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Danah Boyd

Danah Boyd, nom stylisé en danah boyd (sans majuscules[Note 1]), née sous le nom de Danah Michele Mattas le à Altoona (Pennsylvanie), est une chercheuse américaine en communication[1].

Danah Boyd
Biographie
Naissance
Nationalité
Formation
Université Brown
University of California, Berkeley School of Information (en)
Massachusetts Institute of Technology
Manheim Township High School (en)
Activités
Autres informations
A travaillé pour
Directeur de thĂšse
Peter Lyman (en)
Site web

Elle est chercheuse en chef chez Microsoft Research et mĂšne des recherches incluant des projets sur la culture des jeunes, la vie privĂ©e, les pratiques socio-techniques, la sĂ©curitĂ© en ligne, la traite des humains et la visibilitĂ©[2]. Elle occupe Ă©galement les postes de professeure assistante de recherche en « MĂ©dia, culture et communication » Ă  l'UniversitĂ© de New York, de chercheuse invitĂ©e Ă  la FacultĂ© de droit de Harvard et de professeure adjointe Ă  l'UniversitĂ© de Nouvelle-Galles du Sud. Elle reçoit un doctorat en 2008 Ă  l'École d'information de l'UniversitĂ© de Californie Ă  Berkeley (sous la direction de Peter Lyman (en) et Mimi Ito (en))[3].

La recherche de Danah Boyd porte sur les concepts de vie privĂ©e, contexte, culture des jeunes, mĂ©dias sociaux et BigData. Elle tient deux blogs, danah.org et zephoria.org, oĂč elle se prĂ©sente en quelques lignes et entraĂźne ses lecteurs dans des rĂ©flexions personnelles avec sĂ©rieux mais toujours avec une pointe d'humour. On y trouve Ă©galement l'ensemble de ses publications, contributions, publications sur des blogs qui traitent de questions particuliĂšres en profondeur.

Le nom zephoria fait Ă©galement Ă©cho Ă  son compte Twitter.

Biographie

Jeunesse

Danah Michele Mattas nait le Ă  Altoona en Pennsylvanie. Son frĂšre, Ryan, naĂźt deux ans plus tard. Ses parents divorcent cinq ans plus tard et elle dĂ©mĂ©nage avec sa mĂšre et son frĂšre Ă  York, en Pennsylvanie. La famille dĂ©mĂ©nage Ă  Lancaster quelques annĂ©es plus tard, au moment du remariage de sa mĂšre. Au lycĂ©e, elle frĂ©quente les forums de discussion Ă©lectronique. Elle Ă©voque particuliĂšrement un Ă©change avec un jeune soldat de retour de la guerre du Golfe, alors qu'elle envisageait d'entrer dans l'armĂ©e. Elle s'affirme queer[4]. Six annĂ©es plus tard, sa mĂšre et son beau-pĂšre divorcent mais la mĂšre de Danah reste Ă  Lancaster. Elle dĂ©cide de changer son nom de famille en boyd et de supprimer la majuscule de son prĂ©nom.

Son frĂšre l’initie Ă  l’informatique, il possĂšde un compte EPIX sur Internet et cela excite sa curiositĂ©. Elle se met Ă  utiliser l’IRC (l’Internet Relay Chat) et Ă  frĂ©quenter l’Usenet. Elle dĂ©couvre les rapports intenses qui existent entre utilisateurs Ă©loignĂ©s. Elle discute de tous les sujets avec des utilisateurs anonymes : sexualitĂ©, identitĂ© et toutes autres angoisses adolescentes. À ce propos, danah dĂ©livre une anecdote Ă  France Culture concernant son intĂ©rĂȘt Ă  l'Ă©poque pour le sexe et la sexualitĂ© sur Internet. Elle raconte avoir participĂ© Ă  une sĂ©ance de sexe en ligne avec des amis, inventant un faux profil : « On a choisi une image d’une femme totalement irrĂ©elle, personne ne pouvait y croire, elle avait une Ă©norme poitrine, elle Ă©tait hypersexuelle, une sorte de fantasme »[5]. Elle considĂšre cette expĂ©rience plus formatrice que dangereuse.

Elle crĂ©e sa premiĂšre page Internet en 1995 ; un site oĂč sont reproduites les paroles des chansons de Ani DiFranco. Fan de musique au collĂšge, elle suit des cours de rock classique. Au lycĂ©e, elle Ă©coute du ska, de l’alternatif et du punk rock. Son intĂ©rĂȘt pour le rock classique lui fait apprĂ©cier les groupes des annĂ©es 1960 et 1970. Par la suite, en suivant Sarah McLachlan, elle dĂ©veloppe une obsession pour les artistes fĂ©minines (chanteuses et autrices-compositrices) ce qui la mĂšne aux concerts de Tori Amos et de Ani DiFranco. Son obsession pour cette derniĂšre est immĂ©diate et persistante.

Ses annĂ©es Ă  l’école secondaire ne sont pas toujours faciles. Elle attribue d’ailleurs sa « survie » dans ce milieu Ă  trois choses : sa mĂšre, Internet et un camarade de classe misogyne. Sa mĂšre lui apportait une sĂ©curitĂ© affective, Internet lui ouvrait le monde, et son copain misogyne avec qui elle se dispute Ă©normĂ©ment et pour qui les femmes ne peuvent pas pratiquer les sciences, lui donne des objectifs pour lesquels elle a envie de se battre[6].

Études[6]

Danah boyd commence son cursus universitaire Ă  l’UniversitĂ© de Brown. Elle entame des Ă©tudes de mathĂ©matiques et s’inscrit au cours d’introduction Ă  l’informatique de Andries van Dam, avant de se rendre compte que les mathĂ©matiques ne lui conviennent pas. Elle se dirige alors vers l’informatique. Elle obtient son diplĂŽme avec les honneurs et rend un travail de fin d'Ă©tudes sur Depth Cues in Virtual Reality and the Real World: Understanding Individual Differencesin Depth Perception by Studying Shape-from-shading and Motion Parallax[7].

Lors de l'Ă©tĂ© 2000, elle continue sa formation universitaire Ă  l’Institut Technologique du Massachusetts (MIT). Elle travaille essentiellement sur le sujet des outils de visualisation et aborde Ă©galement une Ă©tude portant sur la prĂ©sence des jeunes en ligne. Ses travaux sont supervisĂ©s par Genevieve Bell. Cette derniĂšre va l’initier Ă  l’ethnographie ainsi qu’à l’anthropologie. À la fin de son cursus Ă  l’institut, elle Ă©labore une thĂšse qui rĂ©unit tous les sujets pour lesquels elle a montrĂ© de l’intĂ©rĂȘt lors de son cursus universitaire. Elle rĂ©alise alors une thĂšse sur le sujet : Faceted Id/entity: Managing Representation in a Digital World[7].

A l'automne 2003, elle commence des Ă©tudes Ă  l’UniversitĂ© de Californie, Ă  Berkeley. Durant son cursus Ă  Berkeley, elle effectue une variĂ©tĂ© de stages chez Google ainsi que chez Yahoo. Les sujets qu’elle aborde lors de ces stages sont exclusivement centrĂ©s sur le monde des blogs, l’étude des mĂ©dias sociaux et les usages des jeunes dans le numĂ©rique. Elle termine son cursus avec un mĂ©moire, qui est le suivant : Taken Out of Context: American Teen Sociality in Networked Publics [7].

CarriĂšre

danah boyd au Writers on Writing about Technology roundtable à Yale annonçant la publication de The Best Technology Writing 2009 (Yale University Press), à laquelle elle a contribué.

De 2004 Ă  2005, Danah Boyd travaille comme chercheuse pour Google. Un an plus tard, elle exerce la mĂȘme activitĂ© pour Yahoo et ce, jusqu'en 2006[2]. Depuis 2007, elle travaille Ă  l'UniversitĂ© Harvard, pour Microsoft Research (depuis 2009), Ă  l'UniversitĂ© de New York (depuis 2011) et est fondatrice de Data & Society Research Institute (depuis 2013)[7]. Elle est Ă©galement directrice de Crisis Text Line (depuis 2012)[2].

Sa passion pour la science-fiction et l'informatique la mĂšne Ă  des Ă©tudes d'informatique Ă  l'UniversitĂ© Brown, dans le Rhode Island, puis Ă  l'Institut de technologie du Massachusetts[8], Ă  Cambridge. C'est lĂ , au dĂ©but des annĂ©es 2000, qu'elle commence Ă  se pencher sur les rĂ©seaux sociaux. Friendster, MySpaceFacebook : suivant les modes, les usagers se dĂ©placent de l'un Ă  l'autre. La chercheuse les Ă©tudie en se concentrant sur les utilisateurs les plus jeunes[1].

Sa carriĂšre dĂ©bute Ă  Harvard en 2007 en tant que membre affiliĂ© au Berkman Center for Internet & Society, dont elle fait toujours partie et oĂč elle a suivi une recherche dans le dĂ©partement du droit. Cette annĂ©e lĂ , elle publie une Ă©tude sur les adolescents utilisant Facebook et MySpace qui va Ă  l'encontre des clichĂ©s traditionnels. Elle dĂ©montre que le rĂ©seau de Mark Zuckerberg, Ă©purĂ© et blanc, est Ă  l'Ă©poque peuplĂ© plutĂŽt par des adolescents blancs et aisĂ©s. MySpace, personnalisable et clinquant, est au contraire frĂ©quentĂ© par les enfants des classes populaires et noirs. Son Ă©tude est reprise par les mĂ©dias, et d'autres de ses Ă©crits sont traduits et relayĂ©s sur des blogs francophones, des mĂ©dias en ligne ou des revues de recherche[1].

En 2009, Danah Boyd s'engage auprÚs de Microsoft Research New England[9] en tant que chercheuse à Cambridge (Massachusetts) et en 2013, elle obtient le grade de chercheuse principale. Elle décroche en 2011 un poste en tant que chercheuse assistante à l'Université de New York (NYU) dans le département Média, culture et communication[10]. Danah Boyd fonde le Data & Society Research Insitute[11] en 2013 avec l'aide de Anil Dash (en) (cofondateur de ThinkUp and Activate) et John Palfrey (en) (Head of School (en) à la Phillips Academy)[12].

Dans une interview donnĂ©e Ă  France Culture, elle dĂ©clare ĂȘtre entrĂ©e dans le monde acadĂ©mique en tant qu’activiste. En s’engageant dans la recherche (notamment auprĂšs de Microsoft Research), sa volontĂ© est de veiller Ă  ce que le public soit le plus informĂ© possible en lui proposant des clĂ©s de comprĂ©hension. « En tant qu’activiste, je suis persuadĂ©e que le monde irait mieux si les gens Ă©taient informĂ©s et avaient une approche plus nuancĂ©e des choses »[13]. C’est ainsi qu’elle perçoit son engagement auprĂšs de Microsoft Research.

Selon ses dires[5], les entreprises investissent dans la recherche industrielle, lĂ  oĂč les universitĂ©s n’ont pas toujours les fonds pour s’assurer que de telles recherches soient faites. Elle dĂ©clare alors que ces derniĂšres n’ont pas pour but premier d’aboutir Ă  la crĂ©ation d’un produit mais contribuent, avant tout, au bien public et Ă  ce rĂŽle d’information envers la sociĂ©tĂ©.

D'ailleurs, son intĂ©rĂȘt se porte davantage sur les diffĂ©rentes applications et leurs utilisations que sur les dispositifs techniques eux-mĂȘmes. Ainsi, dans une autre interview elle dit passer aisĂ©ment d'un support technique Ă  l'autre en fonction du contexte et de l'environnement. Elle utilise donc une multitude de supports (iPhone, ordinateurs portables, Kindle, etc) que ce soit pour son travail ou dans sa vie privĂ©e. Outre l'Ă©tude des mĂ©dias sociaux et leurs utilisations, elle aime aussi se servir de ceux-ci comme un moyen d'expression. Elle est notamment trĂšs active sur Twitter[14].

Changement de nom

Danah Boyd Ă  Boston en 2010

Danah Boyd est nĂ©e Danah Michele Mattas. Sa mĂšre ajoute le « h » parce qu’elle apprĂ©cie l’équilibre que cette lettre donne au nom. La mĂšre de danah s’est remariĂ©e quand elle Ă©tait jeune et danah dĂ©cide alors d’ajouter « Beard » Ă  la fin de son nom. Le nom qu’elle porte Ă©tant enfant est : Danah Michele Mattas Beard et ce jusqu’au collĂšge. Au lycĂ©e, aprĂšs le divorce de sa mĂšre, elle entame une procĂ©dure de changement de nom, qui dure plusieurs annĂ©es. C’est enfin durant l’étĂ© 2000 que Danah Michele Mattas obtient l’attestation lĂ©gale de son changement de nom. Elle s'appelle dĂ©sormais danah michele boyd. boyd vient de ses grands-parents maternels et plus particuliĂšrement de son grand-pĂšre. Ce nom reprĂ©sente sa famille, sa culture et son hĂ©ritage. Elle dit l'avoir choisi par respect. C’est une rĂ©elle volontĂ© de l’autrice de laisser son nom sans lettres capitales. Il y a plusieurs raisons Ă  cela, certaines sont politiques, d’autres plus personnelles. Tout d’abord, « danah » lui semble visuellement plus Ă©quilibrĂ© que « Danah ». Ensuite, le fait de mettre une majuscule Ă  la premiĂšre lettre du nom et du prĂ©nom ainsi que celle du premier pronom personnel singulier en anglais (« I ») lui parait Ă©galement trĂšs Ă©gocentrique. Elle dira alors Ă  ce sujet : « J’ai pensĂ© que l’effort pour minimaliser l’individualisation pouvait commencer chez soi ». Écrire son nom d’une maniĂšre diffĂ©rente des normes est pour elle un moyen de le possĂ©der pleinement. ConsidĂ©rant le nom comme une description de soi, elle dĂ©cide de le choisir elle-mĂȘme afin qu’il lui corresponde et qu’elle puisse s'identifier[15] Ă  lui.

Vie privée

DĂšs l’adolescence, Danah Boyd est plongĂ©e dans Internet et s’interroge sur les questions de sexe et de genre. Sa rencontre avec une personne trans lui permet de douter de la dichotomie des genres[16], laissant de cĂŽtĂ© des rĂ©alitĂ©s complexes comme celle des personnes intersexes ou trans. Elle s’identifie alors comme queer, refusant de se voir dĂ©finie par son sexe, son orientation ou ses pratiques sexuelles[17] et dĂ©crit sa sexualitĂ© comme « enracinĂ©e dans une combinaison d’amour et de dĂ©sir qui n’a pas de frontiĂšres de genre »[18].

En 2013, elle donne naissance Ă  un garçon Ziv Lotan Boyd[19]. Son compagnon d’origine israĂ©lienne, Gilad Lotan, est spĂ©cialiste de l'informatique des donnĂ©es chez Betaworks (en) Ă  New York. Elle annonce la naissance de son premier enfant sur son blog personnel, et sur Twitter la naissance de son deuxiĂšme enfant. Avant chaque naissance, Danah Boyd partage sur son blog ses incertitudes par rapport Ă  son futur rĂŽle de mĂšre. Dans son post, elle Ă©voque sa chance d’exercer un travail qui lui offre des congĂ©s de maternitĂ© aussi souples.

Sur la question de la maternitĂ©, Danah Boyd Ă©vite un maximum de donner sens aux conseils des parents qui lui disent quoi faire, comment le faire, comment elle devrait se sentir Ă  l’arrivĂ©e de ses enfants et Ă  quel point ses prioritĂ©s de carriĂšre vont changer au profit de sa famille. Dans ces recommandations, Boyd dĂ©nonce le manque d’incompatibilitĂ© entre devenir mĂšre et ĂȘtre une femme active, impliquĂ©e dans une carriĂšre professionnelle. À sa chance de pouvoir gĂ©rer au mieux les deux rĂŽles, elle oppose la difficultĂ© qu’ont les femmes dans notre sociĂ©tĂ© Ă  jongler entre famille et travail, pour des raisons dues Ă  la culture du travail. Elle mentionne son utopie de pouvoir vivre dans un monde qui permettrait aux gens de faire leurs choix sans pression, et d’atteindre un Ă©quilibre entre travail et famille.

À la suite de son accouchement, la chercheuse mentionne Ă©galement sur son blogue le fait qu'elle prĂ©voit d'ĂȘtre injoignable Ă©lectroniquement durant un certain temps. Elle pense de ce fait, donner une autre possibilitĂ© Ă  ses collaborateurs et partenaires pour la contacter Ă©tant donnĂ© son absence Ă  la commission durant cette pĂ©riode. Par ailleurs, elle promet de s'assurer de la bonne marche de la sociĂ©tĂ© en son absence, mais refuse de communiquer sur le dĂ©roulement et l'organisation de ses congĂ©s parentaux. Elle pense que le fait d’avoir et d'aimer un enfant lui permettront d’aimer d'autant plus ce qu’elle fait professionnellement, et ce malgrĂ© les personnes qui lui disent que le travail ne compte pas. La chercheuse rĂ©itĂšre d’ailleurs sa volontĂ© de continuer Ă  ĂȘtre passionnĂ©e dans son travail avec l’arrivĂ©e de cet enfant. Par contre, elle recommande Ă  toute personne dĂ©sireuse d’un service de sa part, de le faire en ce moment et elle fera de son mieux. Elle est excitĂ©e que sa famille grandisse et est extasiĂ©e d’avoir Ă©tĂ© capable de construire une activitĂ© Ă  but non lucratif[20].

Chaque annĂ©e, elle s'accorde un temps de pause sans Internet afin de se reposer et de s'y consacrer pleinement[21].

Publications

danah boyd durant l'ouverture du keynote of ROFLCon II

C'est compliqué, les vies numériques des adolescents (2014)

En 2014, Danah Boyd publie C'est compliqué, les vies numériques des adolescents, pour inviter les parents à moins angoisser devant les réseaux sociaux utilisés par leurs enfants. Le livre a pour vocation d'expliquer aux parents ce que font concrÚtement leurs enfants sur Internet. Ainsi, la chercheuse s'attache à démonter plusieurs fantasmes et à nuancer les risques les plus couramment évoqués (cyberaddiction, perte d'identité, disparition de leur vie privée, harcÚlement, mauvaises rencontres). Elle propose alors, de voir « les réseaux sociaux comme un espace public dans lequel les adolescents traßnent »[23]".

(en) Nicole B.Ellison and danah boyd, Chapter 8 : Sociality through Social Network Sites, Oxford University Press, 2013[24]

En 2007, Nicole B. Ellison et Danah Boyd essayent de consolider une dĂ©finition des rĂ©seaux sociaux. Selon les deux chercheuses, ce sont « des services Web qui permettent aux individus de construire un profil public ou semi-public dans le cadre d’un systĂšme limitĂ©, d’articuler une liste d'autres utilisateurs avec lesquels ils partagent des relations et de voir et de croiser leurs listes de relations et celles faites par d'autres Ă  travers la plate-forme » (boyd et Ellison, 2007). Les trois caractĂ©ristiques d'un site de rĂ©seau social semblaient ĂȘtre le profil, les listes de relations et la capacitĂ© fonctionnelle de traverser ces relations. Depuis lors, le paysage social et technique de ces sites a changĂ© radicalement. Dans le chapitre 8 de l’ouvrage, les deux autrices situent leur Ă©volution dans un contexte de Web 2.0 et discutent des dĂ©fis liĂ©s Ă  l’étude de sites de rĂ©seaux mĂ©diatiques et sociaux. En effet, dĂ©finir ce que constitue les sites de rĂ©seaux sociaux devient de plus en plus contestĂ© car les systĂšmes d’ordinateurs en rĂ©seaux prolifĂšrent et Ă©voluent rapidement. Certaines des caractĂ©ristiques, qui les ont initialement distinguĂ©s, se confondent dĂ©sormais dans leurs significations tandis que d'autres se sont reproduites dans d'autres genres de mĂ©dias sociaux.

Race After the Internet : White Flight In Networked Publics : How Race And Class Shaped American Teen Engagement With Myspace And Facebook

Le livre Race After the Internet, de Lisa Nakamura et Peter Chow-White, regroupe diffĂ©rents essais d’auteurs aussi divers que variĂ©s touchant Ă  plusieurs disciplines, afin de voir quel est l’impact des mĂ©dias digitaux (et sociaux) et des nouvelles technologies sur la conception de la notion de race.

Voici la liste des contributeurs[25] : danah boyd, Peter Chow-White, Wendy Chun, Sasha Costanza-Chock, Troy Duster, Anna Everett, Rayvon Fouché, Alexander Galloway, Oscar Gandy, Eszter Hargittai, Jeong Won Hwang, Curtis Marez, Tara McPherson, Alondra Nelson, Christian Sandvig, Ernest Wilson.

L’ouvrage comprend quatorze thĂ©matiques, et Danah Boyd est l’autrice du 9e chapitre intitulĂ© White flight In Networked Publics : How Race And Class Shaped American Teen Engagement With Myspace And Facebook[26] (Ă  savoir : « Comment la Race et la Classe ont formĂ© l'engagement des jeunes AmĂ©ricains avec Myspace et Facebook »).

Il s’agit d’une Ă©tude ethnographique que Danah Boyd a menĂ©e par le biais d’interviews de jeunes AmĂ©ricains dans une Ă©cole de classe moyenne concernant le passage de MySpace vers Facebook entre 2006-2007.

La prĂ©fĂ©rence de l’un ou l’autre rĂ©seau social va au-delĂ  du choix des consommateurs. Selon elle, cela reproduit les catĂ©gories sociales que l’on observe dans la vie rĂ©elle. De fait, on reconstitue nos rĂ©seaux d’amitiĂ©s rĂ©elles sur le(s) rĂ©seau(x) virtuel(s). Donc, si nos amis s’inscrivent sur Facebook, et non plus sur MySpace, on fera de mĂȘme. Les groupes d’utilisateurs se rassemblent aussi selon des rĂ©fĂ©rents spatiaux (ex : ghetto), des centres d’intĂ©rĂȘts (ex : goĂ»ts musicaux) et des valeurs. Toujours selon boyd, le mouvement des jeunes de MySpace vers Facebook reproduit l’Histoire tragique du White flight (= la migration des personnes d'origine europĂ©enne hors des zones urbaines).

Il y a deux maniĂšres d’entrer en contact avec MySpace. Soit on s’y inscrit pour suivre des groupes musicaux (dans ce cas-ci surtout des groupes de rock indĂ©pendant et de hip-hop), soit par le bouche-Ă -oreilles, notamment par le biais des membres de notre famille, d’amis ou de rencontres dans divers contextes (Ă©glise, vacances, activitĂ©s sportives
). D’un point de vue gĂ©ographique, MySpace touche d’abord la cĂŽte Ouest des USA (car le site est lancĂ© Ă  Los Angeles), puis se propage vers la cĂŽte Est. Les centres urbains sont Ă©galement touchĂ©s avant les banlieues et les campagnes.

MySpace bĂ©nĂ©ficie alors d’une couverture mĂ©diatique Ă  double tranchant : soit les jeunes s’inscrivent parce que les mĂ©dias en parlent comme un effet de mode, soit les adolescents l’évitent Ă  cause des risques exposĂ©s par les mĂ©dias.

Si tout le monde ne s’inscrit pas directement sur Facebook, c’est parce que ce nouveau rĂ©seau Ă©tait limitĂ© aux Ă©tudiants universitaires lors de sa crĂ©ation en 2004 (et plus spĂ©cialement Harvard), ce qui donnait un cĂŽtĂ© « Ă©litiste » et « intellectuel » au rĂ©seau social. Son accĂšs faisait alors partie du rite de passage lors de l'entrĂ©e Ă  l’universitĂ©. À partir de 2005, Facebook est accessible par les Ă©tudiants du secondaire, et enfin en 2006 par tout le monde (13 ans minimum), ce qui donne alors un choix plus libre entre MySpace et Facebook.

Si beaucoup de jeunes s’inscrivent sur les deux rĂ©seaux, ceux qui ne choisissent que l’un d’entre eux semblent venir de milieux diffĂ©rents. MySpace attire davantage les jeunes appartenant Ă  des sous-cultures, ou Ă  des milieux moins privilĂ©giĂ©s, et comme l’a remarquĂ© Danah Boyd les noirs et les latinos (mĂȘme si les critĂšres de races et d’ethnies sont aussi liĂ©s Ă  des facteurs socio-Ă©conomiques). Alors que Facebook attire la masse dite ordinaire, une Ă©lite universitaire, de blancs et d'asiatiques.

Un premier essai sur ses observations, publiĂ© sur son blog en 2007, a suscitĂ© la controverse auprĂšs des internautes. D’autres chercheurs ont alors partagĂ© avec elle le mĂȘme genre d’observations.

Hanging out, messing around, and geeking out: kids living and learning with new media[27]

Comment les jeunes amĂ©ricains communiquent avec leurs familles et amis en sachant qu’ils bĂ©nĂ©ficient Ă  prĂ©sent de smartphones et sont sur les rĂ©seaux sociaux ? Comment ces jeunes intĂšgrent ces nouveaux mĂ©dias dans leur vie de tous les jours[28] ?

Ce livre, financĂ© par le Digital Media and Learning Initiative de la fondation MacArthur[29], est le fruit de trois annĂ©es d’études ethnographiques durant lesquelles de nombreux chercheurs ont tentĂ© de rĂ©pondre Ă  ces nouvelles questions. Cette Ɠuvre ne met pas seulement en avant cette nouvelle gĂ©nĂ©ration numĂ©rique mais on peut aussi y retrouver certaines questions telles que l’inĂ©galitĂ© d’accĂšs et de participation ou les conflits entre jeunes et adultes Ă  propos du dĂ©veloppements des nouveaux mĂ©dias


Danah Boyd contribue au chapitre 2, Friendship, en tant qu’autrice principale ainsi qu’au chapitre 3, Intimacy, dans lequel elle a dĂ©veloppĂ© le sujet suivant : The Public Nature of Mediated Breakups. Dans le chapitre 2, la chercheuse souligne le fait que les jeunes aiment raconter des potins, partager de l’information, flirter, se donner rendez-vous et rompre
NĂ©anmoins, tout cela pouvait s'observer dans les gĂ©nĂ©rations prĂ©cĂ©dentes. Le changement vient du fait que maintenant, ces Ă©changes ont changĂ© et n’apparaissent plus seulement dans la vie rĂ©elle mais aussi Ă  travers les rĂ©seaux sociaux. Dans The Public Nature of Mediated Breakups, danah b. dĂ©peint la relation amoureuse de deux adolescents (leur relation rĂ©elle et virtuelle), depuis le jour de leur rencontre jusqu’à leur rupture.

Cet ouvrage se distingue par la richesse de son corpus, allant du partage de musiques jusqu’aux ruptures de couple en ligne. Chaque chapitre de ce livre est agrĂ©mentĂ© d’un tĂ©moignage qualitatif avec les jeunes et sa collaboration unique caractĂ©risĂ©e par la dynamique d’un grand nombre de chercheurs (rĂ©seau d’auteurs, de collaborateurs ainsi que d’institutions). Il prĂ©sente, de façon trĂšs dĂ©taillĂ©e, la maniĂšre dont les jeunes apprennent et interagissent avec leurs pairs au travers de ces nouveaux moyens de communication. De plus, il donne l’occasion de rĂ©flĂ©chir Ă  l’utilisation des nouveaux mĂ©dias ainsi qu’à leur Ă©ventuelle intĂ©gration dans l’enseignement[30].

Taken out of context: American teen sociality in networked publics

danah boyd en 2010

En 2008, Danah Boyd Ă©crit une thĂšse de doctorat portant sur « la sociabilitĂ© des adolescents amĂ©ricains dans les espaces publics en rĂ©seaux »(Taken Out of Context : American Teen Sociality in Networked Publics). Elle pense que comprendre les adolescents permet de comprendre la technologie. Elle articule ainsi sa rĂ©flexion autour du conflit constant entre ce que les personnes imaginent qu’ils se passent dans les rĂ©seaux et ce que les jeunes y vivent rĂ©ellement : « j’essaye de comprendre oĂč rĂ©sident les risques rĂ©els, les complexitĂ©s, l’écart entre les possibilitĂ©s offertes et la maniĂšre dont on les interprĂšte »[31]. Cette thĂšse lui permet d’avoir un regard plus prĂ©cis sur la maniĂšre dont les adolescents amĂ©ricains utilisent les rĂ©seaux sociaux comme Facebook ou Myspace pour entrer en relation avec leurs pairs. En effet, ces rĂ©seaux sociaux sont en grande partie utilisĂ©s par les adolescents et ce quotidiennement pour parler, partager ou y passer du temps tout simplement. Cependant les adultes manifestent une certaine crainte vis-Ă -vis de ces rĂ©seaux qu'ils connaissent peu[32].

Les interactions sur Internet ont aussi fait partie de l’adolescence de la chercheuse, elle est donc trĂšs bien placĂ©e pour observer le phĂ©nomĂšne. Pour comprendre ce dernier, Danah Boyd adopte (durant ses deux ans et demi de recherche) une position d’ethnographe. Cette mĂ©thode nĂ©cessite l’analyse de nombreuses pages Facebook et Myspace ainsi que l’interview de cent enfants qui utilisaient ces rĂ©seaux sociaux. Cela permet de voir non seulement l’implication des adolescents sur ces plateformes, mais Ă©galement la maniĂšre dont cette participation contribue Ă  trois ensembles trĂšs importants dans leur vie: la reprĂ©sentation de soi (relation avec soi-mĂȘme), la relation avec leurs pairs et la relation avec les adultes. Plus prĂ©cisĂ©ment, Danah Boyd analyse trois axes Ă  travers sa thĂšse. Elle s'attache d'abord Ă  la production de l'identitĂ©, Ă  savoir, comment les jeunes s'expriment dans les mĂ©dias sociaux. Ensuite, elle s'intĂ©resse Ă  comment ils se sociabilisent et utilisent les mĂ©dias sociaux pour s'engager dans une interaction sociale, et finalement, comment les jeunes composent avec les parents et le pouvoir qu'ils appuient sur eux.

Encore une fois, Danah Boyd ne considĂšre pas ces complications comme nocives pour les adolescents ou comme des faiblesses pour les rĂ©seaux sociaux. Selon la chercheuse, les jeunes ont toujours trouvĂ© la maniĂšre d'ĂȘtre sur Facebook ou Myspace malgrĂ© les restrictions parentales. D'ailleurs, beaucoup de parents continuent Ă  croire que les rĂ©seaux sociaux sont risquĂ©s pour leurs enfants et ne voient pas les bienfaits que peuvent entraĂźner une telle participation. Or, Danah Boyd perçoit ces rĂ©seaux comme des endroits oĂč l’on peut justement apprendre beaucoup au sujet des relations sociales. Selon elle, au fur et Ă  mesure, les adolescents ont appris Ă  manier les rĂ©seaux sociaux et Ă  la suite de cela, ils sont capables de gĂ©rer les inconvĂ©nients et la complexitĂ© que gĂ©nĂšrent ces sites (les audiences invisibles, l’effondrement des contextes et le flou public/privĂ©). D’un cĂŽtĂ©, nous avons ces nouvelles technologies qui bouleversent la vie publique et de l’autre, nous avons les adolescents qui, grĂące Ă  leur investissement sur ces sites, reconfigurent la technologie elle-mĂȘme.

GrĂące Ă  cette thĂšse financĂ©e par la fondation MacArthur[33], Danah Boyd a voulu rĂ©futer certains mythes qui prolifĂšrent autour de l'utilisation des rĂ©seaux sociaux. Cette recherche a donc donnĂ© la parole aux adolescents amĂ©ricains en ayant l’espoir que les adultes les comprennent.

Faceted Id/entity: Managing representation in a digital world

La thĂšse rĂ©alisĂ©e par Danah Boyd lors de son cursus Ă  l’Institut technologique du Massachusetts s’articule autour d’une thĂ©orie expliquant comment et pourquoi les internautes utilisent le contexte pour transmettre seulement une facette de leur identitĂ© lors d’interactions sociales.

MĂ©thodologie en recherche digitale

Danah boyd en 2007

Dans l’article Making Sense of Teen Life : Strategies for Capturing Ethnographic Data in a Networked Era, boyd explique la mĂ©thodologie qu’elle applique dans ses recherches. De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, la mĂ©thode est divisĂ©e en quatre parties distinctes :

Pour elle, les recherches ethnographiques sur Internet peuvent avoir de l’intĂ©rĂȘt. Cependant, comme d’autres chercheurs dont Kendall, Bennett, Miller ou encore Slater l’ont soulignĂ©, prendre le contexte en considĂ©ration et reconnaĂźtre des liens entre les contextes en ligne et hors ligne est essentiel, mĂȘme quand on tente de comprendre des pratiques mĂ©diatiques[34]

Par ailleurs, mĂȘme si ses recherches se centrent sur les rĂ©seaux sociaux, cela ne signifie pas qu'elle questionne uniquement les adolescents sur la technologie. Par exemple, lors d'une de ses interviews avec une adolescente, cette derniĂšre lui racontait comment MySpace rĂ©vĂšle les groupes exclusifs qui sont visibles dans cour de l'Ă©cole, comment les tĂ©lĂ©phones portables sont devenus les nouvelles baskets Nikes, etc. et peuvent ĂȘtre potentiellement des marqueurs de statut. Ce qui, selon Danah Boyd, souligne l'importance d'Ă©tudier ces technologies en contexte[34]

Pour trouver des adolescents Ă  interviewer, la chercheuse identifie des communautĂ©s locales, oĂč elle pense qu'il sera possible de trouver des personnes Ă  interroger. Comme chaque communautĂ© a ses propres particularitĂ©s et limitations, Danah Boyd essaie toujours d'en choisir une qui est la plus diffĂ©rente possible de la prĂ©cĂ©dente. Elle privilĂ©gie les communautĂ©s oĂč elle connaĂźt un informateur local (Ă©ducateurs, libraires, centre de jeunes, etc.) qui lui permettra d'obtenir un Ă©chantillon reprĂ©sentatif des adolescents. Pour ce faire, elle demande Ă  son informateur local de ne pas lui prĂ©senter des adolescents dont les parents sont acadĂ©miciens ou travaillent dans la technologie[34].  

Bien sĂ»r, Danah Boyd est consciente que les informateurs peuvent ne pas ĂȘtre objectifs. C'est pourquoi, pour s'assurer qu'elle rencontre des adolescents qui reprĂ©sente la communautĂ© en gĂ©nĂ©ral, elle collecte les donnĂ©es de recensement de ces communautĂ©s et visite diffĂ©rentes parties de la ville Ă  l'aide de Google Maps, pour mieux sentir la communautĂ©. Elle se rend Ă©galement au cinĂ©ma, dans les centres commerciaux et aux Ă©vĂ©nements sportifs pour voir quels adolescents sont prĂ©sents. En plus de cela, elle va voir les pages MySpace et Facebook en lien avec ces communautĂ©s[34]

Interventions

danah boyd en 2011

Vivre dans un monde de flux

Lors de la Web 2.0 Expo de New York de 2009, danah boyd prĂ©sente les consĂ©quences liĂ©es au fait de vivre dans un monde de flux et en dresse la liste des limites. Le titre de cette prĂ©sentation est Streams of Content, Limited Attention: The Flow of Information through Social Media (Flux de contenus, attention limitĂ©e : le flot d’informations dans les mĂ©dias sociaux). Lors de cette exposĂ©, Danah Boyd explique que les sites d’informations ont, pendant longtemps, Ă©tĂ© une destination. En effet, accĂ©der Ă  l’information a Ă©tĂ© un processus, produire l’information une tĂąche. Elle poursuit son explication en disant que « nous sommes passĂ©s des mĂ©dias de diffusion aux mĂ©dias en rĂ©seau, ce qui modifie fondamentalement la maniĂšre dont s’écoule l’information »[35].

De nos jours, chacun a la possibilitĂ© « de crĂ©er, diffuser et relier ses propres contenus via Internet », dit-elle. Toujours selon la chercheuse : « les technologies Internet dĂ©mantĂšlent et remanient les structures de distribution ». Elle explique aussi que l’acte de distribution a moins d’importance que l’acte de consommation et ce, mĂȘme si les obstacles Ă  la distribution s’effondrent. Pour danah boyd donc, « le dĂ©mantĂšlement des structures traditionnelles de distribution nous pousse Ă  construire de nouvelles formes de diffusion de l’information ». Elle interroge ainsi sur la maniĂšre dont l’information circule aujourd’hui et ce qui a changĂ© par rapport Ă  ce qu’il se passait auparavant. Elle en arrive ainsi Ă  Ă©voquer quatre fausses idĂ©es sur la rĂ©volution numĂ©rique[36].

Danah Boyd et la question du Big Data[5]

À la diffĂ©rence de la reprĂ©sentation que les jeunes ont du Big Data, celle d’une masse de donnĂ©es disponibles et quantifiables, Danah Boyd perçoit quant Ă  elle un phĂ©nomĂšne social, technologique et savant. Un phĂ©nomĂšne qui part de l’obsession que toutes ces donnĂ©es vont permettre de comprendre l’humanitĂ© et de rĂ©soudre tous les problĂšmes du monde. Pour la chercheuse, l’enjeu est ailleurs. Plus il y a de donnĂ©es, plus les entreprises peuvent les monnayer. Ces donnĂ©es collectĂ©es par ces derniĂšres et par l’État sont analysĂ©es et posent alors des questions relatives aux jeux de pouvoir et Ă  l’intimitĂ©.

Dans une interview avec le SFR player, Danah Boyd met aussi les chercheurs en garde face à l'utilisation de ces données. Bien qu'elle considÚre que celles-ci soient trÚs intéressantes dans une recherche en raison de leurs richesses d'informations et des corrélations importantes qu'elles permettent, elle rappelle qu'il est essentiel de garder un esprit critique lors de leur interprétation afin d'éviter les biais[37].

Une autre question qui se pose aux États-Unis est celle de la surveillance de l’État. Ainsi, Danah Boyd s’interroge sur la finalitĂ© de l’utilisation des donnĂ©es : « Ces donnĂ©es vont-elles servir un idĂ©al ? Vont-elles ĂȘtre utilisĂ©es pour le plus grand nombre ? ». Comprendre les possibilitĂ©s offertes par ces donnĂ©es et les risques qui y sont liĂ©s, n’est selon elle, pas chose aisĂ©e. Dans son entretien, elle cite le travail Â« The pathetic dot theory Â» (en) de Lawrence Lessig qui dĂ©clare que toute forme de rĂ©gulation sociale est dĂ©terminĂ©e par quatre forces : le marchĂ©, les lois, les normes sociales et l’architecture technologique. Lorsque ces forces sont orientĂ©es dans une mĂȘme direction, des changements sociaux massifs apparaissent. GĂ©nĂ©ralement, ces forces ne sont pas alignĂ©es et le but recherchĂ© est donc l’alignement. Le rĂŽle que se donne la chercheuse, Ă  travers l’analyse du Big Data, est d’aider le public Ă  comprendre la complexitĂ© du phĂ©nomĂšne pour que « les normes sociales puissent activer un changement social plus global »[38].

Networked Norms: How Tech Startups and Teen Practices Challenge Organizational Boundaries, 2013

Cet exposĂ© a Ă©tĂ© Ă©crit pour la confĂ©rence de TechKnowledge mis sur pied par l'American Society for Training & Development. Il a Ă©tĂ© initialement intitulĂ© L'apprentissage en rĂ©seau: comment les travailleurs de demain vont changer les organisations d’aujourd’hui ?. Cette confĂ©rence est notamment un de ses travaux en cours.

Pour comprendre comment les travailleurs de demain font Ă©voluer les organisations d’aujourd’hui, elle s’appuie sur ce qu’elle a compris Ă  propos de la culture des start-ups, de l’industrie de la technologie, ainsi que des recherches qu’elle a rĂ©alisĂ©es sur certaines parties de la vie des adolescents, mĂȘme si elle dit que les adolescents ne sont pas nĂ©cessairement une bonne indication pour le futur car ceux-ci sont dans une Ă©tape de la vie particuliĂšre. Cependant, elle invite tout de mĂȘme Ă  repenser les comportements et les pratiques des adolescents et des technologues, avec une vision plus actuelle.

Au sein de grandes entreprises, Danah Boyd avance que nous prenons pour acquis les frontiÚres organisationnelles. En effet, selon la chercheuse, la logique organisationnelle traditionnelle suggÚre que la plupart des employés des grandes entreprises ne doivent surtout pas parler à d'autres personnes, mais uniquement à celles de leur organisation afin de réaliser leur travail. Dans ce cadre, les entreprises sont trÚs protectrices de leurs biens et voient tout partage de connaissances avec les «concurrents» comme un affaiblissement de leurs actifs de base.

Pour un adolescent qui grandit dans un monde en « rĂ©seau », ce modĂšle n’a absolument aucun sens. S’ils ont accĂšs Ă  l'Internet, ils ont dĂ©veloppĂ© une sensibilitĂ© pour l'obtention de connaissances Ă  partir d'une grande variĂ©tĂ© de sources. Cela contredit ainsi totalement le principe de nombreuses organisations.

La chercheuse aborde ainsi cette question via trois grands axes : les changements dans le développement de logiciels et le secteur de la technologie, la dynamique de la culture de la jeunesse et les implications que ces dynamiques ont pour la culture organisationnelle au sens large[39].

L’échange de sextos chez les adolescents et son impact sur le secteur des technologies

Cette confĂ©rence de Danah Boyd aborde la problĂ©matique de l’échange de contenus Ă  caractĂšre sexuel par les adolescents. Ce procĂ©dĂ© appelĂ© sexting pose de nombreuses questions d’ordre moral et culturel mais a Ă©galement un impact sur l’industrie du web. La confĂ©rence aborde les aspects lĂ©gaux et quelques cas problĂ©matiques de sexting. La chercheuse invite alors Ă  une rĂ©flexion autour de ce thĂšme.

RĂ©compenses et honneurs

En 2009, le magazine Fast Company désigne danah boyd comme étant : « l'une des femmes les plus influentes dans le secteur des technologies »[40]. En 2010, l'Association américaine de sociologie lui remet le prix de Sociologie publique dans le secteur des Technologies de la communication et de l'information[41] et le magazine Fortune la nomme universitaire la plus douée dans le secteur des technologies[42] ainsi qu'experte sur la maniÚre dont les jeunes utilisent Internet (the reigning expert on how young people use the Internet)[43]. Elle est également incluse dans le classement TR35 (en) des meilleurs innovateurs de moins de 35 ans[44].

Danah Boyd participe Ă  de nombreuses confĂ©rences acadĂ©miques, au SIGIR (en), au SIGGRAPH, au CHI (en), au Personal Democracy Forum (en) ainsi qu'Ă  l'Association amĂ©ricaine pour l'avancement des sciences. En 2010, elle prononce le discours d'ouverture du SXSW Interactive et du WWW oĂč elle parle du Big Data, de la publicitĂ© et de la vie privĂ©e[45] - [46] - [47]. En 2008, elle fait Ă©galement une apparition dans le documentaire Growing Up Online de l'Ă©mission de tĂ©lĂ©vision Frontline oĂč elle s'exprime sur la jeunesse et la technologie[48].

Le magazine Foreign Policy intÚgre Danah Boyd dans le classement Top 100 Public Intellectuals Poll de 2012 pour avoir montré que le Big Data n'est pas forcément de la meilleure information (« for showing us that Big Data isn't necessarily better data »)[49].

En 2013, elle reçoit le SXSW Interactive Festival Hall of Fame[2].

Vidéos

Notes et références

Notes

  1. Les explications de son pseudonyme sans majuscule sur son blog.

Références

(en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de l’article de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « danah boyd » (voir la liste des auteurs).
  1. Alexandre Léchenet, « danah boyd, anthropologue de la génération numérique », sur lemonde.fr, Le Monde, .
  2. (en) « danah boyd », sur LinkedIn (consulté le )
  3. (en) « danah boyd », sur Berkman Center for Internet & Society, (consulté le )
  4. Alexandre LĂ©chenet, « danah boyd, anthropologue de la gĂ©nĂ©ration numĂ©rique », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  5. « Grand entretien avec danah boyd », sur France Culture, (consulté le )
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  7. (en) « danah michele boyd - CV », sur www.danah.org (consulté le )
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  13. « Grand entretien avec danah boyd », sur France Culture, (consulté le )
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  16. (en) « My queer identity », (consulté le )
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  22. (en) « danah boyd publications », sur danah's blog (consulté le )
  23. Alexandre LĂ©chenet et MichaĂ«l Szadkowski, « 6 clĂ©s pour comprendre comment vivent les ados sur les rĂ©seaux sociaux », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  24. (en) Nicole B.Ellison, Sociality through Social Network Sites, Oxford, Oxford University Press, , pp. 151-172 (lire en ligne)
  25. Routledge, Race After the Internet, 2011 (consulté le 17.11.14)
  26. dnaah boyd, White Flight in Networked Publics? How Race and Class Shaped American Teen Engagement with MySpace and Facebook, In Race After the Internet (eds. Lisa Nakamura and Peter A. Chow-‐White). Routledge, 2011, p. 203-222. (consultĂ© le 17.11.14)
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  36. « danah boyd : Ce qu’implique de vivre dans un monde de flux », sur Internetactu.net, (consultĂ© le )
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  39. (en) « Networked Norms: How Tech Startups and Teen Practices Challenge Organizational Boundaries » (consulté le )
  40. Rédaction de Fast Company (1er février 2009). « Women in Tech: The Evangelists ». Fast Company (magazine)
  41. Association américaine de sociologie. Citasa Award for Public Sociology, « Citasa Award for Public Sociology ».
  42. « Alumna danah boyd Named Fortune Magazine's Smartest Academic in Tech », sur UC Berkley School of Information (consulté le ).
  43. Hempel, Jessi (2010), « Ones to watch: Danah Boyd », sur Fortune (consulté le ).
  44. Naone, Erica, « Innovators under 35 », sur MIT Technology Review, (consulté le )
  45. (en) Jason Kincaid, « Danah Boyd: How Technology Makes A Mess Of Privacy and Publicity », sur techcrunch.com, (consulté le )
  46. (en) « SXSW Interactive Festival : 22 Years of Innovation, Creativity and Inspiration », sur sxsw.com (consulté le )
  47. (en) « Special Session : danah boyd's WWW2010 Keynote Talk, April 29 », sur elon.edu (consulté le )
  48. (en) « PBS Frontline: Growing Up Online with danah boyd - January 22nd », sur cyber.law.harvard.edu, (consulté le )
  49. (en) Alicia P.Q. Wittmeyer, « The FP Top 100 Global Thinkers », sur foreignpolicy.com, (consulté le )

Liens externes

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