Fenia Chertkoff
Fenia Chertkoff Demirov[1] (Odessa, Empire russe, 1869 - Buenos Aires, Argentine, 1927) Ă©tait une intellectuelle, Ă©ducatrice, militante politique, journaliste, fĂ©ministe et artiste plasticienne dâorigine juive ukrainienne et naturalisĂ©e argentine.
Nom de naissance | Đ€Đ”ĐœŃ Đ§Đ”ŃŃĐșĐŸĐČĐ° ĐĐ”ĐŒĐžŃĐŸĐČ |
---|---|
Naissance |
Odessa, Empire russe |
DĂ©cĂšs |
Buenos Aires, Argentine |
Nationalité | Argentine |
Profession |
Institutrice |
Activité principale |
Ăducatrice Militante politique socialiste |
Autres activités |
Traductrice Journaliste Sculptrice Peintre |
Formation |
Ăcole normale dâOdessa ; universitĂ© de Lausanne ; Sorbonne |
Famille |
SĆurs : Mariana Chertkoff (Ă©pouse de Juan B. Justo) ; Adela Chertkoff (Ă©pouse dâEnrique Dickmann) ; NicolĂĄs Repetto (Ă©poux) ; Victoria Chertkoff (fille) |
DiplĂŽmĂ©e de lâĂ©cole normale dâOdessa, elle sâengagea de bonne heure dans lâactivisme socialiste et Ă©pousa un militant rĂ©volutionnaire, de qui elle eut sa fille Victoria. AprĂšs que son mari, atteint dâune grave tuberculose, fut dĂ©cĂ©dĂ©, Fenia vint sâinstaller en Argentine, dans une zone rurale en Entre RĂos, oĂč elle dĂ©ploya une intense activitĂ© dâinstruction populaire et de travail intellectuel et journalistique. Ă son retour dâun sĂ©jour dâĂ©tudes en Europe (formation en pĂ©dagogie et psychologie infantile), elle se fixa Ă Buenos Aires, fit la rencontre de son futur mari NicolĂĄs Repetto, haute personnalitĂ© du PS alors fraĂźchement fondĂ©, et sâengagea Ă ses cĂŽtĂ©s dans le parti, dont le programme sâaccordait avec ses vues rĂ©formistes. Ăducatrice dans lâĂąme, elle se voua Ă Ă©lever le niveau culturel des travailleurs et Ă les former Ă exercer leurs droits politiques en toute conscience. Militante fĂ©ministe, elle sâengagea en faveur des droits des travailleuses et pour lâĂ©galitĂ© entre hommes et femmes, sâefforçant de procurer Ă ces derniĂšres, au moyen de lâenseignement, les instruments intellectuels de leur Ă©mancipation. Dans son esprit, il sâagissait de mettre en Ćuvre les idĂ©es socialistes dans le foyer familial aussi bien que dans la sociĂ©tĂ©, et de mener en parallĂšle Ă©mancipation fĂ©minine et lutte des travailleurs ; les femmes devaient certes faire valoir leurs propres revendications, mais en sâassociant simultanĂ©ment Ă celles des travailleurs (masculins) et du peuple. Pour pallier lâabsence de femmes dans la politique â y compris du reste au sein mĂȘme du PS â, elle cofonda le CSF (Centre socialiste fĂ©minin), lequel se donnait pour but lâĂ©mancipation sociale, politique et Ă©conomique de la femme, et ce dans le cadre socialiste, puis lâUniĂłn Gremial Femenina, qui aidait les femmes Ă sâorganiser en syndicats et veillait Ă la bonne application de la lĂ©gislation sociale. Elle milita Ă©galement pour un enseignement laĂŻc et se prĂ©occupa de lâenfance dĂ©shĂ©ritĂ©e, accueillant les enfants des rues dans des Ă©tablissements, dits recreos, oĂč ils bĂ©nĂ©ficiaient dâinstruction, dâune alimentation Ă©quilibrĂ©e, de dĂ©tente, etc.
Ă la suite dâun traumatisme subi lors de la Semaine tragique en janvier 1919, dont elle ne se remit plus, Fenia Chertkoff se retira de la vie publique et se consacra dĂ©sormais entiĂšrement Ă la crĂ©ation artistique.
Biographie
Jeunes années
Fenia Chertkoff naquit le 7 octobre 1869, Ă Odessa, sur les rives de la mer Noire, dans ce qui Ă©tait alors lâEmpire russe. Ses parents Ă©taient Moyses Chertkoff et Rosa Demirov, qui eurent 9 enfants. Fenia grandit dans une atmosphĂšre dâagitation politique contre le rĂ©gime tsariste et dans une pĂ©riode oĂč commençait Ă Ă©merger le socialisme international. Sa famille appartenant Ă lâĂ©lite ukrainienne, elle put sâinscrire lâĂ©cole Saint-Paul et obtenir Ă lâĂąge de 18 ans le diplĂŽme dâinstitutrice Ă lâĂcole normale dâOdessa. A lâĂcole des tsarines, elle se voua Ă lâĂ©tude de la musique, du thĂ©Ăątre et de la danse[2] - [3]. Ladite Ă©cole se rendit cĂ©lĂšbre par lâinauguration dâun opĂ©ra de haut niveau et par le fait aussi quâelle fut la scĂšne de pogroms dirigĂ©s contre les juifs. Cependant, ses prĂ©occupations sociales conduisirent Fenia Ă sâinitier, jeune fille encore, au militantisme clandestin et Ă apprendre Ă rĂ©diger des tracts et Ă les distribuer lors dâactions-surprise[2]. Elle devint bientĂŽt cĂ©lĂšbre pour ses capacitĂ©s intellectuelles, sa disposition Ă enseigner aux paysans et ouvriers, et pour son militantisme socialiste[4].
Elle trouva Ă sâemployer comme institutrice et fit la connaissance de Gabriel Goukovsky, ingĂ©nieur et poĂšte, qui, ayant embrassĂ© la cause rĂ©volutionnaire, avait souffert la prison et la dĂ©portation en SibĂ©rie. Ils se mariĂšrent, puis se transportĂšrent en Italie pour y soigner la tuberculose de Gabriel. Câest lĂ que Fenia eut sa premiĂšre fille, appelĂ©e Victoria en souvenir de la sĆur de Gabriel, militante socialiste, qui sâĂ©tait suicidĂ©e en prison aprĂšs avoir Ă©tĂ© violĂ©e par ses gardiens. Gabriel mourut peu de temps aprĂšs et Fenia sâen retourna Ă Odessa[2].
Premier séjour en Argentine et formation en Europe
Finalement, Fenia Chertkoff se rendit en Argentine et sâinstalla Ă Colonia Clara, dans la province dâEntre RĂos[2] - [5], câest-Ă -dire dans la zone correspondant aux actuelles localitĂ©s de Villa Clara et Villa DomĂnguez[6]. Elle y donna des cours de russe et, maĂźtrisant en plus du russe le français et lâitalien, se voua Ă la traduction, notamment pour le compte de la presse socialiste[3] - [7]. Dâautre part, elle sâadonna au piano, Ă la peinture et Ă la sculpture, produisant des Ćuvres qui seront plus tard exposĂ©es Ă la Maison du peuple Ă Buenos Aires[2]. En outre, elle fonda une bibliothĂšque et apprit Ă lire lâespagnol aux habitants du village[5], de qui beaucoup Ă©taient dâorigine juive[6] - [3].
Elle se mit en rapport avec les directeurs de revues Ă©trangĂšres, et grĂące Ă eux, fut conviĂ©e Ă Ă©tudier en Europe, dâabord Ă lâuniversitĂ© de Lausanne en Suisse, oĂč elle suivit une formation entre 1897 et 1898, puis en France, Ă la Sorbonne, oĂč elle se spĂ©cialisa en pĂ©dagogie et psychologie infantile et acheva une formation de maĂźtresse de jardin dâenfants selon la mĂ©thode fröbelienne, mĂ©thode dâĂ©ducation rĂ©volutionnaire pour lâĂ©poque. Tout au long de ces deux annĂ©es passĂ©es en Europe, elle se tint constamment au courant des luttes ouvriĂšres[2] - [7] et resta en contact Ă©pistolaire avec la thĂ©oricienne marxiste Rosa Luxemburg[5] - [3], mĂȘme si Fenia se sentait plus proche des positions politiques rĂ©formistes[2].
Adhésion au Parti socialiste
De retour en Argentine, Fenia Chertkoff, de mĂȘme que ses deux sĆurs, acquit la nationalitĂ© de ce pays et dĂ©cida de se fixer Ă Buenos Aires, dans la maison dâEnrique Dickmann. Câest lĂ quâelle fit la rencontre de son futur mari, NicolĂĄs Repetto, militant du Parti socialiste, fondĂ© quelques annĂ©es auparavant par Juan B. Justo[5], tandis que la sĆur Adela Ă©pousa Adolfo Dickmann, et lâautre sĆur, Mariana, se lia avec Juan B. Justo[2].
Fenia ambitionnait de mettre les idĂ©es socialistes en Ćuvre autant dans le foyer familial que dans la sociĂ©tĂ©. Elle demandait aux travailleurs masculins dâencourager leurs Ă©pouses Ă participer au dĂ©veloppement du socialisme et Ă ne pas faire obstacle Ă leur Ă©panouissement intellectuel. Tentant de pallier lâabsence de femmes dans le monde politique, le Centro Socialista Femenino (littĂ©r. Centre socialiste fĂ©minin, en abrĂ©gĂ© CSF), quâelle allait fonder en 1920, entreprit de faire pression sur les hommes politiques, les exhortant notamment Ă rendre lĂ©gal le divorce, Ă rĂ©glementer le travail des femmes et des enfants, Ă proscrire lâalcool, Ă abaisser les taxes sur les produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ©, et Ă rendre les Ă©coles rĂ©ellement laĂŻques. Pour lutter contre la marginalisation des femmes au sein de son propre parti, Fenia Chertkoff eut soin de reprĂ©senter le CSF aux congrĂšs du PS argentin en 1903, 1908, 1910 et 1914 ; lors des sĂ©ances du congrĂšs de 1903, auquel du reste elle Ă©tait lâunique femme Ă participer[8], elle proposa, entre autres sujets de discussion, lâĂ©galitĂ© hommes/femmes, le traitement Ă©gal devant la loi des enfants lĂ©gitimes et illĂ©gitimes, la promulgation dâune loi sur le divorce et sur la dĂ©termination de la paternitĂ©[2].
Fenia se voua Ă lâĂ©ducation des enfants et Ă lâinstruction des adultes et des immigrants[2]. Elle voyait son rĂŽle essentiellement comme consistant à « Ă©duquer la famille dans le socialisme », en accord avec la vision de Juan B. Justo sur le Parti socialiste comme « Ă©cole de culture et de civisme » appelĂ© Ă Ă©lever le niveau culturel des travailleurs et Ă les former Ă exercer leurs droits politiques en toute conscience. Elle contribua Ă fonder lâEscuela Libre para Trabajadores (littĂ©r. Ăcole libre pour travailleurs) Ă La Boca, dans la proche banlieue ouvriĂšre sud de Buenos Aires, oĂč elle et sa sĆur Mariana dispensaient des cours. Elle enseigna Ă©galement Ă la Sociedad Luz, universitĂ© populaire socialiste[9].
En 1903, elle organisa un centre de consultation mĂ©dical gratuit, quâelle put faire fonctionner grĂące Ă la collaboration de mĂ©decins solidaires[10].
Fondation du Centre socialiste féminin
Le 19 avril 1920, Fenia Chertkoff, assistĂ©e de ses deux sĆurs, et en association avec Gabriela LaperriĂšre et Raquel Mesina, fonda le dĂ©jĂ mentionnĂ© Centro Socialista Femenino (CSF) et lâUniĂłn Gremial Femenina (littĂ©r. Union syndicale fĂ©minine)[2]. Le but du CSF Ă©tait de rĂ©aliser, au-dedans du cadre socialiste, lâĂ©mancipation sociale, politique et Ă©conomique de la femme[8]. Fenia en effet dĂ©clara :
« Le Centro Femenino est lâunique groupement oĂč les femmes, sans prĂ©jugĂ© dâaucune sorte, et avec un programme clair et dĂ©fini, ne remplissent pas seulement leur existence avec les tĂąches du foyer et du travail, mais Ă©largissent aussi leur horizon par lâĆuvre fĂ©conde en faveur de lâĂ©mancipation Ă©conomique, politique et sociale de la classe prolĂ©taire et, par voie de consĂ©quence, de ces femmes elles-mĂȘmes. »
Elle affirmait que les femmes devaient faire valoir leurs propres revendications, tout en sâassociant Ă celles des travailleurs (masculins) et du peuple[2]. Fenia ne dissociait pas militantisme fĂ©ministe et statut de mĂšre de famille, estimant que les femmes Ă©taient des travailleuses autant que des mĂšres. Pendant la PremiĂšre Guerre mondiale, elle recommanda aux femmes des pays belligĂ©rants dâassumer les tĂąches de leurs maris, en prĂ©disant quâelles pourraient sans doute garder ces emplois une fois la paix revenue[8].
LâUniĂłn Gremial Femenina, Ă©galement cofondĂ©e par elle, dĂ©ploya une activitĂ© considĂ©rable, faisant imprimer des tracts, visitant les usines, organisant des rĂ©unions publiques, rĂ©digeant des notes, et impulsant la conception de projets de loi Ă lâeffet notamment de rĂ©glementer le travail des femmes et des enfants[2].
Lorsquâune loi sociale avait Ă©tĂ© adoptĂ©e, Fenia Chertkoff mettait sur pied un comitĂ© au sein du CSF pour sâassurer de sa mise en application effective, procĂ©dant Ă des vĂ©rifications sur les lieux de travail, et sâil y avait lieu, rapportant les Ă©ventuelles infractions[8]. Le CSF se joignit aux premiĂšres grĂšves ouvriĂšres, aida les travailleuses des diffĂ©rentes secteurs, tels que celui du tĂ©lĂ©phone, du textile, du commerce ou de la fabrication dâespadrilles, Ă sâorganiser en syndicats, et contribua par son action Ă faire adopter entre autres des lois sur le repos dominical pour les travailleuses de la chapellerie. Les femmes du CSF luttĂšrent aux cĂŽtĂ©s des travailleuses du commerce pour obtenir la loi du siĂšge (ley de la silla), qui obligeait le patron Ă mettre un siĂšge Ă la disposition de son personnel. Elles dĂ©noncĂšrent aussi lâexploitation quâavaient Ă subir les mineurs dâĂąge dans les industries comme celle de lâallumette ou du tabac, lâĂ©tat dâinsalubritĂ© des usines, les Ă©quipes de nuit et les longues journĂ©es de travail. Fenia rendait compte de toutes ces dĂ©nonciations dans les colonnes de La Vanguardia, en mĂȘme temps quâelle traduisait, pour ce mĂȘme journal, des contes pour enfants[5] - [2].
Elle fut moins ardente cependant Ă exiger le suffrage des femmes ; selon elle, les femmes devaient prĂ©alablement se prĂ©parer Ă une telle responsabilitĂ© en sâactivant dans les syndicats et dans les partis politiques afin de satisfaire au niveau dâinstruction requis pour pouvoir voter ; de fait, elle Ă©tait sur ce point en porte-Ă -faux avec le CSF, qui vers 1910 rĂ©clamait le suffrage universel sans restriction. En revanche, Fenia Ă©tait en faveur de ce que les femmes pussent tĂ©moigner devant une cour de justice, disposer de leurs propres revenus, toucher Ă travail Ă©gal une rĂ©munĂ©ration Ă©gale Ă celle des hommes, et jouir dâun pouvoir de dĂ©cision sur leurs enfants[9].
En 1910 se tint le Premier CongrĂšs fĂ©minin international, auquel les sĆurs Chertkoff assistĂšrent et dont elles furent les traductrices officielles ; Fenia qualifia ce CongrĂšs de coup dâenvoi de la libĂ©ration des femmes sud-amĂ©ricaines[8].
Activité en faveur des enfants déshérités
Fenia sâattacha Ă garantir une instruction aux enfants pauvres. Elle avait coutume de suivre les enfants mendiants jusquâĂ leur domicile pour inciter leurs parents Ă les envoyer Ă lâĂ©cole, et demandait Ă la police de sâassurer que les enfants frĂ©quentaient bien lâĂ©cole. En 1904, elle et le CSF crĂ©Ăšrent un Ă©tablissement oĂč les petits crieurs de journaux eussent la possibilitĂ© de sâalimenter, de se baigner et dâĂ©tudier, toutefois la presse dominante refusa de financer ce projet socialiste. Des enseignantes y aidaient les enfants Ă faire leurs devoirs et les encourageaient Ă collaborer entre eux. Ces premiers recreos, qui fonctionnĂšrent tout dâabord sans soutien de lâĂtat, finirent par ĂȘtre financĂ©s par la municipalitĂ© de Buenos Aires et par le CongrĂšs national[9].
En 1913, Fenia Chertkoff et Maria C. de Spada mirent sur pied lâAsociaciĂłn de Bibliotecas y Recreos Infantiles (ABRI). Ces bibliothĂšques et centres de rĂ©crĂ©ation pour enfants, que dirigeait Fenia, allaient ĂȘtre hĂ©bergĂ©s dans les diffĂ©rents siĂšges et permanences du PS. Les ABRI se proposaient de prendre en charge les enfants des quartiers populeux de Buenos Aires, de les soustraire Ă la rue et aux pĂ©rils physiques et moraux de celle-ci, et de leur offrir un enseignement au moyen dâimages, de livres, de jouets, de jeux faisant appel Ă la logique, dâexercices physiques, du chant, dâexcursions pĂ©dagogiques et de travaux manuels. Lâon cherchait Ă Ă©veiller chez lâenfant lâamour du travail, de la lecture et de la camaraderie, sans dogme ni prĂ©jugĂ©s. Les enfants Ă©taient conduits dans les bibliothĂšques, les musĂ©es, en pique-nique, aux spectacles, etc., et bĂ©nĂ©ficiaient dâune alimentation saine et nourrissante. Vers 1928, quelque 45 000 enfants avaient Ă©tĂ© accueillis dans les neuf recreos existants[9].
Fenia Chertkoff fut aussi Ă lâinitiative de la BibliothĂšque et du Foyer de vacances Carlos Spada et appuya lâĂcole laĂŻque de MorĂłn, dont elle ambitionna de faire un modĂšle dâenseignement moderne, avec notamment des cours du soir pour adultes, et qui fut reconnue officiellement quelques annĂ©es plus tard[9] - [2]. Câest elle aussi qui inaugura la tradition des festivitĂ©s de Premier mai pour enfants[11].
Semaine tragique et fin de vie
AprĂšs lâĂ©clatement de la PremiĂšre Guerre mondiale en 1914, Enrique Dickmann et le mari de Fenia NicolĂĄs Repetto lancĂšrent, depuis leurs siĂšges au CongrĂšs, un appel Ă la paix, alors que Juan B. Justo en revanche sâalignait sur le bloc franco-britannique contre le militarisme allemand.
La santĂ© de sa fille, qui souffrait de tuberculose, se dĂ©tĂ©riorant, Fenia Chertkoff dĂ©mĂ©nagea avec elle vers la province de CĂłrdoba, dans une propriĂ©tĂ© des Repetto, sise dans une zone de peuplement devenue aujourdâhui le village de TĂo Pujio, mais alors encore Ă majoritĂ© italienne. Elle y fonda une bibliothĂšque, crĂ©a une Ă©cole Ă©lĂ©mentaire, mit sur pied une coopĂ©rative et plusieurs Ă©tablissements de premiers soins. Avec la fin de la guerre et lâamĂ©lioration de lâĂ©tat de santĂ© de Victoria, toutes deux sâen retournĂšrent Ă Buenos Aires. En janvier 1919, sous lâinfluence des rĂ©volutions russe et allemande et dans un contexte dâaggravation de la crise dâaprĂšs-guerre, dâimportantes grĂšves avaient lieu Ă Buenos Aires, auxquelles le pouvoir rĂ©agit par une rĂ©pression fĂ©roce â Ă©vĂ©nements connus sous le nom de Semaine tragique. Le 9 janvier 1919, Fenia se trouva entraĂźnĂ©e dans les graves incidents qui entourĂšrent les obsĂšques de grĂ©vistes tuĂ©s par les forces de rĂ©pression, et de ces violences garda des sĂ©quelles dont elle ne devait plus se remettre. DĂšs lors, elle se retira de la vie publique, sâadonnant dĂ©sormais Ă la crĂ©ation artistique[2].
Sa fille Victoria (née en 1890) devint professeur de sciences naturelles, dirigea le journal La Vanguardia entre 1918 et 1923, puis contribua au quotidien La Nación.
Fenia Chertkoff mourut Ă Buenos Aires, le 31 mai 1927, Ă lâĂąge de 57 ans. Sa fille Victoria poursuivit son Ćuvre[12].
Bibliographie
- (en) Sandra McGee Deutsch, Crossing Borders, Claiming a Nation : A History of Argentine Jewish Women 1880-1955, Durham & Londres, Duke University Press, , 379 p. (lire en ligne), « What Surrounds Us Dissatisfies Us », p. 154-158
- (es) MĂłnica Deleis, Ricardo de Titto et Diego L. Arguindeguy, Mujeres de la PolĂtica Argentina, Buenos Aires, Editorial Aguilar,
Liens externes
- (es) Irene Ocampo et Elizabeth Fernåndez, « Fenia Chertkoff. Datos Biogråficos », Mar del Plata, Centro Alicia Moreau de Justo, (consulté le )
Notes et références
- En cyrillique Đ€Đ”ĐœŃ Đ§Đ”ŃŃĐșĐŸÌĐČ, transcription française FĂ©nia Tchertkov. La graphie Chertkoff est celle de lâĂ©tat civil argentin.
- (es) Irene Ocampo et Elizabeth Fernåndez, « Fenia Chertkoff. Datos Biogråficos », Mar del Plata, Centro Alicia Moreau de Justo, (consulté le )
- (es) « Algunas Protagonistas: Fenia Chertkoff », RIMAweb (consulté en )
- S. McGee Deutsch (2010), p. 154.
- (es) Luis O. Cortese & Nora Capaccioli, « La mujer en las calles de Puerto Madero » (consulté le )
- (es) « Recorrido histĂłrico por colonias judĂas del centro de Entre RĂos », Diario El DĂa, (consultĂ© le )
- S. McGee Deutsch (2010), p. 155.
- S. McGee Deutsch (2010), p. 156.
- S. McGee Deutsch (2010), p. 157.
- (es) Gabriel Scherman, « Vida judĂa en la Argentina », LibrerĂa del Centenario/AMIA, (consultĂ© le )
- S. McGee Deutsch (2010), p. 155-156.
- S. McGee Deutsch (2010), p. 159 etss.