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Interplanetary Transport System

L'Interplanetary Transport System ou ITS (en français, SystÚme de transport interplanétaire, auparavant Mars Colonial Transporter) est un projet du constructeur aérospatial américain SpaceX dont l'objectif est de développer un lanceur lourd et un vaisseau spatial réutilisables permettant de déposer sur Mars un équipage d'une centaine de personnes. Selon les plans dévoilés en , le premier vol vers la planÚte Mars interviendrait en 2023. Le projet, qui serait développé grùce aux bénéfices dégagés par SpaceX et la fortune personnelle de son fondateur Elon Musk, prévoit à terme l'implantation d'une colonie permanente sur Mars. En 2017, le BFR a pris la suite de l'ITS.

Interplanetary Transport System
Le lanceur sur son pas de tir (vue d'artiste)
Le lanceur sur son pas de tir (vue d'artiste)
Données générales
Pays d’origine États-Unis
Constructeur SpaceX
Premier vol 2024
Statut Projet
Hauteur 122 m
DiamĂštre 12 m
Masse au dĂ©collage 10 500 tonnes
Étage(s) 2
PoussĂ©e au dĂ©collage 128 MN
Famille de lanceurs Lanceur super lourd
Charge utile
Orbite basse 550 tonnes
Motorisation
Ergols OxygÚne liquide / méthane
1er Ă©tage 42 x Raptor
2e Ă©tage 9 x Raptor

Contexte

Mars, prochaine étape du programme spatial habité ?

Depuis que l'homme s'est posĂ© sur la Lune en 1969 dans le cadre du programme Apollo, la planĂšte Mars constitue pour certains la prochaine Ă©tape du programme spatial habitĂ©. Bien qu'elle soit plus Ă©loignĂ©e du Soleil que la Terre (ensoleillement deux fois plus faible) et beaucoup plus petite que celle-ci (moitiĂ© du diamĂštre), Mars est la planĂšte dont les caractĂ©ristiques sont les plus proches de celles de la Terre. Mars est aujourd'hui une planĂšte froide, sĂšche et presque dĂ©pourvue d'atmosphĂšre, mais dans un lointain passĂ© elle a Ă©tĂ© chaude et l'eau a coulĂ© Ă  sa surface. Plus Ă©loignĂ©e de la Terre que VĂ©nus, elle se situe nĂ©anmoins Ă  une distance qui permet Ă  un vaisseau spatial de l'atteindre en 6 Ă  9 mois en suivant une trajectoire Ă©conomisant la consommation d'ergols. L'eau ne coule plus Ă  la surface, mais elle est abondante dans les calottes polaires et dans les zones ombragĂ©es des cratĂšres situĂ©s Ă  des latitudes mĂȘme trĂšs basses. Les principaux Ă©lĂ©ments chimiques nĂ©cessaires Ă  l'Ă©tablissement d'une colonie (oxygĂšne, azote, hydrogĂšne, carbone) sont prĂ©sents soit dans l'atmosphĂšre soit dans le sol de la planĂšte.

Mais un projet de mission vers Mars demande des moyens financiers bien supĂ©rieurs Ă  ceux du programme Apollo qui avait Ă©tĂ© lancĂ© grĂące Ă  un concours de circonstances particuliĂšrement favorables (Guerre froide, embellie Ă©conomique). Un vol habitĂ© vers Mars reprĂ©sente un dĂ©fi technique et humain sans commune mesure avec une expĂ©dition lunaire : taille des vaisseaux, systĂšme de support de vie fonctionnant en circuit fermĂ© sur de longues durĂ©es (plusieurs centaines de jours), fiabilitĂ© des Ă©quipements qui ne peuvent ĂȘtre rĂ©parĂ©s ou dont la redondance ne peut ĂȘtre systĂ©matiquement assurĂ©e, problĂšmes psychologiques d'un Ă©quipage confinĂ© dans un espace restreint dans un contexte particuliĂšrement stressant, problĂšmes physiologiques dĂ©coulant de l'absence de gravitĂ© sur des pĂ©riodes prolongĂ©es ainsi que l'effet des rayonnements sur l'organisme.

Depuis le dĂ©but des annĂ©es 1960, diffĂ©rentes Ă©tudes sur le sujet ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es et ont explorĂ© les scĂ©narios et les solutions techniques. Plusieurs points sont particuliĂšrement dĂ©battus : trajectoire en opposition ou en conjonction, recours Ă  la propulsion nuclĂ©aire, taille de l'Ă©quipage, utilisation de l'aĂ©rocapture pour se freiner Ă  l'arrivĂ©e sur Mars, mĂ©thode d'atterrissage sur Mars, production du carburant du voyage de retour in situ, nombre et tonnage des engins spatiaux Ă  lancer. Les avant-projets les plus aboutis Ă©manent de la NASA, forte de son rĂŽle de pionnier et agence spatiale civile la mieux dotĂ©e, qui affine une solution lourde (Mars Design Reference Architecture) nĂ©cessitant de placer entre 850 et 1 250 tonnes en orbite terrestre basse via une dizaine de lancements, mais Ă©galement de groupes de passionnĂ©s regroupĂ©s dans des associations comme la Mars Society qui prĂ©conisent une solution moins coĂ»teuse – Mars Direct – ne nĂ©cessitant que deux lancements. Tous ces scĂ©narios reposent sur le dĂ©veloppement de technologies clĂ©s telles que l'aĂ©rocapture, la dĂ©pose de masses Ă©levĂ©es sur le sol martien et l'extraction des ressources Ă  partir de l'atmosphĂšre ou du sol martiens.

Le succĂšs des missions robotisĂ©es sur Mars, le manque de maturitĂ© des technologies nĂ©cessaires mais surtout le coĂ»t particuliĂšrement important d'un tel projet (plusieurs centaines de milliards US$ pour la NASA) a jusqu'Ă  prĂ©sent empĂȘchĂ© toute concrĂ©tisation du projet martien. La contrainte budgĂ©taire est bien illustrĂ©e par le fait que la mission de retour d'Ă©chantillons martiens (sans Ă©quipage) bien que mettant en jeu des moyens financiers bien plus modestes et par contre prĂ©sentant un intĂ©rĂȘt scientifique de premier plan, n'a pas rĂ©ussi jusqu'Ă  prĂ©sent Ă  trouver de financement. L'abandon du programme Constellation Ă  destination de la Lune mais avec des objectifs martiens Ă  moyen terme a sonnĂ© le glas des projets d'envoi de l'homme sur Mars qui n'est plus Ă©voquĂ© que comme une perspective lointaine par les agences spatiales.

Le projet martien de Elon Musk

Elon Musk est le fondateur de la société aérospatiale SpaceX (2002) qui s'est illustrée ces derniers années par une utilisation particuliÚrement efficace des fonds alloués par l'agence spatiale américaine, la NASA, pour le développement du lanceur Falcon 9 et du vaisseau destiné à ravitailler la Station spatiale internationale. Le nouveau lanceur produit à des prix particuliÚrement concurrentiels a bouleversé le marché des lancements de satellites. SpaceX a par ailleurs mis au point une technique de récupération du premier étage qui fonctionne sans qu'on sache en 2016 si elle pourra déboucher sur un véritable abaissement des coûts. Elon Musk est également le directeur en exercice et l'actionnaire de la société de construction de véhicules automobiles électriques Tesla Motors, rapidement devenue un leader dans son domaine. Sa fortune était évaluée en 2016 à environ 13 milliards US$.

Depuis ses débuts dans le domaine spatial en 2002, Elon Musk s'est donné comme objectif d'amener l'homme sur Mars en développant progressivement l'ensemble des technologies et des moyens nécessaires à ce programme. Une des motivations citées est de permettre à l'humanité de survivre à une catastrophe planétaire qui balaierait toute civilisation de la surface de la Terre (astéroïde de grande taille
) grùce à l'installation de colonies permanentes sur d'autres planÚtes telles que Mars. Un autre objectif est de donner les moyens à l'homme de poursuivre son exploration de l'univers.

Historique du projet

DĂ©collage.
Retour du premier Ă©tage sur Terre.
Ravitaillement en ergols du transporteur par le ravitailleur.

SpaceX a commencĂ© le dĂ©veloppement du moteur de fusĂ©e Raptor destinĂ© au Transporter Colonial Martien avant 2014. Le PDG de SpaceX, Elon Musk a dĂ©voilĂ© les dĂ©tails de l'architecture de la mission spatiale au CongrĂšs international d'astronautique qui a eu lieu du 26 au [1]. Musk a dĂ©clarĂ© en , qu’un premier vol sans pilote du MCT Ă  destination de Mars est prĂ©vu dĂšs 2022, et le premier MCT habitĂ© partira en 2024[2].

En 2007, Elon Musk a fait part de son objectif de rendre l'exploration et la colonisation de Mars possible[3] - [4]. Il a déclaré dans une interview en 2011 qu'il espérait envoyer des humains à la surface de Mars dans les 10 - 20 prochaines années[4]. Fin 2012, Musk a déclaré envisager une colonisation de Mars par des dizaines de milliers de colons arrivant à partir du milieu des années 2020[5] - [6] - [7].

En , Musk a dĂ©clarĂ© son intention de construire un deuxiĂšme systĂšme de fusĂ©e rĂ©utilisable aux capacitĂ©s bien supĂ©rieures aux Falcon 9 et Falcon Heavy[8] Ce nouveau vĂ©hicule sera « une Ă©volution du Falcon 9 de SpaceX [...] en beaucoup plus grand ». Mais Musk a indiquĂ© que SpaceX ne ferait pas de dĂ©claration publique Ă  ce sujet jusqu'en 2013[9] - [5]. En , Musk a dĂ©clarĂ© qu'il avait l'intention de retarder l’introduction en bourse de SpaceX jusqu'Ă  ce que le « Transporter Colonial Martien vole rĂ©guliĂšrement »[10] - [11].

En , Musk a dĂ©clarĂ© que le Transporteur Colonial Martien serait « 100 fois plus grand qu'un SUV » et capable d’emmener 100 personnes Ă  la fois vers Mars. Le chef du dĂ©veloppement du moteur Raptor, Tom Mueller, a dĂ©clarĂ© que SpaceX utiliserait neuf moteurs Raptor par fusĂ©e, suivant une configuration similaire Ă  l'utilisation des neuf moteurs Merlin sur les Falcons 9. Selon lui, le MCT sera capable de « mettre plus de 100 tonnes de fret sur Mars » par vol[12] - [13]. DĂ©but 2014, une estimation de la taille de la fusĂ©e de lancement du MCT montrait qu’elle devrait possĂ©der un diamĂštre d’au moins 10 mĂštres, soit prĂšs de trois fois le diamĂštre et plus de sept fois la section transversale d’un Falcon 9[14].

Les premiers plans du vĂ©hicule de lancement du MCT rendus public en avril 2014 consistaient en un ou trois lanceurs d’un diamĂštre de 10 mĂštres (33 pieds) comparable Ă  la Saturn V. À l'Ă©poque, il Ă©tait envisagĂ© d’utiliser neuf moteurs Raptor LOX / mĂ©thane par propulseur[13] - [14]. La possibilitĂ© d'Ă©liminer la version trois propulseurs pour un unique lanceur mais de plus grand diamĂštre (de 12,5 Ă  15 mĂštres) a Ă©tĂ© Ă©voquĂ©e fin 2014[15] puis confirmĂ©e par Elon Musk dĂ©but 2015[16].

En , des sources mĂ©diatiques ont spĂ©culĂ© qu’un vol test initial du vĂ©hicule de lancement super lourd pourrait se produire dĂšs 2020, et ce, dans le but de tester les moteurs dans des conditions de vol orbital[17] - [15].

En , Musk dĂ©clarait espĂ©rer rendre publics les dĂ©tails de la « toute nouvelle architecture » pour le systĂšme de transport vers Mars dĂšs la fin 2015, mais ces plans ont dĂ» ĂȘtre changĂ©s[18] et en , Musk indiquait que l'architecture des missions martiennes et la prochaine gĂ©nĂ©ration de fusĂ©es et d'engins spatiaux SpaceX serait rendues publiques lors de la confĂ©rence du CongrĂšs international d'astronautique[1], qui est prĂ©vu pour [19] - [20].

En , Elon Musk dĂ©clare vouloir faire atterrir sur Mars une capsule Dragon en 2018 et commencer alors un programme intensif prĂ©voyant d'envoyer des vaisseaux Ă  destination de Mars tous les deux ans quand la Terre et Mars entrent en opposition. Cette sĂ©quence devra aboutir par une mission habitĂ©e qui touchera le sol de la planĂšte rouge en 2025[21] - [22]. DĂ©but , Musk dĂ©cide de changer le nom du MCT car le systĂšme est maintenant prĂ©vu pour ĂȘtre capable d'aller bien au-delĂ  de Mars. Ainsi, la nouvelle dĂ©nomination ne mentionne plus Mars mais dĂ©signe le projet en tant que SystĂšme de Transport InterplanĂ©taire (de l’anglais Interplanetary Transport System (ITS))[23].

Architecture retenue

Pour amener sur Mars 100 astronautes, quatre principes architecturaux sont retenus[24] :

  • tous les engins spatiaux sont complĂštement rĂ©utilisables ce qui permet d'abaisser leur cout (le premier Ă©tage est conçu pour voler 1 000 fois) ;
  • le transporteur martien qui amĂšne les astronautes sur Mars est ravitaillĂ© en ergols alors qu'il se trouve sur une orbite terrestre basse avant son transit vers Mars ;
  • les ergols utilisĂ©s par les moteurs sont de l'oxygĂšne et du mĂ©thane qui peuvent tous deux ĂȘtre extraits de l'atmosphĂšre et du sol de Mars avec des techniques de type ISRU ;
  • le transporteur peut ainsi faire le plein d'ergols Ă  la surface de Mars pour redĂ©coller et regagner la Terre dans le but d'ĂȘtre rĂ©utilisĂ©.

Caractéristiques techniques du lanceur

Le lanceur a une masse de 10 500 tonnes soit environ 3 fois celle de la fusĂ©e gĂ©ante Saturn V utilisĂ©e pour les missions habitĂ©es du programme Apollo. Haut de 122 mĂštres (Saturn V ; 111 mĂštres), il comprend deux Ă©tages tous deux rĂ©utilisables. La structure du lanceur est rĂ©alisĂ©e en fibre de carbone pour rĂ©duire la masse. Les ergols Ă  l'Ă©tat gazeux sont utilisĂ©s pour pressuriser les rĂ©servoirs (pressurisation autogĂšne), ce qui permet de se passer de rĂ©servoirs d'hĂ©lium Ă  l'origine de la perte de deux lanceurs Falcon 9. Ces ergols gazĂ©ifiĂ©s sont Ă©galement utilisĂ©s pour les moteurs de contrĂŽle d'attitude[25] - [26] - [27].

Le premier Ă©tage long de 77,5 mĂštres et d'un diamĂštre de 12 mĂštres est propulsĂ© par 42 moteurs-fusĂ©es Raptor. Ce moteur en cours de dĂ©veloppement chez SpaceX a rĂ©alisĂ© sa premiĂšre mise Ă  feu en . Il brule un mĂ©lange oxygĂšne liquide / mĂ©thane et sa poussĂ©e au sol est de 3,042 mĂ©ganewtons (environ 310 tonnes)[28]. La poussĂ©e totale au dĂ©collage du lanceur est donc de 127,8 mĂ©ganewtons (environ 13 000 tonnes). L'Ă©tage a une masse de 6 700 tonnes avec le plein d'ergols et de 275 tonnes Ă  sec. Le second Ă©tage est dĂ©veloppĂ© en deux versions : une version utilisĂ©e pour le transport vers Mars et l'autre pour le ravitaillement en ergols du transporteur martien une fois que celui-ci a atteint son orbite. Cet Ă©tage est long de 49,5 mĂštres pour un diamĂštre maximal de 17 mĂštres. Il est propulsĂ© par 3 moteurs-fusĂ©es Raptor Ă  tuyĂšre courte (impulsion spĂ©cifique de 361 secondes) et 6 moteurs Raptor optimisĂ©s pour la propulsion dans l'espace (tuyĂšre longue avec impulsion spĂ©cifique de 382 secondes). La version transporteur embarque 1 950 tonnes d'ergols contre 2 500 tonnes pour le ravitailleur. La masse Ă  vide est de 150 tonnes pour le transporteur contre 90 tonnes pour le ravitailleur. Le transporteur peut placer une charge utile de 300 tonnes sur une orbite basse puis aprĂšs ravitaillement de 450 tonnes sur le sol martien. Le ravitailleur peut emporter 380 tonnes d'ergols en orbite basse[25] - [26] - [27].

DĂ©roulement d'une mission

Transit vers Mars.
Arrivée du vaisseau en vue de Mars.
Rentrée atmosphérique du vaisseau avant son atterrissage sur le sol de Mars.
Le systĂšme de SpaceX pourrait ĂȘtre utilisĂ© pour explorer d'autres planĂštes (ici Ă  la surface d'Europe satellite de Jupiter).

La mission type comprend deux lancements. Le premier lancement permet de placer en orbite basse le transporteur martien avec son équipage. Le premier étage une fois sa mission accomplie revient se poser à son point de départ sur le complexe de lancement en utilisant la technique mise au point avec le lanceur Falcon 9 réutilisable (freinage avec des moteurs phase de vol planée, puis atterrissage en utilisant à nouveau la propulsion). Le deuxiÚme étage (le transporteur martien) utilise une partie du carburant qu'il transporte pour atteindre l'orbite basse. Le premier étage est réutilisé peu de temps aprÚs avoir refait le plein et effectué des tests pour lancer un deuxiÚme étage de type ravitailleur qui emporte des ergols au transporteur placé en orbite. Une opération de transfert d'ergols a alors lieu entre les deux engins spatiaux[25] - [26] - [27].

Une fois les ergols transfĂ©rĂ©s, le transporteur utilise sa propulsion pour quitter l'orbite basse terrestre et s'insĂ©rer sur une trajectoire de transit vers Mars. ArrivĂ© Ă  proximitĂ© de cette planĂšte, il met en marche sa propulsion pour se freiner puis pĂ©nĂštre dans l'atmosphĂšre martienne. Son bouclier thermique de grande taille (17 mĂštres de large), constituĂ© par la coque de l'Ă©tage et dont une face est recouverte par un matĂ©riau rĂ©fractaire, le protĂšge de la montĂ©e en tempĂ©rature et est utilisĂ© pour rĂ©duire sa vitesse. ArrivĂ© Ă  proximitĂ© du sol, le transporteur se pose sur sa queue en utilisant Ă  nouveau sa propulsion. Du carburant est produit sur Mars Ă  partir des ressources locales (ISRU), ce qui permet au transporteur de redĂ©coller puis de revenir sur Terre pour ĂȘtre rĂ©utilisĂ©[25] - [26] - [27].

Un projet aussi ambitieux coute trĂšs cher. Son prix Ă©valuĂ© en Ă  environ 10 milliards US$ est obtenu grĂące Ă  la rĂ©utilisation systĂ©matique des engins spatiaux utilisĂ©s. Le premier Ă©tage est conçu pour ĂȘtre rĂ©utilisĂ© 1 000 fois, le ravitailleur qui ne va pas au-delĂ  de l'orbite basse terrestre 100 fois et le transporteur 12 fois[25] - [26] - [27].

Site de lancement

Il est prĂ©vu que la fusĂ©e dĂ©colle depuis le pas de tir 39A de la base de lancement Kennedy en Floride. C'est de ce pas de tir qu'ont dĂ©collĂ© les fusĂ©es Saturn V qui ont placĂ© les vaisseaux Apollo en orbite. Le pas de tir est en 2016 en cours d'amĂ©nagement par SpaceX pour y lancer son lanceur mi-lourd Falcon Heavy. Pour qu'il puisse ĂȘtre utilisĂ© par le lanceur lourd ITS, il faudrait toutefois effectuer des travaux de renforcement car le pas de tir permet de supporter une masse totale de 12 700 tonnes trop rĂ©duite pour le lanceur superlourd et les installations de lancement[25].

Financement

Le dirigeant de SpaceX, Elon Musk, avançait en un cout de dĂ©veloppement de 10 milliards US$ pour la rĂ©alisation de l'ensemble du systĂšme de transport. Le cout de fabrication d'un seul lanceur avec un deuxiĂšme Ă©tage de type ravitailleur et un vaisseau destinĂ© Ă  transporter l'Ă©quipage est Ă©valuĂ© Ă  560 millions US$[29]. Il prĂ©voit de financer le dĂ©veloppement de son lanceur gĂ©ant grĂące aux bĂ©nĂ©fices rĂ©alisĂ©s par la sociĂ©tĂ© qu'il dĂ©tient et de sa fortune personnelle. Il considĂšre que la colonisation de Mars, objectif ultime de son projet, doit ĂȘtre vue comme un gigantesque partenariat public/privĂ© comme celui qui a abouti, selon sa vision, Ă  la formation des États-Unis. Pour le futur colon martien, le prix du voyage pourrait descendre Ă  environ 100 000 Ă  140 000 US$ et le retour vers la Terre serait gratuit[30].

Critique du projet

Robert Zubrin, ingénieur américain, expert en systÚmes de propulsion spatiale et concepteur d'un scénario bien connu de équipage humain vers Mars baptisé Mars Direct a analysé la proposition de Elon Musk[31] :

Grande taille du lanceur

Le lanceur proposé par Musk est quatre fois plus gros que la fusée Saturn V. Bien que la société SpaceX rencontre un succÚs commercial indéniable, il n'est pas douteux que SpaceX n'aura pas les moyens de financer le cout d'un engin aussi colossal dont le cout est évalué par ses concepteurs à plus de 10 milliards US$.

Utilisation du méthane et oxygÚne liquides

Le scĂ©nario prĂ©voit d'utiliser pour toutes les phases propulsĂ©es (lancement, transit et retour sur Terre depuis la surface de Mars) les ergols mĂ©thane et oxygĂšne liquides. C'est un excellent choix de scĂ©nario car ces ergols ont une bonne capacitĂ© Ă©nergĂ©tique tout en Ă©tant plus denses et moins volatils que le mĂ©lange hydrogĂšne/oxygĂšne. C'est d'ailleurs le choix effectuĂ© par Zubrin dans son scĂ©nario de mission martienne de rĂ©fĂ©rence Mars Direct. Toutefois, bien que la fabrication de mĂ©thane et d'oxygĂšne Ă  partir du dioxyde de carbone et de l'eau martienne soient probablement faisables, ce ne sera pas sans beaucoup d'effort, d’énergie et d'investissement. Aussi, le scĂ©nario retenu pour le transport martien doit faire en sorte de maintenir ce fardeau imposĂ© Ă  la base martienne dans des limites gĂ©rables.

TrÚs grandes quantités de méthane/oxygÚne liquide fabriqués à la surface de Mars

Dans la mesure oĂč tout le scĂ©nario de Musk repose sur ce choix, il est essentiel de lier l'Ă©chelle du projet (le nombre de personnes transportĂ©es, le tonnage du vaisseau) Ă  la capacitĂ© de production des ergols sur le sol Ă©valuĂ©e de maniĂšre rĂ©aliste.

Tous les engins spatiaux sont réutilisables

C'est un choix central qui permet de limiter les couts et pour lequel SpaceX a dĂ©jĂ  fait ses preuves avec le lanceur Falcon 9. Toutefois, le caractĂšre rĂ©utilisable n'impose pas obligatoirement un retour sur Terre. En gĂ©nĂ©ral, il serait plus pertinent de rĂ©utiliser les engins dĂ©jĂ  dans l'espace. Ce principe est mis en Ɠuvre en partie par le scĂ©nario de SpaceX avec le remplissage en orbite du seconde Ă©tage, mais il est ignorĂ© ailleurs avec des consĂ©quences importantes sur le cout rĂ©el du programme. Par ailleurs, la frĂ©quence avec laquelle un engin spatial peut ĂȘtre utilisĂ© doit ĂȘtre pris en compte.

Remplissage des réservoirs du second étage dans l'espace

TransfĂ©rer des ergols cryogĂ©niques en gravitĂ© nulle constitue un dĂ©fi technique qui n'a jamais Ă©tĂ© relevĂ©. Le problĂšme est qu'en gravitĂ© nulle, l'ergol se trouve Ă  la fois dans deux phases mĂ©langĂ©es entre elles et que, dans ces conditions, l'utilisation de pompes devient difficile. Toutefois, une solution peut sans doute ĂȘtre trouvĂ©e.

Utilisation du second Ă©tage pour descendre sur le sol martien et en revenir

Ce choix du scĂ©nario est une trĂšs mauvaise idĂ©e. Il impose de descendre sur le sol martien tout l'appareil propulsif d'une masse d'au moins 60 tonnes ainsi que les Ă©normes rĂ©servoirs utilisĂ©s depuis l'orbite basse terrestre ce qui entraĂźne une diminution importante de la charge utile et impose un niveau de production important pour l'usine de production d'ergols installĂ©e sur Mars. Par ailleurs, ce vaisseau de grande taille, couteux en capitaux, ne pourra effectuer un aller-retour Terre-Mars qu'une fois tous les quatre ans compte tenu de l'ouverture d'une fenĂȘtre de lancement tous les 2 ans.

Transit d'un habitat de grande taille de la Terre Ă  Mars et retour

C'est une trÚs mauvaise idée car cet habitat ne sera utilisé que dans un seul sens et une fois tous les 4 ans. Si l'objectif est de construire une base ou une colonie sur Mars, tout habitat de grande taille doit rester à la surface de la planÚte pour servir de quartier d'habitation aux colons.

Transit rapide vers Mars

Le transit rapide vers Mars proposé dans le scénario (115 jours), en partant du principe qu'il est réalisable, impose un surcout important. Ce choix ne se justifie absolument pas car il impose de tripler le cout du transport pour réduire de 65 jours (en moyenne) le temps de transport.

Utilisation de rétrofusées durant la phase de vol supersonique de la descente sur le sol Martien

Le recours aux rĂ©trofusĂ©es dans la phase de vol supersonique pour faire atterrir des masses importantes sur le sol est une percĂ©e majeure de SpaceX qui a effectuĂ© des dĂ©monstrations couronnĂ©es de succĂšs avec le retour des premiers Ă©tages du lanceur Falcon 9 sur Terre. Le recours sur Mars Ă  une telle technique est dĂ©montrĂ© en principe. Mais SpaceX propose de la mettre en Ɠuvre sur un engin 50 fois plus massif. Par ailleurs, cette technique impose des contraintes supplĂ©mentaires sur le systĂšme propulsif rendant l'objectif d'un transit rapide encore plus difficile Ă  atteindre.

Avancement du projet

 Vaisseau Dragon de SpaceX sur Mars (Vue d'artiste)
Vaisseau Dragon de SpaceX sur Mars (Vue d'artiste).
 Atterrissage d'un vaisseau sur Mars en 2018
Atterrissage d'un vaisseau sur Mars en 2018.

SpaceX est engagé dans plusieurs projets qui doivent contribuer à mettre au point des technologies ou des composants qu'il est prévu de réutiliser pour le SystÚme de Transport Interplanétaire :

  • la sociĂ©tĂ© a mis au point une technique permettant la rĂ©utilisation thĂ©orique du premier Ă©tage d'un lanceur grĂące Ă  une phase propulsive permettant de ramener celui-ci jusqu'Ă  son point de dĂ©part et Ă  un atterrissage en douceur ;
  • SpaceX dĂ©veloppe le futur moteur-fusĂ©e Raptor de 300 tonnes de poussĂ©e qui doit ĂȘtre utilisĂ© par le nouveau lanceur ;
  • enfin, la sociĂ©tĂ© met au point une technique de propulsion supersonique qui doit ĂȘtre testĂ©e sur un vaisseau Dragon chargĂ© d'atterrir sur Mars dans le cadre d'une mission robotique qui pourrait avoir lieu vers 2018. Cette technique pourrait constituer un progrĂšs important pour l'atterrissage des charges lourdes sur le sol martien car les techniques actuelles ne permettent pas de poser plus d'une tonne.

Colonisation de Mars

Le Transporteur Colonial Martien a Ă©tĂ© dĂ©crit comme un grand vaisseau spatial interplanĂ©taire capable de transporter 100 personnes Ă  la fois sur Mars[12]. Toutefois, les premiers vols devraient transporter moins de personnes et plus d'Ă©quipement[5]. L’utilisation d’un important rĂ©servoir d'eau est une possibilitĂ© envisagĂ©e pour protĂ©ger les occupants contre les rayonnements cosmiques et la teneur en oxygĂšne des cabines devrait ĂȘtre jusqu'Ă  deux fois supĂ©rieure Ă  celle de l'atmosphĂšre terrestre[5].

La colonie sur Mars envisagĂ©e par Musk commencerait modestement, avec un groupe initial de moins de dix personnes. Musk espĂšre qu'un tel poste pourrait Ă©voluer vers un dispositif beaucoup plus grand et devenir autonome et comprendre au moins un million de personnes. Selon Musk, « mĂȘme avec un million de personnes, vous avez besoin d’une productivitĂ© incroyable par personne, parce que vous avez besoin de recrĂ©er l'ensemble de la base industrielle sur Mars. Vous avez besoin d'extraire et d'affiner l'ensemble des diffĂ©rents matĂ©riaux dans un environnement beaucoup plus difficile que celui de la Terre. Il n'y a pas d'arbres, pas d'oxygĂšne ou d'azote qui sont comme sur terre juste disponibles, pas de carburants, mis Ă  part les biocarburants qui peuvent ĂȘtre produits. Si vous pouviez prendre 100 personnes Ă  la fois, vous auriez besoin de 10 000 voyages pour atteindre le nombre d’un million de personnes » dit-il. « Mais vous avez aussi besoin de beaucoup de fret pour soutenir tout ce monde. En fait, votre ratio fret/personne va ĂȘtre assez Ă©levĂ©. Il serait probablement de 10 voyages de fret pour un voyage de colons, donc plus probablement autour de 100 000 voyages. Et nous parlons de 100 000 voyages d'un vaisseau spatial gĂ©ant »[32].

Musk a dĂ©clarĂ© que son ambition de prix pour un tel voyage Ă©tait de l'ordre de 500 000 $ US, quelque chose que « la plupart des gens dans les pays avancĂ©s, au milieu de la quarantaine ou quelque chose comme ça, pourrait investir [pour faire le voyage] »[5].

Avant que les premiers colons ne soient transportĂ©s vers Mars, un certain nombre de missions de fret serait entrepris d'abord afin d’acheminer les Ă©quipements nĂ©cessaires, les habitats et autres fournitures sur place[33]. L'Ă©quipement qui accompagnerait les premiers groupes comprendrait « des machines pour produire des engrais, du mĂ©thane et de l'oxygĂšne Ă  partir de l’azote et du dioxyde de carbone atmosphĂ©riques martiens et de la glace d'eau souterraine de la planĂšte ». Les Ă©quipements devront aussi comprendre des matĂ©riaux de construction pour bĂątir des dĂŽmes transparents pour permettre la croissance de cultures agricoles[5].

Selon Elon Musk, le MCT pourrait Ă©galement servir de premier habitat aux colons sur Mars[34].

Concurrence sur le marché du transport lourd

En , des sources mĂ©diatiques ont notĂ© que le marchĂ© du lancement amĂ©ricain pourrait se retrouver avec deux vĂ©hicules de lancement super lourd en compĂ©tition dans les annĂ©es 2020. Le gouvernement amĂ©ricain dĂ©veloppe actuellement le systĂšme de lancement spatial SLS qui est un vĂ©hicule de lancement lourd pouvant soulever de trĂšs grandes charges utiles de 70 Ă  130 tonnes en orbite basse terrestre. Bien que SpaceX ait minimisĂ© l'aspect compĂ©titif avec le SLS, si SpaceX fait des progrĂšs sur son vĂ©hicule de lancement super-lourd dans les annĂ©es Ă  venir, il est presque inĂ©vitable que les deux systĂšmes amĂ©ricains vont attirer des comparaisons et dĂ©clencher un dĂ©bat sain, potentiellement au niveau politique[15] - [35].

Références

  1. « 2016 StartmeupHK Venture Forum - Elon Musk on Entrepreneurship and Innovation » () (lire en ligne, consulté le )
    —StartmeupHK Venture Forum--2016 (lire en ligne)
    « (SpaceX discussion at 30:15-31:40) We'll have the next generation rocket and spacecraft, beyond the Falcon and Dragon series ... I'm hoping to describe that architecture later this year at the International Astronautical Congress. which is the big international space event every year. ... first flights to Mars? we're hoping to do that in around 2025 ... nine years from now or thereabouts. »
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    « an evolution of SpaceX's Falcon 9 booster ... much bigger [than Falcon 9], but I don’t think we’re quite ready to state the payload. We’ll speak about that next year. ... Vertical landing is an extremely important breakthrough — extreme, rapid reusability. »
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    « The Mars transport system will be a completely new architecture. Am hoping to present that towards the end of this year. Good thing we didn't do it sooner, as we have learned a huge amount from Falcon and Dragon. »
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