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Alfredo Astiz

Alfredo Ignacio Astiz (nĂ© le ), surnommĂ© « L’Ange blond » et « L’Ange de la mort », a Ă©tĂ© lieutenant de frĂ©gate spĂ©cialiste de la torture, dirigeant le commando spĂ©cial de l’École supĂ©rieure mĂ©canique de la marine argentine (ESMA)[1], l'un des centres clandestins de dĂ©tention de la dictature militaire argentine (1976-1983).

Alfredo Astiz
Alfredo Astiz

Surnom « L’Ange blond de la mort »
(El Ángel Rubio de la Muerte)
Naissance
Mar del Plata (Argentine)
Origine Argentin
Allégeance Drapeau de l'Argentine Argentine
Unité Grupo de Tareas 3.3.2
Groupe tactique de plongeurs
Grade Commandant (rayé des listes)
AnnĂ©es de service 1970 – 1995
Conflits Guerre des Malouines

Il Ă©tait sous les ordres du capitaine Jorge Eduardo Acosta (« Le Tigre »), et est notamment accusĂ© de la disparition forcĂ©e de deux religieuses françaises, Alice Domon et LĂ©onie Duquet, ainsi que de celle de l’adolescente argentino-suĂ©doise, Dagmar Hagelin.

En 2011, il est condamné à la réclusion à perpétuité pour crime contre l'humanité.

Biographie

Agent de la dictature et amnistie

Né à Mar del Plata d'un pÚre officier de marine[1], il est chargé sous la dictature du GT 332 (Grupo de Tareas ou « Groupe de travail », les commandos chargés d'enlever les cibles de la junte) et, en tant que tel, il a notamment infiltré les MÚres de la place de Mai, sous le nom de Gustavo Niño[1] et se liant particuliÚrement avec une de ses futures victimes, Alice Domon :

« Il signalait les futures victimes en leur donnant un baiser sur la joue, d'oĂč son surnom, « Judas Â»[2]. »

Astiz a ainsi Ă©tĂ© directement impliquĂ© dans la disparition forcĂ©e des membres fondatrices de cette association en , ainsi que de celle, lors de la mĂȘme opĂ©ration, des religieuses françaises Alice Domon et LĂ©onie Duquet, liĂ©e Ă  ces derniĂšres[3] ; il est aussi accusĂ© de la disparition forcĂ©e de l’Argentino-SuĂ©doise Dagmar Hagelin (17 ans), en [1]. La torture se pratique dans les bĂątiments de l'École mĂ©canique de la marine (ESMA), le plus grand centre clandestin de torture Ă  Buenos Aires, oĂč les tortionnaires vivent avec leurs victimes, les torturant au sous-sol et au grenier, dormant paisiblement aux Ă©tages. « PrĂšs de 5 000 prisonniers politiques y ont Ă©tĂ© torturĂ©s et tuĂ©s »[2].

La disparition forcée d'étrangers suscite alors l'ire de la communauté internationale et permet de focaliser l'attention de l'opinion publique mondiale sur les violations des droits de l'homme commis par la junte de Videla.

Alfredo Astiz est ensuite envoyĂ© en mission d’infiltration en France des milieux d’opposants. Il figure ainsi sur une photographie, datĂ©e d’ et prise Ă  l’occasion d’un contre-congrĂšs sur le cancer organisĂ© par le chercheur Georges PĂ©riĂšs, exilĂ© argentin, en protestation contre un congrĂšs organisĂ© par la junte. Il n'a Ă©tĂ© identifiĂ© sur cette photographie qu'en 2009[4].

Il participe ensuite à la guerre des Malouines (avril-), et en tant que commandant de la petite garnison de Leith Harbour en Géorgie du Sud se rend, le 26 avril 1982, sans gloire, aux forces britanniques lors l'opération Paraquet[5] - [6]. Fait prisonnier de guerre par le Royaume-Uni, la SuÚde et la France demandent alors son extradition, refusée par la PremiÚre ministre Margaret Thatcher, qui invoque la Convention de GenÚve, et restitue le militaire à son pays à la fin de la guerre[6].

Astiz est ensuite amnistié par les lois de 1986 et 1987 (ley de Punto final et ley de Obediencia Debida). Dans les années 1990, Astiz vit tranquillement dans sa ville natale, Mar del Plata, « traditionnelle cité balnéaire, photographié en maillot de bain ou à la terrasse de cafés, accompagné de jolies filles »[2].

En , il est condamnĂ© Ă  deux mois de prison dans une caserne pour « apologie du crime », aprĂšs avoir revendiquĂ© la rĂ©pression illĂ©gale et dĂ©clarĂ©, Ă  un magazine argentin, qu'il avait Ă©tĂ© « techniquement prĂ©parĂ© pour tuer un homme politique ou un journaliste »[2]. ForcĂ© pour cela Ă  dĂ©missionner de l’armĂ©e argentine, en 1998[6], Alfredo Astiz est condamnĂ© par contumace en France, en 1990, sur le fondement de la « compĂ©tence personnelle passive Â», Ă  la rĂ©clusion Ă  perpĂ©tuitĂ© pour le meurtre des deux religieuses françaises (Domon et Duquet). Les deux femmes sont passĂ©es entre ses mains une dizaine de jours en , avant d'ĂȘtre « transfĂ©rĂ©es », c’est-Ă -dire jetĂ©es Ă  la mer pendant un faux transfert en hĂ©licoptĂšre.

Toutefois, la France n’ayant aucun accord d’extradition avec l’Argentine[1], il reste libre, vivant dans des quartiers chics en Uruguay et à Buenos Aires[1].

Arrestation et procĂšs

Galons d’Alfredo Astiz à l’Imperial War Museum de Londres.

ArrĂȘtĂ© en 2003 aprĂšs l'abrogation par le prĂ©sident NĂ©stor Kirchner, validĂ©e par la Cour suprĂȘme, des lois d'amnistie, l'« Ange blond de la mort » est restĂ© aux arrĂȘts dans une base de la marine argentine. Il est opĂ©rĂ© d'une tumeur au foie en 2004[1].

Mais en , la Chambre criminelle de la Cour de cassation ordonne de le libĂ©rer, avec le gĂ©nĂ©ral DĂ­az Bessone, Jorge Acosta, en tout 21 militaires, affirmant que leur temps de dĂ©tention prĂ©ventive avait atteint son maximum, fixĂ© Ă  trois ans[7]. La prĂ©sidente Cristina FernĂĄndez de Kirchner se dĂ©clare alors scandalisĂ©e par la dĂ©cision du tribunal, rejoignant le sentiment des organisations de dĂ©fense des droits de l'homme. Finalement, le secrĂ©taire aux droits de l'homme Eduardo Luis Duhalde sollicite le Conseil de la magistrature pour qu'il initie une procĂ©dure de destitution des magistrats ayant votĂ© cet arrĂȘt (en particulier de Guillermo Yacobucci et de Luis GarcĂ­a), tandis que le procureur RaĂșl PleĂ© fait un appel suspensif de la dĂ©cision[8]. La dĂ©cision judiciaire ne couvre de toute façon pas l'ensemble des affaires concernant les militaires, qui demeurent donc en dĂ©tention[8].

Une nouvelle fois repoussĂ© en [9], le procĂšs d’Alfredo Astiz devant la justice argentine pour l’enlĂšvement et le meurtre de deux religieuses françaises s'ouvre finalement le 11 dĂ©cembre 2009[1]. D'autres inculpations le visent, notamment en Espagne et en Italie, oĂč il a Ă©tĂ© rĂ©cemment condamnĂ©, Ă©galement par contumace, Ă  la perpĂ©tuitĂ©.

Il est Ă©galement inculpĂ© dans le procĂšs de l'ESMA entamĂ© fin 2009, qu'il inaugure en agitant de façon provocatrice le livre de l'ex-chef de la SIDE (SecrĂ©tariat des renseignments de l'État) du gouvernement Menem, Juan Bautista Tata Yofre, intitulĂ© Volver a matar (« Tuer encore une fois »)[10]. La justice argentine a refusĂ© son extradition au motif qu'il Ă©tait dĂ©jĂ  en cours de jugement en Argentine[11].

Condamnation

Alfredo Astiz et 11 autres inculpés sont condamnés le à la réclusion à perpétuité en Argentine aprÚs 22 mois de procÚs[12].

Références

  1. Pauline Damour, Argentine : «l'Ange blond de la mort» devant ses juges, Le Figaro, 10 décembre 2009
  2. Le Monde, 11.12.2009
  3. Thierry Oberlé, Dictature argentine: un procÚs pour les victimes françaises, Le Figaro, 8 décembre 2009
  4. Quand la dictature argentine espionnait ses opposants Ă  Paris, Rue89, 1er novembre 2009
  5. FrĂ©dĂ©ric Stahl, « La guerre des Malouines II – 22 avril au 12 mai : les premiers combats aĂ©ronavals... », Navires et Histoire, no 114,‎ , p. 14 (lire en ligne).
  6. Ricardo Herren, Malvinas, 20 años después : II)- Llegó la hora de los cañones, El Mundo, mars 2002
  7. Ordenan liberar a Astiz, Acosta y Díaz Bessone, Los Andes, 19 décembre 2008
  8. El Gobierno impulsarå el juicio político a los jueces que ordenaron liberar a represores, La Nación, 19 décembre 2008
  9. Nouveau report du procùs de l’ESMA, Le Petit Journal, 19 novembre 2009
  10. Se reanudĂł el juicio por los crĂ­menes de la ESMA, PĂĄgina/12, 14 janvier 2010
  11. La Justicia rechazĂł el pedido de extradiciĂłn de Astiz, PĂĄgina/12, 23 avril 2010
  12. ValĂ©rie Rohart, « « L’Ange blond » Alfredo Astiz condamnĂ© Ă  la prison Ă  vie », sur RFI, (consultĂ© le )

Bibliographie

  • Tristan MendĂšs France, Gueule d’ange, Ă©d. Favre, 2003
  • Interviews filmĂ©s de l'avocate des victimes françaises d'Astiz et du porte-parole français des Affaires Ă©trangĂšres sur les demandes d'extradition de ce dernier. Plus visuels des plans du centre de torture oĂč Astiz travaillait. VidĂ©o rĂ©alisĂ©e par Tristan MendĂšs France, 2003.

Liens externes

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