Eleazar LĂłpez Contreras
Eleazar LĂłpez Contreras (Queniquea, TĂĄchira, 1883 â Caracas, 1973) Ă©tait un militaire et homme d'Ătat vĂ©nĂ©zuĂ©lien, qui fut prĂ©sident du Venezuela entre 1935 et 1941.
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(Ă 89 ans) Caracas |
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Interrompant ses Ă©tudes de mĂ©decine, il rejoignit la RĂ©volution libĂ©rale de Restauration dirigĂ©e par Cipriano Castro et Juan Vicente GĂłmez. Il participa dĂšs lors Ă de nombreux combats et fut blessĂ© lors de la bataille dĂ©cisive de Tocuyito de 1899, qui assura le triomphe de la rĂ©volution. Ayant succĂ©dĂ© en 1935 Ă Juan Vicente GĂłmez Ă la prĂ©sidence de la rĂ©publique, il sâattacha Ă tempĂ©rer lâautoritarisme de son prĂ©dĂ©cesseur et Ă dĂ©mocratiser le pays, tout dâabord en signant un dĂ©cret de libĂ©ration des prisonniers politiques, puis en promulguant la Constitution de 1936. Il eut Ă affronter la premiĂšre grĂšve dans lâindustrie du pĂ©trole du Venezuela. Ă son instigation furent crĂ©Ă©es la Garde nationale vĂ©nĂ©zuĂ©lienne (pour combler un vide dans le cadre institutionnel de lâĂtat) et la Banque centrale du Venezuela (afin de moderniser le pays et gĂ©rer dâune maniĂšre plus efficace les considĂ©rables ressources apportĂ©es par le pĂ©trole). Des experts techniciens Ă©trangers en matiĂšre de santĂ© publique furent recrutĂ©s et une Division dâhygiĂšne rurale fut instituĂ©e. Recueillant les juifs en mal de terre dâasile errant sur les paquebots Caribia et Königstein, il sera pour une grande part Ă lâorigine de lâactuelle communautĂ© juive du Venezuela.
Jeunesse
LĂłpez Contreras vit le jour en 1883, annĂ©e oĂč eurent lieu les festivitĂ©s pour le centenaire de la naissance du « libertador » SimĂłn BolĂvar, mais aussi annĂ©e oĂč Antonio GuzmĂĄn Blanco se trouvait Ă lâapogĂ©e de son pouvoir. Il fut le fils unique du gĂ©nĂ©ral Manuel MarĂa LĂłpez et de MarĂa Catalina Contreras et eut pour tuteur le prĂȘtre Fernando MarĂa Contreras. Trois mois aprĂšs sa naissance, son pĂšre mourut Ă CĂșcuta (Colombie), de la fiĂšvre jaune, Ă la suite de quoi son oncle, lâecclĂ©siastique Fernando Contreras, prit la famille Ă sa charge.
Il obtint Ă quinze ans le titre de bachelier en philosophie et lettres du collĂšge du SacrĂ©-CĆur-de-Jesus dans la ville de La Grita (Ătat de TĂĄchira). Initialement, le jeune Eleazar se destinait Ă Ă©tudier la mĂ©decine Ă lâuniversitĂ© de MĂ©rida, lâactuelle UniversitĂ© des Andes, mais prit le parti, alors quâil nâĂ©tait ĂągĂ© que de seize ans, dâadhĂ©rer Ă la « rĂ©volution libĂ©rale de restauration » (en esp. RevoluciĂłn Liberal Restauradora), Ă©galement dĂ©nommĂ©e « rĂ©volution des soixante », dirigĂ©e par Cipriano Castro et Juan Vicente GĂłmez. PersĂ©cutĂ© par le rĂ©gime de GuzmĂĄn, il se rĂ©fugia dans les montagnes du RĂo Bobo. Peu aprĂšs, aidĂ© de son oncle Contreras, et avec le concours de quelques amis prĂȘtres, il se porta vers la ville colombienne de CĂșcuta, oĂč il prit part Ă de nombreuses batailles, et fut Ă©levĂ© au grade de capitaine en second du bataillon Libertador en 1899. Lors de la bataille de Tocuyito du 12 septembre 1899, qui marqua le triomphe de la rĂ©volution, LĂłpez Contreras fut blessĂ© au bras gauche par une balle de fusil, qui le mit hors de combat et le força Ă se soumettre Ă des soins mĂ©dicaux prolongĂ©s ; câest le gĂ©nĂ©ral GĂłmez qui veilla alors sur lui et le transporta Ă Caracas, aux soins dâune famille amie.
CarriĂšre militaire
AprĂšs avoir Ă©tĂ© fait lieutenant-colonel en 1900, il fut nommĂ© aide de camp de Cipriano Castro, devenu prĂ©sident de la rĂ©publique, mais nâexerça cette fonction que durant un mois et demi. Plus tard, en 1902, il fut dĂ©signĂ© commandant en second de lâĂ©tat-major du bataillon Carabobo, et prit part Ă la bataille de La Victoria (prĂšs de la ville vĂ©nĂ©zuĂ©lienne du mĂȘme nom) en juillet 1902, laquelle, gagnĂ©e par les castristes, marque un tournant dans la guerre civile de 1901-1903 en faveur du gouvernement de Restauration en place. Lâinsurrection dĂ©finitivement vaincue lâannĂ©e suivante, LĂłpez Contreras fut nommĂ© commandant en second du Castillo Libertador Ă Puerto Cabello. Dans cette ville sâĂ©tait constituĂ© un mouvement qui mĂ©ditait un coup de force Ă lâeffet dâĂ©loigner du gouvernement Juan Vicente GĂłmez, alors vice-prĂ©sident de la rĂ©publique, de sorte Ă ne garder que Cipriano Castro comme Chef unique. LĂłpez se garda de tremper dans ledit mouvement, lequel du reste fut bientĂŽt dĂ©couvert, et dĂ©missionna de sa fonction ; cependant, Cipriano Castro autant que GĂłmez se mĂ©fiaient de lui, chacun en effet le croyant dans le camp adverse. Il sâensuivit qu'il ne se vit plus confier entre 1903 et 1914 que des postes Ă caractĂšre civil : commandant des garde-frontiĂšre de Puerto CristĂłbal ColĂłn Ă Macuro, de La Vela de Coro, de RĂo Caribe et de CarĂșpano, contrĂŽleur des douanes Ă Puerto Sucre, chef civil de RĂo Chico, et administrateur des marais salants dâAraya.
Actions sous la présidence de Juan Vicente Gómez
En 1914, la constellation politique vĂ©nĂ©zuĂ©lienne Ă©tait changĂ©e : GĂłmez exerçait la prĂ©sidence depuis 1908, Ă la suite dâun coup d'Ătat exĂ©cutĂ© sans coup fĂ©rir, tandis que Cipriano Castro avait Ă©tĂ© contraint Ă lâexil. Il advint alors un accident fortuit qui persuada GĂłmez que LĂłpez Contreras nâĂ©tait pas un partisan de Castro : en effet, une lettre de Carmelo Castro, frĂšre de lâancien prĂ©sident, qui lâinvitait Ă se joindre Ă une rĂ©bellion, fut interceptĂ©e. Ce que constatant, GĂłmez rĂ©habilita LĂłpez, lâĂ©leva au grade de colonel et le nomma commandant par intĂ©rim du bataillon Rivas ; un an aprĂšs, il fut dĂ©signĂ© commandant du rĂ©giment Piar no 6.
En 1919, il fut nommĂ© Directeur de la Guerre du ministĂšre de la Guerre et de la Marine, fonction dans laquelle il fit preuve de notables qualitĂ©s administratives et dâorganisateur. En 1923, il fut Ă©levĂ© au rang de gĂ©nĂ©ral de brigade et promu chef de la garnison de Caracas. En 1924, Ă la tĂȘte de la dĂ©lĂ©gation militaire et diplomatique reprĂ©sentant le Venezuela lors des cĂ©lĂ©brations du centenaire de la bataille dâAyacucho, il visita le champ de bataille, y exhuma le corps dâun soldat inconnu et en fit transporter les restes au Venezuela, pour les rĂ©inhumer sur le champ de bataille de Carabobo. Attendu que LĂłpez Contreras Ă©tait lâhomme qui, Ă lâĂ©poque, apparaissait le plus ferrĂ© sur Sucre et BolĂvar, câest tout naturellement sur lui que se porta le choix du prĂ©sident GĂłmez pour remplir cette mission. Au reste, le premier ouvrage quâĂ©crivit LĂłpez Contreras, El Callao histĂłrico, traitait de la capitulation du fort de Callao en 1826, haut fait des guerres dâindĂ©pendance ; lâouvrage, qui parut en 1926, fut bien accueilli par la critique.
En 1928, Ă©tant chef de garnison, il lui incomba d'affronter une insurrection fomentĂ©e par un groupe de jeunes officiers, dâĂ©tudiants dâuniversitĂ© et de militants politiques ; il sut la juguler avec fermetĂ©, mais se retrouva dans une situation difficile quand il dĂ©couvrit que parmi les conspirateurs figurait son propre fils aĂźnĂ©, Eleazar LĂłpez Wolkmar. GĂłmez lui-mĂȘme offrit Ă LĂłpez la libertĂ© pour son fils, mais LĂłpez Wolkmar, de façon surprenante, repoussa cette offre. Dans la suite, GĂłmez prit une sĂ©rie de dĂ©cisions militaires et politiques, entre lesquelles la mutation de LĂłpez Contreras vers lâĂtat de TĂĄchira en tant que chef de garnison, puis en qualitĂ© de commandant de la Brigade no 4 de lâarmĂ©e Ă Capacho, aprĂšs quâil eut menĂ© dans cette ville une contre-attaque en 1928 contre la caserne San Carlos, foyer dâun soulĂšvement visant Ă renverser GĂłmez par un coup dâĂtat.
Revenu Ă Caracas en 1930, LĂłpez fut nommĂ© par GĂłmez chef dâĂ©tat-major gĂ©nĂ©ral par intĂ©rim, Ă lâoccasion du dĂ©filĂ© commĂ©moratif du centenaire de la mort de SimĂłn BolĂvar en 1930. Cette mĂȘme annĂ©e, il fit paraĂźtre deux ouvrages : SĂntesis de la vida militar de Sucre et BolĂvar conductor de tropas. En 1931, GĂłmez le dĂ©signa ministre de la Guerre et de la Marine, faisant du coup de lui le militaire de carriĂšre le plus influent du pays[1].
Accession au pouvoir
Ă la mort de GĂłmez le 17 dĂ©cembre 1935, LĂłpez fut dĂ©signĂ© prĂ©sident supplĂ©ant de la rĂ©publique (en esp. Encargado de la Presidencia de la RĂ©publica) jusquâau 19 avril 1936. Il rĂ©ussit Ă Ă©touffer un dĂ©but de rĂ©bellion fomentĂ©e par la famille de GĂłmez. Il signa un dĂ©cret de libĂ©ration des prisonniers politiques et rĂ©tablit la libertĂ© de la presse[2]. Le 25 avril de lâannĂ©e suivante, il fut Ă©lu prĂ©sident constitutionnel de la rĂ©publique pour une durĂ©e de sept ans, Ă compter de 1936. Dans son ouvrage intitulĂ© La Historia Militar de Venezuela, il relĂšve en quoi il avait Ă©tĂ© en dĂ©calage par rapport au rĂ©gime de GĂłmez, soulignant notamment, Ă propos des Ă©vĂ©nements politiques de 1928 et 1929, quâil nâavait jamais Ă©tĂ© favorable aux mesures rĂ©pressives prises pour Ă©craser la rĂ©bellion des Ă©tudiants dâuniversitĂ© (appelĂ©s collectivement la « GĂ©nĂ©ration de 1928 »), et expose ses arguments en faveur de lâapplication dâun ensemble de rĂšgles dans le maintien de lâordre public sans recours Ă lâaction militaire[3].
Présidence
Il eut, dĂšs le dĂ©but de son mandat prĂ©sidentiel, Ă faire face Ă deux crises majeures : dâabord le mouvement populaire du mardi gras 1936, lorsqu'une manifestation se rendit devant le palais de Miraflores pour revendiquer plus de libertĂ©s, ce Ă quoi LĂłpez accĂ©da en partie, et ensuite la grĂšve dĂ©clenchĂ©e en juin de la mĂȘme annĂ©e par une opposition dĂ©sireuse de le renverser, but qui ne fut pas atteint. Il rĂ©forma la constitution en juillet 1936, dans un sens quâil voulut dĂ©mocratique, ramenant notamment la durĂ©e du mandat prĂ©sidentiel de 7 Ă 5 ans, rĂšgle Ă laquelle lui-mĂȘme se fit un devoir de se soumettre. En mĂȘme temps toutefois, des mesures autoritaires furent lĂ©galisĂ©es, telles que lâexil sur dĂ©cret prĂ©sidentiel, et lâinterdiction des idĂ©ologies communiste et anarchiste, qui servit Ă justifier lâexpulsion hors du pays de plusieurs personnalitĂ©s politiques, parmi lesquelles RĂłmulo Betancourt.
Sa prĂ©sidence se distingua dâautre part par la crĂ©ation dâorganismes publics de protection et dâassistance, tels que le ministĂšre de la santĂ© et de lâassistance sociale, crĂ©Ă© par voie de dĂ©cret du 25 fĂ©vrier 1936 ; lâimportance de lâhygiĂšne publique Ă©tait le motif invoquĂ©. Nombre des innovations introduites par ce ministĂšre Ă©taient dues Ă Arnoldo GabaldĂłn, porteur des recommandations de la ConfĂ©rence des directeurs de santĂ© publique rĂ©unie Ă Washington DC en 1936. Des techniciens Ă©trangers experts en santĂ© publique furent recrutĂ©s pour aider Ă la crĂ©ation de la Division dâhygiĂšne rurale, de l'Institut national de puĂ©riculture et de la Division de malariologie. Fut crĂ©Ă© Ă©galement le ministĂšre de lâagriculture et de lâĂ©levage, en accord avec lâimportance attachĂ©e par la politique de LĂłpez Contreras au dĂ©veloppement agricole. Le Conseil de lâenfance (Consejo Venezolano del Niño) et le statut des mineurs dâĂąge (Estatuto de Menores) virent le jour le 6 aoĂ»t 1936. Toutes ces initiatives institutionnelles furent activement appuyĂ©es par le prĂ©sident Ă travers tout le pays et dotĂ©es dâune organisation permanente au budget croissant, en particulier en faveur de la lutte contre les principales maladies et Ă©pidĂ©mies. En 1938 fut fondĂ© l'Institut technique de lâimmigration et de la colonisation (Instituto TĂ©cnico de InmigraciĂłn y Colonisation), par lequel le gouvernement se proposait dâorganiser la distribution de terres arables aux agriculteurs vĂ©nĂ©zuĂ©liens et Ă©trangers, afin de repeupler les campagnes, dâĂ©lever la qualitĂ© de vie et dâamĂ©liorer ethniquement la population du pays.
La constitution de 1936 stipulait notamment, en son article premier :
- « La nation vĂ©nĂ©zuĂ©lienne rĂ©unit tous les VĂ©nĂ©zuĂ©liens au sein dâun pacte dâorganisation politique dĂ©nommĂ© Ătats-Unis du Venezuela. Elle est Ă jamais et irrĂ©vocablement libre et indĂ©pendante de toute domination ou protection dâune puissance Ă©trangĂšre[4]. »
en son article deuxiĂšme :
- « Le territoire des Ătats-Unis du Venezuela recouvre celui qui, avant la transformation politique de 1810, relevait de la Capitainerie gĂ©nĂ©rale du Venezuela, avec les modifications dĂ©rivĂ©es des traitĂ©s signĂ©s par la RĂ©publique. Ledit territoire ne pourra jamais, ni en entier ni en partie, ĂȘtre cĂ©dĂ©, transfĂ©rĂ©, donnĂ© en location, ou de quelque autre maniĂšre aliĂ©nĂ© au profit dâune puissance Ă©trangĂšre, fĂ»t-ce mĂȘme pour une durĂ©e limitĂ©e[4]. »
et en son article 95 :
- « Le prĂ©sident de la RĂ©publique a un mandat de cinq ans, et ne pourra pas ĂȘtre rĂ©Ă©lu pour la pĂ©riode constitutionnelle qui suit immĂ©diatement. Ne pourra non plus ĂȘtre Ă©lu quiconque a assumĂ© la prĂ©sidence durant toute la derniĂšre annĂ©e de la pĂ©riode constitutionnelle antĂ©rieure, ni les parents de lâun et lâautre jusquâau quatriĂšme degrĂ© de parentĂ© ou jusquâau deuxiĂšme degrĂ© dâalliance. »
Ćuvre politique
Sous son gouvernement furent mis Ă exĂ©cution plusieurs projets dans diffĂ©rents domaines, la plupart de grande portĂ©e : en 1936, pour la premiĂšre fois au Venezuela, une lĂ©gislation sur le travail fut promulguĂ©e, dont le principal rĂ©dacteur, le jeune Rafael Caldera, accĂ©dera plus tard Ă la prĂ©sidence ; il sâemploya Ă dĂ©velopper lâenseignement scolaire, en crĂ©ant l'Institut pĂ©dagogique national de Caracas (1937) pour la formation des maĂźtres dâĂ©cole ; il Ă©tablit la Sociedad Bolivariana de Venezuela (1937) ; il fonda le corps de sapeurs-pompiers de Caracas et la Garde nationale du Venezuela (Guardia Nacional de Venezuela, par le DĂ©cret no 1320 du 4 aoĂ»t 1937) en tant que force auxiliaire de lâarmĂ©e et de la police ; en janvier 1937, il signa le dĂ©cret de fondation de Ciudad Ojeda, nouveau foyer dâhabitation pour les habitants de la localitĂ© de Lagunillas de Agua, dĂ©truite par un incendie en 1939. Par ailleurs furent inaugurĂ©s le musĂ©e des Beaux-Arts et le musĂ©um des Sciences naturelles de Caracas (1938) et instituĂ©s la Banque centrale du Venezuela en 1940, qui permit de centraliser lâĂ©mission de piĂšces et de billets, l'Office national du Travail, le ministĂšre de lâAgriculture et de lâĂlevage, le Conseil vĂ©nĂ©zuĂ©lien de lâEnfance, dĂ©jĂ Ă©voquĂ©s ci-haut, le ministĂšre des Communications, la Banco Industrial, l'Office national de Change et l'Office de ContrĂŽle des Exportations[5]. Enfin, en 1941 fut signĂ© entre la Colombie et le Venezuela un traitĂ© de fixation des frontiĂšres, propre Ă rĂ©gler les diffĂ©rends relatifs Ă la dĂ©limitation des territoires du RĂo de Oro, de la Guajira et du bassin de lâOrĂ©noque.
Création de la Banque centrale du Venezuela
Le 8 septembre 1939, câest-Ă -dire peu de jours avant la dĂ©claration formelle de la Seconde Guerre mondiale, une loi fut dĂ©crĂ©tĂ©e qui autorisa la crĂ©ation dâune banque centrale, Ă lâeffet de rĂ©guler la circulation monĂ©taire et le crĂ©dit et dâĂ©viter des fluctuations trop fortes de la quantitĂ© de monnaie en circulation. Elle aurait en outre pour fonction principale de rĂ©guler et de surveiller le commerce de lâor et des devises. Ses activitĂ©s dĂ©butĂšrent en octobre 1940, et le 1er janvier 1941, elle commença Ă opĂ©rer sous la direction de JesĂșs Herrera Mendoza, prĂ©sident de la banque. Pour quâelle pĂ»t remplir sa mission, il apparut nĂ©cessaire que fussent transfĂ©rĂ©s vers elle lâor et les billets emis par la Banco de Venezuela, la Banco Mercantil y AgrĂcola, la Banco de Maracaibo, la Banco Comercial de Maracaibo, la Banco Venezolano de CrĂ©dito et la Banco Caracas ; ces deux derniĂšres cependant, ayant refusĂ© de remettre lâor quâelles dĂ©tenaient, furent poursuivies en justice par la Banque centrale ; le litige se conclut en 1956 par lâincinĂ©ration des billets et la remise intĂ©grale Ă la Banque centrale de lâor servant de couverture au bolivar vĂ©nĂ©zuĂ©lien.
La Banque centrale du Venezuela (BCV), personne juridique de droit public, jouit dâune autonomie quant Ă la dĂ©finition et lâexercice des politiques relevant de sa compĂ©tence, et reprĂ©sente la principale autoritĂ© Ă©conomique chargĂ©e de veiller dans le pays Ă la stabilitĂ© de la monnaie et des prix. Elle est la seule instance habilitĂ©e Ă Ă©mettre de la monnaie ayant cours lĂ©gal au Venezuela. Elle a acquis un rang constitutionnel de par la Constitution de 1999, laquelle lui reconnaĂźt son autonomie et son indĂ©pendance Ă lâĂ©gard des politiques menĂ©es par le gouvernement national. Elle a son siĂšge Ă Caracas et, depuis 1977, une annexe Ă Maracaibo.
Fondation de la Garde nationale
Les Forces armĂ©es de coopĂ©ration (Fuerzas Armadas de CooperaciĂłn), mieux connues sous la dĂ©nomination de « Garde nationale du Venezuela » (Guardia Nacional de Venezuela), est une des quatre composantes qui constituent la Force armĂ©e nationale du Venezuela (Fuerza Armada Nacional de Venezuela). La Garde nationale fut fondĂ©e le 4 aoĂ»t 1937 par le prĂ©sident de la rĂ©publique et gĂ©nĂ©ral en chef de lâarmĂ©e Eleazar LĂłpez Contreras.
La prĂ©misse de ce corps militaire se trouve dĂ©fini Ă lâarticle 329 de la constitution de 1999[6]:
- « Les armĂ©es de terre, de mer et de lâair ont pour responsabilitĂ© essentielle la planification, lâexĂ©cution et le contrĂŽle des opĂ©rations militaires requises pour assurer la dĂ©fense de la nation. La Garde nationale apportera son concours Ă la mise en Ćuvre desdites opĂ©rations et aura pour responsabilitĂ© de base la conduite des opĂ©rations nĂ©cessaires au maintien de lâordre intĂ©rieur du pays. La Force armĂ©e nationale pourra exercer les activitĂ©s de police administrative et dâinstruction pĂ©nale que la loi lui attribue. »
Cette composante de la force armĂ©e remplit donc la fonction de veiller Ă la sĂ©curitĂ© et de dĂ©fendre la souverainetĂ© du territoire national vĂ©nĂ©zuĂ©lien, tant Ă lâintĂ©rieur que le long de ses frontiĂšres, en coopĂ©ration avec lâarmĂ©e de terre, de mer et de lâair. En mĂȘme temps, elle participe Ă des opĂ©rations de sĂ»retĂ© intĂ©rieure en collaboration avec les corps de police tant de lâĂtat que municipaux, sous la direction du ministĂšre du Pouvoir populaire pour la DĂ©fense (Ministerio del Poder Popular para la Defensa) et du ministĂšre du Pouvoir populaire de lâIntĂ©rieur et de la justice (Ministerio del Poder Popular del Interior y Justicia), respectivement. En consĂ©quence, en cas de troubles ou de pillage, il sera appelĂ© Ă intervenir pour dissuader et maĂźtriser les protestations et autres atteintes Ă lâordre public.
AprĂšs que LĂłpez Contreras, sortant alors dâune longue pĂ©riode au service du ministĂšre de la Guerre et de la Marine, eut accĂ©dĂ© Ă la prĂ©sidence, il fut certes en mesure, sous sa devise « Calme et Sagesse » (« Calma Y Cordura »), Ă maĂźtriser politiquement la situation ; nĂ©anmoins, certains dĂ©sordres ne laissaient pas de sĂ©vir dans le pays, tels que violentes manifestations de rue, prolifĂ©ration des vols de bĂ©tail, hausse de la dĂ©linquance, intensification de la contrebande sur les frontiĂšres. Face Ă ces convulsions sociales, le prĂ©sident de la rĂ©publique se tourna vers les prĂ©sidents des Ătats de lâUnion et leur exposa la nĂ©cessitĂ© urgente dâorganiser dans les diffĂ©rents Ătats, Ă lâaide dâĂ©lĂ©ments actifs, dĂ©terminĂ©s et conscients, une police rurale Ă cheval, Ă pied ou en voiture, afin de dĂ©fendre et prĂ©server le foyer national vĂ©nĂ©zuĂ©lien, les droits individuels et la propriĂ©tĂ©. Pour mener Ă bien la mise sur pied de cette institution policiĂšre d'envergure nationale, chargĂ©e de sauvegarder lâordre public, et pour la rendre capable de remplir cet objectif, il y avait lieu de mobiliser les ressources humaines appropriĂ©es. AprĂšs de longues discussions polĂ©miques sur le propos de savoir comment ce corps devait ĂȘtre conçu et structurĂ©, lâĂ©crivain et diplomate vĂ©nĂ©zuĂ©lien Rufino Blanco Fombona suggĂ©ra Ă LĂłpez Contreras lâidĂ©e de crĂ©er un corps calquĂ© sur la garde civile espagnole. En juin 1936, il fut convenu entre les gouvernements du Venezuela et de lâEspagne quâune mission de ce dernier pays se rendrait au Venezuela pour y Ă©tablir, instruire et rendre opĂ©rationnel un corps semblable Ă la garde civile espagnole. Ce projet se matĂ©rialisa le 17 septembre 1936, lorsque fut dĂ©crĂ©tĂ©e la crĂ©ation de l'Ăcole du service national de sĂ©curitĂ© (Escuela del Servicio Nacional de Seguridad)[7].
Le dĂ©cret portant crĂ©ation de l'Ăcole du service national de sĂ©curitĂ©, appelĂ©e Ă fournir les ressources humaines nĂ©cessaires Ă la nouvelle institution, fut promulguĂ© le 17 septembre 1936, tandis que le dĂ©cret confĂ©rant un caractĂšre lĂ©gal Ă la Garde nationale du Venezuela le fut le 4 aoĂ»t 1937. Ă compter de cette date, la Guardia Nacional devenait opĂ©rationnelle sur tout le territoire national. Le siĂšge de la Garde nationale se trouve actuellement dans le quartier El ParaĂso, Ă Caracas.
Parcours aprÚs la présidence
Le 14 juillet 1939, le sĂ©nat de la rĂ©publique lâĂ©leva au rang de gĂ©nĂ©ral de division. En avril 1941, le congrĂšs Ă©lut comme nouveau prĂ©sident IsaĂas Medina Angarita, Ă©galement gĂ©nĂ©ral de division et jusque-lĂ ministre de la Guerre et de la Marine. Avant de cĂ©der la prĂ©sidence, le 2 mai, LĂłpez Contreras se vit confĂ©rer par le sĂ©nat le grade militaire le plus Ă©levĂ© existant au Venezuela au XXe siĂšcle, celui de gĂ©nĂ©ral en chef. Trois jours aprĂšs, le 5 mai, il remettait la prĂ©sidence Ă Medina.
Si ensuite LĂłpez se replia certes dans une retraite relativement tranquille, se vouant Ă lâĂ©criture, publiant notamment, en 1944, son ouvrage PĂĄginas para la Historia Militar de Venezuela, il ne renonça pas pour autant Ă sâimpliquer dans la politique du nouveau gouvernement et continua du reste Ă faire partie du Parti dĂ©mocratique vĂ©nĂ©zuĂ©lien, le parti de IsaĂas Medina Angarita. Ce nonobstant, de graves dĂ©saccords surgirent entre LĂłpez et Medina au cours du mandat prĂ©sidentiel de ce dernier, ce qui contribua Ă provoquer une crise institutionnelle, laquelle eut un Ă©pilogue violent sous la forme du coup dâĂtat du 18 octobre 1945, lequel renversa Medina et Ă©tait dirigĂ© par de jeunes militaires et activistes issus des diffĂ©rents partis politiques. RĂłmulo Betancourt, qui figurait au nombre des putschistes, fut appelĂ© Ă prĂ©sider la junte de gouvernement constituĂ©e Ă la suite du coup dâĂtat. LĂłpez, Medina et plusieurs de ses collaborateurs furent arrĂȘtĂ©s, puis expulsĂ©s du pays et jugĂ©s par contumace pour prĂ©varication et enrichissement illicite[8]. LĂłpez sâĂ©tablit Ă Miami, aux Ătats-Unis, oĂč il vĂ©cut jusquâen 1948, et oĂč son domicile devint le centre de rĂ©union des opposants Ă la junte au pouvoir au Venezuela, laquelle junte, pour sa part, le dĂ©clarait « dangereux et subversif ». Câest lors de cet Ă©pisode de sa vie que LĂłpez se laissa aller Ă lâironique commentaire suivant :
- « Ce bannissement, la prison, ces jugements politiques qui me maintiennent dans la soumission me comblent de gratitude, (car) ils complĂštent ma figure dâhomme politique vĂ©nĂ©zuĂ©lien. Jâai Ă©tĂ© de tout au Venezuela : ministre, prĂ©sident, chef de garnison, envahisseur, guĂ©rillero, mais non encore prisonnier politique et exilĂ©. Et il ne peut y avoir au Venezuela de dirigeant politique sans que celui-ci ait aussi son histoire dâexil »[9].
Retour au Venezuela et derniÚres années
AutorisĂ© Ă rentrer au pays Ă la suite du coup dâĂtat du 24 novembre 1948, nonobstant quâil fĂ»t en dĂ©saccord avec la politique menĂ©e par le nouvel homme fort, le gĂ©nĂ©ral Marcos PĂ©rez JimĂ©nez, il se replia sur sa vie privĂ©e, faisant paraĂźtre trois ouvrages encore : El triunfo de la verdad (1949), Temas de Historia Bolivariana (1954) et Proceso PolĂtico Social (1955). Ă partir de 1958, aprĂšs la chute de PĂ©rez JimĂ©nez, il retourna dans lâarĂšne publique, se dĂ©clarant partisan de la concorde nationale, et prenant lâinitiative dâune fraternisation avec son ancien ennemi politique, RĂłmulo Betancourt, devenu prĂ©sident de la Nation, et confrontĂ© Ă des situations trĂšs similaires Ă celles quâeut Ă affronter LĂłpez en 1936. SinguliĂšrement, ses anciens ennemis sâempressaient dĂ©sormais Ă lui rendre toutes sortes dâhommages, et cela dâabord en le nommant, en 1961, par disposition constitutionnelle, sĂ©nateur Ă vie[10]. Huit des signataires de la Carta magna appartenaient aux 43 que LĂłpez avait, par voie de dĂ©cret, proscrits en 1937. Ensuite, en 1963, il reçut â et LĂłpez Contreras fut le premier Ă la recevoir â la rĂ©plique de lâĂ©pĂ©e du Libertador, symbole des gĂ©nĂ©raux, des mains mĂȘmes du prĂ©sident Betancourt.
LâĂąge avançant, sa santĂ© se dĂ©tĂ©riorait, mais il garda toute sa luciditĂ©. Tout en continuant Ă fournir des articles de presse, il fit paraĂźtre deux ouvrages de plus (El pensamiento de BolĂvar Libertador, en 1963, et Gobierno y AdministraciĂłn, 1936-1941, en 1966). Il eut le bonheur dâĂȘtre reconnu, de son vivant, pour son action politique, considĂ©rĂ©e comme historique, et dâĂȘtre respectĂ© comme un exemple de civisme. Fin 1972, souffrant de complications pulmonaires, il sâĂ©teignit finalement le 2 janvier 1973 Ă Caracas, Ă lâĂąge de 89 ans[11]. Lâon observa un deuil national de trois jours, et les honneurs de chef dâĂtat lui furent rendus ; ainsi fut-il inhumĂ© au son de 21 salves de canon. Sa derniĂšre volontĂ© â que sa dĂ©pouille fĂ»t transportĂ©e par quatre militaires de la Garde nationale â tĂ©moigne de son attachement Ă cette derniĂšre, et fut accomplie.
Notes et références
- (es) « Actividad de López Contreras en el gobierno de Juan Vicente Gómez »
- (es) « La muerte de Gómez y el nuevo Presidente »
- (es) « El orden publico y el Gobierno de López Contreras »
- SegĂșn la constituciĂłn de 1936 de los Estados Unidos de Venezuela
- (es) « Obras de Eleazar López Contreras »
- La mission de ce corps se trouve clairement définie également dans la constitution de la république bolivarienne du Venezuela.
- Article 328 : La Force armĂ©e nationale constitue une institution essentiellement professionnelle, exempte de parti-pris politique, organisĂ©e par lâĂtat pour garantir lâindĂ©pendance et la souverainetĂ© de la nation et assurer lâintĂ©gritĂ© de lâespace gĂ©ographique, Ă travers la dĂ©fense militaire, la coopĂ©ration dans le maintien de lâordre intĂ©rieur et la participation active au dĂ©veloppement national, en accord avec la constitution et avec la loi.
- (es) « LĂłpez Contreras junto con otros fueron expulsados del paĂs durante la dictadura »
- (es) « Frases desde el exilio »
- (es) « López Contreras es nombrado Senador Vitalicio »
- (es) « Fallece el General López Contreras »
Bibliographie
- Caldera, Rafael, Los Caushabientes: De Carabobo a Puntofijo, Editorial PANAPO, 1999 (ISBN 980-366-237-6)
- Lanz, Sigfrido, Balance PolĂtico del año 1936, Caracas: Universidad Santa MarĂa, 1986
- Libro Rojo del General LĂłpez Contreras: 1936. 2ÂȘ ED. Caracas: Ăvilarte, 1975; LĂłpez Contreras, Eleazar.
- Gobierno y AdministraciĂłn, 1936-1941. Caracas: Editorial Arte, 1966
- Mensajes Presidenciales. Caracas: Ediciones de la Presidencia de la RepĂșblica, 1971. Vol. 4 et 5
- Luzardo, Rodolfo. Notas HistĂłrico-EconĂłmicas (1928-1963). Caracas: Editorial Sucre, 1963
- Moleiro, Rodolfo. de la Dictadura a la Democracia: Eleazar LĂłpez Contreras
- Linderos y Puentes entre dos Ăpocas. 3e Ă©d.. Caracas: Pomaire, 1993
- Pacheco, Emilio. de Castro a López Contreras, Proceso Social de la Venezuela Contemporånea: Contribución a su Estudio de los años 1900-1941.
- Polanco Alcantara, TomĂĄs. Eleazar LĂłpez Contreras: el General de Tres Soles. 3e Ă©d. Caracas: Grijalbo, 1991
- Gran Enciclopedia de Venezuela. Caracas: Editorial Globe, 1998.
- Biographies de la BibliothĂšque nationale du Venezuela
- Bibliographie: Allen, Henry Justin. Venezuela, a Democracy. Nueva York: Doubleday, 1940
- Brunicardi, Rafael. Por los caminos de la patria. Caracas: Agencia Musical, 1941
- HernĂĄndez Bitter, Carlos. InterpretaciĂłn de un hombre y de una polĂtica. Caracas: Editorial CĂłndor, 1940