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Emilio Eduardo Massera

L'Amiral Emilio Eduardo Massera (né à Paraná le et mort le [1] à l'Hôpital Naval de Buenos Aires) est un militaire argentin qui fut, de 1976 à 1978, membre de la junte militaire qui avait renversé, lors d'un coup d'État, la présidente Isabel Martínez de Perón et gouverna l'Argentine durant la dictature militaire appelée Proceso de Reorganización Nacional.

Emilio Eduardo Massera
Emilio Massera en 1978.
Fonction
Chief of the Navy General Staff
-
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  85 ans)
Buenos Aires
Nom dans la langue maternelle
Emilio Massera
Nationalité
Formation
École navale militaire (Argentine) (en)
École militaire des Amériques
Activités
Période d'activité
Autres informations
Arme
Grade militaire
Condamné pour
Distinctions
Grand-croix du MĂ©rite militaire avec la distinction blanche ()
Condecoración Protector de los Pueblos Libres General José Artigas (d) ()
signature d'Emilio Eduardo Massera
Signature

Il fut également membre de la loge P2[2] - [3], dirigée en Italie par Licio Gelli.

Carrière militaire

Emilio Massera entra à l'École militaire de la Marine en 1942.

À sa sortie en 1946, il fut élève de l'école militaire des Amériques et de l'Interamerican Defence College à Washington DC, où on le forma à la guerre antisubversive. De retour en Argentine, il monta les degrés de la hiérarchie de la Marine argentine et en 1955, entra au service d'information de la Marine[4].

Nommé capitaine de frégate sur l'ARA Libertad, il obtint le grade d'Amiral le , à la suite du retrait forcé d'une bonne partie des patrons de la marine argentine dont il fut nommé commandant en chef.

Membre de la junte militaire argentine (1976-1978)

Le , l'amiral Massera prit part au coup d'État qui destitua la présidente Isabel Martínez de Perón et fut membre, avec les généraux Jorge Rafael Videla et Orlando Ramón Agosti, de la junte militaire qui gouverna alors l'Argentine.

Emilio Massera fut alors l'un des principaux promoteurs de la « guerre sale Â», par laquelle la dictature s'en prit aux mouvements rĂ©volutionnaires — pĂ©ronistes ou marxistes —, ainsi qu'Ă  toute forme de dissidence politique. En 1977, l'amiral dĂ©clara :

« La crise actuelle de l'humanité est due à trois hommes. Vers la fin du XIXe siècle, Marx publia trois tomes du Capital et avec eux mit en doute l'intangibilité de la propriété privée; au début du XXe siècle, la sphère sacrée intime de l'être humain fut attaquée par Freud, dans son livre L'Interprétation des rêves, et… Einstein, en 1905, fit reconnaître la théorie de la relativité, où il met en doute la structure statique et la mort de la matière[5]. »

L'Ă©touffement de la diffusion des « idĂ©es opposĂ©es Ă  la civilisation occidentale et chrĂ©tienne Â», provoquĂ©e selon lui par cette trilogie d'auteurs juifs, justement, se solda par la disparition forcĂ©e de quelque 30 000 personnes de diffĂ©rents niveaux de militance politique, incluant un grand nombre de prĂŞtres et de religieuses tiers-mondistes, bien que les relations de Massera avec l'Église catholique furent toujours excellentes. En novembre 1977, l'UniversitĂ© del Salvador (jĂ©suite) lui accorda le rang de docteur honoris causa ; les responsables, alors proches du pĂ©ronisme, disent aujourd'hui qu'ils visaient par-lĂ  Ă  protĂ©ger les courants pĂ©ronistes de l'UniversitĂ©. Certains membres de l'OUTG, qui avait ses entrĂ©es Ă  l'UniversitĂ© del Salvador, auraient effectuĂ© les basses-Ĺ“uvres de Massera ; d'autres, toutefois, ont eu des trajectoires très diffĂ©rentes.

L'École supĂ©rieure de MĂ©canique de la Marine (ESMA), sous la direction de Massera, fut un des centres clandestins de dĂ©tention les plus grands du pays, oĂą se pratiquèrent un grand nombre d'actes de tortures. Des personnes y furent emprisonnĂ©s sans jugement prĂ©alable, y furent torturĂ©es ou assassinĂ©es. Un des adjoints de Massera fut notamment le capitaine Alfredo Astiz, surnommĂ© l'« ange blond Â», qui infiltra les Mères de la Place de Mai.

Jugement et condamnation

Le , l'amiral Massera quitta ses fonctions de commandant en chef de la marine ainsi que son poste au sein de la junte militaire et remplacé par un nouveau triumvirat dirigé par le général Roberto Eduardo Viola.

En janvier 1983, Ă  la fin de la dictature militaire, il se prĂ©senta comme candidat Ă  la prĂ©sidence de la nation pour le parti pour la dĂ©mocratie sociale. En juin de la mĂŞme annĂ©e, il fut mis aux arrĂŞts par le juge Oscar Mario Salvi pour sa prĂ©sumĂ©e participation Ă  la disparition de Fernando Branca. Cette arrestation l'empĂŞcha de participer Ă  la campagne Ă©lectorale. En 1984, ses actions durant la dictature furent Ă©tudiĂ©es par la CONADEP, l'organisme chargĂ© de l'instruction sur la « guerre sale Â» et la terreur d'État. Le l'amiral Massera fut dĂ©chu de son grade et condamnĂ© Ă  la perpĂ©tuitĂ© pour violations des droits humains, assassinats, tortures et privations illĂ©gales de libertĂ©.

Le , Emilio Massera fut gracié par le président Carlos Menem, et recouvra la liberté. En 1998, il fut de nouveau incarcéré préventivement pour des affaires de séquestration et de disparition de mineurs, intervenus durant son gouvernement, et pour avoir donné des ordres de torture, d'exécution, de confinement dans des centres clandestins et de noyade en haute mer de prisonniers vivants. L'ordre d'arrestation, émis par la juge María Servini de Cubría, se basait sur le fait que l'appropriation de mineurs et les autres charges retenues contre lui, étant considérées comme crime contre l'humanité, n'étaient pas prescrits.

L'appropriation illégitime de biens des disparus, pour laquelle il n'avait pas été jugé en 1985, fut inclus dans l'acte d'accusation.

Le cas de Massera donna consistance à de nombreuses actions légales qui amenèrent en 2001 le juge fédéral Gabriel Cavallo à déclarer anticonstitutionnelles les lois du Point final et d'Obéissance due, qui avaient paralysé, durant les quinze années antérieures, les actions intentées contre des militaires de rang inférieur à celui de colonel.

En 2004, à la suite de la rupture d'un anévrisme cérébro-vasculaire, Emilio Massera entra à l'Hôpital Militaire de Buenos Aires. En conséquence des séquelles de l'anévrisme, Massera fut déclaré incapable pour démence, et les procédures judiciaires à son encontre furent suspendues. Les demandes d'extradition faites à son encontre par les gouvernements espagnols, français et allemand, furent suspendues pour les mêmes raisons.

Massera et la loge P2

Le nom de Massera figurait sur la liste des 963 membres que la police italienne trouva en 1981 en enquêtant sur les actions de la loge Propaganda Due, et dont d'autres membres avaient été, en Argentine, José López Rega[3] ou le général Guillermo Suárez Mason (en) [3]. La loge, depuis lors déclarée illégale par le gouvernement italien et dissoute, était sous la direction de Licio Gelli, un ancien agent de Mussolini pendant la Seconde Guerre mondiale.

Gelli aurait connu Massera grâce Ă  un certain Carlos Alberto Corti, capitaine de la flotte militaire argentine et confident de Massera . Gelli utilisa Massera pour garantir de juteux contrats multimillionnaires en dĂ©penses d'Ă©quipements militaires et d'armements de la junte argentine soit 6 000 millions de dollars amĂ©ricains en deux ans. Gelli s'assura Ă©galement ainsi du contrĂ´le d'une partie de la presse grâce Ă  l'achat d'une partie des Ă©ditions italiennes Rizzoli et des Ă©ditions argentines Editorial Abril. En Ă©change, Gelli aurait facilitĂ© les relations de Massera avec le Vatican et les États-Unis, et fourni les moyens pour canaliser en lieu sĂ»r Ă  l'Ă©tranger l'argent obtenu par la corruption et les malversations du TrĂ©sor public .

Massera et Montoneros

Il existe une série de rumeurs (jamais démontrées) selon lesquelles Massera assista à une série de réunions secrètes à Paris avec le leader du groupe guérillero Montoneros (gauche péroniste), Mario Firmenich .

MalgrĂ© le fait qu'un grand nombre des victimes du rĂ©gime faisaient partie de ce groupe, Massera et plusieurs membres des forces armĂ©es pensaient que la direction du groupe Ă©tait « rĂ©cupĂ©rable Â» et « rĂ©versible Â», en raison des racines catholiques et du nationalisme des membres de la hiĂ©rarchie de Montoneros.

Ces mêmes racines avaient déjà été évoquées pour expliquer une prétendue alliance stratégique et idéologique d'intérêts entre la hiérarchie de Montoneros et le président Juan Carlos Onganía en 1969 lors du meurtre du général Pedro Eugenio Aramburu , alliance qui n'a jamais été démontrée non plus et demeure très douteuse.

Massera croyait qu'il était possible de faire travailler pour lui les membres exilés de Montoneros, dans son projet de devenir une référence d'un grand parti politique de masses. Un hypothétique témoin de ces réunions, la fonctionnaire de l'ambassade argentine à Paris, Elena Holmberg (en), fut rappelée à Buenos Aires par sa hiérarchie. Le , elle fut enlevée et son corps fut retrouvé quelques jours plus tard dans le port de la ville.

Lors de la « contre-offensive Â» menĂ©e par les Montoneros entre 1979 et 1980, dans laquelle il Ă©tait prĂ©vu qu'un nombre important de membres du groupe pĂ©nètre dans le pays pour mener une lutte rĂ©volutionnaire urbaine contre le rĂ©gime militaire, la façon et la rapiditĂ© dont presque la totalitĂ© de ces membres furent interceptĂ©s, capturĂ©s, et « disparus Â» a nourri les thĂ©ories selon lesquelles les Montoneros soit auraient Ă©tĂ© infiltrĂ©s par les services de renseignement (l'extrĂŞme longĂ©vitĂ© de Mario Firmenich a pu notamment soutenir ces soupçons, qui n'ont toutefois jamais pu ĂŞtre prouvĂ©), soit auraient parvenu Ă  Ă©tablir un pacte avec le rĂ©gime militaire, probablement lors de cette sĂ©rie de rĂ©unions avec Massera Ă  Paris .

Voir aussi

Références

  1. .
  2. Buongiorno, Pino, L'Internazionale dal Venerabile Licio dans Andrea Barbieri et. al.; "L'Italia della P2" - publication Milan: Mondadori (1981).
  3. Fabrizio Calvi et Olivier Schmidt, Intelligences secrètes. Annales de l'espionnage, Hachette, 1988, p. 71.
  4. Carlos Bartffeld, Mason y Amigo de Massera.
  5. DĂ©claration au journal La OpiniĂłn, le 25/11/1977.

Liens externes

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