanc ». Il continuerait de se baser sur des stĂ©rĂ©otypes raciaux historiques sur les Noirs, notamment celui de la puissance du corps des Noirs alliĂ© Ă  un manque de capacitĂ©s intellectuelles Ă  l'Ă©poque de la colonisation française. Ces stĂ©rĂ©otypes auraient un impact dans le monde du travail au XXIe siĂšcle. Le rapport se penche Ă©galement sur le mythe dit du « bon sauvage » noir Ă  l'Ă©poque contemporaine. Les Noirs seraient Ă©galement altĂ©risĂ©s et exotisĂ©s, considĂ©rĂ©s comme venant d'ailleurs, spĂ©cifiquement d'Afrique, caractĂ©ristiques qui l'emporteraient souvent sur leur citoyennetĂ© française dans les reprĂ©sentations, par exemple. Leur prĂ©sence sur le territoire français serait sans cesse questionnĂ©e au travers notamment du comportement de la police Ă  leur Ă©gard, qui contrĂŽlerait plus frĂ©quemment les jeunes hommes noirs. Les personnes noires seraient Ă©galement victimes de prĂ©jugĂ©s portant sur leur situation socio-Ă©conomique et familiale, et considĂ©rĂ©s gĂ©nĂ©ralement issus d’une famille nombreuse, pauvre, peu Ă©duquĂ©e et habitant dans des quartiers difficiles. Ces prĂ©jugĂ©s leur seraient particuliĂšrement prĂ©judiciables pour trouver un logement.

La commission recommande de lutter contre cette forme de racisme en reconnaissant tout d'abord sa spĂ©cificitĂ©. Elle propose de financer des enquĂȘtes de victimation et des tests de discrimination (en particulier dans les services publics, les commissariats et les gendarmeries), afin de saisir la spĂ©cificitĂ© du racisme antinoir et de mesurer son Ă©volution. Elle recommande des mesures dans diffĂ©rents domaines, notamment de « favoriser la mise en place de bonnes pratiques pour la reprĂ©sentation mĂ©diatique des minoritĂ©s visibles », oĂč celles-ci comptent pour 17% de la distribution des rĂŽles. Dans le domaine de l'Ă©ducation, elle recommande d’axer davantage les programmes scolaires sur les racines multiculturelles de la France et leurs apports Ă  la culture nationale, en raison du sentiment d'injustice scolaire ressenti par 56% des descendants d'immigrĂ©s des pays d'Afrique subsaharienne. De maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale, elle appelle diverses autoritĂ©s publiques françaises Ă  mettre en place des campagnes de communication pour lutter contre les stĂ©rĂ©otypes. Enfin, elle appelle Ă  une « prise de conscience du phĂ©nomĂšne par la sociĂ©tĂ© dans son ensemble » et une « dĂ©colonisation des esprits », et recommande aux individus, particuliĂšrement les personnes blanches, de travailler Ă  leur niveau, citant l’universitaire amĂ©ricaine Peggy McIntosh et sa thĂ©orie du privilĂšge blanc[34] - [35].

En décembre 2022, le Comité de l'ONU pour l'élimination de la discrimination raciale (Cerd) se dit "préoccupé" par "la persistance et l'ampleur des discours à caractÚre raciste et discriminatoire en France, notamment dans les médias et sur internet". Au terme de l'examen périodique de la politique de la France envers ses minorités, les experts indépendants du Cerd ont émis une série d'observations et recommandations. Ils s'inquiÚtent du "discours politique raciste tenu par des responsables politiques", dont les noms ne sont pas cités, à l'égard de certaines minorités, en particulier les personnes africaines ou d'ascendance africaine[36].

Le Conseil reprĂ©sentatif des associations noires prĂ©sente en fĂ©vrier 2023 un rapport Ă  l'AssemblĂ©e nationale sur le racisme, en France mĂ©tropolitaine, contre la population noire ou « mĂ©tisse d’ascendance noire ». Selon l'Ă©tude, 91% des sondĂ©s soutiennent avoir Ă©tĂ© victime de discrimination raciale dont 85% pour leur couleur de peau. Le rapport prĂ©sente des chiffres plus spĂ©cifiques sur le racisme face Ă  l'emploi, Ă  la police, ... L'Ă©tude prĂ©sente Ă©galement un sentiment d'amĂ©lioration dans la lutte contre les discriminations[37].

Suisse

À la demande du Service de lutte contre le racisme (SLR) de la ConfĂ©dĂ©ration suisse, le Forum suisse pour l’étude des migrations et de la population a effectuĂ© en 2017 une Ă©tude[38] se penchant sur le racisme antinoir en Suisse. Ce dernier y est dĂ©fini comme une forme de racisme « envers les personnes perçues ou se considĂ©rant comme noires (..) partant du principe qu’il s’agit essentiellement de personnes afro-descendantes, selon la dĂ©finition qu’en donne le groupe de travail d’experts de l’ONU consacrĂ© Ă  cette question »[39]. Plus formellement, le racisme antinoir au niveau « interindividuel » est dĂ©fini comme

« une situation, un acte ou un événement par lesquels les individus qui sont perçus ou se considÚrent comme noirs se sentent, en raison de leur couleur de peau ou autres traits phénotypiques, dénigrés, ridiculisés, exclus ou autrement discriminés, que ce soit en public ou en privé. »

Cette dĂ©finition serait due en partie significative au Carrefour de RĂ©flexion et d’Action contre le Racisme anti-Noir (CRAN[40]), association suisse qui Ɠuvre depuis le dĂ©but des annĂ©es 2000 Ă  la reconnaissance du racisme envers les personnes noires, Ă  la fois en Suisse et au niveau international.

Les auteurs, qui notent qu'ils sont en partie « non-Noires au sens d’« Afro-descendant_e_s » », affirment que le phĂ©nomĂšne « a encore peu fait l’objet de recherches en Suisse ». Toutefois, la question aurait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© abordĂ©e sous diffĂ©rents angles « dans la littĂ©rature scientifique consacrĂ©e Ă  des sujets proches ». Ils notent Ă©galement que des dĂ©bats mĂ©diatiques « attirent rĂ©guliĂšrement l’attention sur des pratiques de profilage racial de la police ou d’autres incidents racistes » et qu'il y a « tout lieu de penser que la Suisse n’est pas moins concernĂ©e par le phĂ©nomĂšne que d’autres pays europĂ©ens, mĂȘme si les modes d’expressions varient selon les contextes nationaux ou rĂ©gionaux ».

Monde arabo-musulman

Les travaux menĂ©s par l’historien Bernard Lewis sur les reprĂ©sentations dĂ©veloppĂ©es par la civilisation musulmane Ă  l’égard des autres ĂȘtres humains concluent sur l’existence d’un systĂšme perceptif qu’il qualifie de raciste, notamment Ă  l’égard des populations noires[41]. Selon le journaliste Serge BilĂ©, plusieurs auteurs arabes les comparaient Ă  des animaux[42]. Le poĂšte al-Mutanabbi mĂ©prisait le gouverneur Ă©gyptien Abu al-Misk Kafur au Xe siĂšcle Ă  cause de la couleur de sa peau[42]. Le mot arabe aabd Űčۚۯ (pl. aabidŰčŰšÙŠŰŻ) qui signifiait esclave est devenu Ă  partir du VIIIe siĂšcle plus ou moins synonyme de « Noir »[43], prenant une signification similaire au terme "nĂšgre" dans la langue française du XXe siĂšcle. Quant au mot arabe zanj, il dĂ©signait de façon pĂ©jorative les Noirs[44], avec une connotation raciale officielle que l'on retrouve dans les textes et discours racialistes. Ces jugements racistes Ă©taient rĂ©currents dans les Ɠuvres des historiens et des gĂ©ographes arabes : ainsi, Ibn Khaldoun a pu Ă©crire au XIVe siĂšcle: « Les seuls peuples Ă  accepter vraiment l'esclavage sans espoir de retour sont les nĂšgres, en raison d'un degrĂ© infĂ©rieur d'humanitĂ©, leur place Ă©tant plus proche du stade de l'animal »[45]. À la mĂȘme pĂ©riode, le lettrĂ© Ă©gyptien Al-Abshibi Ă©crivait : « Quand il [le Noir] a faim, il vole et lorsqu'il est rassasiĂ©, il fornique »[46]. Cependant, selon Simone Bakchine Dumont, « Il ne faut cependant pas perdre de vue que le musulman rĂ©duit Ă  l’esclavage aussi bien le Noir que le Blanc, et qu’il n’existe pas chez lui de thĂ©orie raciale Ă  ce propos »[47].

Notes et références

Notes

    Références

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    2. Pierre-André Taguieff, La couleur et le sang : doctrines racistes à la française, Paris, Mille et une nuits, , 236 p. (ISBN 2-84205-640-X et 9782842056407)
    3. AgnĂšs LainĂ©, « Ève africaine ? De l’origine des races au racisme de l’origine », dans François-Xavier Fauvelle-Aymar, Jean-Pierre ChrĂ©tien et Claude-HĂ©lĂšne Perrot, dir., Afrocentrismes. L’histoire des Africains entre Égypte et AmĂ©rique, Paris, Karthala, , p. 105-125
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    8. Pierre Daum, « Mauritanie, une société obsédée par la couleur de peau », Le Monde diplomatique, (consulté le )
    9. Justine Spiegel, « Les Négro-Mauritaniens se mobilisent contre un recensement « discriminatoire » », Jeune Afrique, (consulté le )
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    41. Bernard Lewis, Race et couleur en terre d’Islam, Paris : Payot, 1982. On se reportera aussi à David Brian Davis, Slavery and human progress, chap. 4.
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    44. Serge Bilé, Quand les noirs avaient des esclaves blancs, Pascal Galodé éditeurs, Saint-Malo, 2008 (ISBN 978-2-35593-005-8), p. 30
    45. Jacques Heers, Les Négriers en terre d'islam, Perrin, coll. « Pour l'histoire », Paris, 2003 (ISBN 978-2-262-01850-4), p. 117
    46. Bernard Lewis, Race et couleur en pays d'islam, Payot, p. 40.
    47. Simone Bakchine Dumont, « Le thĂšme chamatique dans les sources rabbiniques du Proche-Orient, du dĂ©but de l'Ăšre chrĂ©tienne au XIIIe siĂšcle », Éthiopiques – Revue trimestrielle de culture nĂ©gro-africaine, Dakar, vol. III, nos 40-41 « 1-2 »,‎ 1er trimestre 1985 (lire en ligne, consultĂ© le )
    1. Dornel 1995, p. 71.
    2. Dornel 1995, p. 72.

    Articles connexes

    Histoire

    Théories

    Stéréotypes

    Aux États-Unis :

    Organisations et mouvements anti-racisme antinoir

    Autres racismes

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