Ethnologue, Languages of the World
Ethnologue, Languages of the World, souvent abrégé en Ethnologue, est une publication de SIL International visant à inventorier toutes les langues du monde. Publiée en version sur papier depuis 1951, elle est également disponible sur internet depuis 1997.
Historique
La première édition de l'ouvrage est publiée en 1951 par la SIL[1]. Jusqu'à la 16e édition de 2009, la base de données est éditée sous la forme d'un ouvrage papier puis mise en ligne sur le site web[2].
À partir de décembre 2015, le site limite l'accès gratuit à sept pages par mois, au-delà , les utilisateurs doivent souscrire un abonnement[3] - [4], et depuis octobre 2019, si toutes les pages sont consultables, la majorité des données est cachée (autres que le code ISO 639-3, la classification, l'autonyme, et le lien vers la liste des ressources de l'OLAC), le reste requérant un abonnement payant[3] - [5]. Il est toutefois possible d'obtenir un abonnement standard gratuit en contribuant[6] - [7], et les anciennes éditions en ligne, depuis la 13e de 1996, sont disponibles à la consultation[8].
En 2022, la 25e édition compte 7 151 langues vivantes[9].
Collaborateurs
Le rédacteur en chef est Gary Simons, il est assisté par David Eberhard et le directeur de la rédaction est Charles Fennig, Paul Lewis est quant à lui employé comme consultant[10], tous sont professeurs de linguistique.
Les chercheurs sur le terrain sont employés par la SIL (environ 5 000 linguistes en 2020), ou sont des chercheurs indépendants[3]. Depuis la 17e édition de 2013, une partie des corrections est proposée par les contributeurs enregistrés sur le site sur une sous-page spéciale pour chaque langue et est vérifiée par Fennig[6].
Éditions
Les premières éditions d'Ethnologue sont publiées approximativement tous les quatre ans, et à partir de la 18e édition, tous les ans[11]
Édition | Date | Éditeur | Notes |
---|---|---|---|
1 | 1951 | Richard S. Pittman | 10 pages miméographiées - 46 langues |
2 | 1951 | Pittman | |
3 | 1952 | Pittman | |
4 | 1953 | Pittman | |
5 | 1958 | Pittman | Première édition en format livre |
6 | 1965 | Pittman | |
7 | 1969 | Pittman | 4 493 langues |
8 | 1974 | Barbara F. Grimes | |
9 | 1978 | Grimes | |
10 | 1984 | Grimes | Première introduction des codes SIL |
11 | 1988 | Grimes | 6 253 langues |
12 | 1992 | Grimes | 6 662 langues |
13 | 1996 | Grimes | 6 883 langues |
14 | 2000 | Grimes | 6 809 langues |
15 | 2005 | Raymond G. Gordon, Jr. | 6 912 langues - Projet de norme ISO |
16 | 2009 | M. Paul Lewis | 6 909 langues |
17 | 2013[13] | Lewis, Gary F. Simons et Charles D. Fennig | 7 106 langues |
18 | 2015 | Lewis, Simons et Fennig | 7 102 langues |
19 | 2016 | Lewis, Simons et Fennig | 7 097 langues |
20 | 2017 | Simons et Fennig | 7 099 langues |
21 | 2018 | Simons et Fennig | 7 097 langues |
22 | 2019 | David M. Eberhard, Simons et Fennig | 7 111 langues |
23 | 2020 | Eberhard, Simons et Fennig | 7 117 langues |
24 | 2021 | Eberhard, Simons et Fennig | 7 139 langues |
25 | 2022 | Eberhard, Simons et Fennig | 7 151 langues |
Code SIL
En 1984, Ethnologue publie un système de codage à trois lettres appelé « code SIL » pour identifier chaque langue qu'il décrit, lequel dépasse largement les normes antérieures (comme l'ISO 639-1)[1]. La 14e édition, publiée en 2000, comprend 7 148 codes linguistiques qui généralement ne correspondent pas à la norme ISO 639-3. En 2002, Ethnologue demande à travailler avec l'Organisation internationale de normalisation (ISO) afin d'intégrer ses codes dans un projet de norme internationale. La 15e édition, publiée en 2005, utilise ce nouveau standard et comprend 7 299 codes ISO 639-3. Les collections et les familles de langues ont été intégrées dans la norme ISO 639-5[14].
Présentation des données
Langues individuelles
Les langues individuelles possèdent chacune leur page, avec un onglet principal portant les informations sur le pays d'origine de la langue, des onglets pour les autres pays où elle est parlée, un onglet avec une carte interactive, et un dernier onglet, visible uniquement pour les participants au programme de contribution, où ces derniers peuvent proposer des modifications si certaines informations diffèrent des sources ou sont obsolètes.
L'onglet principal et les onglets des pays supplémentaires comprennent plusieurs sections[15] - [16] :
- identification de la langue : avec le code ISO 639-3, et une liste de noms alternatifs utilisés pour désigner la langue ;
- population d'utilisateurs : avec le nombre de locuteurs dans le pays et le nombre total dans le monde, ainsi que les nombres de locuteurs de langue maternelle (L1) et seconde (L2) lorsque ces données sont disponibles, et éventuellement d'autres commentaires ;
- localisation : décrit où les locuteurs sont situés dans le pays ;
- statut de la langue : indique le rang EGIDS (Expanded Graded Intergenerational Disruption Scale, « échelle graduée de perturbation intergénérationnelle élargie ») qui donne une appréciation de la viabilité de la langue, avec également son niveau de reconnaissance officielle ;
- classification : fournit la classification phylogénétique de la langue ;
- dialectes : liste les noms des variétés de la langue, leurs intelligibilité mutuelle et similarités lexicales ;
- typologie : fournit des informations sur la typologie linguistique, avec éventuellement de brèves descriptions de l'ordre des mots, des caractéristiques phonologiques, morphologiques et syntaxiques significatives, le nombre de consonnes et de voyelles, etc. ;
- utilisation de la langue : avec les domaines d'utilisation, l'âge des locuteurs, d'autres commentaires sur la viabilité de la langue, l'utilisation d'autres langues par cette communauté linguistique, et l'utilisation par d'autres groupes comme seconde langue ;.
- développement de la langue : avec les taux d'alphabétisation, l'utilisation dans l'éducation, les ouvrages de documentation et de développement, les efforts de revitalisation et les agences liées à la langue, ainsi que les traductions éventuelles de la Bible ;
- ressources linguistiques : un lien vers page correspondante de l'OLAC) qui répertorie les ressources dans et sur la langue ;
- écriture : avec les systèmes d'écriture utilisés ;
- autres commentaires : avec des informations sur les langues non indigènes et toutes les informations supplémentaires sur la langue ou le groupe ethnique, y compris les principales affiliations religieuses.
Familles de langues
La classification d'Ethnologue se fonde sur celle de William Bright[17], mais a évolué avec la participation de nombreux autres chercheurs. C'est sur elle que reposent les informations sur la classification dans les articles traitant des langues individuelles. En revanche, les arbres généalogiques des langues sont générés par ordinateur et dépendent fortement de la compatibilité des formats de données des différentes classifications, ce qui aboutit à des incohérences et à des faux groupements.
Le tableau ci-dessous reprend les 152 familles de langues listées par Ethnologue dans sa 25e édition de 2022, y compris les isolats, pidgins, langues créoles, mixtes, construites et non classées[18].
Critiques
En 1986, William Bright (en), alors rédacteur en chef de la revue de linguistique Language, écrit qu'Ethnologue est « indispensable à tout rayonnage de référence sur les langues du monde »[19]. En 2008, dans la même revue, Lyle Campbell et Verónica Grondona déclarent qu'« Ethnologue[...] est devenu la référence standard, et son utilité est difficile à surestimer »[20].
Michael Erard, dans son article du New York Times de 2005, note que, « bien que son histoire insolite attire quelques critiques chez les linguistes laïcs, Ethnologue est également loué pour son étendue »[21].
En 2015, Harald Hammarström (en), responsable de Glottolog, en parlant des 16e, 17e et 18e éditions, critique l'absence de sourçage systématique dans la publication et son incapacité à exposer clairement ses principes de classification des langues et d'identification. Il conclut néanmoins que tout compte fait, « Ethnologue est un catalogue des langues du monde d'une exhaustivité impressionnante, et il est de loin supérieur à tout ce qui a été produit avant 2009 »[22].
En 2020, Catherine Matacic note dans la revue Science que depuis que le site est devenu payant, de nombreux linguistes ont décidé de l'abandonner pour d'autres ressources, notamment Glottolog, mais que ce dernier ne propose pas toutes les données disponibles sur Ethnologue, la plus recherchée étant les chiffres de population. Le rédacteur en chef Gary Simons comprend leur colère, mais dit qu'ils ont été obligés d'en arriver là s'ils ne veulent pas disparaître. La SIL affirme qu'elle ne compte pas vraiment sur les abonnés individuels, mais plutôt sur les institutions — environ 40 % des 50 plus grandes écoles du monde s'étant déjà abonnées — et les grandes entreprises[3].
Notes et références
- Brown et Ogilvie 2010, p. 385.
- Lewis 2013.
- Matacic 2020.
- (en) « Ethnologue launches subscription service », sur ethnologue.com, .
- (en) « Changes at Ethnologue.com », sur ethnologue.com,
- Hammarström 2015, p. 729.
- (en) « Contributor Program », sur ethnologue.com
- Archives, sur ethnologue.com.
- (en) Gary Simons, « Welcome to the 25th edition », sur ethnologue.com, .
- (en) « Credits », sur ethnologue.com.
- (en) Paul Lewis, « Welcome to the 18th edition! », sur ethnologue.com,
- (en) « History of the Ethnologue », sur ethnologue.com.
- mise à jour en 2014
- (en) « Three-letter Codes for Identifying Languages », sur ethnologue.com.
- (en) « Language Information », sur ethnologue.com.
- Lewis et Simons 2010.
- Bright 1992.
- (en) « Browse by Language Family », sur ethnologue.com.
- Bright 1986.
- Campbell et Grondona 2008.
- Erard 2005.
- Hammarström 2015.
Voir aussi
Bibliographie
- (en) Paul Lewis et Gary F. Simons, « Assessing Endangerment: Expanding Fishman's GIDS », Revue roumaine de linguistique, vol. 55, no 2,‎ , p. 103-120 (ISSN 0035-3957, lire en ligne).
- (en) William Bright (en), « Book Notice on Ethnologue », Language, vol. 62, no 3,‎ , p. 698-699 (ISSN 1535-0665, DOI 10.2307/415493) — « This pair of volumes is indispensable for any reference shelft on the languages of the world. ».
- (en) William Bright (en), International Encyclopedia of Linguistics, vol. 1 à 4, Oxford University Press, (ISBN 0195051963 et 9780195051964, présentation en ligne).
- (en) Michael Erard (en), « How Linguists and Missionaries Share a Bible of 6,912 Languages », New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne) — « Though its unusual history draws some criticism among secular linguists, the Ethnologue is also praised for its breadth. ».
- (en) Keith Brown (en) et Sarah Ogilvie, Concise Encyclopedia of Languages of the World, Elsevier, , 1320 p. (ISBN 9780080877754 et 0080877753, lire en ligne).
- (en) Lyle Campbell et Verónica Grondona, « Ethnologue, Languages of the World (review) », Language, vol. 84, no 3,‎ , p. 636–641 (ISSN 1535-0665, DOI 10.1353/lan.0.0054, lire en ligne [PDF]).
- (en) Harald Hammarström (en), « Ethnologue 16/17/18th editions: A comprehensive review », Language, vol. 91, no 3,‎ , p. 723–737 (ISSN 1535-0665, DOI 10.1353/lan.2015.0038, lire en ligne [PDF]).
- (en) Catherine Matacic, « World's largest linguistics database is getting too expensive for some researchers », Science,‎ (DOI 10.1126/science.abb2422, lire en ligne).
Liens externes
- (en) Site officiel
- (en) « Archive », toutes les éditions d'ethnologue.com depuis 1996.
- (en) « SIL International ».
- (en) Paul Lewis, « One month later... », sur ethnologue.com, .