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La PaĂŻva

Esther Lachmann, née Esther Pauline Blanche Lachmann et généralement connue sous le nom « la Païva », comtesse Henckel von Donnersmarck (à compter du ), née le à Moscou et morte le au château de Neudeck en Silésie, est une célèbre courtisane et demi-mondaine du XIXe siècle.

La PaĂŻva
Esther Lachmann en 1850.
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Esther Pauline Blanche Lachmann
Nationalité
Activités
Père
Martin Lachmann (d)
Mère
Anna Amalie Klein (d)
Conjoint
Guido Henckel von Donnersmarck (de Ă  )
Autres informations
Propriétaire de

Biographie

Origines, enfance et premiers mariages

Esther Pauline Blanche Lachmann est née de parents juifs polonais de la région ouest de l'Empire russe, appelée Zone de Résidence des Juifs[1]. Son père, Martin Lachmann est tisserand ; il a épousé Anna Amalia Klein vers 1815.

Le [2], on la marie à Antoine François Hyacinthe Villoing, tailleur français né vers 1810 et installé en Russie. Un fils, Antoine Villoing, naît en 1837. Mais dès l’année suivante, rebutée par une vie qu’elle trouve ennuyeuse, elle s’enfuit avec un inconnu, dans une longue traversée d'Europe qui la conduit jusqu’à Paris.

Vie mondaine Ă  Paris et Ă  Londres

Henri Herz en 1849.

Installée près de l’église Notre-Dame-de-Lorette (quartier des lorettes), elle s’introduit dans le milieu de la prostitution où, sur le conseil d’une de ses collègues, elle adopte le pseudonyme de Thérèse.

Vers 1840, elle rencontre le riche pianiste Henri Herz, qui tombe Ă©perdument amoureux d’elle et qui lui fait connaĂ®tre plusieurs autres artistes : les compositeurs Franz Liszt et Richard Wagner, les Ă©crivains ThĂ©ophile Gautier et Émile de Girardin. On suppose qu’un mariage – illĂ©gitime puisque l’épouse Ă©tait dĂ©jĂ  mariĂ©e en Russie Ă  Antoine Villoing â€“ eut lieu Ă  Londres. De cette union, naĂ®t, vers 1847, une fille prĂ©nommĂ©e Henriette, aussitĂ´t confiĂ©e aux parents de Herz[3]. L’enfant mourra prĂ©maturĂ©ment en 1859, Ă  l'âge de 12 ans.

Dès cette époque, Thérèse s’affirme comme l’une des femmes les plus élégantes de Paris.

En 1848, Herz part donner des concerts aux États-Unis. Restée en France, elle dilapide la fortune de son compagnon : la famille de ce dernier la chasse. Elle va tenter de refaire sa vie à Londres. Au Covent Garden, elle rencontre Lord Édouard Stanley, qui s’éprend d'elle et la comble de présents.

La Paiva, en 1860, portrait par Marie-Alexandre Alophe.

D’autres riches amants succèdent à Stanley. Fin 1848, elle regagne Paris où elle entretient une liaison avec le duc de Gramont. Son premier mari, Villoing, quitte la Russie pour la reconquérir mais elle le repousse. Désespéré, il meurt à Paris en 1849.

Le , la veuve (Villoing) séparée (de Herz) épouse un riche Portugais, le « marquis » Albino Francisco de Araújo de Païva, qui lui offre un hôtel au 28, place Saint-Georges, construit en 1840 par l’architecte Édouard Renaud, où elle réside jusqu’en 1852.

  • HĂ´tel particulier place saint-Georges Ă  Paris
  • Toile reprĂ©sentant Une soirĂ©e chez la PaĂŻva, peinte par Adolphe Joseph Thomas Monticelli.
    Toile représentant Une soirée chez la Païva, peinte par Adolphe Joseph Thomas Monticelli.
  • Premier hĂ´tel de la PaĂŻva (hĂ´tel de Bernis) au 28 place Saint-Georges en 2009.
    Premier hĂ´tel de la PaĂŻva (hĂ´tel de Bernis) au 28 place Saint-Georges en 2009.
  • DĂ©tail de la façade : statues de l'Abondance et de la TempĂ©rance.
    Détail de la façade : statues de l'Abondance et de la Tempérance.

Le lendemain du mariage, elle dĂ©clare Ă  son mari que chacun ayant obtenu ce qu’il voulait, il convient d’en rester lĂ . Le couple se sĂ©pare et le « marquis Â» de PaĂŻva retourne au Portugal, mais elle continue de porter le titre prĂ©sumĂ© de son Ă©poux en tant que « marquise de PaĂŻva, qui sonne bien ». PaĂŻva est le nom d'un château du Portugal sur le Douro, n’ayant jamais appartenu Ă  AraĂşjo, fils d’un roturier, Albino Gonçalves de AraĂşjo, marchand colonial portugais, et son Ă©pouse, Mariana VicĂŞncia de Paiva. Il est possible que le titre trompeur d’AraĂşjo de PaĂŻva provienne d’une supposition populaire affirmant qu’il se serait liĂ© au vicomte de Paiva, ambassadeur du Portugal Ă  Paris dans les annĂ©es 1850, vĂ©ritable dĂ©tenteur du titre de noblesse liĂ© au château homonyme.

La Païva dans les années 1860.
Guido Henckel von Donnersmarck (1830-1916), en 1871.

En 1852, Thérèse devient la maîtresse d’un richissime prussien, un cousin du chancelier allemand Otto von Bismarck, le comte Guido de Donnersmarck, originaire de Silésie. Entre 1856 et 1865, il lui fait construire, au 25, avenue des Champs-Élysées, le somptueux hôtel de la Païva[4]. Son coût exorbitant (dix millions de francs-or) défraie la chronique. L’architecte Pierre Manguin choisit le style, alors en vogue, de la Renaissance italienne. Le bâtiment abrite aujourd’hui le Travellers Club. On y admire encore un grand escalier en onyx jaune d’Algérie, une salle de bains de style mauresque, de somptueuses cheminées par Barbedienne, des sculptures de Jules Dalou ou d’Albert-Ernest Carrier-Belleuse et des peintures de Paul Baudry[5].



  • HĂ´tel particulier avenue des Champs-ElysĂ©es Ă  Paris
  • HĂ´tel de la PaĂŻva au 25 avenue des Champs-ÉlysĂ©es en 2009.
    Hôtel de la Païva au 25 avenue des Champs-Élysées en 2009.
  • HĂ´tel de la PaĂŻva : Le Jour pourchassant la Nuit par P. Baudry (la Nuit est figurĂ©e par la PaĂŻva), plafond du grand salon.
    Hôtel de la Païva : Le Jour pourchassant la Nuit par P. Baudry (la Nuit est figurée par la Païva), plafond du grand salon.
  • Peintures murales allĂ©goriques dans l'escalier en onyx du vestibule d'entrĂ©e.
    Peintures murales allégoriques dans l'escalier en onyx du vestibule d'entrée.
  • HĂ´tel de la PaĂŻva, dĂ©tail du grand salon.
    Hôtel de la Païva, détail du grand salon.
La Païva, années 1870.

En 1857, Donnersmarck lui offre aussi le château de Pontchartrain, où elle séjourne en villégiature[6].

Son fils Antoine Villoing meurt à 25 ans en 1862 alors qu’il était étudiant en médecine. Elle a pourvu à son éducation mais ne l’a jamais revu.

Son mariage avec le marquis de Païva est annulé le . Ce dernier revient en France mais, ruiné, il se suicide le [7].

Le , dans une église luthérienne de Paris, elle épouse son amant Donnersmarck, bientôt nommé gouverneur de la Lorraine annexée. Elle est utile à son nouveau mari : sa connaissance des milieux parisiens fortunés facilite le remboursement anticipé, par la France, de l’indemnité de guerre de cinq milliards de francs-or exigée par Bismarck après la guerre de 1870[8].

Exil en Allemagne

Après la guerre franco-allemande de 1870, elle se mêle de politique. Cherchant à s’entremettre dans les négociations avec la Prusse, elle reçoit Léon Gambetta à Pontchartrain[9]. Mais le gouvernement français la soupçonne d’espionnage et, en 1877, elle doit quitter la France. Elle se retire en Silésie avec son époux, dans le château de Neudeck (aujourd’hui à Świerklaniec en Pologne).

Elle y meurt le , âgée de soixante-cinq ans[10].

Bijoux

  • Aux termes d'une transaction secrète, elle possĂ©dait un collier de 600 000 francs ayant fait partie de la collection de l'impĂ©ratrice EugĂ©nie[11].
  • Le , Sotheby's vend Ă  Genève, pour 3,5 et 5 millions de francs suisses (soit 2 et 3 millions d'euros), deux diamants jaunes dits Donnersmark lui ayant appartenu : l'un en forme de poire (pear shaped), pesant 82,48 carats ; l'autre en forme de coussin (cushion shaped), de 102,54 carats[12] - [13].

Citations Ă  son propos

  • Son hĂ´tel Ă©tait surnommĂ© Chez la PaĂŻva, qui paye y va (PaĂŻva)[14].
  • Sur son hĂ´tel Ă  peine achevĂ©, Alexandre Dumas fils aurait dit : « C'est presque fini, il ne manque que le trottoir »[15].
  • De mĂŞme, les Frères Goncourt ont indiquĂ© dans leur Journal, en date du vendredi , Ă  la suite de leur venue Ă  l'hĂ´tel de la PaĂŻva[16], que c'Ă©tait « le Louvre du cul »[17].

Documentaire

Esther Lachmann fait partie des figures féminines traitées dans le cadre de l'émission Secrets d'histoire, intitulée Les reines de Paris[18].

Un épisode de Sous les jupons de l'Histoire lui est consacré sur Chérie 25 le 12 mai 2023.

Notes et références

  1. Ă€ l'Ă©poque, la majeure partie de la Pologne fait partie de l'Empire russe et de la « Zone de RĂ©sidence Â» des Juifs.
  2. Parisis (Émile Blavet) : La vie parisienne ; la ville et le théâtre ; prĂ©face de François CoppĂ©e, Paris, L. Boulanger, 1885, p. 46-47.
  3. Historia, janvier 1984, n°446, p. 76.
  4. Odile Nouvel-Kammerer (dir.), L'Extraordinaire HĂ´tel de la PaĂŻva, Paris, Les Arts DĂ©coratifs, , 192 p. (ISBN 978-2-916914-57-2)
  5. Les heureux maitres de la Païva, sur le site lepoint.fr, consulté le 9 octobre 2014.
  6. Viel-Castel, Horace de : Mémoires sur le règne de Napoléon III (1851-1864). [4] ; préface par L. Léouzon Le Duc, éditeur : chez tous les libraires (Paris), édition : 1883-1884, p. 68.
  7. Historia, janvier 1984, n° 446, page 76.
  8. Alfred Colling, La Prodigieuse Histoire de la Bourse, Paris, Société d'éditions économiques et financières, , p. 286.
  9. Revue catholique des institutions et du droit Éditeur : [s.n.?], Paris, publication en série imprimée (Français), 1872, p. 266.
  10. une légende prétend que son mari, tout d'abord inconsolable, fit embaumer son corps dans un cercueil de verre, conservé dans les combles du château de Neudeck. Mais sa seconde épouse exigea que la dépouille fût inhumée.
  11. Gabrielle Houbre, Courtisanes sous surveillance in Dans les secrets de la police.
  12. L’ascension d’une courtisane au XIXe siècle : la marquise de la Païva, sur le site evous.fr, consulté le 9 octobre 2014.
  13. (en)The Donnersmarck Diamonds, sur le site royal-magazin.de, consulté le 25 janvier 2015.
  14. "Chez La Païva, qui paye y va...", sur le site moniquetdany.typepad.fr, consulté le 9 octobre 2014.
  15. Émission La Marche de l'Histoire, 3 janvier 2013, Radio France.
  16. Les Frères Goncourt, « Journal des Frères Goncourt extrait », sur freres-goncourt.fr, (consulté le ).
  17. « La Païva, coûteuse mais endurante », sur leparisien.fr, (consulté le ).
  18. Éric Mandel, « Païva, Liane de Pougy... La revanche des belles de nuit », Le Journal du Dimanche,‎ (lire en ligne)

Bibliographie

Notices

Liens externes

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