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Interaction biologique

Une interaction biologique, appelée aussi interaction biotique ou interaction écologique, désigne un processus impliquant des échanges ou relations réciproques entre plusieurs individus ou espèces dans un écosystème (relations interspécifiques), ou entre deux ou plusieurs individus d'une même population (relations intraspécifiques).

Diagramme simplifié des six principales interactions biologiques.

Ces interactions, bénéfiques, neutres ou néfastes, instantanées ou durables, obligatoires (strictes), facultatives, opportunistes ou accidentelles selon leur niveau de spécificité, peuvent engendrer des coévolutions, induites directement (par exemple dans une relation prédateur-proie) ou indirectement (par exemple l'accès à une ressource commune) par ces échanges. On parlera alors d’interactions directes ou indirectes.

Il existe toute une gradation de relations, rendant les individus plus ou moins interdépendants, en fonction du degré d'association des organismes impliqués, de la durée de ces interactions et de leur caractère bénéfique ou nuisible. Les principales sont[1] :

  • symbiose, interaction durable indirecte Ă  directe, impliquant tout ou partie du cycle de vie des deux organismes, quels que soient les Ă©changes entre ceux-ci ;
  • symbiose mutualiste : interaction directe de nature mutuellement bĂ©nĂ©fique, dont le caractère obligatoire peut ĂŞtre soit unilatĂ©ral (ex : corail tropical et ses zooxanthelles) soit bilatĂ©ral (ex : plantes nectarifères entomogames et insectes nectarivores pollinisateurs associĂ©s), qu'entretiennent des organismes d'espèces diffĂ©rentes qui vivent en contact direct les uns avec les autres ;
  • mutualisme : interaction indirecte Ă  directe de nature mutuellement profitable entre organismes d'espèces diffĂ©rentes (cas particulier de la coopĂ©ration, terme dĂ©signant des interactions Ă  bĂ©nĂ©fices rĂ©ciproques entre individus d’espèce identique ou non), Ă  caractère facultatif (protocoopĂ©ration) ou obligatoire ;
  • commensalisme : interaction directe ou indirecte entre deux espèces dont une seule tire profit, sans nuisance pour l'autre (ex : oiseaux se servant, pour la confection d'un nid, de poils tombĂ©s). Le mutualisme et le commensalisme, deux interactions positives qui profitent Ă  au moins un des partenaires sans dĂ©favoriser le second, sont considĂ©rĂ©es comme des facilitations Ă©cologiques ;
  • neutralisme : absence d'interaction concurrentielle, commensale ou mutualiste entre deux espèces ; ni bĂ©nĂ©fice ni dĂ©triment d'une espèce sur l'autre ne sont mesurables ;
  • amensalisme : interaction directe ou indirecte entre deux espèces, sans impact pour l'une mais nuisible Ă  dĂ©trimentielle pour l'autre (ex : escargot piĂ©tinĂ© par une vache) ;
  • compĂ©tition : interaction indirecte Ă  parfois directe de nature antagoniste, concernant une Ă  plusieurs ressource (s) critique(s) pour les espèces concernĂ©es (qui occupent des niches Ă©cologiques de grande similitude), induisant une concurrence ;
  • parasitisme : interaction directe durable, de nature antagoniste unilatĂ©ralement nuisible Ă  dĂ©trimentielle, entre une espèce dĂ©nommĂ©e parasite et une Ă  plusieurs espèces dĂ©nommĂ©e(s) hĂ´te(s), duquel ou desquels l'espèce "nuisible" dĂ©pendra de façon unilatĂ©ralement obligatoire au plan trophique et vital pour tout ou partie de sa vie, le parasitisme n'entraĂ®nant pas forcĂ©ment la mort de l'hĂ´te (parasitisme biotrophe qui peut devenir nĂ©crotrophe ; parasitoĂŻdes, parasites de parasites qui se dĂ©veloppent aux dĂ©pens d'un hĂ´te dont ils entraĂ®nent obligatoirement la mort).
  • prĂ©dation : interaction directe instantanĂ©e, de nature antagoniste unilatĂ©ralement nuisible, entre une espèce dĂ©nommĂ©e prĂ©dateur et une Ă  plusieurs espèces dĂ©nommĂ©e(s) proies, interaction entraĂ®nant la mort de cette dernière.

Le monde vivant peut être décrit comme un immense réseau d'interactions entre organismes. Les effets négatifs tendent à être quantitativement faibles lorsque les populations en interaction ont une histoire évolutive commune dans un écosystème relativement stable. En d'autres termes, les interactions sont le plus souvent à bénéfices réciproques car la sélection naturelle exerce une forte pression en faveur des adaptations qui permettent de réduire l'impact des interactions néfastes ou les éliminer car leur maintien entraînerait l'extinction de ces populations[2].

Contexte scientifique, philosophique et politique

Les notions d'interactions néfastes se développent dans la seconde moitié du XIXe siècle, dans le cadre du darwinisme social, théorie qui reflète les idées de l'époque victorienne au Royaume-Uni, au moment où s'opère la transition d'une économie agraire à une économie industrielle capitaliste, si bien que les concepts de survie du plus apte et de progrès entraîné par la compétition sont utilisés à la fin du XIXe siècle pour justifier un capitalisme sans frein[3] - [4]. Les notions d'interactions bénéfiques apparaissent à la fin du XIXe siècle parmi des penseurs de sympathies socialistes[5] ou anarchistes[6]. Le développement de ces deux notions opposées le doit ainsi autant « à des irréductibilités de points de vue scientifiques qu’à des oppositions entre leurs prolongements philosophiques et sociétaux »[7].

Principales interactions

Effet sur l'espèce "cible"
nuisance sans effet bénéfice
Attitude de
l'espèce active
antagonisme Compétition Commensalisme Prédation,
Parasitisme
neutre Amensalisme Neutralisme Commensalisme
protagonisme Parasitisme Neutralisme,
Mutualisme
Mutualisme,
Symbiose

Ce tableau ne présente que quelques combinaisons possibles d'interactions statiques alors que depuis les années 1980, les biologistes ont pris conscience du caractère dynamique des effets exercés par les espèces les unes sur les autres, les interactions présentant tout un gradient d'effets nets[8].

« L’opposition entre, d’une part, plantes autotrophes et sessiles et, d’autre part, animaux hétérotrophes et mobiles est sans doute la clé des complémentarités écologiques et fonctionnelles qui ont grandement orienté leurs processus coévolutifs. Il en découle la foisonnante diversité de leurs interactions » qui sont sans doute les plus étudiées mais qui « n’illustrent qu’une petite partie des interdépendances du vivant (les plus importantes mettent en scène des microorganismes)[9] ».

Symbiose

Elle peut être vitale pour assumer certaines fonctions biologiques (ex : reproduction de guêpes braconides et leurs polydnavirus symbiotiques) ou ne concerner qu'un plan trophique et des échanges de bons procédés (ex : fourmis élevant des pucerons).

  • IntĂ©rĂŞts de la symbiose : elle permet le partage et l'Ă©change de ressources et services dans une relation poussĂ©e au-delĂ  du mutualisme opportuniste. De ce fait, les ĂŞtres vivants en association symbiotique peuvent Ă©ventuellement s'adapter Ă  des contextes qui, autrement, seraient peu propices Ă  une implantation ou un maintien in situ (ex : corail tropical associĂ© Ă  ses zooxanthelles).
  • Limites de la symbiose : certaines symbioses peuvent tourner au parasitisme (ex : labre nettoyeur prĂ©fĂ©rant le mucus aux parasites de son "client") ou devenir dĂ©trimentielles dans certaines conditions stressantes (ex : blanchissement des coraux). De mĂŞme, la coĂ©volution d'espèces en relation symbiotique peut dĂ©boucher sur l'infĂ©odation complète d'un des organismes (ex : endosymbiose de l'ancĂŞtre des mitochondries).
  • Exemple : l’orchidĂ©e Ophrys sphegodes synthĂ©tise la phĂ©romone femelle de l’abeille Andrena nigroaenea et conduit les mâles de l’insecte Ă  des simulacres de copulation avec la fleur. Ce stratagème a pour but essentiel la transmission du pollen d’une orchidĂ©e Ă  l’autre, c'est-Ă -dire sa reproduction, mais aussi son extension Ă  de nouveaux territoires. Le bĂ©nĂ©fice de la relation est rĂ©ciproque pour les deux espèces et la disparition de l’une peut entraĂ®ner, Ă  plus ou moins long terme, la mort de l’autre.

Mutualisme

  • IntĂ©rĂŞts du mutualisme : Le mutualisme amĂ©liore les conditions de vie des espèces s'y rapportant. De plus, le mutualisme ne gĂ©nère aucune obligation d'association dans le cas de la protocoopĂ©ration.
  • Exemples : le hĂ©ron pique bĹ“uf qui trouve sa nourriture en dĂ©barrassant les grands mammifères (buffle, girafes...) de leurs parasites. Un autre exemple mutualiste est le regroupement en immenses troupeaux (plus ou moins mĂ©langĂ©s) des grands herbivores de la savane africaine (gnous, zèbres, antilopes, etc)

Parasitisme

  • IntĂ©rĂŞts du parasitisme : le parasite fait une Ă©conomie de moyens et ressources aux dĂ©pens d'un hĂ´te, parfois au dĂ©triment de ce dernier. S'il tire parti de son hĂ´te sur un plan physiologique, le parasite peut mĂŞme se permettre de perdre certaines fonctions redondantes avec l'hĂ´te.
  • Limites du parasitisme : lors de relations parasitaires durables au fil des gĂ©nĂ©rations, on assiste Ă  une course aux armements entre l'espèce hĂ´te et l'espèce parasite, pouvant conduire Ă  une spĂ©cialisation aussi efficace que fragilisante. De mĂŞme lorsqu'un parasite profite des fonctions vitales de son hĂ´te, ces mĂŞmes fonctions et organes tendent Ă  rĂ©gresser au fil des gĂ©nĂ©rations chez le parasite, conduisant Ă  une dĂ©pendance Ă  l'hĂ´te de plus en plus importante. Il en resulte que la disparition d'une espèce hĂ´te peut condamner l'espèce parasite.
  • Exemple : les parasites sont innombrables; le ver Paragordius tricuspidatus, impressionnant parasite du grillon des bois commun Nemobius sylvestris qui pousse ce dernier Ă  se jeter dans les cours d’eau avant de le quitter pour continuer sa propre Ă©volution et se reproduire. Aussi la tique et les mammifères tels que le hĂ©risson.

Commensalisme

Phorésie

  • Exemple : le poisson rĂ©mora, par exemple, est phoronte de la grande raie Manta.

La phorésie fait partie du commensalisme.

Similitudes et différences

Mutualisme, Coopération et Symbiose

  • Mutualisme : phĂ©nomène d'association bĂ©nĂ©fique entre deux espèces vivantes. Celle-ci peut-ĂŞtre facultative (protocoopĂ©ration), ou obligatoire, auquel cas on la dĂ©nomme symbiose.
  • CoopĂ©ration : association de deux ĂŞtres vivants oĂą les deux associĂ©s retirent des bĂ©nĂ©fices d'une relation non obligatoire. Il y a plusieurs exemples possibles de coopĂ©ration oĂą il y a un Ă©change de service. Si on sĂ©pare les deux associĂ©s, chacun peut vivre sans problème car c'est une relation non-obligatoire. Chaque vivant de la relation peut aller chercher ailleurs pour rĂ©pondre Ă  ses besoins. Les fleurs qui donnent de la nourriture aux abeilles et les abeilles qui transportent le pollen des fleurs, le cheval qui aide le fermier et le fermier qui nourrit le cheval sont deux exemples de coopĂ©ration.
  • Symbiose : interaction oĂą les deux partenaires retirent des bĂ©nĂ©fices vitaux d'une relation obligatoire (vitale pour au moins un stade de vie).

La coopération et la symbiose sont des mutualismes.

Parasitisme et commensalisme

  • Parasitisme : relation entre deux vivants dont l'un (plus petit) vit aux dĂ©pens, nuit et rend malade un autre vivant (gĂ©nĂ©ralement plus grand). Par exemple, un moustique qui pique un humain, une puce sur un chien et un ver blanc dans l'intestin d'un humain.
  • Commensalisme : association de deux vivants dont l'un profite de la nourriture ou de l'abri d'un autre vivant sans lui nuire ni le dĂ©ranger. Le goĂ©land mange les restants de repas d'un humain, et cela ne dĂ©range pas ce dernier. Un Ă©tourneau profite du nid d'un pic qui est parti depuis longtemps.

Mutualisme et parasitisme

  • Mutualisme : association facultative de deux vivants dont les deux associĂ©s retirent des bĂ©nĂ©fices obligatoires ; autrement dit, l'association n'est pas obligatoire, mais les deux ĂŞtres en retirent des avantages nĂ©cessaires Ă  leur survie.
  • Parasitisme : l'un des vivants nuit Ă  l'autre ; bien que le parasite ait besoin de l'hĂ´te, cela n'est pas rĂ©ciproque, bien au contraire.

Prédation et parasitisme

  • prĂ©dation : interaction directe, de court terme (instantanĂ©e ou quasi instantanĂ©e), de nature antagoniste unilatĂ©ralement dĂ©trimentielle, entre une espèce dĂ©nommĂ©e prĂ©dateur et une Ă  plusieurs espèces dĂ©nommĂ©e(s) proie(s), duquel ou desquels l'espèce "nuisible" dĂ©pend de façon opportuniste voire obligatoire au plan trophique ;.
  • Parasitisme : interaction de long terme, l'hĂ´te subissant un prĂ©judice, mais celui-ci n'est pas mortel Ă  court terme alors que dans la prĂ©dation, la proie est tuĂ©e immĂ©diatement[10].

Autres relations

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

Notes et références

  1. (en) Cheng, T.C. (1991) Is parasitism symbiosis? A definition of terms and the evolution of concepts. In: Toft, C.A., Aeschlimann, A. and Bolis, L. (eds) Parasite—Host Associations: Coexistence or Conflict ?, Oxford University Press, Oxford, p. 15-36
  2. (en) Eugene Pleasants Odum, Fundamentals of Ecology, Thomson Brooks/Cole, , p. 296.
  3. (en) Richard C. Lewontin, « The Units of Selection », Annual Review of Ecology and Systematics, vol. 1,‎ , p. 1-18 (DOI 10.1146/annurev.es.01.110170.000245).
  4. Pascal Acot, Histoire de l'Ă©cologie, Presses universitaires de France, , p. 197
  5. Marx et Engels, théoriciens du socialisme scientifique, reconnaissent l'importance de l'œuvre théorique de Darwin mais sont réticents à l'égard du darwinisme social. Ils se refusent à assimiler la lutte des classes à la lutte pour la vie mais de nombreux marxistes darwiniens (Enrico Ferri, Paul Lafargue) considèrent que le darwinisme donne une base biologique à l'antagonisme des classes. Cf Luc Bourcier de Carbon, Essai sur l'histoire de la pensée et des doctrines économiques, Montchrestien, , p. 5-8, Jean-Marc Bernardini, Le darwinisme social en France (1859-1918). Fascination et rejet d’une idéologie, CNRS éditions, , p. 15.
  6. Les auteurs russes anarchistes, voulant réformer le régime tsariste autocratique, rejettent le darwinisme individualiste et concurrentiel au profit d'un darwinisme collectif et coopératif. Metchnikoff, dès 1886 et Kropotkine avec son ouvrage L'Entraide, un facteur de l'évolution (1902) , développent ainsi la théorie de la coopération validée par les naturalistes contemporains. Alors que Wallace et Darwin mettent au point la théorie de l'évolution par la sélection naturelle en basant leurs observations sur les milieux tropicaux très densément peuplés en espèces animales et végétales caractérisées par un développement rapide qui sature leurs niches écologiques (loi de la jungle qui entraîne des comportements de compétition territoriale et reproductrice), les auteurs russes orientent leurs observations sur les populations sibériennes animales et humaines qui, en vivant dans des régions peu peuplées, privilégient l'entraide intraspécifique en raison des conditions climatiques extrêmement rigoureuses. Cf (en) Daniel Todes, « Global Darwin: Contempt for competition », Nature, vol. 462, no 7269,‎ , p. 36-7 (DOI 10.1038/462036a).
  7. Marc-André Selosse, « Symbiose et mutualisme versus évolution : de la guerre à la paix ? », Atala, no 15,‎ , p. 35.
  8. J.L. Bronstein, Game structures in mutualisms : what can the evidence tell us about the kinds of models we need?, Advances in the Study of Behavior, no 34, 2004, p. 59-104
  9. Bruno Corbara, « Les reines de la manipulation », Pour la science, no 101,‎ , p. 68
  10. Eugene Pleasants Odum, op. cit., p.297.
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