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Expérience de Milgram

L’expérience de Milgram est une expérience de psychologie publiée en 1963 par le psychologue américain Stanley Milgram[2]. Cette expérience évalue le degré d'obéissance d'un habitant des États-Unis du tout début des années 1960 devant une autorité qu'il juge légitime et permet d'analyser le processus de soumission à l'autorité, notamment quand elle induit des actions posant des problèmes de conscience au sujet.

Expérience de Milgram
Description de cette image, également commentée ci-après
Graphique montrant que 65 % des sujets de l'expérience infligent des souffrances maximales si on le leur ordonne
Champ d'application Psychologie, Psychologie sociale
Auteur Stanley Milgram
Date 1963
Pays d'origine États-Unis
L’expĂ©rimentateur (E) amène le sujet (S) Ă  infliger des chocs Ă©lectriques Ă  un autre participant, l’apprenant (A), qui est en fait un acteur. La majoritĂ© des participants continuent Ă  infliger les prĂ©tendus chocs jusqu'au maximum prĂ©vu (450 V) en dĂ©pit des plaintes de l'acteur.

L'expérience a suscité de nombreux commentaires dans l’opinion publique, ainsi que dans le milieu de la psychologie et de la philosophie des sciences, et a inspiré de nombreuses œuvres de fiction ou de télévision.

Déroulement de l'expérience

Fac-similé de l'annonce publiée en 1961 par l'équipe de S. Milgram.

Entre 1960 et 1962, l'Ă©quipe du professeur Milgram fait paraĂ®tre des annonces dans un journal local pour recruter les sujets d'une apparente expĂ©rience sur l'apprentissage. La participation dure 1 heure et est rĂ©munĂ©rĂ©e dollars, plus 50 cents pour les frais de dĂ©placement, ce qui reprĂ©sente Ă  l'Ă©poque une bonne somme, Ă©tant donnĂ© que le revenu mensuel moyen en 1960 est de 100 dollars[3]. L'expĂ©rience est prĂ©sentĂ©e comme une Ă©tude scientifique de l'efficacitĂ© de la punition sur la mĂ©morisation.

La majoritĂ© des variantes de l'expĂ©rience a lieu dans les locaux de l'universitĂ© Yale (New Haven, Connecticut). Les participants sont des hommes et des femmes de 20 Ă  50 ans, issus de tous les milieux et avec diffĂ©rents niveaux d'Ă©ducation. L'expĂ©rience telle que prĂ©sentĂ©e met en jeu trois personnages :

  • un Ă©lève (learner), qui s'efforce de mĂ©moriser des listes de mots et reçoit une dĂ©charge Ă©lectrique en cas d'erreur ;
  • un enseignant (teacher), qui dicte les mots Ă  l'Ă©lève et vĂ©rifie les rĂ©ponses. En cas d'erreur, il envoie une dĂ©charge Ă©lectrique destinĂ©e Ă  faire souffrir l'Ă©lève ;
  • un expĂ©rimentateur (experimenter), qui reprĂ©sente l'autoritĂ© officielle, vĂŞtu d'une blouse grise de technicien, et sĂ»r de lui[Milgram 1].

L'expérimentateur et l'élève sont en réalité deux comédiens.

L'enseignant, qui est le seul sujet de l'expĂ©rience rĂ©elle visant Ă  Ă©tudier le niveau d'obĂ©issance, ou encore la « soumission Ă  l'autoritĂ© » se voit dĂ©crire les conditions de l'expĂ©rience portant prĂ©tendument sur la mĂ©moire. On l'informe qu'un tirage au sort avec l'autre participant leur attribuera le rĂ´le d'Ă©lève ou d'enseignant. On le soumet Ă  un lĂ©ger choc Ă©lectrique de 45 volts pour lui montrer quel type de souffrance l'Ă©lève peut recevoir, et pour renforcer sa confiance sur la vĂ©racitĂ© de l'expĂ©rience. Une fois que le cobaye a acceptĂ© le protocole, un tirage au sort truquĂ© est effectuĂ©, qui le dĂ©signe systĂ©matiquement comme enseignant.

L'Ă©lève est placĂ© dans une pièce distincte, sĂ©parĂ©e par une fine cloison, et attachĂ© sur une chaise Ă©lectrique (en apparence). L'enseignant-cobaye est installĂ© devant un pupitre muni d'une rangĂ©e de manettes et reçoit la mission de faire mĂ©moriser Ă  l'Ă©lève des listes de mots. Ă€ chaque erreur, l'enseignant doit enclencher une manette qui, croit-il, envoie un choc Ă©lectrique de tension croissante Ă  l'apprenant (15 volts supplĂ©mentaires Ă  chaque dĂ©charge, selon ce qui est Ă©crit sur le pupitre). Le sujet est priĂ© d'annoncer Ă  haute voix la tension correspondante avant de l'appliquer. Naturellement, les chocs Ă©lectriques sont fictifs.

Les rĂ©actions aux chocs Ă©lectriques sont simulĂ©es par l'apprenant. Le comĂ©dien qui simule la souffrance a reçu les consignes suivantes : Ă  partir de 75 V, il gĂ©mit ; Ă  120 V, il se plaint Ă  l'expĂ©rimentateur qu'il souffre ; Ă  135 V, il hurle ; Ă  150 V, il supplie d'ĂŞtre libĂ©rĂ© ; Ă  270 V, il lance un cri violent ; Ă  300 V, il annonce qu'il ne rĂ©pondra plus. Lorsque l'apprenant ne rĂ©pond plus, l'expĂ©rimentateur indique qu'une absence de rĂ©ponse est considĂ©rĂ©e comme une erreur. Au stade de 150 volts, la majoritĂ© des enseignants-sujets manifestent des doutes et interrogent l'expĂ©rimentateur qui est Ă  leur cĂ´tĂ©. L’expĂ©rimentateur est chargĂ© de les rassurer en leur affirmant qu'ils ne sont pas tenus pour responsables des consĂ©quences. Si un sujet hĂ©site, l'expĂ©rimentateur a pour consigne de lui demander d'agir.

Si un sujet exprime le désir d'arrêter l'expérience, l'expérimentateur lui adresse, dans l'ordre, ces réponses[Milgram 2] :

  1. « Veuillez continuer s'il vous plaît » ;
  2. « L'expérience exige que vous continuiez » ;
  3. « Il est absolument indispensable que vous continuiez » ;
  4. « Vous n'avez pas le choix, vous devez continuer ».

Si le sujet souhaite toujours s'arrĂŞter après ces quatre interventions, l'expĂ©rience est interrompue. Sinon, elle prend fin quand le sujet a administrĂ© trois dĂ©charges maximales (450 volts) Ă  l'aide des manettes marquĂ©es de trois « X » situĂ©es après celles faisant mention d' « Attention, choc dangereux ».

À l'issue de chaque expérience, un questionnaire et un entretien avec le cobaye jouant l'enseignant permet de recueillir ses sentiments et d'écouter les explications qu'il donne de son comportement. Cet entretien vise aussi à le réconforter en lui révélant qu'aucune décharge électrique n'a été appliquée, en le réconciliant avec l'apprenant, et en lui disant que son comportement n'a rien de sadique et est tout à fait normal[Milgram 3]. Un an plus tard, le cobaye recevait enfin un dernier questionnaire sur son sentiment à l'égard de l'expérience, ainsi qu'un compte rendu détaillé des résultats de cette expérience[Milgram 3].

Contexte

L'expérience arrive après l'expérience des prisonniers de la guerre de Corée, où l'on avait constaté qu'environ 15 % des prisonniers restaient réfractaires à tout lavage de cerveau.

Variantes

Au total, dix-neuf variantes[Milgram 4] de l'expĂ©rience avec 636 sujets sont rĂ©alisĂ©es, permettant ainsi, en modifiant la situation, de dĂ©finir les vĂ©ritables Ă©lĂ©ments poussant une personne Ă  obĂ©ir Ă  une autoritĂ© qu'elle respecte et Ă  maintenir cette obĂ©issance.

Ces variantes modifient des paramètres comme la distance séparant le sujet de l'élève, celle entre le sujet et l'expérimentateur, la cohérence de la hiérarchie ou la présence de deux expérimentateurs donnant des ordres contradictoires ou encore l'intégration du sujet au sein d'un groupe qui refuse d'obéir à l'expérimentateur.

La plupart des variantes permettent de constater un pourcentage d'obéissance maximum proche de 65 %. Il peut exister des conditions extrêmes allant d'un comportement de soumission à l'autorité élevé (près de 92 %) dans le cas de chocs administrés par un tiers à un comportement de soumission faible (proximité du compère recevant les chocs) ou nul (décrédibilisation de l'autorité).

Tableau des variantes

Voici un tableau synthétique de ces variantes de l'expérience de Milgram classées par types, et leurs résultats :

Variante Sujets Choc maximal
moyen
Choc maximal (450 V)
Type Variation Sujets Pourcentage
ProximitĂ© de l'Ă©lève[Milgram 5] RĂ©troaction Ă  distance (variante de base) 40 405 V 26 65 %
RĂ©troaction vocale 40 367,95 V 25 62,5 %
ProximitĂ© 40 312 V 16 40 %
Contact 40 268,2 V 12 30 %
Importance
de l'autorité
[Milgram 6]
Nouvel environnement 40 368,25 V 26 65 %
Changement de personnel 40 333 V 20 50 %
Absence de l'expĂ©rimentateur 40 272,25 V 8 20 %
Immeuble de bureaux Ă  Bridgeport 40 314,25 V 19 47,5 %
Sujets fĂ©minins[Milgram 7] RĂ©troaction Ă  distance 40 370,95 V 26 65 %
RĂ´le du groupe[Milgram 8] Deux pairs se rebellent 40 246,75 V 4 10 %
Un pair administre les chocs 40 429,75 V 37 92,5 %
Limitations de l'élève
et personnalité du sujet
[Milgram 7]
Conditions prĂ©alables Ă  la participation 40 321 V 16 40 %
Le sujet choisit le niveau de choc 40 82,5 V 1 2,5 %[alpha 1]
Changement de statut[Milgram 9] L'Ă©lève demande Ă  recevoir les chocs 20 150 V 0 0 %
Un individu ordinaire donne les ordres 20 150 V 4 20 %
Le sujet est spectateur 16 373,5 V 11[alpha 2] 68,75 %[alpha 2]
L'autoritĂ© dans le rĂ´le de la victime 20 150 V 0 0 %
Troubles au sein
de l'autorité
[Milgram 10]
Deux autoritĂ©s, ordres contradictoires 20 150 V 0 0 %
Deux autoritĂ©s, une dans le rĂ´le de la victime 20 352,5 V 13 65 %
  1. Le pourcentage de sujets administrant le choc maximal ne doit pas être interprété comme une mesure de l'obéissance puisque le sujet est libre de fixer le niveau de choc.
  2. Tous les participants ont manifesté leur opposition verbalement. Ce nombre correspond à ceux qui n'ont pas entrepris de s'opposer physiquement à la poursuite de l'expérience en quittant la salle ou en s'interposant.

RĂ©sultats

Lors des premières expĂ©riences menĂ©es par Stanley Milgram, 62,5 % (25 sur 40) des sujets menèrent l'expĂ©rience Ă  terme en infligeant Ă  trois reprises les prĂ©tendus Ă©lectrochocs de 450 volts. Tous les participants acceptèrent le principe annoncĂ© et, finalement après encouragement, atteignirent les 135 volts prĂ©tendus. La moyenne des prĂ©tendus chocs maximaux (niveaux auxquels s'arrĂŞtèrent les sujets) fut 360 volts. Toutefois, chaque participant s'Ă©tait Ă  un moment ou Ă  un autre interrompu pour questionner l'examinateur. Beaucoup prĂ©sentaient des signes patents de nervositĂ© extrĂŞme et de rĂ©ticence lors des derniers stades (protestations verbales, rires nerveux, etc.).

Milgram a qualifiĂ© Ă  l'Ă©poque ces rĂ©sultats « d’inattendus et inquiĂ©tants ». Des enquĂŞtes prĂ©alables menĂ©es auprès de 39 mĂ©decins-psychiatres avaient Ă©tabli une prĂ©vision d'un taux de sujets envoyant 450 volts de l'ordre de 1 pour 1000 avec une tendance maximale avoisinant les 150 volts[4].

Analyse de Milgram

En plus des nombreuses variantes expérimentales qui permettent de mettre en valeur des facteurs de la soumission, Stanley Milgram propose dans son livre paru en 1974 une analyse détaillée du phénomène. Il se place dans un cadre évolutionniste et conjecture que l'obéissance est un comportement inhérent à la vie en société et que l'intégration d'un individu dans une hiérarchie implique que son propre fonctionnement en soit modifié : l'être humain passe alors du mode autonome au mode systématique où il devient l'agent de l'autorité. À partir de ce modèle, il recherche les facteurs intervenant à chacun des trois stades :

  1. Les conditions préalables de l'obéissance : elles vont de la famille (l'éducation repose sur une autorité dans la famille) à l'idéologie dominante (la conviction que la cause est juste, c'est-à-dire ici la légitimité de l'expérimentation scientifique) ;
  2. L'état d'obéissance (ou état agentique) : les manifestations les plus importantes sont la syntonisation (réceptivité augmentée face à l'autorité et diminuée pour toute manifestation extérieure) et la perte du sens de la responsabilité. Il constate aussi une redéfinition de la situation en ce sens que l'individu soumis « est enclin à accepter les définitions de l'action fournies par l'autorité légitime » ;
  3. Les causes maintenant en obéissance : le phénomène le plus intéressant parmi ceux relevés est l'anxiété, qui joue le rôle de soupape de sécurité ; elle permet à l'individu de se prouver à lui-même par des manifestations émotionnelles qu'il est en désaccord avec l'ordre exécuté.

A contrario, Stanley Milgram s'oppose fortement aux interprétations qui voudraient expliquer les résultats expérimentaux par l'agressivité interne des sujets. Une variante met d'ailleurs en évidence cela, où le sujet était libre de définir le niveau d'intensité. Ici, seule une personne sur les quarante a utilisé le niveau maximal.

Il propose également une série d'arguments factuels pour réfuter les trois critiques qui lui sont le plus souvent adressées : la non-représentativité de ses sujets, leur conviction en ce protocole expérimental et l'impossibilité de généraliser l'expérience à des situations réelles.

Rôle de l’obéissance dans la société

L'obéissance à une autorité et l'intégration de l'individu au sein d'une hiérarchie est l'un des fondements de toute société. Une société a des règles, et par voie de conséquence il existe une autorité, qui permet aux individus de vivre ensemble et empêche que leurs besoins et désirs entrent en conflit et mettent à mal la structure de la société. Ayant posé cela, Stanley Milgram ne considère pas l'obéissance comme un mal. Pour résumer sa pensée, ce qui est dangereux, c'est l'obéissance aveugle.

Un moteur de l'obéissance est selon lui le conformisme. Lorsque l'individu obéit à une autorité, il est conscient de réaliser les désirs de cette autorité. Avec le conformisme, l'individu est persuadé que ses motivations lui sont propres et qu'il n'imite pas le comportement du groupe. Ce mimétisme est une façon pour l'individu de ne pas se démarquer du groupe. Le conformisme a été mis en évidence par le psychosociologue Solomon Asch dans son expérience réalisée dans les années 1950. Les variantes de l'expérience de Milgram avec plusieurs pairs « désobéissants » ont montré que le sujet se range alors le plus souvent du côté du groupe et n'obéit plus lui non plus. Ainsi, si l'obéissance d'un groupe veut être assurée, il faut faire en sorte que la majorité de ses membres adhère aux buts de l'autorité.

Processus de l'obéissance chez l'individu

L'homme est un ĂŞtre social, mais cela ne l'empĂŞche pas d'avoir une certaine autonomie.

État agentique

Lorsque l'individu obéit, il délègue sa responsabilité à l'autorité et passe dans l'état que Stanley Milgram appelle « agentique ». L'individu n'est plus autonome, c'est un « agent exécutif d'une volonté étrangère »[Milgram 11].

Milgram expliquera aussi par la suite que le comportement de la plupart des Allemands (et collaborateurs) sous l'Allemagne nazie était explicable par cette expérience. En effet, ils suivaient selon lui les ordres d'une autorité qu'ils respectaient et étaient un des multiples « maillons » de la chaîne de l'extermination des Juifs. Un conducteur de train était ainsi « déresponsabilisé » de son travail, tout comme le gardien du camp, etc., et pouvait ainsi attribuer la responsabilité de ses actes à une autorité supérieure.

RĂ´le de la tension

Le maintien de l'individu dans un état agentique dure aussi longtemps que s'exerce le pouvoir de l'autorité et qu'elle n'entre pas en conflit avec le comportement du groupe (le conformisme) et un certain niveau de tension ou d'anxiété personnel.

La tension que ressent l'individu qui obéit est le signe de sa désapprobation à un ordre de l'autorité. L'individu fait tout pour baisser ce niveau de tension ; le plus radical serait la désobéissance, mais le fait qu'il ait accepté de se soumettre l'oblige à continuer à obéir. Il fait donc tout pour faire baisser cette tension, sans désobéir. Dans l'expérience de Milgram, des sujets émettent des ricanements, désapprouvent à haute voix les ordres de l'expérimentateur, évitent de regarder l'élève, l'aident en insistant sur la bonne réponse ou encore lorsque l'expérimentateur n'est pas là ils ne donnent pas la décharge convenable exigée. Toutes ces actions visent à faire baisser le niveau de tension. Lorsqu'il n'est plus possible de le faire diminuer avec ces subterfuges, le sujet désobéit purement et simplement.

Implications

Dans son livre, Stanley Milgram ne cherche pas à couper sa démarche scientifique de la société contemporaine. Sans pour autant mélanger les genres, il fait fréquemment référence tant aux situations d'obéissance de la vie quotidienne qu'aux grands événements. La Seconde Guerre mondiale et en particulier la Shoah ont ainsi joué un grand rôle dans le choix de Stanley Milgram de s'intéresser à l'obéissance. Il mentionne souvent le procès d'Adolf Eichmann. Il soutient la journaliste et philosophe Hannah Arendt qui, dans ses reportages controversés, soutient que ce criminel de guerre est plus un bureaucrate qu'un cruel antisémite. L'épilogue de son livre Soumission à l'autorité est pour une bonne part consacré à la guerre du Viêt Nam et au massacre de Mỹ Lai.

Il insiste sur le fait que les situations d'autorité des régimes fascistes ne sont pas absentes des sociétés occidentales :

« Les exigences de l'autorité promue par la voie démocratique peuvent elles aussi entrer en conflit avec la conscience. L'immigration et l'esclavage de millions de Noirs, l'extermination des Indiens d'Amérique, l'internement des citoyens américains d'origine japonaise, l'utilisation du napalm contre les populations civiles du Viêt Nam représentent autant de politiques impitoyables qui ont été conçues par les autorités d'un pays démocratique et exécutées par l'ensemble de la nation avec la soumission escomptée. »

Il finit d'ailleurs son livre en faisant sienne une citation de Harold Laski :

« … la civilisation est caractérisée, avant tout, par la volonté de ne pas faire souffrir gratuitement nos semblables. Selon les termes de cette définition, ceux d'entre nous qui se soumettent aveuglément aux exigences de l'autorité ne peuvent prétendre au statut d'hommes civilisés. »

Reproductions de l'expérience

Des reproductions de l'expérience à travers le monde (en Italie, Jordanie, Allemagne de l'Ouest, Afrique du Sud, Autriche, Espagne et Australie) et à différentes époques (de 1967 à 1985) ont reproduit, davantage parfois sous forme de spectacle que de recherche, cette expérience de Milgram[5].

En 2006, ABC News a reproduit l'expérience de Milgram et obtenu des résultats similaires (65 % des hommes et 73 % des femmes ont suivi les instructions jusqu'au bout)[6].

En 2008, Jerry Burger de l'UniversitĂ© de Santa Clara aux États-Unis a reproduit l'expĂ©rience en obtenant un taux de 70 % d'obĂ©issance (et donc 30 % de refus). Les 70 % Ă©taient prĂŞts Ă  aller au-delĂ  de la limite de 150 V si l'expĂ©rimentateur le dĂ©sirait[7].

France Télévisions produit en 2009 le documentaire Le Jeu de la mort mettant en scène un faux jeu télévisé (La Zone Xtrême) reproduisant l'expérience de Milgram. La différence notable est que l'autorité scientifique représentée par le technicien en blouse grise est remplacée par une présentatrice de télévision. Selon les premières estimations, le taux d'obéissance est 81 %, supérieur aux 62,5 % en rétroaction vocale de l'expérience originelle. Le producteur de l'émission[8], Christophe Nick, présente son documentaire comme une critique de la télé-réalité. La comparabilité de La Zone Xtrême avec les études de Milgram a été interrogée par Bègue et Terestchenko.

La différence du taux d'obéissance à une autorité légitime entre les hommes et les femmes a également été étudiée et il n'a pas été remarqué de différence significative[5]. En revanche, lors d'une expérience réalisée en 1974, en Australie, où l'élève était une femme et l'enseignant un homme, le taux d'obéissance n'est plus que 28 %[7].

Critiques et commentaires

Validité de l'expérience

Milgram le disait lui-même, la première critique de son expérience concernait la validité de ses résultats et leur portabilité à des situations réelles ; la reproduction de l'expérience dans d'autres pays avec des résultats très proches et la production d'expériences du même ordre, comme l'expérience de Stanford, même si toutes ces expériences reçoivent les mêmes critiques de validité, tendent à minimiser cette première critique.

La principale critique de l'expérience, qui vient pour l'essentiel des milieux universitaires d'Amérique du Nord (États-Unis et Canada), est beaucoup plus consistante : celle de l'acceptabilité à la fois morale et scientifique du protocole mis en place. Dans les deux cas, la critique est d'ordre déontologique et éthique.

L'expérience de Milgram participe de questions qui sont beaucoup posées sur la validité des protocoles (point de vue scientifique) et sur leur qualité (point de vue moral). La question est : une expérience reposant sur la tromperie (en anglais, deception, traduit dans le texte cité par « duperie ») est-elle scientifiquement valide et moralement acceptable ? Daphne Maurer, professeur de psychologie à l'Université McMaster, expose ainsi les points problématiques les plus discutés[9] :

« On avait donc trompé les sujets sur les points suivants :

  • la « victime » ne recevait en rĂ©alitĂ© aucun choc ;
  • la « victime » Ă©tait en rĂ©alitĂ© un complice ;
  • les sujets pouvaient en rĂ©alitĂ© cesser en tout temps (ce qui n'Ă©tait pas vĂ©ritablement le cas Ă©tant donnĂ© que la personne chargĂ©e de l'expĂ©rience donnait des consignes prĂ©cises de poursuivre malgrĂ© l’hĂ©sitation des sujets et, par consĂ©quent, ne laissait pas aux sujets la possibilitĂ© d'arrĂŞter).

Il ne fait pas l'ombre d'un doute que ce genre de méthode soulève d'importantes questions d'éthique tel le respect des personnes et de leur droit de faire des choix volontaires lorsqu'elles participent à des expériences. Quand un choix se fonde sur des allégations mensongères, il ne peut être qualifié de volontaire. Un autre aspect de l’éthique que soulève le recours à la duperie est la rupture du lien de confiance entre le chercheur et le sujet. »

Le corollaire de ces interrogations est la validité scientifique des résultats d'une expérience de ce type, sujet qui donne lieu à une abondante littérature universitaire en langue anglaise, pour l'essentiel d'origine nord-américaine.

Pour Jean-Léon Beauvois[10], cette polémique éthique viserait en fait à contraindre la recherche en psychologie à rester dans le politiquement correct. Il y aurait également une extension internationale de cette pensée, par la mise en place d'une réglementation stricte. « Sous le couvert moral de protéger le public contre les risques psychologiques encourus lors de manipulations expérimentales, certaines expériences sont interdites puisque soumises à la nécessité du consentement éclairé du sujet participant à l'expérience. »[11]

D'autres critiques portent plus spécifiquement sur les facteurs pouvant influencer le déroulement de l'expérience. En effet, le fait de participer à un test influencerait le comportement des sujets comme l'a décrit Elton Mayo dans sa théorie de l'effet Hawthorne. L'effet Pygmalion est également à prendre en considération dans la mesure où il est très proche des conditions décrites par Milgram.

Isabelle Stengers porte sa critique sur la validité même de l'expérience. Selon elle, « l'expérience où Stanley Milgram créa, au nom de la science psychologique, les conditions où des individus normaux allaient devenir des bourreaux » car « la question éthique, ici, est toujours en même temps une question technique, […] l'expérience dite de Milgram n'a pas produit de témoins fiables », d'autant que « les sujets-bourreaux de Milgram se savaient au service de la science, et ce savoir a pour conséquence que l'expérience, qui était censée se borner à mettre en évidence un comportement, a sans doute contribué, sur un mode incontrôlable, à le produire »[12].

Manipulation des résultats par Milgram ?

Dans un livre intitulé Behind the Shock Machine - The Untold Story of the Notorious Milgram Psychology Experiments[13], la psychologue australienne Gina Perry accuse Milgram d'avoir manipulé les résultats de son étude en vue d'obtenir le résultat qu'il souhaitait.

Ă€ partir de l'Ă©coute des cassettes d'enregistrement de l'expĂ©rience et des tĂ©moignages de ceux qui y ont participĂ©, elle met notamment en avant divers Ă©lĂ©ments ayant faussĂ© l'Ă©tude, tels le non-respect du script prĂ©vu par les expĂ©rimentateurs avec l'autorisation de Milgram[14] ou l'insistance excessive manifestĂ©e par les expĂ©rimentateurs : dans un cas, l'expĂ©rimentateur demanda ainsi 26 fois au sujet de poursuivre, au lieu des 4 annoncĂ©s dans le protocole expĂ©rimental[15].

Les critiques de Perry touchent Ă©galement Ă  la sĂ©lection des rĂ©sultats obtenus : Perry met en exergue le fait que Milgram a menĂ© 24 expĂ©riences semblables, obtenant des rĂ©sultats extrĂŞmement variables : le chiffre le plus souvent citĂ©, selon lequel 65 % des sujets auraient obĂ©i, ne s'est produit que dans une seule de ces expĂ©riences : prises dans leur ensemble, les expĂ©riences montrent que plus de la moitiĂ© des sujets dĂ©sobĂ©issaient[16]. En outre, Milgram aurait minimisĂ© le fait que certains des sujets avaient de sĂ©rieux doutes quant Ă  la rĂ©alitĂ© des « souffrances » qu'ils infligeaient[17]. Perry conclut que « la mĂ©thodologie des expĂ©riences prĂ©sente tellement de failles qu’il est extrĂŞmement difficile d’en tirer une conclusion quelconque »[18].

L’expérience de Milgram comme topos

Cette expérience est devenue un topos dans les discours sur l'obéissance et la soumission volontaire à l'autorité ainsi que dans des discussions plus abstraites, sur les limites de la notion de libre arbitre.

Dans des domaines académiques, elle sert souvent de modèle ou d'exemple en sociologie, en psychologie expérimentale et en psychologie sociale, ainsi qu'en philosophie, notamment en philosophie du droit. En psychologie sociale particulièrement, l'expérience de Milgram est souvent utilisée pour discuter ou présenter certains concepts dégagés par ce domaine, tels que le conformisme, l'influence normative et bien sûr la soumission à l’autorité et l'état agentique, deux notions au cœur du travail de Milgram dans cette expérience.

Analyse de la désobéissance

Dans le contexte de la suspension de la convention de Genève aux États-Unis Ă  la suite des attentats du et de la mise en place de techniques d'interrogatoires renforcĂ©es (ensuite qualifiĂ©es de torture par l'administration Obama), une mĂ©ta-analyse des rĂ©sultats de Milgram a dĂ©montrĂ© que les sujets qui avaient dĂ©sobĂ©i Ă  l'autoritĂ© n'avaient pas tant rĂ©agi Ă  la souffrance qu'Ă  la première demande de la victime de faire cesser l'expĂ©rience, Ă  150 V. La capacitĂ© du sujet Ă  percevoir chez sa victime un droit capable d'invalider le droit de l'autoritĂ© de conduire son expĂ©rimentation serait l'Ă©lĂ©ment nĂ©cessaire Ă  la dĂ©sobĂ©issance, tandis que l'escalade de la souffrance, de nature quantitative et graduelle, n'amènerait pas de changements cognitifs suffisants[19].

Influence de l'expérience

Cette expérience demeure une référence. D'après une étude réalisée en 2002[20], Milgram est le 12e psychologue le plus cité dans l'introduction des livres de psychologie du XXe siècle. Cette recherche de Milgram est d'ailleurs une référence dans des domaines aussi différents que celui de la psychologie du travail[21], la finance comportementale[22], ou en sociologie politique[23] par exemple.

De ce fait, l'expérience a été adaptée pour être reproduite. Ainsi, Mel Slater a reproduit l'expérience pour s'intéresser au statut de la réalité virtuelle[24]. Il a constitué deux groupes : des participants punissaient un soi-disant élève, qu'ils ne voyaient pas, tandis que d'autres punissaient un personnage virtuel. Le groupe qui faisait face à un personnage virtuel a cessé beaucoup plus tôt de punir cet « élève ».

Dans la culture populaire

  • L'Ă©pisode de la sĂ©rie Le Saint avec Roger Moore, intitulĂ© Le Jeu de la Mort ,s'inspire de l'expĂ©rience de Milgram.
  • En 1979, l'expĂ©rience de Milgram a Ă©tĂ© mise en scène dans le film I… comme Icare d'Henri Verneuil, fiction inspirĂ©e de l'assassinat de John F. Kennedy, oĂą l'acteur Roger Planchon joue le professeur David Naggara (par ailleurs professeur, dans le film, Ă  l'universitĂ© de LayĂ©, anagramme de Yale), inspirĂ© de Stanley Milgram, qui prĂ©sente son expĂ©rience au personnage principal jouĂ© par Yves Montand, avec Jacques Denis dans le rĂ´le de l'expĂ©rimentateur piĂ©gĂ©.
  • Dans son album de 1986 So, le musicien Peter Gabriel a Ă©crit une chanson, We do what we're told (Milgram's 37) (Nous faisons ce qu'on nous dit (les 37 de Milgram)), faisant rĂ©fĂ©rence Ă  la variante de l'expĂ©rience de Milgram oĂą 37 personnes sur 40 participent par leur inaction Ă  l'administration des dĂ©charges Ă©lectriques maximales.
  • Dans l'Ă©pisode 5 de la saison 5 de la sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e Malcolm, l'expĂ©rience est pratiquĂ©e sur Malcolm.
  • Cette expĂ©rience est Ă©voquĂ©e par une doctoresse et chercheuse dans le roman graphique V pour Vendetta, comme point de dĂ©part d'une rĂ©flexion sur la complicitĂ© des scientifiques aux crimes des dictatures. La scientifique, que le personnage principal va assassiner, a en effet supervisĂ© des expĂ©riences non Ă©thiques dans des camps de concentration.
  • Dans l'Ă©pisode 17 de la saison 9 de New York, unitĂ© spĂ©ciale, Merritt Rook alias inspecteur Milgram (incarnĂ© par Robin Williams), fait subir l'expĂ©rience de Milgram Ă  Elliot Stabler.
  • Le premier tome de la bande dessinĂ©e Le tueur, par Matz et Luc Jacamon, fait Ă©galement rĂ©fĂ©rence Ă  l’expĂ©rience de Milgram.
  • Dans La Vague de Todd Strasser, on retrouve le dispositif d'une expĂ©rience semblable, entre un professeur et ses Ă©lèves.
  • Le Jeu de la mort, un documentaire rĂ©alisĂ© par Christophe Nick.
  • Experimenter est un film biographique sur Stanley Milgram sorti en 2015.

Notes et références

Références

Stanley Milgram (trad. de l'anglais), La Soumission à l'autorité, Calmann-Lévy, coll. « Liberté de l'esprit », , 2e éd., 270 p. (ISBN 2-7021-0457-6)

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Divers

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Annexes

Bibliographie

  • (en) A. G. Miller, The obedience experiments : A case study of controversy in social science, New York, Westport, Preaeger, 1986.
  • Stanley Milgram (trad. de l'anglais), La Soumission Ă  l'autoritĂ© : Un point de vue expĂ©rimental [« Obedience to Authority : An Experimental View »], Calmann-LĂ©vy, coll. « LibertĂ© de l'esprit », , 2e Ă©d., 270 p. (ISBN 2-7021-0457-6).
  • Stanley Milgram, ExpĂ©rience sur l'obĂ©issance et la dĂ©sobĂ©issance Ă  l'autoritĂ©, la DĂ©couverte, Hors Collection ZONES, 2013. PrĂ©face de Michel Terestchenko.

Articles connexes

Expériences proches

Essai philosophique

Fictions

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