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Joost Van Vollenhoven

Le capitaine Joost Van Vollenhoven, né le à Rotterdam et mort au champ d’honneur le à Montgobert, est un officier et un administrateur colonial français, d’origine néerlandaise.

Joost van Vollenhoven
Joost Van Vollenhoven dans sa jeunesse.
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  40 ans)
Parcy-et-Tigny
Nationalité
française (à partir du )
Domicile
Formation
École coloniale (d)
École de droit (en)
Activités
Père
Jacobus Johannes van Vollenhoven (d)
Mère
Helen Annette Pluygers (d)
Autres informations
Conflit
Distinction

Gouverneur général d’Indochine et de l’Afrique-Occidentale française (AOF), il s'est distingué notamment par son refus de procéder au nouveau recrutement de troupes indigènes demandé par Clemenceau en 1917.

Biographie

Second fils d'une famille bourgeoise protestante[1], il passe ses premières annĂ©es en AlgĂ©rie oĂą ses parents se sont installĂ©s comme colons. Il fait ses Ă©tudes au lycĂ©e et Ă  la facultĂ© de droit d'Alger[2]. Il rĂ©alise en 1903 une thèse doctorale en droit, intitulĂ©e Essai sur le fellah algĂ©rien[3]. Van Vollenhoven est naturalisĂ© Français le , Ă  22 ans, et, après un an de service militaire au 1er rĂ©giment de zouaves en 1900 et 1901, il intègre l'École coloniale dont il sort major de sa promotion[4] en 1903, et oĂą il est Ă  son tour nommĂ© professeur[5], le .

Il occupe plusieurs postes dans l'administration, notamment celui de secrétaire général au ministère des Colonies, puis directeur des Finances en 1905. Il fait fonction de gouverneur en Guinée du 16 mai au , puis au Sénégal du 26 août au . Il est aussi secrétaire général de la jeune Afrique-Équatoriale française (AEF), créée en 1910. Il devient chef de cabinet (directeur de cabinet aujourd'hui) d'Adolphe Messimy puis Albert Lebrun dans les années 1910-1912, avant de partir comme gouverneur général de l'Indochine. En 1912, il reçoit la Légion d'honneur à titre civil[6]. Elle lui sera également décernée à titre militaire par la suite.

À Hanoï, il est gouverneur général d’Indochine par intérim de janvier 1914 au , avant qu’Ernest Roume n'y prenne ses fonctions. Avec le simple grade de sergent d’infanterie coloniale, Van Vollenhoven rejoint pourtant le front en aux côtés des marsouins français installés dans les colonies que la France mobilisait pour refouler les troupes allemandes, dans le régiment d'infanterie coloniale du Maroc (RICM, voir la composition du régiment dans le lien consacré à celui-ci), rebaptisé par la suite régiment d'infanterie-chars de marine. Blessé et cité plusieurs fois, il est promu sous-lieutenant le et, après un « brillant coup de main »[7] devant Fismes, il apprend sa nomination comme gouverneur général de l’Afrique-Occidentale française (AOF).

Plutôt à regret, Van Vollenhoven prend ses fonctions à Dakar le . À travers un rapport de mission de l'inspecteur général Picanon, il découvre les ravages faits par les recrutements pour le front dans une population déjà très éprouvée par les épidémies et la misère, entraînant exodes et révoltes[8]. En juillet 1917 il émet un avis défavorable au principe d'un nouveau recrutement demandé par le ministre des Colonies, André Maginot :

« Les opérations de recrutement qui ont eu lieu de 1914 à 1917 en AOF ont été excessives dans leurs résultats comme dans leurs méthodes... Aucun nouveau recrutement n'est possible tant que la Colonie ne sera pas complètement en mains et que la population n'aura pas repris une suffisante confiance en nous pour ne plus redouter les abus du récent passé[9]. »

Le , auprès de René Besnard, successeur de Maginot à la tête du ministère des Colonies, il insiste avec plus de ferveur encore :

« Je vous supplie, Monsieur le Ministre, de ne pas donner l'ordre de procéder à de nouveaux recrutements de troupes noires. Vous mettriez ce pays à feu et à sang. Vous le ruineriez complètement et ce, sans aucun résultat. Nous sommes allés non seulement au-delà de ce qui était sage, mais au-delà de ce qu'il était possible de demander à ce pays[10]. »

Outre la dimension humaine, il semble que des enjeux économiques – notamment les intérêts dans la région des maisons de commerce bordelaises et marseillaises, privées de main d'œuvre – aient également pesé sur la prise de position du nouveau gouverneur.

Président du Conseil depuis peu, Clemenceau décide pourtant le de reprendre le recrutement indigène, particulièrement au Sénégal[11]. Il pense à faire appel au premier député noir africain, élu au Parlement en 1914, Blaise Diagne, qui est chargé de cette mission. De son côté Van Vollenhoven a consulté ses gouverneurs de territoires qui lui confirment qu’une nouvelle conscription ne pourrait se faire que par la force. Il a aussi pris l'avis de personnalités telles que Jules Carde – futur gouverneur général de l'AOF – ou l'ethnologue Maurice Delafosse. Lorsqu'il est informé de l'envoi de la mission Diagne en AOF et en AEF, Van Vollenhoven a une entrevue orageuse avec Clemenceau à Paris. Mécontent de cette décision qu'il juge en outre inconciliable avec ses prérogatives de gouverneur général, il offre sa démission le et obtient de revenir sur le front, toujours avec le RICM, cette fois avec le grade de capitaine. Gabriel Angoulvant assure alors l'intérim comme gouverneur général de l'AOF. En Conseil des ministres, Albert Lebrun prend sa défense face à Georges Clemenceau [12].

Le capitaine Van Vollenhoven (Ă  gauche) avec d'autres officiers du RICM en 1918.

Van Vollenhoven est grièvement blessé d'une balle de mitrailleuse à la tête le devant la ferme de Mont-Rambœuf, sur la commune de Parcy-et-Tigny, alors qu'il mène sa compagnie lors de l'offensive de la 10e armée du général Mangin. Ramené à l'arrière, il meurt à Montgobert le lendemain matin, 20 juillet.

La famille Van Vollenhoven paye ainsi un lourd tribut à sa patrie d'adoption. Le fils aîné est tué au front de France. Blessé et gazé à l'armée d'Orient, un autre succombe peu après. Le plus jeune des quatre frères, engagé volontaire, est le seul survivant du conflit[7].

Hommages

Buste de Joost Van Vollenhoven au ministère des Outre-mer.

C'est dans la forêt de Longpont, à Montgobert, qu'est implanté le mémorial sous lequel est enterré le capitaine Joost Van Vollenhoven. Sur le mausolée, œuvre de la sculptrice Anna Quinquaud, figure la citation à l'ordre du RICM et sa propre citation à l'ordre du régiment, décernée le par le général Mangin en ces termes :

« Officier d'une valeur et d'une vertu antiques, incarnant les plus belles et les plus solides qualités militaires, mortellement frappé au moment où, électrisant la troupe par son exemple, il enlevait une position ennemie opiniâtrement défendue. À placer au rang des Bayard et des La Tour d'Auvergne, et à citer en exemple aux générations futures, ayant été l'un des plus brillants parmi les plus braves[13]. »

Le Albert Lebrun, président de la République, et Georges Mandel, ministre des Colonies, inaugurent ce monument, très dégradé par les Allemands en 1941, puis restauré en 1954[14].

Sur la place de la Gare à Dakar, le monument dédié en 1923 « aux créateurs de l'AOF et à la gloire de l'armée noire » comporte – outre les statues de Demba et Dupont, le tirailleur et le marsouin – les médaillons de Faidherbe et de quatre prestigieux gouverneurs, Ballay, Ponty, Clozel et Van Vollenhoven lui-même[15]. « Maigre, cheveux ras, on dirait un jeune homme. Et jeune, il l'était en effet ! Gouverneur général à trente-huit ans. Mort à quarante ans pour la France »[16].

Le nom de Joost Van Vollenhoven figure dans la liste des 546 écrivains morts pour la France pendant la Première Guerre mondiale – des noms qui furent gravés sur quatre panneaux au Panthéon de Paris le .

Dans le 12e arrondissement de Paris se trouve un square Van-Vollenhoven, doté d'une fontaine en provenance de l’Exposition coloniale de 1931.

Le Cours secondaire de Dakar a pris son nom en 1940, avant d’être rebaptisé lycée Lamine Guèye.

Une avenue porte son nom Ă  Cotonou, une autre Ă  Bamako.

Depuis 1963, la salle d’honneur du RICM (Vannes puis Poitiers) est baptisée de son nom.

La promotion 90/12 des élèves officiers de réserve de l'ESM Saint-Cyr-Coëtquidan porte son nom.

Les commémorations de la fin de la Première Guerre mondiale sont notamment l’occasion d’hommages au capitaine Van Vollenhoven, comme ce fut le cas en 1938 (voir ci-dessus) ou en 1988, sous l'égide de Pierre Messmer[17]. Une cérémonie au monument de Montgobert fait partie des manifestations envisagées pour le 90e anniversaire de 1918 en mai 2008[18].

Deux timbres à son effigie ont été émis en 1944 en Indochine dans la série "Grandes figures de l'Indochine"[19].

Écrits

  • (fr) Essai sur le fellah algĂ©rien : thèse pour le doctorat, A. Rousseau, Paris, 1903, 31 p.
  • (fr) Le voyage de Nachtigal au OuadaĂŻ (traduction de Van Vollenhoven), ComitĂ© de l'Afrique Française, Paris, s. d., 109 p.
  • (nl) Multatuli en congĂ©. Documents officiels inĂ©dits publiĂ©s par Joost Van Vollenhoven, Amsterdam, Maas & Van Suchtelen, 1909, 89 p.

Notes et références

  1. « Commémoration du 70e anniversaire de la mort de Joost Van Vollenhoven », Mondes et cultures, 1988, t. 48, no 3, p. 476-504 (avec 5 contributions : Pierre Messmer, G. Mangin, L. Sanmarco, J. Dequecker, et R. Cornevin)
  2. Robert Louis Delavignette et Charles André Julien, Les constructeurs de la France d'outre-mer, Corréa, 1946, p. 421
  3. Thèse doctorale en droit, notice du Sudoc.
  4. Association des écrivains combattants, Anthologie des écrivains morts à la guerre, 1914-1918, E. Malfère, 1926, p. 327
  5. Albert Prévaudeau, Joost Van Vollenhoven, 1877-1918, Larose, 1953, p. 25
  6. Base LĂ©onore.
  7. R. Vanlande, Dakar !, Peyronnet, Paris, 1940, p. 186
  8. Christian Roche, « L'opposition du gouverneur Van Vollenhoven au nouveau recrutement », Histoire de la Casamance. Conquête et résistance : 1850-1920, Karthala, Paris, p. 330-332
  9. Rapport de Van Vollenhoven à Maginot, cité par C. Roche, « L'opposition du gouverneur Van Vollenhoven au nouveau recrutement », loc. cit., p. 331
  10. Lettre de Van Vollenhoven à René Besnard, citée par C. Roche, « L'opposition du gouverneur Van Vollenhoven au nouveau recrutement », loc. cit., p. 331
  11. Marc Michel, Les Africains et la Grande Guerre : l'appel Ă  l'Afrique (1914-1918), Karthala, Paris, 2003, p. 67
  12. Éric Freysselinard, Albert Lebrun, le dernier président de la IIIe République, Belin, 2013, p. 254>
  13. R. Vanlande, Dakar !, op. cit., p. 188
  14. Rapport de la Commission Becker pour la commémoration du 90e anniversaire de 1918, 19 décembre 2007, p. 10
  15. R. Vanlande, Dakar !, op. cit., p. 189
  16. R. Vanlande, Dakar !, op. cit., p. 185
  17. « Commémoration du 70e anniversaire de la mort de Joost Van Vollenhoven », loc. cit.
  18. Rapport de la Commission Becker pour la commémoration du 90e anniversaire de 1918, 19 décembre 2007, p. 5
  19. Catalogue Yvert & Tellier, Timbres des colonies françaises, Tome 2-1

Voir aussi

Bibliographie

  • ComitĂ© d'initiative des amis de Vollenhoven, Une âme de chef. Le Gouverneur gĂ©nĂ©ral J. Van Vollenhoven, Paris, 1920, 285 p.
  • « CommĂ©moration du 70e anniversaire de la mort de Joost Van Vollenhoven », Mondes et cultures, 1988, t. 48, no 3, p. 476-504 (avec 5 contributions : Pierre Messmer, G. Mangin, L. Sanmarco, J. Dequecker, et R. Cornevin)
  • Y. Cazaux, « Joost Van Vollenhoven », dans Septentrion, 1980, 9, 3, p. 84-87
  • Pol Victor Mangeot, La vie lucide et passionnĂ©e de Joost Van Vollenhoven grand administrateur colonial, soldat hĂ©roĂŻque, Impr. Montsouris, 1940
  • Pol Mangeot, La vie ardente de Van Vollenhoven, gouverneur gĂ©nĂ©ral de l’AOF. Un grand colonial et un grand Français, Paris, Fernand Sorlot, 1943, 141 p.
  • Albert PrĂ©vaudeau, Joost Van Vollenhoven, 1877-1918, Larose, 1953, 61 p.
  • (en) Alice L. Conklin: 'Democracy' rediscovered. Civilization through association in French West Africa (1914-1930). Cahiers d'Ă©tudes africaines, (1997), vol. 37, cah. 145, p. 59-84
  • (nl) Silvia Wilhelmina de Groot, Joost Van Vollenhoven : 1877-1918 : portret van een Frans koloniaal ambtenaar, Amsterdam, Historisch Seminarium van de Universiteit van Amsterdam, 1991

Articles connexes

Liens externes

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