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Nucléides présents dans l'environnement

Les nucléides présents dans l'environnement peuvent être regroupés en plusieurs catégories, suivant leur origine :

  • Les nucléides primordiaux, présents sur Terre depuis la formation de celle-ci il y a environ 4,6 milliard d'années, lesquels peuvent eux-mêmes être séparés en deux groupes :
    • Les 254 nucléides stables, dont la radioactivité est inexistante ou n'a pas encore été détectée : tous les isotopes stables connus ont été retrouvés sur Terre.
    • Les isotopes instables à longue demi-vie, dont on a détecté la radioactivité : on en connaît de façon certaine 32 dans l'environnement, on en soupçonne deux de plus (le samarium 146 et le plutonium 244 ont des demi-vie de respectivement 100 millions et 80 millions d'années)
  • Les nucléides radiogéniques, issus de la désintégration de nucléides primordiaux : on en connaît un peu plus d'une quarantaine (parmi les isotopes radioactifs), la plupart isotopes d'éléments lourds présents dans les chaînes de désintégration du thorium 232, de l'uranium 238 et de l'uranium 235. Ceux à demi-vie courte (isotopes de l'astate, du polonium, du radon...) ne sont présents qu'en quantités infimes sur Terre (de l'ordre de quelques grammes à un instant donné pour l'astate, par exemple), et ne sont décelables que par leur radioactivité. Ceux à demi-vie plus longue (radium 226, uranium 234...) sont généralement quantifiables dans la croûte terrestre par des méthodes de séparation physiques ou chimiques.
  • Les nucléides cosmogéniques, issus de la spallation des rayons cosmiques. Le plus connu est le carbone 14, issu de la spallation de l'azote atmosphérique et à l'origine de la méthode de datation radiométrique au carbone 14.
  • Les nucléides artificiels, ou synthétiques. Ceux ayant une demi-vie courte ne "survivent" pas assez longtemps hors de leur lieu de synthèse pour contaminer l'environnement, mais plusieurs autres, notamment le césium 137 ou le strontium 90, ont des demi-vie assez longue (plusieurs décennies). On les retrouve dans l'environnement en raison de la contamination de celui-ci :
    • Par les retombées radioactives dues aux bombes atomiques et aux essais nucléaires ayant eu lieu dans l'atmosphère entre 1945 et 1980,
    • Lors d'incidents ou accidents s'étant produits dans des centrales nucléaires ou des centres de retraitement des déchets nucléaires. Les plus graves et les plus connus de ces accidents sont les catastrophes de Tchernobyl et de Fukushima.
    • Par des rejets contrôlés des industries nucléaires.

Un nucléide peut appartenir à plusieurs de ces catégories : il peut être par exemple à la fois primordial et radiogénique (comme le plomb 208, isotope stable donc primordial, mais dont la majorité des atomes sur Terre est issue de la désintégration du thorium 232, ou l'argon 40, lui aussi stable mais issu à plus de 99 % de la désintégration du potassium 40), ou cosmogénique et artificiel (comme l'iode 129, que l'on peut trouver en traces infimes comme isotope cosmogénique dans l'environnement, mais surtout produit de fission dont l'essentiel est issu de contaminations à la suite d'essais ou d'accidents nucléaires).

Liste

Élément Z Isotopes primordiaux

(dont instables)

Radioisotopes non primordiaux
Isotopes Origine
Hydrogène 1 1H, 2H 3H Cosmogénique et artificielle
Hélium 2 3He, 4He
Lithium 3 6Li, 7Li
Béryllium 4 9Be 7Be, 10Be Cosmogénique
Bore 5 10B, 11B
Carbone 6 12C, 13C 11C, 14C Cosmogénique et artificielle
Azote 7 14N, 15N
Oxygène 8 16O, 17O, 18O
Fluor 9 19F 18F Cosmogénique
Néon 10 20Ne, 21Ne, 22Ne 24Ne, 25Ne, 26Ne Radiogénique[note 1]
Sodium 11 23Na 22Na, 24Na Cosmogénique
Magnésium 12 24Mg, 25Mg, 26Mg 28Mg Cosmogénique
Aluminium 13 27Al 26Al Cosmogénique
Silicium 14 28Si, 29Si, 30Si 31Si, 32Si Cosmogénique
Phosphore 15 31P 32P Cosmogénique
Soufre 16 32S, 33S, 34S, 36S 35S Cosmogénique
Chlore 17 35Cl, 37Cl 34mCl, 36Cl, 38Cl, 39Cl Cosmogénique et artificielle
Argon 18 36Ar, 38Ar, 40Ar 37Ar, 39Ar, 41Ar Cosmogénique
Potassium 19 39K, 40K, 41K
Calcium 20 40Ca, 42Ca, 43Ca, 44Ca, 46Ca, 48Ca 41Ca Cosmogénique[1]
Scandium 21 45Sc 48Sc (?) Radiogénique (issu de 48Ca)
Titane 22 46Ti, 47Ti, 48Ti, 49Ti, 50Ti
Vanadium 23 50V, 51V
Chrome 24 50Cr, 52Cr, 53Cr, 54Cr
Manganèse 25 55Mn 53Mn Cosmogénique[2]
Fer 26 54Fe, 56Fe, 57Fe, 58Fe
Cobalt 27 59Co 60Co Artificielle
Nickel 28 58Ni, 60Ni, 61Ni, 62Ni, 64Ni
Cuivre 29 63Cu, 65Cu
Zinc 30 64Zn, 66Zn, 67Zn, 68Zn, 70Zn
Gallium 31 69Ga, 71Ga
Germanium 32 70Ge, 72Ge, 73Ge, 74Ge, 76Ge
Arsenic 33 75As
Sélénium 34 74Se, 76Se, 77Se, 78Se, 80Se, 82Se
Brome 35 79Br, 81Br
Krypton 36 78Kr, 80Kr, 82Kr, 83Kr, 84Kr, 86Kr 81Kr, 85Kr Cosmogénique et artificielle
Rubidium 37 85Rb, 87Rb
Strontium 38 84Sr, 86Sr, 87Sr, 88Sr 90Sr Artificielle
Yttrium 39 89Y
Zirconium 40 90Zr, 91Zr, 92Zr, 94Zr, 96Zr
Niobium 41 93Nb
Molybdène 42 92Mo, 94Mo, 95Mo, 96Mo, 97Mo, 98Mo, 100Mo
Technétium 43 99Tc Artificielle[3]
Ruthénium 44 96Ru, 98Ru, 99Ru, 100Ru, 101Ru, 102Ru, 104Ru
Rhodium 45 103Rh
Palladium 46 102Pd, 104Pd, 105Pd, 106Pd, 108Pd, 110Pd
Argent 47 107Ag, 109Ag
Cadmium 48 106Cd, 108Cd, 110Cd, 111Cd, 112Cd, 113Cd, 114Cd, 116Cd
Indium 49 113In, 115In
Étain 50 112Sn, 114Sn, 115Sn, 116Sn, 117Sn, 118Sn, 119Sn, 120Sn, 122Sn, 124Sn
Antimoine 51 121Sb, 123Sb
Tellure 52 120Te, 122Te, 123Te, 124Te, 125Te, 126Te, 128Te, 130Te
Iode 53 127I 129I, 131I Cosmogénique et artificielle
Xénon 54 124Xe, 126Xe, 128Xe, 129Xe, 130Xe, 131Xe, 132Xe, 134Xe, 136Xe
Césium 55 133Cs 137Cs Artificielle
Baryum 56 130Ba, 132Ba, 134Ba, 135Ba, 136Ba, 137Ba, 138Ba
Lanthane 57 138La, 139La
Cérium 58 136Ce, 138Ce, 140Ce, 142Ce
Praséodyme 59 141Pr
Néodyme 60 142Nd, 143Nd, 144Nd, 145Nd, 146Nd, 148Nd, 150Nd
Prométhium 61 147Pm Radiogénique et artificiel[4]
Samarium 62 144Sm, 146Sm (?), 147Sm, 148Sm, 149Sm, 150Sm, 152Sm, 154Sm
Europium 63 151Eu, 153Eu
Gadolinium 64 152Gd, 154Gd, 155Gd, 156Gd, 157Gd, 158Gd, 160Gd
Terbium 65 159Tb
Dysprosium 66 156Dy, 158Dy, 160Dy, 161Dy, 162Dy, 163Dy, 164Dy
Holmium 67 165Ho
Erbium 68 162Er, 164Er, 166Er, 167Er, 168Er, 170Er
Thulium 69 169Tm
Ytterbium 70 168Yb, 170Yb, 171Yb, 172Yb, 173Yb, 174Yb, 176Yb 182Yb (?) Radiogénique (issu de 232Th)
Lutécium 71 175Lu, 176Lu
Hafnium 72 174Hf, 176Hf, 177Hf, 178Hf, 179Hf, 180Hf
Tantale 73 180mTa, 181Ta
Tungstène 74 180W, 182W, 183W, 184W, 186W
Rhénium 75 185Re, 187Re
Osmium 76 184Os, 186Os, 187Os, 188Os, 189Os, 190Os, 192Os
Iridium 77 191Ir, 193Ir
Platine 78 190Pt,192Pt, 194Pt, 195Pt, 196Pt, 198Pt
Or 79 197Au
Mercure 80 196Hg, 198Hg, 199Hg, 200Hg, 201Hg, 202Hg, 204Hg
Thallium 81 203Tl, 205Tl 206Tl, 210Tl, 207Tl, 208Tl Radiogénique
Plomb 82 204Pb, 206Pb, 207Pb, 208Pb 210Pb, 211Pb, 212Pb, 214Pb Radiogénique
Bismuth 83 209Bi 210Bi, 211Bi, 212Bi, 214Bi Radiogénique
Polonium 84 210Po, 211Po, 212Po, 214Po, 215Po, 216Po, 218Po Radiogénique
Astate 85 215At, 218At, 219At Radiogénique
Radon 86 218Rn, 219Rn, 220Rn, 222Rn Radiogénique
Francium 87 223Fr Radiogénique
Radium 88 223Ra, 224Ra, 226Ra, 228Ra Radiogénique
Actinium 89 227Ac, 228Ac Radiogénique
Thorium 90 232Th 227Th, 228Th, 230Th, 231Th, 234Th Radiogénique
Protactinium 91 231Pa, 234Pa, Radiogénique
Uranium 92 235U, 238U 234U Radiogénique
Neptunium 93 237Np Artificielle
Plutonium 94 244Pu (?) 238Pu, 239Pu, 240Pu, 241Pu Artificielle
Américium 95 241Am Artificielle[5]

Notes :

  • Si un nucléide est primordial, il n'est pas répété parmi la liste des nucléides radiogéniques, cosmogéniques ou artificiels, même s'il peut être également issu de l'une de ces voies.
  • Certains nucléides sont indiqués comme artificiels (par généralisation) si on ne les retrouve naturellement dans l'environnement que sur le site du réacteur nucléaire naturel d'Oklo.
  • Certains isotopes sont probablement présents dans l'environnement, mais n'y ont pour l'instant jamais été observés avec certitude car présents en trop faibles quantités, ils sont indiqués avec (?).
  • Certains isotopes (par exemple 26Ne) ont des demi-vies si brèves (une fraction de seconde) que l'on ne peut les trouver dans l'environnement, même si on sait qu'ils s'y trouvent ce n'est que de la manière la plus fugace.
  • On peut constater une alternance entre Z pair, éléments avec plusieurs isotopes stables ou quasi stables, et Z impair, éléments avec peu ou pas d'isotopes stables : cette structure s'explique mieux en considérant tous les nucléides selon leur place dans la Vallée de stabilité.

Nucléides primordiaux

Les nucléides primordiaux, issus (à l'exception de l'hydrogène) de la nucléosynthèse stellaire, sont présents sur Terre depuis la formation de celle-ci, et sont soit stables, soit instables mais avec une demi-vie assez longue pour avoir survécu depuis. Leur radioactivité est soit absente, soit très faible (et dans de nombreux cas difficilement détectable). Seuls neuf nucléides radioactifs avec une demi-vie inférieure à dix fois l'âge de l'univers ont été détectés avec certitude sur Terre : par ordre de demi-vie décroissante (et donc radioactivité croissante), il s'agit de 147Sm, 138La, 87Rb, 187Re, 176Lu, 232Th, 238U, 40K et 235U. Les isotopes du thorium et de l'uranium sont à la tête des chaînes de désintégrations majeures sur Terre, et donc responsables de la présence d'une quarantaine d'autres nucléides, ceux-là radiogéniques et nettement plus radioactifs. On soupçonne qu'il sera possible, avec les progrès de la chimie analytique, de détecter le 146Sm (demi-vie d'environ 100 millions d'années), et la détection du 244Pu a été annoncée dans les années 1970, mais depuis remise en question.

Nucléides radiogéniques

Les nucléides radiogéniques sont issus des désintégrations radioactives d'autres nucléides, en premier lieu les nucléides primordiaux. Ils peuvent être stables (comme l'argon 40, descendant du potassium 40), ou eux-mêmes radioactifs. Presque tous les isotopes radioactifs des éléments lourds (Z = 81, Thallium, à Z = 92, Uranium), sont d'origine radiogénique (les exceptions sont les quatre radioisotopes primordiaux des éléments bismuth, thorium et uranium). Par ailleurs trois des quatre isotopes stables du plomb et l'un des deux isotopes stables du thallium sont également issus des chaînes de désintégration.

Quelques rares nucléides radiogéniques ne sont pas isotopes d'éléments lourds et/ou pas issus d'une chaîne de désintégration du thorium ou de l'uranium :

  • Le prométhium 147 est issu de la désintégration de l'europium 151 ; celui-ci ayant une très longue demi-vie - un milliard de fois l'âge de la Terre - son produit de désintégration est très rare, d'autant qu'il a lui-même une demi-vie d'à peine 30 mois.
  • Le scandium 48 est issu de la désintégration du calcium 48 : non seulement le calcium 48 a une demi-vie encore plus longue que l'europium 151, mais son produit de désintégration a une demi-vie de moins de 2 jours.

On sait que ces nucléides doivent être présents dans la nature puisque leur isotope parent, dont on connaît le mode de désintégration, s'y trouve, mais on ne les y a jamais détectés.

Nucléides cosmogéniques

Les nucléides cosmogéniques sont issus de l'interaction des rayons cosmiques avec les nucléides terrestres. Ils sont tous présents à l'état de faibles traces, mais peuvent avoir une importance non négligeable, comme en témoigne l'utilisation du carbone 14 (présent dans l'environnement à hauteur d'à peine un ou deux atomes de 14C pour 1012 atomes de 12C) dans la datation des restes d'origine biologique.

Nucléides artificiels

Les nucléides artificiels sont essentiellement produits en laboratoire ou issus de l'industrie du nucléaire. La plupart ont des périodes radioactives très courtes, mais les rares nucléides artificiels à demi-vie longue produits en quantité par l'industrie nucléaire sont susceptibles de contaminer l'environnement[6]. Il y a 13 isotopes dans cette catégorie, que l'on peut diviser en deux groupes :

  • Demi-vie longue (supérieure à un siècle), par ordre d'abondance décroissante : 135Cs, 93Zr, 99Tc, 129I, 107Pd, 126Sn, 79Se
  • Demi-vie moyenne (entre 10 et 100 ans), par ordre d'abondance décroissante : 137Cs, 90Sr, 85Kr, 151Sm, 121mSn, 113mCd. Le premier, le césium 137, est de loin le plus important marqueur des contaminations environnementales accidentelles comme celles de Tchernobyl ou Fukushima[7].

Outre les rejets issus de l'industrie du nucléaire, la plus importante source de contamination vient des essais nucléaires réalisés dans l'atmosphère entre 1945 et 1980. C'est notamment la source presque exclusive des radioisotopes transuraniens dans l'environnement : isotopes du plutonium et américium 241. C'est également la cause du pic de chlore 36 dans les années 1950 utilisé dans le suivi des eaux souterraines. Il y a également quelques rejets de radioisotopes à vie courte utilisés dans le domaine médical, notamment l'iode 131, mais ces contaminations de l'environnement ne sont, par nature, pas persistantes.

Certains nucléides sont généralement considérés comme artificiels, car issus de réactions de fission typiques des réacteurs nucléaires, néanmoins on peut en trouver quelques traces naturellement présentes sur le site du réacteur nucléaire naturel d'Oklo (c'est notamment le cas des seuls isotopes naturels des éléments technétium et prométhium).

Notes et références

Notes

Références

  1. W. Henning, W. A. Bell, P. J. Billquist et B. G. Glagola, « Calcium-41 concentration in terrestrial materials: prospects for dating of pleistocene samples », Science (New York, N.Y.), vol. 236, , p. 725–727 (ISSN 0036-8075, PMID 17748311, DOI 10.1126/science.236.4802.725, lire en ligne, consulté le )
  2. Joerg M. Schaefer, Thomas Faestermann, Gregory F. Herzog et Klaus Knie, « Terrestrial manganese-53 — A new monitor of Earth surface processes », Earth and Planetary Science Letters, vol. 251, nos 3–4, , p. 334–345 (DOI 10.1016/j.epsl.2006.09.016, lire en ligne, consulté le )
  3. (en) Eric Scerri, « Tales of technetium », Nature Chemistry, vol. 1, no 4, , p. 332–332 (ISSN 1755-4330, DOI 10.1038/nchem.271, lire en ligne, consulté le )
  4. Moses Attrep et P.K. Kuroda, « Promethium in pitchblende », Journal of Inorganic and Nuclear Chemistry, vol. 30, no 3, , p. 699–703 (ISSN 0022-1902, DOI 10.1016/0022-1902(68)80427-0, lire en ligne, consulté le )
  5. « Américium 241 et environnement - fiche de l'IRSN », sur irsn.fr,
  6. « Les sources de radioactivité artificielle », sur www.irsn.fr (consulté le )
  7. « Constat Radiologique 'Rémanence de la radioactivité d’origine artificielle' », sur www.irsn.fr (consulté le )
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