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Idries Shah

Idries Shah (persan : Ű§ŰŻŰ±ÛŒŰł ŰŽŰ§Ù‡, ourdou : Ű§ŰŻŰ±ÛŒŰł ŰŽŰ§Ù‡, hindi : à€‡à€Šà€°à„€à€ž à€¶à€Ÿà€č), nĂ© le Ă  Simla et mort le Ă  Londres, Ă©galement connu sous le nom d’Idris Shah, nĂ© Sayed Idries el-Hashimi (Arabe : ŰłÙŠŰŻ Ű„ŰŻŰ±ÙŠŰł Ù‡Ű§ŰŽÙ…ÙŠ) et sous le pseudonyme d’Arkon Daraul, est un Ă©crivain britannique et enseignant de la tradition soufie. Il a Ă©crit plus de trois douzaines de livres sur des sujets partant de la psychologie et la spiritualitĂ© et allant jusqu’aux carnets de voyage et Ă©tudes culturelles.

Idries Shah
ŰŻŰ±ÛŒŰł ŰŽŰ§Ù‡
à€‡à€Šà€°à„€à€ž à€¶à€Ÿà€č
Description de l'image Idries Shah.gif.
Alias
Arkon Daraul[1]
Naissance
Simla, Inde britannique
DĂ©cĂšs
Londres, Royaume-Uni
Profession
Écrivain, Ă©diteur
Distinctions
Outstanding Book of the Year (BBC "The Critics"), deux fois;
six premiers prix au World Book Year de l'UNESCO en 1973
Auteur
Mouvement Soufisme[2], psychologie
Genres
Culture et philosophie orientales

ƒuvres principales

  • Les Soufis
  • Le Moi dominant
  • Les subtilitĂ©s de l'inimitable Mulla Nasrudin
  • Les exploits de l'incomparable Mulla Nasrudin
  • Penseurs de l'Est
  • Apprendre Ă  apprendre
  • The Way of the Sufi
  • Reflections
  • Kara Kush

Compléments

www.idriesshahfoundation.org
Signature de Idries ShahŰŻŰ±ÛŒŰł ŰŽŰ§Ù‡ à€‡à€Šà€°à„€à€ž à€¶à€Ÿà€č

NĂ© en Inde et descendant d’une noble famille afghane, Shah grandit principalement en Angleterre. Ses premiers Ă©crits se rapportent Ă  la magie et Ă  la sorcellerie. En 1960, il ouvre une maison d’édition, Octogon Press, distribuant des traductions des classiques soufis ainsi que ses propres productions. Les Soufis (The Sufis), son Ɠuvre-phare, parait en 1964 et est bien accueilli au niveau international. En 1965, Shah fonde l’Institut pour la recherche culturelle (Institute for Cultural Research (en)), une association caritative et pĂ©dagogique basĂ©e Ă  Londres et consacrĂ©e Ă  l’étude de la culture et du comportement humain. Une organisation similaire, l’Institut pour l’étude de la connaissance humaine (Institute for the Study of Human Knowledge (en) ; ISHK), existe aux États-Unis, sous la direction du professeur en psychologie Robert Ornstein (en) de l’UniversitĂ© Stanford, nommĂ© par Shah comme son reprĂ©sentant aux États-Unis.

Dans ses travaux, Shah prĂ©sente le soufisme comme une forme universelle de sagesse prĂ©cĂ©dant l’islam. Il insiste sur le fait que le soufisme n’est pas une chose statique, mais toujours en adaptation constante au lieu, au temps et aux personnes concernĂ©es. C’est ainsi qu’il formule ses enseignements en reprenant les termes de la psychologie occidentale. Shah fait Ă©galement un usage abondant des paraboles et des histoires pĂ©dagogiques (en) traditionnelles ; des textes aux multiples pistes de lecture Ă©laborĂ©s dans le but de stimuler une vision et une auto-rĂ©flexion chez le lecteur. Peut-ĂȘtre est-il plus connu pour ses collections d’histoires drĂŽles figurant le Mulla Nasrudin.

Shah a parfois Ă©tĂ© critiquĂ© par certains orientalistes remettant en question ses qualifications et son parcours [citation requise]. Son rĂŽle dans la controverse entourant la nouvelle traduction des RubaĂŻyat (quatrains) d’Omar KhayyĂąm, publiĂ©e par son ami Robert Graves et son grand-frĂšre Omar Ali-Shah, a Ă©tĂ© passĂ© au crible. Mais c’était sans compter ses dĂ©fenseurs remarquables ; la premiĂšre Ă©tant l’écrivaine Doris Lessing. Shah fut finalement reconnu comme le porte-parole du soufisme en Occident et participa Ă  des confĂ©rences en tant que professeur-invitĂ© Ă  un certain nombre d’universitĂ©s occidentales. Ses travaux ont jouĂ© un grand rĂŽle dans la prĂ©sentation du soufisme comme une forme individualiste de sagesse spirituelle et non nĂ©cessairement reliĂ©e Ă  une religion en particulier[3].

Enfance

Idries Shah est nĂ© Ă  Simla, en Inde, d’un pĂšre indien-afghan, Sirdar Ikbal Ali Shah (en), Ă©crivain et diplomate, et d’une mĂšre Ă©cossaise, Saira Elizabeth Luiza Shah (en). Sa famille paternelle appartient aux Sayyid Mousavi (en). Leur foyer ancestral se situe prĂšs des jardins de Paghman Ă  Kaboul[4]. Son grand-pĂšre paternel, Sayed Amjad Ali Shah, Ă©tait le nawab de Sardhana dans l’État de l’Uttar Pradesh[5], situĂ© au nord de l’Inde, un titre hĂ©ritĂ© par la famille grĂące aux services qu’un ancĂȘtre, Jan-Fishan Khan (en), avait rendu aux Anglais[6] - [7].

Shah grandit en majeure partie prĂšs de Londres[8]. D’aprĂšs L. F. Rushbrook Williams (en), Shah a commencĂ© Ă  accompagner son pĂšre lors de ses voyages dĂšs son trĂšs jeune Ăąge. MĂȘme s’ils voyageaient beaucoup et loin, ils retournaient toujours en Angleterre oĂč leur famille a vĂ©cu pendant de nombreuses annĂ©es. GrĂące Ă  ces voyages, qui faisaient souvent partie du travail soufi d’Ikbal Ali Shah, Shah a pu rencontrer et passer du temps avec des hommes d’état importants et des personnalitĂ©s distinguĂ©es d’Orient et d’Occident. Williams Ă©crit :« Une telle Ă©ducation fournit Ă  un jeune homme dotĂ© d’une intelligence remarquable, qu’Idries Shah s’est vite avĂ©rĂ© possĂ©der, de nombreuses opportunitĂ©s d’acquĂ©rir une vision vĂ©ritablement internationale ; une vue Ă©tendue ; et la connaissance de personnes et de lieux que tout diplomate professionnel d’un Ăąge plus avancĂ© et ayant une plus grande expĂ©rience pourrait bien envier. Mais une carriĂšre de diplomate n’attirait pas Idries Shah[9]... »

Shah dĂ©crit son Ă©ducation peu conventionnelle sur la BBC dans un entretien avec Pat Williams en 1971. Il y raconte comment son pĂšre, son grand cercle d’amis et de famille ont toujours tentĂ© d’exposer les enfants Ă  « une multitude d’impacts » et Ă  un grand Ă©ventail de contacts et d’expĂ©riences avec l’intention de crĂ©er un individu Ă©quilibrĂ©. Shah en parle comme « l’approche soufie » de l’éducation[10].

AprĂšs que sa famille a dĂ©mĂ©nagĂ© de Londres Ă  Oxford en 1940 pour Ă©chapper au Blitz (bombardement allemand), il passe deux ou trois ans au lycĂ©e d’Oxford. En 1945, il accompagne son pĂšre en Uruguay en tant que secrĂ©taire pour la mission de son pĂšre en rapport avec la viande halal[7] - [8]. Il rentre en Angleterre en , Ă  la suite d'allĂ©gations d’affaires impropres[7] - [8].

Livres sur la magie et l’occulte

Les premiers Ă©crits de Shah sont des Ă©tudes de ce qu’il appelait des “croyances minoritaires”. Son premier livre, Oriental Magic (en) (Magie d’Orient), publiĂ© en 1956, Ă©tait censĂ© s’intituler Considerations in Eastern and African Minority Beliefs (Études des croyances minoritaires de l’Est et d’Afrique). En 1957, il continue avec La tradition secrĂšte de la magie : Livre des sorciers, prĂ©cĂ©demment intitulĂ© De la littĂ©rature sur les croyances minoritaires europĂ©ennes. Selon un contributeur Ă  une publication honorifique dĂ©diĂ©e Ă  Shah en 1973, le titre de ces livres a Ă©tĂ© modifiĂ© avant publication dĂ» aux « exigences des pratiques commerciales de l’édition »[9].

Avant sa mort en 1969, le pĂšre de Shah dĂ©clara que la raison pour laquelle lui et son fils ont publiĂ© des livres au sujet de la magie et de l’occulte Ă©tait « afin de prĂ©venir de possibles reprises ou croyances populaires de ce non-sens par un certain nombre de personnes. Mon fils (...) a finalement terminĂ© cette tĂąche, en accomplissant pendant plusieurs annĂ©es des recherches qui ont abouti Ă  la publication deux livres considĂ©rables Ă  ce sujet. »[11]

Dans un entretien pour Psychology Today datant de 1975, Shah développe :

« Le principal objectif de mes livres sur la magie Ă©tait de rendre disponible ce matĂ©riel au lecteur lambda. Pendant trop longtemps les gens ont cru qu’il existait des livres secrets, des endroits cachĂ©s et des choses Ă©tonnantes. Ils s’agrippaient Ă  ces informations comme Ă  quelque chose avec lequel s’effrayer. Donc, le premier but Ă©tait d’informer. Voici la magie d’Orient et d’Occident. C’est tout. Rien de plus. Le deuxiĂšme objectif de ces livres Ă©tait de montrer qu’il semble bien exister des forces ; certaines d’entre elles Ă©tant soit rationalisĂ©es par cette magie soit issues de cette magie ; qui n’ont pas cours au sein de la physique habituelle ou des expĂ©riences des gens ordinaires. Je pense que cela devrait ĂȘtre Ă©tudiĂ©, que nous devrions rĂ©unir les donnĂ©es et analyser ce phĂ©nomĂšne. En quelque sorte, il nous faut sĂ©parer la chimie de la magie, de l’alchimie[12]. »

Shah poursuit en avançant que ses livres sur le sujet n’ont pas Ă©tĂ© Ă©crits pour les adeptes actuels de la magie et de la sorcellerie, et que, en rĂ©alitĂ©, il devait par la suite Ă©viter ces derniers, car ils n’étaient que déçus par ce qu’il avait Ă  en dire[12].

Ces livres ont été suivis par la publication du carnet de voyage Destination Mecca (en) (1957), qui fut présenté à la télévision par David Attenborough[13]. Destination Mecca et Oriental Magic contiennent des sections au sujet du soufisme[14] - [15].

Liens d’amitiĂ© avec Gerald Gardner et Robert Graves, et publication de The Sufis

Vers la fin des annĂ©es 1950, Shah entre contact avec les cercles Wiccans londoniens ; puis il assume, pour un temps, la fonction de secrĂ©taire et compagnon de Gerald Gardner, le fondateur de la Wicca moderne[7] - [16]. Durant cette pĂ©riode, chaque mardi soir, Shah se trouve en compagnie de quiconque s’intĂ©resse au soufisme Ă  une table du restaurant Cosmo au Swiss Cottage (en) (Nord de Londres)[17].

En 1960, Shah fonde sa propre maison d’édition, Octogon Press (en) ; l’une de ses premiĂšres sorties est la biographie de Gerald Gardner ; intitulĂ©e : Gerald Gardner, Witch (Gerald Gardner, sorcier). AttribuĂ© Ă  l’un des disciples de Gardner, Jack L. Bracelin (en), le livre est en rĂ©alitĂ© rĂ©digĂ© par Shah[16] - [18].

D’aprĂšs Frederic Lamond, le nom de Bracelin fut utilisĂ© par Shah car « il ne voulait pas confondre ses Ă©tudiants soufis en se voyant associĂ© Ă  une tradition Ă©sotĂ©rique. »[17] Lamond raconta que Shah semblait avoir Ă©tĂ© en quelque sorte déçu par Gardner, et lui dit un jour, alors qu’ils buvaient le thĂ© : « Lorsque je m’entretenais avec Gerald, j’aurais parfois voulu ĂȘtre un journaliste du News of the World. Quel merveilleux matĂ©riel pour un exposĂ© ! Et pourtant, je sais de source sĂ»re que ce groupe sera la pierre angulaire de la religion de l’ñge Ă  venir. Mais, de façon rationnelle, je n’arrive pas Ă  le voir[17] ! »

En , lors d’un voyage Ă  Majorque avec Gardner, Shah rencontre le poĂšte Anglais Robert Graves[19]. Shah Ă©crit Ă  Graves depuis sa rĂ©sidence Ă  Palma, lui demandant l’occasion de le « saluer un jour avant trĂšs longtemps »[19]. Il ajoute qu’il est en train d’effectuer des recherches sur les religions extatiques, et qu’il a « assistĂ© (
) Ă  des expĂ©riences conduites par des sorciers en Angleterre, avec ingestion de champignons et ainsi de suite » - un sujet qui intĂ©resse Graves depuis un certain temps[19] - [20].

Shah raconte Ă©galement Ă  Graves qu’il est « profondĂ©ment inquiet en ce moment de l’avenir de la connaissance extatique et intuitive. »[20] Graves et Shah deviennent rapidement bons amis et confidents[19]. Graves aime Ă  soutenir la carriĂšre d’écrivain de Shah et l’encourage Ă  publier un traitĂ© qui fera autoritĂ©, sur le soufisme pour un public occidental, ainsi que sur les moyens pratiques pour son Ă©tude ; et qui deviendra un jour The Sufis (en)[19]. Shah rĂ©ussit Ă  obtenir une avance considĂ©rable pour son livre, rĂ©solvant des difficultĂ©s pĂ©cuniaires temporaires[19].

En 1964, The Sufis apparaĂźt[16], publiĂ© par Doubleday, avec une longue introduction de Robert Graves[21]. Ce livre rapporte en dĂ©tail l’influence du soufisme sur le dĂ©veloppement de la civilisation et de la tradition occidentales depuis le VIIe siĂšcle jusqu’à ce jour ; Ă  travers les travaux de personnalitĂ©s telles que Roger Bacon, Jean de la Croix, Raymond Lulle, Chaucer et d’autres, et devient un classique[22]. Comme les autres livres de Shah sur le sujet, The Sufis Ă©vite remarquablement une terminologie qui pourrait lier son interprĂ©tation du soufisme Ă  l’Islam traditionnel[23].

Ce livre emploie Ă©galement un style dĂ©libĂ©rĂ©ment « dispersĂ© » : Shah Ă©crit Ă  Graves que son but est de « dĂ©conditionner les gens, et de prĂ©venir leur reconditionnement » ; s’il en fut Ă©tĂ© autrement, il aurait pu faire usage d’une forme d’exposition plus conventionnelle[24]. Le livre se vend peu au dĂ©but, et Shah investit une somme considĂ©rable de son argent dans le but de le promouvoir[24]. Graves lui dit de ne pas s’inquiĂ©ter, et ce, mĂȘme s’il a quelques doutes sur l’écriture, et se sent blessĂ© par le fait que Shah refuse qu’il relise le texte avant publication. Il dit avoir Ă©tĂ© « si fier de participer Ă  sa publication », et affirme Ă  Shah que c’est un « livre merveilleux, qui sera reconnu en tant que tel d’ici peu. Laisse-le trouver son propre public ; celui qui entendra ta voix se propager, pas ceux envisagĂ©s par Doubleday[25].

L’introduction rĂ©digĂ©e par Graves, avec l’aide de Shah, dĂ©crit Shah comme faisant partie de « la lignĂ©e masculine des descendants du prophĂšte Mohammed » et comme ayant hĂ©ritĂ© des « mystĂšres et secrets des Califes, ses ancĂȘtres. En effet, il est un Grand Sheikh de la Tariqa (voix soufie)
 »[26] Pourtant, dans une communication privĂ©e Ă  un ami, Graves confie que cela « induit en erreur : il est l’un des nĂŽtres, et non un personnage musulman. »[19]

L.P. Etwell-Sutton, universitaire d’Edimbourg, s’exprimant dans une critique de 1975 de ce qu’il appelait les « pseudo-soufis » comme Gurdjieff et Shah, fit remarquer que Graves avait tentĂ© de « surclasser la lignĂ©e plutĂŽt ordinaire » de Shah. Il dĂ©clare que la rĂ©fĂ©rence Ă  la lignĂ©e masculine des descendants de Mahomet Ă©tait une « gaffe plutĂŽt malheureuse », du fait que les fils de Mahomet Ă©taient tous morts Ă©tant enfants. Bien qu'Elwell-Sutton accepte que la famille de Shah appartienne aux Sayyid, descendants du septiĂšme imam Musa al-Kadhim, l’arriĂšre-arriĂšre-petit-fils de Hussein ibn Ali, qui Ă©tait le plus jeune fils du mariage de Fatima (la fille du prophĂšte Mahomet) et de AlÄ« ibn AbÄ« áčŹÄlib ; il considĂšre cela comme une « descendance ordinaire”, dĂ©pourvue de saintetĂ© particuliĂšre car « les sayyids prolifĂšrent Ă  travers le monde islamique, de tous bords de la sociĂ©tĂ© et de toutes parts de toutes religions et politiques. »[27] - [28] L’introduction n’est pas incluse dans les Ă©ditions du livre de l’Octogon Press aprĂšs 1983 mais a toujours fait partie des Ă©ditions Anchor/Doubleday[29] - [30].

John G. Bennett et le lien Gurdjieff

En , quelques annĂ©es aprĂšs la publication de The Sufis, Shah a Ă©galement Ă©tabli un contact avec les membres du mouvement formĂ© autour des enseignements mystiques de Gurdjieff et d’Ouspensky[27] - [31]. Un article de presse parait[nb 1] dĂ©crivant la visite de l’auteur Ă  un monastĂšre d’Asie Centrale, oĂč des mĂ©thodes remarquablement similaires Ă  celles de Gurdjieff Ă©taient apparemment enseignĂ©es[31]. Il est sous-entendu que ce monastĂšre, par ailleurs non attestĂ©, a un reprĂ©sentant en Angleterre[7]. L’un des premiers Ă©lĂšves d’Ouspensky, Reggie Hoare, qui a fait partie du travail de Gurdjieff depuis 1924, prend contact avec Shah Ă  travers cet article. Hoare « attachait une importance particuliĂšre Ă  ce que Shah lui avait dit au sujet du symbole de l’EnnĂ©agramme et disait que Shah lui avait rĂ©vĂ©lĂ© des secrets Ă  ce propos qui allaient bien au-delĂ  de ce qu’il avait entendu par Ouspensky. »[32] À travers Hoare, Shah est prĂ©sentĂ© aux autres Gurdjieffiens, y compris John G. Bennet, un Ă©lĂšve notable de Gurdjieff et fondateur de l’Institute for the Comparative Study of History, Philosophy and the Sciences (Institut pour l’étude comparative de l’histoire, de la Philosophie et des sciences) situĂ© Ă  Coombe Springs, une propriĂ©tĂ© d'environ 3 hectares (28 000 m2) Ă  Kingston upon Thames, Surrey[32].

À cette Ă©poque, Bennet a dĂ©jĂ  recherchĂ© les origines soufies de beaucoup des enseignements de Gurdjieff, se basant Ă  la fois sur les nombreuses dĂ©clarations de Gurdjieff, et sur ses propres voyages en Orient oĂč il rencontra divers Sheikhs soufis[33]. Il est convaincu que Gurdjieff a adoptĂ© beaucoup des idĂ©es et techniques des soufis et que, pour ceux qui avaient assistĂ© aux confĂ©rences de Gurdjieff au dĂ©but des annĂ©es 1920, « l’origine soufie de ses enseignements Ă©tait facilement reconnaissable par quiconque avait Ă©tudiĂ© les deux. »[33]

Bennet Ă©crit au sujet de sa premiĂšre rencontre avec Shah dans son autobiographie Witness (1974) :

« Au dĂ©but, j’étais sur mes gardes. J’avais tout juste dĂ©cidĂ© d’avancer seul et dĂ©sormais un autre « maĂźtre » apparaissait. Une ou deux conversations avec Reggie m’avait convaincu que je devais au moins voir par moi-mĂȘme. Elizabeth et moi sommes allĂ©s diner avec les Hoare pour rencontrer Shah, qui s’est rĂ©vĂ©lĂ© ĂȘtre un jeune homme au dĂ©but de sa quarantaine. Il parlait un anglais impeccable et, hormis sa barbe et quelques-uns de ses gestes, il aurait pu ĂȘtre pris pour un anglais issu d’une Ă©cole privĂ©e. Notre premiĂšre impression fut dĂ©favorable. Il Ă©tait agitĂ©, fumait sans cesse et semblait trop vouloir faire bonne impression. Au milieu de la soirĂ©e, notre attitude avait complĂštement changĂ©e. Nous reconnaissions qu’il Ă©tait non seulement un homme extraordinairement douĂ©, mais qu’il avait Ă©galement un je-ne-sais-quoi, la marque de quelqu’un qui a sĂ©rieusement travaillĂ© sur lui-mĂȘme
 Connaissant Reggie comme un homme trĂšs attentif, entrainĂ© de surcroĂźt Ă  Ă©valuer les informations durant plusieurs annĂ©es aux services des renseignements, j’acceptai ses assurances et Ă©galement sa croyance que Shah avait une mission trĂšs importante en Occident que nous devions l’aider Ă  accomplir. »[32] »

Shah donna Ă  Bennet une « DĂ©claration du Peuple de la Tradition » (Declaration of the People of the Tradition)[34] et l’autorisa Ă  la partager avec les autres « Gurdjieffiens »[31]. Le document annonçait qu’il y avait dĂ©sormais une opportunitĂ© pour la transmission « d’une forme supĂ©rieure de connaissance cachĂ©e et secrĂšte » ; cela et l’impression personnelle de Bennet sur Shah, convainquirent Bennet que Shah Ă©tait un Ă©missaire authentique du « MonastĂšre de Sarmoung (en) » en Afghanistan, un cercle interne des soufis dont les enseignements ont inspirĂ© Gurdjieff[31] - [35].

A qui la barbe ? Nasrudin rĂȘvait qu’il tenait la barbe de Satan dans sa main. En tirant sur un poil, il cria : « la douleur que tu ressens n’est rien comparĂ©e Ă  celle que tu infliges aux mortels pervertis. » Et il tira sur la barbe tellement fort qu’il se rĂ©veilla dans un cri d’agonie. C’est Ă  ce moment qu’il comprit que la barbe qu’il tenait Ă©tait la sienne. − Idries Shah[36]

Durant les quelques annĂ©es qui suivent, Bennet et Shah s’entretiennent en privĂ© toutes les semaines pendant des heures. Plus tard, Shah donne Ă©galement des confĂ©rences aux Ă©tudiants de Coombe Springs. Bennet rapporte que le projet de Shah souhaite « atteindre les personnes qui occupent des postes de pouvoir et d’autoritĂ©, et dĂ©jĂ  Ă  moitiĂ© conscients que les problĂšmes du genre humain ne peuvent plus ĂȘtre rĂ©solus par voie Ă©conomique, politique ou sociale. De telles personnes, dit-il, sont touchĂ©es par les nouvelles forces en mouvement dans le monde pour aider le genre humain Ă  survivre Ă  la crise Ă  venir. »[32]

Bennet est d’accord avec ces idĂ©es et Ă©galement sur le fait que « les personnes attirĂ©es par des mouvements ouvertement spirituels ou Ă©sotĂ©riques possĂšdent rarement les qualitĂ©s requises pour atteindre et occuper des postes de pouvoir » et « qu’il y avait suffisamment de preuves pour croire que, Ă  travers le monde, il y avait dĂ©jĂ  des personnes occupant des positions importantes, qui Ă©taient capables de voir au-delĂ  des barriĂšres de la nationalitĂ© et de la culture et qui pourraient voir par elles-mĂȘmes que le seul espoir pour l’humanitĂ© repose dans l’intervention d’une Source SupĂ©rieure. »[32]

Bennet Ă©crit, « j’ai assez vu Shah pour savoir qu’il n’est pas un charlatan ou un vantard oisif et qu’il est profondĂ©ment sĂ©rieux Ă  propos de la tĂąche qu’il lui a Ă©tĂ© confiĂ©e. »[32] DĂ©sirant soutenir le travail de Shah, Bennet dĂ©cide en 1965, aprĂšs avoir agonisĂ© pendant longtemps et discutĂ© de ce sujet avec le conseil et les membres de son Institut, de donner la propriĂ©tĂ© de Coombe Springs Ă  Shah, qui insiste sur le fait qu’un tel don doit ĂȘtre fait sans attachement[7] - [31]. Une fois la propriĂ©tĂ© transfĂ©rĂ©e, Shah interdit aux associĂ©s de Bennet de venir, et fait en sorte que Bennet lui-mĂȘme s’y sente mal Ă  l’aise[31].

Bennet dit avoir reçu une invitation aux « Midsummer Revels », une fĂȘte que Shah tenait Ă  Coombe Springs pendant deux jours et deux nuits, originairement pour les jeunes gens que Shah souhaitait attirer[32]. Anthony Blake (en), qui avait travaillĂ© avec Bennet pendant 15 ans, dit : « lorsque Idries Shah acquit Coombe Springs, sa principale activitĂ© Ă©tait d’organiser des rĂ©ceptions. Je ne l’ai rencontrĂ© que quelques fois mais j’ai suffisamment pu apprĂ©cier son attitude irrĂ©vĂ©rencieuse. Bennet m’a dit un jour : « il y a diffĂ©rents styles dans le travail. Le mien est comme celui de Gurdjieff, autour de la lutte avec son propre dĂ©ni. Celui de Shah est de considĂ©rer le travail comme une plaisanterie. »[37]

AprĂšs plusieurs mois, Shah vend le terrain (d’une valeur supĂ©rieure Ă  100 000 ÂŁ) Ă  un promoteur immobilier et utilise l’argent pour s’établir, lui-mĂȘme et ses affaires, Ă  Langton House situĂ©e Ă  Langton Green, prĂšs de Tunbridge Wells, une propriĂ©tĂ© d'environ 25 hectares qui appartenait Ă  la famille de Lord Baden-Powell, fondateur des Boy Scouts[31] - [38].

Avec la propriĂ©tĂ© de Coombe Springs, Bennet remet Ă©galement le soin de son corps d’élĂšves Ă  Shah, comprenant quelque00 personnes[31]. Shah promet qu’il intĂšgrera tous ceux qui seront appropriĂ©s ; environ la moitiĂ© trouve une place dans le travail de Shah[31]. Quelque 20 ans plus tard, l’auteur Gurdjieffien James Moore (en) suggĂšre que Bennet a Ă©tĂ© dupĂ© par Shah[7]. Bennet fait un compte-rendu Ă  ce sujet dans son autobiographie (1974) ; il y raconte que le comportement de Shah aprĂšs le transfert de la propriĂ©tĂ© Ă©tait « dur Ă  supporter », mais insiste Ă©galement sur le fait que Shah Ă©tait un « homme raffinĂ© aux maniĂšres exquises et Ă  la sensibilitĂ© dĂ©licate » et considĂšre que Shah ait pu adoptĂ© ce comportement volontairement « pour s’assurer que tous les liens avec Coombe Springs aient Ă©tĂ© rompus »[31]. Il ajoute que Langton Green Ă©tait un endroit bien plus adaptĂ© pour le travail de Shah que Coombe Springs aurait pu l’ĂȘtre et dit ne pas avoir ressenti de peine quant Ă  la perte d’identitĂ© de Coombe Springs. Il conclut son rĂ©cit de la chose en dĂ©clarant qu’il avait « gagnĂ© en libertĂ© » Ă  travers le contact de Shah, et qu’il avait appris « Ă  aimer les gens qu’il ne pouvait pas comprendre »[39].

D’aprĂšs Bennet, Shah s’est par la suite impliquĂ© dans des discussions avec les dirigeants des groupes de Gurdjieff Ă  New York. Dans un lettre Ă  Paul Anderson du , Bennet Ă©crit : « Madame de Salzmann et tous les autres (
) sont conscients de leurs propres limitations et ne font guĂšre plus que ce qu’ils sont capables de faire. Lorsque j’étais Ă  New York, Elizabeth et moi-mĂȘme visitions la Fondation, et nous y vĂźmes la plupart des dirigeants du groupe de New York ainsi que Jeanne de Salzmann elle-mĂȘme. Quelque chose se prĂ©pare, mais je ne peux dire si cela portera ses fruits ou non. Je me rĂ©fĂšre Ă  leur connexion avec Idries Shah et ses capacitĂ©s pour tout mettre sens dessus dessous. Il est inutile avec ces gens d’ĂȘtre passif, et il est inutile d’éviter le sujet. Pour le moment, nous ne pouvons qu’espĂ©rer qu’un bien en sortira, et en attendant continuer notre propre travail
”[40]

L’auteur et psychologue clinicien Kathleen Speeth Ă©crit plus tard :

« TĂ©moin du conservatisme grandissant au sein de la Fondation [Gurdjieff], John Bennet espĂ©rait qu’un sang nouveau et qu’un dirigeant arriverait de quelque part
 Bien qu’il y ait eu un rapprochement avec Shah, rien n’en fut. Le sentiment dominant [parmi les dirigeants du travail de Gurdjieff] que rien ne devait changer, qu’un trĂ©sor dans leur bonne garde devait Ă  tout prix ĂȘtre prĂ©servĂ© dans sa forme originelle, Ă©tait plus fort que tout souhait d’une nouvelle vague d’inspiration. »[40] »

Les Ă©tudes et instituts soufis

En 1965, Shah fonde la Society for Understanding Fundamental Ideas (SUFI ; sociĂ©tĂ© pour la comprĂ©hension des idĂ©es fondamentales), plus tard renommĂ©e Institute for Cultural Research (en) (ICR ; Institut pour recherche culturelle) – une Ɠuvre de charitĂ© pĂ©dagogique visant Ă  stimuler « l’étude, le dĂ©bat, l’éducation et la recherche dans tous les aspects de la pensĂ©e, du comportement et de la culture de l’Homme »[21] - [41] - [42] - [43]. Il Ă©tablit Ă©galement la Society for Sufi Studies (SSS ; sociĂ©tĂ© pour les Ă©tudes soufies)[44].

Shah considĂšre que la meilleure maniĂšre de prĂ©senter la sagesse soufie en Occident, tout en rĂ©solvant les problĂšmes des gourous et des sectes, est de clarifier la diffĂ©rence entre une secte et un systĂšme Ă©ducatif, et de contribuer Ă  la connaissance. Dans un entretien, il explique : « Il vous faut travailler au sein d’un modĂšle Ă©ducatif – pas dans le domaine du charabia»[45]. Dans le cadre de son approche, il incarne le rĂŽle de Directeur des Ă©tudes Ă  l’ICR[45]. Il donne Ă©galement des confĂ©rences sur l’étude du soufisme en Occident Ă  l’universitĂ© du Sussex en 1966. Cela fut ensuite publiĂ© comme monographie intitulĂ©e Les problĂšmes spĂ©ciaux de l’étude des idĂ©es Soufies[46].

Langton House Ă  Langton Green devient un lieu de rassemblement et de discussion pour les poĂštes, les philosophes et les hommes d’état du monde entier, et un lieu consacrĂ© de la scĂšne littĂ©raire de ce temps[47]. L’ICR y tient des rĂ©unions et y donne des confĂ©rences, remettant des attestations de membres Ă  des universitaires internationaux incluant Sir John Glubb, Aquila Berlas Kiani (en), Richard Gregory et Robert Cecil, le dirigeant des Ă©tudes europĂ©ennes Ă  l’universitĂ© de Reading qui devint prĂ©sident de l’institut au dĂ©but des annĂ©es 1970[47] - [48]. Shah est un membre et partisan de longue date du Club de Rome[nb 2], et plusieurs prĂ©sentations ont Ă©tĂ© donnĂ©es Ă  l’Institut par des scientifiques tels que Alexander King[49] - [50] - [51].

D’autres visiteurs, Ă©lĂšves et prĂ©tendants-Ă©lĂšves comprennent le poĂšte Ted Hughes, les Ă©crivains J. D. Salinger, Alan Sillitoe et Doris Lessing, le zoologue Desmond Morris et le psychologue Robert Ornstein. L’intĂ©rieur de la maison est dĂ©corĂ©e dans un style moyen-oriental, et les buffets sont tenus le dimanche midi pour les invitĂ©s dans un grand salon, qui fut un temps une Ă©table, surnommĂ©e « L’élĂ©phant » (un clin d’Ɠil au conte oriental « L’élĂ©phant dans le noir »)[38].

Durant les annĂ©es suivantes, Shah dĂ©veloppe Octogon Press (en) comme moyen de publier et de distribuer les rĂ©Ă©ditions des traductions de nombreux classiques soufis[52]. De plus, il rassemble, traduit et Ă©crit des milliers de contes soufis, les rendant disponibles au public occidental Ă  travers ses livres et ses confĂ©rences[44]. Plusieurs des livres de Shah prĂ©sentent le personnage du Mullah Nasrudin, parfois accompagnĂ© d’illustrations fournies par Richard Williams. Dans l’interprĂ©tation de Shah, les histoires du Mulla Nasrudin, prĂ©cĂ©demment considĂ©rĂ©es comme faisant partie du folklore de la culture musulmane, sont prĂ©sentĂ©es comme des paraboles soufies[53].

Nasrudin fut prĂ©sentĂ© dans le documentaire tĂ©lĂ©visuel de Shah Dreamwalkers, qui fut diffusĂ© sur la BBC en 1970. Des segments incluent Richard Williams Ă©tant interviewĂ© au sujet de son dessin animĂ© incomplet sur Nasrudin, et le scientifique John Kermish discutant l’utilisation des histoires de Nasrudin au Rand Corporation Think Tank. D’autres invitĂ©s incluent le psychiatre anglais William Sargant discutant des effets indĂ©sirables du lavage de cerveau et du conditionnement social sur la crĂ©ativitĂ© et la rĂ©solution de problĂšmes, et le comĂ©dien Marty Feldman parlant avec Shah Ă  propos du rĂŽle de l’humour et du rituel dans la vie humaine. L’émission finit avec Shah dĂ©clarant que l’humanitĂ© pourrait continuer sa propre Ă©volution en « rompant les limitations psychologiques » mais qu’il y a une accumulation constante de pessimisme qui prĂ©vient efficacement l’évolution de poursuivre de cette façon (
) L’homme est endormi – doit-il mourir avant de se rĂ©veiller ? »[54]

Shah organise Ă©galement des groupes d’étude soufis aux États-Unis. Claudio Naranjo, un psychiatre chilien qui enseigne en Californie Ă  la fin des annĂ©es 1960, dit que, aprĂšs avoir Ă©tĂ© « déçu quant au fait que l’école Gurdjieff impliquait une lignĂ©e vivante », il s’était tournĂ© vers le soufisme et avait « fait partie du groupe sous la direction de Idries Shah. »[55] Naranjo co-Ă©crit ensuite un livre avec Robert Ornstein, intitulĂ© On The Psychology of Meditation (De la psychologie de la mĂ©ditation ; 1971). Tous deux sont associĂ©s Ă  l’universitĂ© de Californie oĂč Ornstein est psychologue chercheur Ă  l’Institut psychiatrique de Langley Porter[56].

Ornstein est Ă©galement le prĂ©sident et fondateur de l’Institut pour l’étude de la connaissance humaine (en), Ă©tabli en 1969. Percevant un besoin aux États-Unis pour des livres et des collections sur les anciennes et nouvelles façons de penser, il forme l’ISHK Book Service en 1972 comme une source centrale de la littĂ©rature contemporaine et traditionnelle d’importance, devenant l’unique distributeur aux États-Unis des travaux d’Idries Shah publiĂ©s par Octogon Press[57].

Un autre associĂ© de Shah, le scientifique et professeur Leonard Lewin (en), qui Ă  l’époque enseigne la tĂ©lĂ©communication Ă  l’universitĂ© du Colorado, met en place des groupes d’étude soufis et d’autres organisations pour la promotion des idĂ©es soufies, comme l’Institut pour la recherche sur la dissĂ©mination de la connaissance humaine (IRDHK), et publie Ă©galement une anthologie des Ă©crits de et sur Idries Shah intitulĂ©e La diffusion des idĂ©es Soufies en Occident (The Diffusion of Sufi Ideas in the West ; 1972)[58] - [59].

Shah explique plus tard que les activités soufies étaient divisées en différentes composantes et départements : « études en soufisme », « études du soufisme » et « études pour le soufisme »[60].

Les Ă©tudes pour le soufisme aident Ă  diriger les gens vers le soufisme et incluent la promotion de la connaissance qui peut manquer dans la culture et nĂ©cessite sa restauration et sa diffusion, telle qu’une comprĂ©hension du conditionnement social et du lavage de cerveau, la diffĂ©rence entre le rationnel et les modes intuitifs de pensĂ©e, et d’autres activitĂ©s ; afin que l’esprit des gens puisse devenir plus libre et Ă©tendu. Les Ă©tudes du soufisme incluent les institutions et les activitĂ©s, telles que les confĂ©rences et les sĂ©minaires, qui fournissent des informations sur le soufisme et agissent en tant que liaison culturelle entre les soufis et le public. Enfin, les Ă©tudes en soufisme se rĂ©fĂšrent Ă  une Ă©cole soufie, effectuant les activitĂ©s prescrites par l’enseignant en tant qu’entrainement, et cela peut prendre bien des formes qui ne rentrent pas nĂ©cessairement dans la notion prĂ©conçue d’une « Ă©cole mystique »[60].

Les objectifs et les méthodologies soufis de Shah sont également définis dans la « Déclaration du peuple de la Tradition » fournie à Coombe Springs :

« En plus de faire cette annonce, de nourrir certains champs de pensĂ©e et idĂ©es, et d’indiquer quelques-uns des facteurs entourant ce travail, les concepteurs de cette dĂ©claration ont une tĂąche pratique. Cette tĂąche est de localiser les individus qui ont la capacitĂ© d’obtenir une connaissance spĂ©ciale de l’homme disponible ; de les regrouper d’une maniĂšre particuliĂšre, et non alĂ©atoire, afin que chacun de ces groupes forme un organisme harmonieux ; de le faire au bon endroit et au bon moment ; de fournir un format externe et intĂ©rieur avec lequel travailler, ainsi qu’une formulation des « idĂ©es » convenables aux conditions locales ; d’équilibrer la thĂ©orie avec la pratique[32]. »

La controverse Omar KhayyĂąm

À la fin des annĂ©es 1960 et au dĂ©but des annĂ©es 1970, Shah est attaquĂ© au sujet d’une controverse concernant la publication en 1967 d’une nouvelle traduction des Rubaiyat (quatrains) d’Omar KhayyĂąm, par Robert Graves et le grand-frĂšre de Shah, Omar Ali-Shah[21] - [61]. La traduction, qui prĂ©sente le Rubaiyat comme un poĂšme soufi, est basĂ©e sur une « copie » annotĂ©e, prĂ©tendument dĂ©rivĂ©e d’un manuscrit qui aurait Ă©tĂ© en la possession de la famille Shah depuis 800 ans[62]. L. P. Elwell-Sutton, un orientaliste de l’universitĂ© d’Édimbourg et d’autres qui avaient reçu le livre exprimĂšrent leur conviction que l'histoire de l'ancien manuscrit Ă©tait fausse[61] - [62].

Graves s’attendait Ă  ce que le pĂšre de Shah, le Sirdar Ikbal Ali Shah (en), prĂ©sente le manuscrit original afin de clarifier l’affaire, mais il mourut dans un accident de voiture Ă  Tanger en [63]. Un an plus tard, Graves demande Ă  Shah de fournir le manuscrit. Shah rĂ©pond dans une lettre que le manuscrit n’est pas en sa possession, mais que, mĂȘme si cela avait Ă©tĂ© le cas, le lui fournir ne prouverait rien, car il ne pouvait pas ĂȘtre datĂ© avec prĂ©cision Ă  l’aide des mĂ©thodes actuelles et que son authenticitĂ© serait contestĂ©e[63]. Il Ă©tait temps, Ă©crit Shah, « que nous comprenions que les hyĂšnes qui font tant de bruit ne cherchent que l’opposition, la destructivitĂ© et la bonne marche de leur campagne quand, soyons honnĂȘtes, personne n’écoute rĂ©ellement »[63]. Il ajoute que ceux rĂ©pandant ces calomnies avaient rendu son pĂšre si furieux qu’il refusa de collaborer avec eux, et qu’il a le sentiment que la rĂ©ponse de son pĂšre avait Ă©tĂ© correcte[63]. Graves, remarquant qu’il est dĂ©sormais largement perçu comme s’étant fait avoir par le grossier mensonge du frĂšre de Shah, et que cela affecte les revenus sur les ventes de ses autres Ă©crits historiques, insiste sur le fait que fournir le manuscrit est devenu « une question d’honneur de famille »[63]. Il presse Shah de nouveau, lui rappelant sa promesse de fournir le document si nĂ©cessaire[63].

Aucun des frĂšres ne fournit le manuscrit, laissant les neveux et le biographe de Graves mĂ©diter sur ce qui Ă©tait dur Ă  croire – gardant en tĂȘte les nombreuses obligations des frĂšres Shah envers Graves – que ces derniers avaient conservĂ© pour eux le manuscrit quand bien mĂȘme il aurait existĂ©[63]. D’aprĂšs sa veuve, Ă©crivant bien des annĂ©es plus tard, Graves avait « entiĂšrement foi » dans l’authenticitĂ© du manuscrit du fait de son amitiĂ© avec Shah, mĂȘme s’il n’avait jamais eu l’occasion de voir le texte de ses propres yeux[64]. Le consensus des Ă©rudits aujourd’hui est que le manuscrit de « Jan-Fishan Khan (en) » Ă©tait bien un canular, et que la traduction de Graves/Ali Shah Ă©tait en rĂ©alitĂ© basĂ©e sur l’analyse, par un universitaire amateur Victorien, des sources utilisĂ©es par le prĂ©cĂ©dent traducteur des Rubayats, Edward Fitzgerald[7] - [61] - [65] - [66].

DeuxiÚme moitié de vie

Shah Ă©crit deux autres douzaines de livres dans la dĂ©cennie qui suit, beaucoup d’entre eux sur les sources soufies classiques[7]. Atteignant une grande Ă©tendue mondiale[41], ses travaux attirent premiĂšrement un public occidental intellectuel[23]. En traduisant les enseignements soufis dans un langage psychologique contemporain, il leur prĂ©sente en des termes vernaculaires et donc accessibles[67]. Ses contes populaires, illustrant la sagesse soufie par le biais d’anecdotes et d’exemples, s’avĂšrent particuliĂšrement populaires[23] - [41]. Shah reçoit et accepte des invitations pour donner des confĂ©rences en tant que professeur-invitĂ© dans des institutions acadĂ©miques incluant l’universitĂ© de Californie, l’universitĂ© de GenĂšve, l’universitĂ© nationale de La Plata et diffĂ©rentes universitĂ©s anglaises[68]. En plus de son travail littĂ©raire et pĂ©dagogique, il trouve le temps de concevoir un ioniseur d’air (crĂ©ant une entreprise avec Coppy Laws) et de diriger un certain nombre de sociĂ©tĂ©s textiles, cĂ©ramiques et Ă©lectroniques[38]. Il entreprend Ă©galement divers voyages dans son Afghanistan ancestral et s’implique pour mettre en place des interventions de secours ; il conte ces expĂ©riences plus tard dans son livre Kara Kush, un roman sur la guerre soviĂ©tique en Afghanistan[21].

Vie personnelle

Shah se marie avec Cynthia (Kashfi) Kabraji en 1958 ; ils ont une fille, Saira (en), en 1964, suivie de jumeaux – un fils, Tahir, et une autre fille, Safia (en) – en 1966[69].

Maladie

À la fin du printemps 1987, environ un aprĂšs sa derniĂšre visite en Afghanistan, Shah souffre de deux fortes crises cardiaques successives[43] - [70]. Il apprend qu’il ne lui reste plus que 8 % de ses capacitĂ©s cardiaques et ne peut s’attendre Ă  en survivre[43]. MalgrĂ© des accĂšs de maladie intermittents, il continue de travailler et de produire d’autres livres au fil des neuf annĂ©es suivantes[43] - [70].

DĂ©cĂšs

Idries Shah meurt Ă  Londres le , Ă  l’ñge de 72. Selon la rubrique nĂ©crologique du The Daily Telegraph, Idries Shah collabora avec les Moudjahidines durant la guerre soviĂ©tique en Afghanistan, il fut un temps le directeur d’étude pour l’Institut pour la recherche culturelle et le gouverneur de la Royal Humane Society (en) et du Royal Hospital and Home for Incurables (en)[43]. Il Ă©tait Ă©galement membre du Club Athenaeum[7]. Au moment de sa mort, les livres de Shah se sont vendus Ă  plus de 15 millions d’exemplaires dans douze langues Ă  travers le monde[8], et ont Ă©tĂ© rĂ©visĂ©s dans de nombreux journaux et revues internationaux[71] - [72].

Enseignements

Le soufisme comme une forme de sagesse intemporelle

Shah prĂ©sentait le soufisme comme une forme de sagesse intemporelle ayant prĂ©cĂ©dĂ© l’islam[73]. Il insistait sur le fait que la nature du soufisme Ă©tait vivante, et non statique, et qu’elle adaptait toujours ses manifestations visibles Ă  l’époque, au lieu et aux personnes : « Les Ă©coles soufies sont comme des vagues qui se brisent sur des rochers : [elles viennent] de la mĂȘme mer, sous des formes diffĂ©rentes, dans le mĂȘme but » Ă©crit-il, citant Ahmad al-Badawi[44] - [73]. Shah contestait souvent les descriptions du soufisme par les orientalistes, soutenant que les Ă©tudes acadĂ©miques ou personnelles de ses formes et de ses mĂ©thodes historiques n’étaient pas une base suffisante pour en avoir une comprĂ©hension correcte[73]. En fait, une obsession pour ses formes traditionnelles peut rĂ©ellement devenir un obstacle : « Montre Ă  un homme trop d’os de chameaux, et montre-les-lui trop souvent, et il sera incapable de reconnaĂźtre un chameau quand il en rencontrera un vivant », idĂ©e qu’il exprimait ainsi dans l’un de ses livres[73] - [74].

Shah, comme Inayat Khan, prĂ©sentait le soufisme comme un chemin qui transcendait les religions individuelles, et qu’il adaptait Ă  une audience occidentale[52]. Cependant, Ă  la diffĂ©rence de Khan,, il accordait une moindre importance aux signes extĂ©rieurs religieux et spirituels, prĂ©fĂ©rant dĂ©crire le soufisme comme une technique psychologique, une mĂ©thode ou une science qui permet d’atteindre la rĂ©alisation de soi[52] - [75]. Ce faisant, son approche semblait s’adresser spĂ©cialement aux disciples de Gurdjieff, aux Ă©tudiants de l’Institut pour le DĂ©veloppement Harmonieux de l’Homme (Human Potential Movement), et aux intellectuels familiarisĂ©s avec la psychologie moderne[52]. Par exemple, il Ă©crivait : « Le soufisme (
) affirme que l’homme peut devenir objectif et que l’objectivitĂ© permet Ă  l’individu de saisir des faits â€˜Ă©levĂ©s’. L’homme est donc invitĂ© Ă  poursuivre son Ă©volution vers ce qui est quelquefois appelĂ© dans le soufisme ‘le vrai intellect’ »[52]. Shah enseignait que l’ĂȘtre humain pouvait acquĂ©rir de nouveaux organes subtils en rĂ©ponse Ă  un besoin[44] :

« Les Soufis croient que, d’une certaine maniĂšre, l’humanitĂ© Ă©volue vers un certain destin. Nous faisons tous partie de cette Ă©volution. Les organes naissent en rĂ©ponse au besoin d’organes spĂ©cifiques (Rumi). L’organisme humain produit un nouvel ensemble d’organes afin de rĂ©pondre Ă  un tel besoin. En cette Ă©poque de transcendance de l’espace et du temps, l’ensemble des organes s’en trouve concernĂ©. Les apparitions soudaines d’un pouvoir de tĂ©lĂ©pathie et de prĂ©diction que les gens ordinaires considĂšrent comme sporadiques et occasionnels ne sont pour les Soufis rien de moins que les premiĂšres apparitions de ces mĂȘmes organes. La diffĂ©rence entre toute l’évolution jusqu’à ce jour et le besoin actuel d’évolution est que depuis environ dix mille ans nous avons eu la possibilitĂ© d’évoluer consciemment. Cette Ă©volution qui s’est rarĂ©fiĂ©e est si essentielle que notre futur en dĂ©pend. »

— Idries Shah, The Sufis[3]

Shah rejetait les reprĂ©sentations orientales ou occidentales du soufisme comme Ă©tant « diluĂ©es, gĂ©nĂ©ralisĂ©es ou partielles» ; il y incluait non seulement la version de Khan, mais aussi les formes ouvertement musulmanes du soufisme que l’on trouve dans la plupart des pays islamiques[52]. Les Ă©crits des associĂ©s de Shah laissaient entendre qu’il Ă©tait le « Grand Sheikh des soufis » – une position d’autoritĂ© fragilisĂ©e par le refus de tous les autres soufis de reconnaĂźtre son existence[52].

Dans une interview Ă  la BBC en 1971, Shah expliquait ainsi sa dĂ©marche contemporaine d’adaptation : « Je cherche Ă  rendre accessible en Occident ces aspects du soufisme qui seront utiles Ă  l’Occident d’aujourd’hui. Je ne veux pas transformer de bons EuropĂ©ens en mĂ©diocres Orientaux. Les gens m’ont demandĂ© pourquoi je n’utilise pas les mĂ©thodes traditionnelles d’entraĂźnement spirituel, par exemple en traitant avec les gens qui me recherchent ou me poursuivent ; et bien sĂ»r, la rĂ©ponse est que c’est pour la mĂȘme raison que vous ĂȘtes venu chez moi aujourd’hui en voiture et non Ă  dos de chameau. En fait, le soufisme n’est ni un systĂšme mystique, ni une religion, mais un corpus de connaissances. »[58]

Shah dĂ©crivait frĂ©quemment une partie de son Ɠuvre comme n’étant en fait qu’un prĂ©liminaire Ă  la vĂ©ritable Ă©tude soufie, de la mĂȘme maniĂšre qu’apprendre Ă  lire et Ă  Ă©crire peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un prĂ©liminaire Ă  l’étude de la littĂ©rature : « A moins que la psychologie ne soit correctement orientĂ©e, on ne peut parler de spiritualitĂ©, mais plutĂŽt d’obsession et d’émotion qui en prennent l’apparence. »[76] - [77] « Quiconque essaie de greffer des pratiques spirituelles sur une personnalitĂ© non rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e, expliquait-il, obtiendra une aberration. »[76]. C’est pour cette raison que la plupart du travail qu’il rĂ©alisa depuis Les soufis Ă©tait de nature psychologique, et avait pour but d’attaquer le nafs-i-ammara, le faux Ă©go : « Je n’ai rien Ă  vous donner, sinon la maniĂšre de comprendre comment chercher – mais vous pensez que vous savez dĂ©jĂ  le faire. »[76] Shah Ă©tait frĂ©quemment critiquĂ© de ne mentionner Dieu que trĂšs rarement dans ses Ă©crits ; sa rĂ©ponse Ă©tait qu’étant donnĂ© l’état actuel de l’Homme, il n’y avait pas vraiment de raison de parler de Dieu[76]. Il illustrait le problĂšme avec une parabole dans son livre Penseurs d’Orient : « Ayant dĂ©couvert comment parler la langue des fourmis, je m’approchais de l’une d’entre elles et lui demandais « Comment est Dieu ? Est-ce qu’il ressemble Ă  une fourmi ? » Elle rĂ©pondit « Dieu ! pas du tout – nous n’avons qu’un dard mais Dieu, Lui, en a deux ! »[76] - [78]

Les histoires-enseignements

Shah utilisait les histoires-enseignements et l’humour pour augmenter l’effet de son travail[73] - [79]. Il mettait l’accent sur la fonction thĂ©rapeutique d’anecdotes surprenantes, et les perspectives originales que ces contes rĂ©vĂ©laient[80]. La lecture et la discussion autour de tels contes dans un groupe Ă©tabli devenaient une part significative des activitĂ©s dans lesquelles les membres des cercles d’études de Shah Ă©taient engagĂ©s[53]. La transformation effectuĂ©e par ces contes Ă©nigmatiques ou surprenants, capables de dĂ©stabiliser le mode de conscience normale (non-conscient) d’un Ă©tudiant, fut Ă©tudiĂ©e par Robert Ornstein, professeur de psychologie Ă  l’UniversitĂ© Stanford. Ce dernier fut l’un des nombreux penseurs renommĂ©s profondĂ©ment influencĂ©s par Shah, tout comme son collĂšgue psychologue Charles Tart[81] et d’éminents Ă©crivains tels que Ted Hughes[82], poĂšte laurĂ©at britannique, et la romanciĂšre et Prix Nobel de LittĂ©rature, Doris Lessing[44] - [83] - [80] - [84].

Shah et Ornstein se rencontrĂšrent dans les annĂ©es 1960[84]. Comprenant qu’Ornstein pouvait ĂȘtre un partenaire idĂ©al pour la diffusion de son enseignement, par sa transposition dans le langage de la psychothĂ©rapie, Shah en fit son dĂ©putĂ© (khalifa) aux États-Unis[80] - [84]. Le livre The Psychology of Consciousness d’Ornstein fut reçu avec enthousiasme par la communautĂ© officielle dans le domaine de la psychologie, car cela coĂŻncidait avec un nouvel intĂ©rĂȘt dans ce domaine, tels que l’étude du biofeedback et autres techniques conçues pour provoquer des changements d’humeur et de conscience[84]. Ornstein a publiĂ© d’autres livres sur le sujet durant toutes ces annĂ©es[84].

Le philosophe des sciences et physicien Henri Bortoft se servait des contes-enseignements issus du corpus de Shah comme analogies pour les habitudes mentales empĂȘchant les gens de comprendre la mĂ©thode scientifique de Johann Wolfgang von Goethe. Dans son livre The wholeness of Nature: Goethe's Way of Science, on trouve des contes provenant de Contes Derviches, Les Exploits de l’incroyables Mulla Nasrudin et A Perfumed Scorpion[85].

Dans leur cadre historique et culturel d’origine, les histoires Ă©ducatives soufies popularisĂ©es par Shah (d’abord racontĂ©es oralement, puis Ă©crites afin de transmettre la foi et la pratique soufie aux gĂ©nĂ©rations successives) Ă©taient considĂ©rĂ©es comme convenant aux personnes de tous les Ăąges, y compris les enfants, dans la mesure oĂč elles contenaient de multiples niveaux de signification[44]. Shah comparait l’histoire soufie Ă  une pĂȘche : « Vous pouvez ĂȘtre Ă©mu par l’extĂ©rieur, comme si la pĂȘche vous Ă©tait offerte. Vous pouvez manger la pĂȘche et en apprĂ©cier la saveur
 Vous pouvez jeter le noyau, ou l’ouvrir et trouver dedans une dĂ©licieuse graine. Ceci est la profondeur cachĂ©e. »[44] C’était de cette maniĂšre que Shah invitait son auditoire Ă  recevoir l’histoire soufie[44]. N’arrivant pas Ă  dĂ©couvrir la graine, et considĂ©rant l’histoire comme simplement amusante ou superficielle, une personne ne faisait rien d’autre que regarder la pĂȘche, tandis que d’autres internalisaient le conte, et en Ă©taient ainsi touchĂ©s[44].

Tahir Shah Ă©voque l’utilisation des contes par son pĂšre Ă  plusieurs reprises dans son livre In Arabian Nights publiĂ© en 2008, en examinant tout d’abord la maniĂšre dont Idries Shah utilisait les histoires-enseignements. Il Ă©crit : « Mon pĂšre ne nous disait jamais comment les histoires fonctionnaient. Il ne rĂ©vĂ©lait pas les couches, les prĂ©cieuses informations, les fragments de vĂ©ritĂ© et de fantaisie. Il n’en avait pas besoin : car, dĂ©livrĂ©es au bon moment, les histoires s’activaient et se semaient elles-mĂȘmes. »[86] Ensuite, il explique comment son pĂšre utilisait ces histoires pour communiquer la sagesse : « Mon pĂšre avait toujours un conte sous la main pour dĂ©tourner notre attention, ou comme moyen de transmettre une idĂ©e ou une pensĂ©e. Il disait que les immenses collections d’histoires de l’Orient Ă©taient comme des encyclopĂ©dies, des mines de sagesse et de connaissance prĂȘtes Ă  ĂȘtre Ă©tudiĂ©es, apprĂ©ciĂ©es et chĂ©ries. Pour lui, les histoires reprĂ©sentaient beaucoup plus qu’un simple divertissement. Il les considĂ©rait comme des documents de psychologie complexes, formant un corpus de connaissances qui avait Ă©tĂ© collectĂ© et raffinĂ© depuis l’aube de l’humanitĂ© et la plupart du temps transmis oralement. »[86]

Plus loin dans le livre, il continue l’examen des histoires comme outils d’enseignement en citant l’explication suivante donnĂ©e par son pĂšre Ă  la fin d’une histoire :

« Ces histoires sont des documents techniques, elles sont comme des cartes ou des sortes de plans. Ce que je fais, c’est montrer aux gens comment utiliser ces cartes parce qu’ils ont oubliĂ©. On pourrait penser que c’est une Ă©trange maniĂšre d’enseigner - avec des histoires - mais autrefois c’était la maniĂšre dont on transmettait la sagesse. Chacun savait comment retirer la sagesse de l’histoire. Ils pouvaient voir Ă  travers les strates, de la mĂȘme maniĂšre que l’on peut voir un poisson pris dans un bloc de glace. Mais le monde oĂč nous vivons a perdu cette capacitĂ©, une capacitĂ© qu’ils avaient indubitablement avant. Ils entendent les histoires et ils les aiment, parce que les histoires les amusent, les rĂ©confortent. Mais ils ne savent pas voir au-delĂ  de la premiĂšre strate, Ă  l’intĂ©rieur de la glace.

Les histoires sont comme un bel Ă©chiquier : nous savons tous jouer aux Ă©checs et nous pouvons ĂȘtre entraĂźnĂ©s dans un jeu si compliquĂ© qu’il Ă©puise nos facultĂ©s. Mais imagine que le jeu ait Ă©tĂ© oubliĂ© par une sociĂ©tĂ© depuis des siĂšcles et que cet Ă©chiquier et ses piĂšces soient retrouvĂ©s. Tout le monde s’attrouperait pour le voir et l’honorer. Ils n’imagineraient peut-ĂȘtre jamais qu’un si bel objet ait pu avoir un autre but que de distraire les yeux. La valeur intĂ©rieure des histoires a Ă©tĂ© perdue de la mĂȘme maniĂšre. A un moment donnĂ©, tout le monde savait comment jouer avec elles, comment les dĂ©chiffrer. Mais Ă  prĂ©sent les rĂšgles ont Ă©tĂ© oubliĂ©es. C’est Ă  nous de remontrer aux gens comment le jeu se joue. »

— Tahir Shah, CafĂ© Mabrouk : Maroc des mille et une nuits (In Arabian Nights)[86]

Olav Hammer, dans Soufism in Europe and North America (Soufisme en Europe et en AmĂ©rique du Nord ; 2004), cite un exemple[8]. C’est l’histoire d’un homme qui cherche sa clĂ© par terre[8]. Quand un voisin qui passe par lĂ  lui demande si c’est bien l’endroit oĂč il a perdu la clĂ©, l’homme rĂ©pond : « Non, je l’ai perdu chez moi, mais ici il y a plus de lumiĂšre que dans ma propre maison. »[8]

Peter Wilson, dans New Trends and Developments in the World of Islam (1998), cite une autre histoire de ce genre, en prĂ©sentant un derviche Ă  qui l’on demande de dĂ©crire les qualitĂ©s de son maĂźtre, Alim[87]. Le derviche explique qu’Alim a Ă©crit de magnifiques poĂšmes et que son don de lui-mĂȘme, son service pour son prochain, l’ont inspirĂ©[87]. Son interlocuteur approuve volontiers ces qualitĂ©s, mais voit le derviche lui reprocher : « Ce sont les qualitĂ©s qu’Alim vous aurait recommandĂ©es. »[87] - [88] Puis il Ă©numĂšre les qualitĂ©s qui ont rĂ©ellement permis Ă  Alim d’ĂȘtre un maĂźtre efficace : « Hazrat Alim Azimi m’irritait, ce qui m’obligeait Ă  examiner mon irritation, Ă  remonter Ă  sa source. Alim Azimi me mettait en colĂšre afin que je puisse sentir et transformer ma colĂšre[87]. Il explique qu’Alim Azimi suivait le chemin du blĂąme, provoquant intentionnellement des attaques vicieuses contre lui afin de mettre en lumiĂšre les Ă©checs des Ă©tudiants autant que des critiques, leur permettant ainsi de se voir comme ils Ă©taient rĂ©ellement. : « Il nous montrait l’étrange, afin que l’étrange devienne banal et que nous puissions comprendre ce qu’est la rĂ©alitĂ©. »[87] - [88]

Points de vue sur la culture et la vie pratique

L’objectif de Shah Ă©tait de rĂ©vĂ©ler les bases de toutes les cultures, et les facteurs cachĂ©s qui dĂ©terminent le comportement individuel[41]. Il ne tenait pas compte des prĂ©occupations occidentales sur les apparences et les superficialitĂ©s, qui sont souvent le simple reflet de modes ou d’habitudes, et attirait l’attention sur les origines de la culture et sur les motivations inconscientes et mixtes de personnes et de groupes ainsi formĂ©s[41]. Il mettait Ă©galement en avant le fait qu’autant au niveau individuel qu’au niveau du groupe, des dĂ©sastres Ă  court terme se transforment souvent en bĂ©nĂ©dictions – et vice versa –et pourtant ce savoir n’a que peu d’effet sur la maniĂšre dont les gens rĂ©agissent aux Ă©vĂšnements tels qu’ils ont lieu[41].

Shah ne prĂ©conisait pas l’abandon des devoirs de ce monde ; au contraire, il soutenait que le trĂ©sor recherchĂ© par l’apprenti-disciple devait dĂ©couler de ses luttes dans la vie quotidienne[44]. Il considĂ©rait les travaux pratiques comme le moyen permettant au chercheur de travailler sur lui-mĂȘme, tout comme la traditionnelle adoption par les soufis de professions ordinaires leur permettait de gagner leur vie et de « travailler » sur eux-mĂȘmes[44]. Le statut de Shah comme maĂźtre restait indĂ©finissable ; rĂ©futant tout autant l’identitĂ© de gourou que le moindre dĂ©sir de fonder un culte ou une secte, il refusait aussi de porter le chapeau acadĂ©mique.[39] Michael Rubinstein, dans son livre Makers of Modern Culture, concluait qu’« il vaudrait peut-ĂȘtre mieux le voir comme une incarnation de la Tradition selon laquelle les aspects contemplatifs et intuitifs de l’esprit sont considĂ©rĂ©s comme plus efficaces quand ils travaillent ensemble. »[41]

Accueil

Les livres d’Idries Shah sur le soufisme connurent un retentissement critique considĂ©rable. Idries Shah fut l’objet d’un documentaire Ă  la BBC (« One Pair of Eyes ») en 1969[89], et deux de ses travaux (The Way of the Sufi et Reflections) furent nommĂ©s « Outstanding Book of the Year » (meilleur livre de l’annĂ©e) par l’émission « The Critics » de la BBC[61]. Parmi d’autres honneurs, Shah gagna six premiers prix du World Book Year de UNESCO en 1973[89], et le chercheur musulman James Kritzeck dit, Ă  propos des « Contes Derviches » de Shah, qu’ils Ă©taient « magnifiquement traduits »[61].

Un ensemble de textes critiques favorables Ă  l’Ɠuvre de Shah, intitulĂ© Sufi Studies : East and West, fut publiĂ© en 1973, parmi les contributions on trouve celles de L. F. Rushbrook Williams, Rom Landau, Mohammad Hidayatullah, Gyula Germanus, Sir John Glubb, Sir Razik Fareed, Ishtiaq Hussain Qureshi, Ahmet Emin Yalman, Mahmoud Youssef Shawarbi et Nasrollah S. Fatemi[90].

Colin Wilson a dĂ©clarĂ© : « c’est en partie grĂące Ă  Idries Shah que j’ai commencĂ© Ă  percevoir de nouvelles et intĂ©ressantes implications [Ă  propos du mysticisme] »[91]. Dans son article sur Le MonastĂšre magique (1972), il notait que Shah « ne considĂšre pas comme d’une importance premiĂšre la propagation d’une sorte de doctrine secrĂšte. Le plus important pour lui est la mĂ©thode avec laquelle la connaissance mystique est transmise
 [Les soufis] transmettent la connaissance par intuition directe plutĂŽt Ă  la maniĂšre des maĂźtres Zen, et l’un des principaux moyens d’y parvenir est par des histoires courtes et des paraboles qui font leur chemin Ă  l’intĂ©rieur du subconscient et mettent en action ses forces cachĂ©es. »[92]

En Afghanistan, le Kabul Times dit que Caravane de RĂȘves (1968) Ă©tait « hautement recommandĂ© » et « particuliĂšrement intĂ©ressant pour les Afghans » car ce livre est « fondamentalement une anthologie de nouvelles, contes et proverbes, plaisanteries et extraits de la littĂ©rature Ă©crite et orale transmise lors des veillĂ©es et Ă©changes – mĂȘme en ces temps modernes – en Afghanistan. »[93] L’Afghanistan News signala que Les Soufis « reprend d’importantes contributions afghanes pour la philosophie et la science mondiales » et que ce livre Ă©tait le premier Ă  faire autoritĂ© sur le soufisme et le systĂšme de dĂ©veloppement humain des derviches. »[94] Quant aux doutes sur l’éducation et les qualifications de Shah, le Sardar Haji Faiz Muhammad Khan Zikeria, chercheur afghan qui fut ministre de l’Éducation afghane et ancien ambassadeur et ministre des Affaires Ă©trangĂšres en Afghanistan, publia en 1971 une DĂ©claration authentique destinĂ©e aux intellectuels du monde entier sur la famille Shah : « Les Sayed Musavi d’Afghanistan et les Khans de Paghman sont reconnus comme Ă©tant les descendants du ProphĂšte – que la paix soit sur lui. On leur accord la plus noble descendance de l’Islam et ils sont respectĂ©s comme maĂźtres soufis et chercheurs Ă©rudits. Sayed Idries Shah, fils du dĂ©funt Sayed Ikbal Ali Shah, que je connais personnellement, est un homme honorable dont le rang, les titres et la descendance sont attestĂ©s et rĂ©putĂ©s. »[95]

En 1980, le Professeur Khalilullah Khalili, ancien poĂšte laurĂ©at d’Afghanistan, fit les louanges de l’Ɠuvre de son « compatriote et ami l’Arif (soufi IlluminĂ©) Le Sayed Idries Shah, et qu’il fallait particuliĂšrement apprĂ©cier son importante et brillante contribution en rĂ©vĂ©lant les inspirations cĂ©lestes et les pensĂ©es intĂ©rieures des grands maĂźtres de l’Islam et des soufis. »[96]

Le Hindustan Standard of India trouva que Caravane de RĂȘves Ă©tait une « remarquable anthologie, dont on pouvait s’imprĂ©gner Ă  tout moment pour se divertir, se rafraichir, se consoler et tirer son inspiration (
), pleine d’esprit, captivante, profondĂ©ment et admirablement humaine. »[97]

L’accueil du mouvement de Shah fut aussi marquĂ© par la controverse[44]. Certains orientalistes lui furent hostiles, en partie du fait que Shah prĂ©sentait les classiques soufis comme des instruments pour le dĂ©veloppement personnel utilisables par les contemporains, plutĂŽt que comme des objets d’étude historique[21]. L. P. Elwell-Sutton, de l’UniversitĂ© d’Edimbourg, le plus fĂ©roce critique de Shah, dĂ©crivit ses livres comme « sans importance », rempli d’erreurs de faits, donnant des traductions nĂ©gligĂ©es et incorrectes, et mĂȘme une mauvaise orthographe des noms et des mots orientaux – « un ramassis de platitudes, d’impertinences et de grosses extravagances », ajoutant pour faire bonne mesure que Shah avait « une remarquable opinion de sa propre importance »[98]. Il vit d’un mauvais Ɠil le Festschrift de Rushbrook Williams en l’honneur de Shah, disant qu’il considĂ©rait nombres des dĂ©clarations faites dans le livre au nom de Shah et de son pĂšre, concernant le fait qu’ils reprĂ©sentaient la tradition soufie, comme n’étant qu’une publicitĂ© autoproclamĂ©e marquĂ©e par un manque de considĂ©ration dĂ©sarmante pour la rĂ©alitĂ© des faits. »[99] - [100] Exprimant de l’amusement et de l’étonnement pour les « maniĂšres flatteuses» des interlocuteurs de Shah dans l’interview Ă  la radio sur la BBC, Elwell-Sutton concluait que certains intellectuels occidentaux voulaient « si dĂ©sespĂ©rĂ©ment trouver des rĂ©ponses aux questions qui les rendaient perplexes que, confrontĂ©s Ă  la sagesse de « l’Orient mystĂ©rieux », ils abandonnaient leurs facultĂ©s critiques et se soumettaient Ă  un lavage de cerveau des plus crus. »[61] Pour Elwell-Sutton, le soufisme de Shah appartenait au royaume du « pseudo-soufisme », « centrĂ© non sur Dieu mais sur l’homme. »[44] - [101]

Les Ă©crits de « L’école de Shah »

Un autre critique hostile fut James Moore (en), un Gurdjieffien qui dĂ©sapprouva l’affirmation de Shah selon laquelle l’enseignement de Gurdjieff Ă©tait essentiellement soufique de nature et s’indigna de la publication d’un livre sur le sujet et liĂ© Ă  Shah : Les MaĂźtres de Gurdjieff de Rafael Lefort, publiĂ© sous pseudonyme et dont la chronologie est impossible[7]. Dans un article de 1986 dans Religion Today (renommĂ© The Journal of Contemporary Religion), Moore rapporta les controverses concernant Bennett et Graves et Ă©crivit que Shah Ă©tait entourĂ© d’un halo d’une exorbitante adulation ; adulation qu’il avait lui-mĂȘme attisĂ©[7]. Il dĂ©crivit Shah entourĂ© d’une coterie de journalistes complaisants, d’éditeurs, de critiques, d’animateurs, d’hommes de radio et d’écrivains-voyageurs, qui chantaient vaillamment les louanges de Shah. »[7] Moore s’interrogea sur l’hĂ©ritage et l’éducation prĂ©tendument soufis de Shah et dĂ©plora le corpus d’écrits sous le pseudonyme « École Shah », par des auteurs tels que « Omar Michael Burke PhD. » et « Hadrat B.M. Dervish », qui depuis 1960 accumulaient des louanges immodĂ©rĂ©es sur Shah – venant ostensiblement de partis dĂ©sintĂ©ressĂ©s – se rĂ©fĂ©rant Ă  lui comme la « Tariqa du Grand Sheikh Idries Shah Saheb », « Prince Idries Shah », « Roi Enoch », « La PrĂ©sence », « Le Prince Studieux », l’ « Incarnation d’Ali », et mĂȘme le Qutb ou « Axe » - tout ceci pour soutenir les premiers efforts de Shah pour vendre le soufisme Ă  un public occidental[7] - [102] - [103].

De mĂȘme, Peter Wilson souligna « la qualitĂ© trĂšs pauvre » de la plupart de ce qui avait Ă©tĂ© Ă©crit pour la dĂ©fense de Shah, notant un « style malheureusement excessif », et dĂ©clara que Shah possĂ©dait diverses capacitĂ©s paranormales, « un ton de supĂ©rioritĂ© ; une attitude parfois suffisante, condescendante, ou de pitiĂ©, envers ceux « de l’extĂ©rieur » ; et l’apparente absence d’une quelconque motivation pour prouver des dĂ©clarations qui sembleraient le mĂ©riter. »[104] A son avis, il y avait une « diffĂ©rence remarquable qualitativement parlant entre les propres Ă©crits de Shah » et la qualitĂ© de cette littĂ©rature secondaire[104]. Cependant Moore et Wilson ont notĂ© tous les deux des similaritĂ©s de style, et ont considĂ©rĂ© la possibilitĂ© que la plupart de ce travail sous pseudonyme, frĂ©quemment publiĂ© par Octogon Press, la maison d’édition de Shah, pourrait avoir Ă©tĂ© Ă©crit par Shah lui-mĂȘme[104].

Proposant une autre interprĂ©tation de cette littĂ©rature, Andrew Rawlinson, Ă©rudit religieux, proposait que « plutĂŽt qu’une tromperie visiblement intĂ©ressĂ©e », il aurait pu s’agir d’une « mascarade – quelque chose qui doit par dĂ©finition ĂȘtre considĂ©rĂ© au-delĂ . »[105] DĂ©clarant qu’ « une critique de positions retranchĂ©es ne peut pas en soi ĂȘtre figĂ©e et dogmatique », et indiquant que l’intention de Shah a toujours Ă©tĂ© d’ébranler les fausses certitudes, il avance ainsi que l’idĂ©e du « mythe Shah » crĂ©Ă© par ces Ă©crits puisse ĂȘtre un instrument pĂ©dagogique plutĂŽt qu’un moyen de dissimulation ; quelque chose « conçu pour ĂȘtre dĂ©construit – censĂ© se dissoudre quand on le touche. »[105] Rawlinson concluait que Shah « ne pouvait ĂȘtre pris pour argent comptant. Ses propres axiomes en excluaient la possibilitĂ©. »[105]

Évaluation

La gagnante d'un prix Nobel Doris Lessing fut profondément influencée par Shah.

Doris Lessing, qui a le plus dĂ©fendu Shah[7], dĂ©clara en 1981 dans une interview : « J’ai trouvĂ© que le soufisme enseignĂ© par Idries Shah, qui affirme ĂȘtre la rĂ©introduction d’un ancien enseignement, convenait Ă  notre Ă©poque et Ă  notre culture. Ce n’est ni du rĂ©gurgitĂ© de l’Orient, ni de l’Islam dĂ©layĂ©, ni autre chose. »[44] En 1996, interrogĂ©e par le Daily Telegraph Ă  la suite du dĂ©cĂšs de Shah, elle dĂ©clara qu’elle avait rencontrĂ© Shah grĂące au livre Les Soufis qui Ă©tait l’un des plus surprenants qu’elle ait lu, et que ce livre avait changĂ© sa vie[106]. DĂ©crivant l’Ɠuvre de Shah comme un « phĂ©nomĂšne sans nul pareil Ă  notre Ă©poque », elle le dĂ©peignit comme un homme aux multiples aspects, la personne la plus spirituelle qu’elle ait jamais rencontrĂ©e, aimable, gĂ©nĂ©reux, modeste (« ne me regardez pas mais prenez plutĂŽt ce qui est dans ma main », disait-elle en le citant) et comme son grand ami et maĂźtre depuis une trentaine d’annĂ©es[106].

Arthur J. Deikman, professeur en psychiatrie et chercheur de longue date dans le domaine de la mĂ©ditation et des changements de conscience, commença Ă  Ă©tudier les histoires-enseignements soufies au dĂ©but des annĂ©es 1970. Il disait que les psychiatres occidentaux pourraient bĂ©nĂ©ficier des perspectives offertes par le soufisme et son essence universelle, Ă  condition que les matĂ©riaux choisis soient Ă©tudiĂ©s de maniĂšre correcte et en bon ordre[75]. Dans la mesure oĂč les Ă©crits et les traductions des histoires-enseignement de Shah Ă©taient conçus dans cet esprit, il les recommandait Ă  tous ceux dĂ©sireux de s’en faire une idĂ©e par eux-mĂȘmes. Il remarquait Ă©galement que nombreuses Ă©taient les personnes faisant autoritĂ© qui reconnaissaient Ă  Shah son rĂŽle en tant que porte-parole du soufisme contemporain[75]. Selon Charles Tart, psychologue et spĂ©cialiste des facultĂ©s de conscience, les Ă©crits de Shah « lui ont donnĂ© une perception de ce qu’est la psychologie plus profonde que tout ce qui a Ă©tĂ© Ă©crit. »[107]

Lorsqu’on lui demandait son avis sur Shah en 1973, J.G. Bennett dit que Shah faisait un important travail sur une large Ă©chelle, « stimulant les gens trĂšs efficacement et partout, les amenant Ă  rĂ©flĂ©chir, leur montrant que les modes de pensĂ©e qui semblent libres sont en rĂ©alitĂ© largement conditionnĂ©es. » Il considĂ©rait Shah comme le Krishnamurti du soufisme, car il mettait en mille morceaux les idĂ©es fixes des gens dans un processus d’éveil qui Ă©tait « une prĂ©paration tout Ă  fait indispensable pour ce nouveau monde. »[108]

Le philosophe et mystique indien Osho, Ă  propos de l’Ɠuvre de Shah, comparait Les Soufis Ă  « un vĂ©ritable diamant. La valeur de ce qu’il a fait dans Les Soufis est incommensurable. » Il ajoutait que Shah Ă©tait « l’homme qui a prĂ©sentĂ© Mulla Nasrudin Ă  l’Occident, et qu’il a rendu un incroyable service. Sans que l’on puisse lui rendre. [
] Idries Shah a rendu les petites anecdotes de Nasrudin encore plus belles
 [Il] n’a pas seulement la capacitĂ© de traduire prĂ©cisĂ©ment les paraboles, mais mĂȘme de les embellir, de les rendre encore plus poignantes, plus aiguisĂ©es. »[109]

Richard Smoley et Jay Kinney, dans Hidden Wisdom : A Guide to the Western Inner Traditions (2006), jugent que Les Soufis de Shah est « une vaste et trĂšs accessible introduction au soufisme», ajoutant que « le propre penchant de Shah est Ă©vident tout le long, que certaines affirmations historiques sont discutables (il n’y a aucune note en bas de page), mais qu’aucun autre livre ne rĂ©ussit autant Ă  provoquer l’intĂ©rĂȘt pour le soufisme auprĂšs du lecteur de base. »[110] Selon eux, Apprendre Ă  apprendre, recueil d’interviews, discussions et textes courts, est l’une des meilleurs Ɠuvres de Shah car elle oriente solidement l’approche « psychologique » du travail soufi. Ils signalent qu’au mieux, « Shah apporte des perspectives qui vaccinent les apprentis contre les nombreux non-sens du marchĂ© de la spiritualitĂ©. »[110]

Ivan Tyrrell et le sociologue Joe Griffin, dans leur ouvrage sur les besoins Ă©motionnels innĂ©s, Human Givens: A new approach to emotional health and clear thinking, Ă©crivent que Shah « mieux que quiconque, sut comprendre et apprĂ©cier la signification rĂ©elle des Ă©vidences de la nature humaine »[111]. Dans un autre ouvrage, Godhead: The Brain’s Big Bang – The explosive origin of creativity, mysticism and mental illness, ils Ă©crivent Ă  propos des histoires de Shah : « quand on les raconte aux jeunes comme aux vieux [
] laissent des traces, des schĂ©mas dans leur esprit, qui permettent non seulement de vivre et de surmonter les difficultĂ©s de la vie quotidienne mais aussi de cheminer spirituellement. Leur impact peut ne pas ĂȘtre reconnu et ressenti durant des mois ou des annĂ©es aprĂšs les avoir entendues ou lues, mais un jour la structure interne qu’elles contiennent exploite la nature du cerveau Ă  faire correspondre des schĂ©mas et permettre aux apprentis d’observer le fonctionnement de leurs propres rĂ©ponses, conditionnĂ©es Ă©motionnellement, aux changements des conditions de vie. Cela leur permet ensuite d’agir plus facilement en fonction de la rĂ©alitĂ©, et de se connecter mentalement Ă  des sphĂšres supĂ©rieures. Les histoires-enseignements devraient ĂȘtre lues, racontĂ©es et mĂ©ditĂ©es, mais pas analysĂ©es intellectuellement car cela dĂ©truit l’impact bĂ©nĂ©fique qu’elles ont sur notre esprit. Shah, ajoutent-ils, Ă©tait un grand collectionneur et Ă©diteur de ces contes et rĂ©cits possĂ©dant cette qualitĂ© d’ « impact Ă  long terme ». Il connaissait l’importance vitale pour l’humanitĂ© de leur ‘schĂ©ma mental’ et ses livres sont remplis d’exemples substantiels[112].

Olav Hammer remarque que durant les derniĂšres annĂ©es de Shah, quand la gĂ©nĂ©rositĂ© de ses admirateurs l’avaient rendu rĂ©ellement riche, et qu’il Ă©tait devenu un personnage respectĂ© dans la haute sociĂ©tĂ© britannique, des controverses s’élevĂšrent sur des divergences entre des Ă©lĂ©ments autobiographiques – mentionnant ses liens ancestraux avec le prophĂšte Mahomet, ses affiliations avec un ordre secret soufi en Asie centrale, ou avec la tradition dans laquelle Gurdjieff a Ă©tĂ© formĂ© – avec des faits historiquement prouvĂ©s[8]. Alors qu’une parentĂ© avec le prophĂšte Mahomet Ă©tait probable, le nombre de personnes partageant ce mĂȘme lien de nos jours, 1300 ans plus tard, avoisine au moins le million[8]. D’autres Ă©lĂ©ments autobiographiques de Shah semblaient ĂȘtre de pure fiction[8]. Toutefois, Hammer remarquait que les livres de Shah Ă©taient toujours demandĂ©s et qu’il avait jouĂ© « un rĂŽle significatif pour faire connaĂźtre l’essence du soufisme comme Ă©tant la distillation d’une sagesse spirituelle non confessionnelle, individualiste et porteur d’un message de vie. »[8]

Peter Wilson Ă©crivit que si Shah avait Ă©tĂ© un escroc, il aurait Ă©tĂ© « extrĂȘmement douĂ© », car Ă  la diffĂ©rence des Ă©crivains purement commerciaux, il avait pris le temps de produire un systĂšme Ă©laborĂ©, avec un contenu intĂ©rieur qui attirait « un large spectre de personnalitĂ©s plus ou moins Ă©minentes », et qu’il avait provoquĂ© et stimulĂ© la pensĂ©e dans de nombreux domaines divers »[107].

Moore reconnut que Shah avait contribuĂ© Ă  populariser un soufisme humaniste, et avait « apportĂ© Ă©nergie et ressource Ă  son autoglorification », mais finit par l’accablante conclusion que le soufisme de Shah Ă©tait un soufisme sans autosacrifice, sans auto-transcendance, sans aspiration Ă  la gnose, sans tradition, sans le ProphĂšte, sans le Coran, sans l’Islam, et sans Dieu. Rien que ça. »[7] - [73]

L’opinion du dĂ©funt Gore Vidal sur l’Ɠuvre de Shah Ă©tait que « ces livres Ă©taient largement plus difficiles Ă  lire qu’ils avaient Ă©tĂ© Ă  Ă©crire. »[113]

HĂ©ritage

Idries Shah considĂ©rait que ses livres Ă©taient son hĂ©ritage ; quand il ne serait plus lĂ , ce serait eux qui rempliraient la fonction que lui-mĂȘme avait rempli[114]. Promouvoir et distribuer les publications de leur maĂźtre a Ă©tĂ© un important« travail » ou activitĂ© pour ceux qui ont Ă©tudiĂ© avec Shah, pour collecter de l’argent et pour transformer la conscience gĂ©nĂ©rale[53]. L’ICR continue d’accueillir des dĂ©bats et des sĂ©minaires sur des sujets en relation avec les aspects de la nature humaine, tandis que SSS a cessĂ© ses activitĂ©s. L’ISHK (Institute of the Study of Human Knowledge), dirigĂ© par Ornstein[115], est actif aux États-Unis ; aprĂšs les attentats terroristes du 11 septembre, par exemple, cet institut envoya une brochure pour faire la publicitĂ© des livres sur l’Afghanistan signĂ©s de Shah et de son cercle de membres du Middle East Studies Association, faisant ainsi le lien entre ces publications et la nĂ©cessitĂ© d’une meilleure comprĂ©hension interculturelle[53].

Quand Elizabeth Hall fit une interview de Shah pour Psychology Today en , elle lui demanda : « Dans l’intĂ©rĂȘt de l’humanitĂ©, que voudriez-vous voir arriver ? » Shah rĂ©pliqua : « Ce que je voudrais vraiment, au cas oĂč je serais entendu, ce serait que les rĂ©sultats des recherches sur la psychologie de ces 50 derniĂšres annĂ©es soient Ă©tudiĂ©es par le public, par tout un chacun, afin que ces dĂ©couvertes fassent partie de leur maniĂšre de penser (
) ils ont ce large corpus d’informations sur la psychologie et refusent de l’utiliser. »[12]

Le frĂšre d’Idries Shah, Omar Ali-Shah (1922-2005), Ă©tait aussi un Ă©crivain et un maĂźtre du soufisme ; les deux frĂšres enseignĂšrent ensemble un temps dans les annĂ©es 1960, mais en 1977 ils « se mirent d’accord sur leur dĂ©saccord » et se sĂ©parĂšrent[116]. À la suite de la mort d’Idries Shah en 1996, bon nombre de ses Ă©tudiants s’affiliĂšrent au mouvement d’Omar Ali-Shah[117].

L’une des filles d’Idries Shah, Saira Shah, se fit connaĂźtre en 2001 pour son reportage sur les droits des femmes en Afghanistan dans son documentaire Beneath the Veil[69]. Son fils Tahir Shah est un Ă©crivain-voyageur, journaliste et aventurier connu.

Travaux

Magie

  • Oriental Magic (ISBN 0-86304-017-9) (1956)
  • The Secret Lore of Magic (ISBN 0-8065-0004-2) (1957)

Soufisme

  • The Sufis (ISBN 0-385-07966-4) (1964) – traduction française : Les Soufis et l'Ă©sotĂ©risme, Paris : Payot, 1972.
  • Tales of the Dervishes (ISBN 0-900860-47-2) (1967)
  • Caravan of Dreams (ISBN 0-86304-043-8) (1968)
  • Reflections (ISBN 0-900860-07-3) (1968)
  • The Way of the Sufi (ISBN 0-900860-80-4) (1968)
  • The Book of the Book (ISBN 0-900860-12-X) (1969)
  • Wisdom of the Idiots (ISBN 0-86304-046-2) (1969)
  • The Dermis Probe (ISBN 0-86304-045-4) (1970)
  • Thinkers of the East – Studies in Experientialism (ISBN 0-900860-46-4) (1971)
  • The Magic Monastery (ISBN 0-86304-058-6) (1972)
  • The Elephant in the Dark|The Elephant in the Dark – Christianity, Islam and The Sufis (ISBN 0-900860-36-7) (1974)
  • A Veiled Gazelle – Seeing How to See (ISBN 0-900860-58-8) (1977)
  • Neglected Aspects of Sufi Study (ISBN 0-900860-56-1) (1977)
  • Special Illumination: The Sufi Use of Humour (ISBN 0-900860-57-X) (1977)
  • A Perfumed Scorpion (ISBN 0-900860-62-6) (1978)
  • Learning How to Learn: Psychology and Spirituality in the Sufi Way (ISBN 0-900860-59-6) (1978)
  • The Hundred Tales of Wisdom (ISBN 0-86304-049-7) (1978)
  • Evenings with Idries Shah (ISBN 0-86304-008-X) (1981)
  • Letters and Lectures of Idries Shah (ISBN 0-86304-010-1) (1981)
  • Observations (ISBN 0-86304-013-6) (1982)
  • Seeker After Truth (ISBN 0-900860-91-X) (1982)
  • Sufi Thought and Action (ISBN 0-86304-051-9) (1990)
  • The Commanding Self (ISBN 0-86304-066-7) (1994)
  • Knowing How to Know (ISBN 0-86304-072-1) (1998)

Recueils d’histoires du Mulla Nasrudin

  • The Exploits of the Incomparable Mulla Nasrudin (ISBN 0-86304-022-5) (1966)
  • The Pleasantries of the Incredible Mullah Nasrudin (ISBN 0-86304-023-3) (1968)
  • The Subtleties of the Inimitable Mulla Nasrudin (ISBN 0-86304-021-7) (1973)
  • The World of Nasrudin (ISBN 0-86304-086-1) (2003)

Études de l’Anglais

  • Darkest England (ISBN 0-86304-039-X) (1987)
  • The Natives are Restless (ISBN 0-86304-044-6) (1988)
  • The Englishman's Handbook (ISBN 0-86304-077-2) (2000)

Voyage

  • Destination Mecca (ISBN 0-900860-03-0) (1957)

Fiction

  • Kara Kush, London: William Collins Sons and Co., Ltd.. (ISBN 0-685-55787-1) (1986)

Folklore

  • World Tales (ISBN 0-86304-036-5) (1979)

Pour les enfants

  • Neem the Half-Boy (ISBN 1-883536-10-3) (1998)
  • The Farmer’s Wife (ISBN 1-883536-07-3) (1998)
  • The Lion Who Saw Himself in the Water (ISBN 1-883536-25-1) (1998)
  • The Boy Without A Name (ISBN 1-883536-20-0) (2000)
  • The Clever Boy and the Terrible Dangerous Animal (ISBN 1-883536-51-0) (2000)
  • The Magic Horse (ISBN 1-883536-26-X) (2001)
  • The Man With Bad Manners (ISBN 1-883536-30-8) (2003)
  • The Old Woman and The Eagle (ISBN 1-883536-27-8) (2005)
  • The Silly Chicken (ISBN 1-883536-50-2) (2005)
  • Fatima the Spinner and the Tent (ISBN 1-883536-42-1) (2006)
  • The Man and the Fox (ISBN 1-883536-43-X) (2006)

Sous le nom d’Arkon Daraul

  • A History of Secret Societies (ISBN 0-8065-0857-4) (1961)[2]
  • Witches and Sorcerers (ISBN 0-8065-0267-3)[2] (1962)

Entretiens audio, séminaires et conférences

  • Shah, Idries, and Pat Williams. A Framework for New Knowledge. London: Seminar Cassettes, 1973. Sound recording.
  • Shah, Idries. Questions and Answers. London: Seminar Cassettes, 1973. Sound recording.
  • King, Alexander, Idries Shah, and Aurelio Peccei. The World-and Men. Seminar Cassettes, 1972. Sound recording.
  • King, Alexander, et. al. Technology: The Two-Edged Sword. London: Seminar Cassettes, 1972. Sound recording.
  • Learning From Stories (1976 Lecture) (ISBN 1-883536-03-0) (1997)
  • On the Nature of Sufi Knowledge (1976 Lecture) (ISBN 1-883536-04-9) (1997)
  • An Advanced Psychology of the East (1977 Lecture) (ISBN 1-883536-02-2) (1997)
  • Overcoming Assumptions that Inhibit Spiritual Development; prĂ©cĂ©demment intitulĂ© A Psychology of the East (1976 Lecture) (ISBN 1-883536-23-5) (2000)

Notes

  1. Augy Hayter, un Ă©lĂšve d’Idries et d’Omar Ali-Shah, affirme que cet article, publiĂ© dans le magazine Blackwood, a Ă©tĂ© Ă©crit par Idries Shah sous un pseudonyme. Quand Reggie Hoare, un Gurdjieffien et associĂ© de Bennett, Ă©crit Ă  l’attention de l’auteur du magazine, intrigue par la description des exercices connus seulement par un petit nombre des Ă©lĂšves de Gurdjieff, ce fut Shah qui rĂ©pondit Ă  Hoare, et Hoare prĂ©senta Shah Ă  Bennett. Shah lui-mĂȘme selon Hayter dĂ©crit plus tard l’article du Blackwood comme du « chalutage ». ((en) Augy Hayter, Fictions and Factions, Reno, NV/Paris, France, Tractus Books, , 187 p. (ISBN 2-909347-14-1))
  2. Certaines sources ont dĂ©crit Shah comme un « membre fondateur » du Club de Rome. Augy Hayter dĂ©clare, “Dans une certaine mesure, on peut dire qu’une bonne partie de la littĂ©rature mise Ă  disposition par Shah et ses amis sous diffĂ©rents synonymes Ă©tait conçue pour agir comme un « leurre ». Cela occupait Ă  la fois les potentiels Ă©tudiants et les opposants, et enflammait la critique Ă  un point assez extraordinaire. La plupart Ă©tait faux : Shah savait parfaitement bien qu’il n’était pas un membre fondateur du Club de Rome ; il en fut membre pendant un court moment et fut gentiment priĂ© de partir parce qu’il ne se rendait pas aux rĂ©unions. Mais cette mythologie autour du personnage public de Shah Ă©tait nĂ©cessaire afin de fournir le mensonge-rĂȘve sans lequel aucune vĂ©ritĂ© ne peut exister, car un Ă©lĂšve doit toujours avoir le choix. » (Hayter, Augy (2002). Fictions and Factions. Reno, NV/Paris, France: Tractus Books. p. 262. (ISBN 2-909347-14-1).)

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Liens externes

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