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DĂ©termination d'une structure cristalline

La détermination d'une structure cristalline consiste, de maniÚre générale, à déterminer, pour un cristal de structure inconnue, les paramÚtres de sa maille conventionnelle, son réseau de Bravais, son groupe d'espace et la position des atomes dans la maille. Dans la pratique, on utilise des méthodes de radiocristallographie, comme la diffraction de rayons X, la diffraction de neutrons ou la diffraction des électrons, pour la détermination de structure. Le plus souvent, les structures cristallines sont déterminées à partir d'échantillons monocristallins, mais cela est aussi possible en utilisant des poudres.

Le problÚme central de la détermination d'une structure cristalline est l'absence d'information sur la phase des facteurs de structure lors d'une mesure de diffraction. Plusieurs méthodes ont été développées pour résoudre ce « problÚme de phase » dans le cas de la diffraction par des rayons X : méthodes directes, méthode de Patterson, méthode de l'atome lourd, remplacement isomorphe, remplacement moléculaire, diffraction anomale, recuit simulé, méthode d'entropie maximum, charge flipping, fonction de distribution de paires, mesure expérimentale de phases.

Des méthodes complémentaires comme la spectrométrie d'absorption des rayons X ou la spectroscopie Mössbauer donnent aussi des informations sur la composition du cristal, le degré d'oxydation et l'environnement des espÚces chimiques.

Historique

La premiÚre structure cristalline déterminée par diffraction de rayons X avec une résolution atomique fut celle du chlorure de sodium NaCl[1] - [2] - [3].

En 1985, Herbert Aaron Hauptman et Jerome Karle obtinrent le prix Nobel de chimie pour « leurs réalisations remarquables dans la mise au point de méthodes directes de détermination des structures cristallines[4] ».

ProblĂšme de phase

Le problÚme de phase vient du fait qu'une grande partie de l'information sur la structure d'un cristal, contenue dans la phase de l'onde diffractée, n'est pas accessible expérimentalement.

Lors d'une expérience de diffraction sur un cristal, la taille du faisceau incident est beaucoup plus grande que le cristal, afin d'assurer une diffraction homogÚne dans tout le cristal. On peut alors considérer que l'onde incidente , de longueur d'onde λ, a la forme d'une onde plane, décrite en tout point et à chaque instant t par l'expression complexe :

oĂč est l'amplitude de l'onde, sa pulsation, son vecteur d'onde et sa phase au temps t=0, que l'on choisit gĂ©nĂ©ralement nulle.

L'onde diffractée par un cristal est alors donnée par :

avec le vecteur d'onde de l'onde diffractée, le vecteur de diffusion (variable continue), le facteur de forme du cristal et le facteur de structure, contenant dans sa phase l'information sur la structure de la maille : est le vecteur position et le facteur de diffusion atomique de l'atome dans la maille.

Le facteur de structure d'un cristal s'annule pour des vecteurs de diffusion ne satisfaisant pas la condition de Laue. L'ensemble des vecteurs de diffraction est un sous-ensemble discret de celui des vecteurs de diffusion pour lequel une intensitĂ© diffractĂ©e peut ĂȘtre observĂ©e (elle peut cependant ĂȘtre nulle pour certains vecteurs de diffraction si le groupe d'espace du cristal conduit Ă  des extinctions systĂ©matiques). Par la suite ne seront considĂ©rĂ©s que les vecteurs de diffraction, notĂ©s :

oĂč est la densitĂ© Ă©lectronique de la maille.

L'onde diffractĂ©e est proportionnelle Ă  la transformĂ©e de Fourier de la maille : en effectuant la transformĂ©e de Fourier inverse de l'onde diffractĂ©e, il devrait ĂȘtre possible de dĂ©terminer la structure de la maille. Cependant, la quantitĂ© accessible expĂ©rimentellement est l'intensitĂ© I, proportionnelle au carrĂ© de la norme de l'onde diffractĂ©e :

avec h, k et l les coordonnĂ©es dans l'espace rĂ©ciproque du point oĂč l'intensitĂ© est mesurĂ©e, soit les composantes du vecteur de diffraction .

L'intensité d'une réflexion est une quantité réelle, ne contenant pas d'information sur la phase de l'onde diffractée : il n'est pas possible de déterminer directement la structure du cristal en effectuant une transformée de Fourier inverse de l'intensité mesurée. C'est le problÚme de phase de la cristallographie.

MĂ©thodes de solution du problĂšme de phase

Les méthodes ci-dessous ont été développées afin de résoudre le problÚme de phase, c'est-à-dire d'assigner la phase correcte à chaque facteur de structure. Beaucoup d'entre elles utilisent une ou plusieurs hypothÚses de base qui découlent des propriétés de la distribution de la densité électronique dans un cristal :

  1. la densité électronique est en tout point positive (ou éventuellement nulle) ;
  2. la densité électronique possÚde plusieurs maxima relativement bien localisés (autour des atomes).

De par la nature de ces hypothĂšses, on comprend que les mĂ©thodes de solution du problĂšme de phase ne peuvent ĂȘtre appliquĂ©es qu'Ă  des donnĂ©es de diffraction de rayons X : en effet, les interactions des rayons X avec la matiĂšre s'effectuent avec les Ă©lectrons. Dans le cas de la diffraction de neutrons, les longueurs de diffusion atomiques peuvent ĂȘtre nĂ©gatives, ce qui dĂ©truit les hypothĂšses ci-dessus.

MĂ©thodes directes

Les méthodes directes utilisent des conditions sur la densité électronique dans un cristal afin d'établir des relations entre les phases des facteurs de structure. Elles se basent sur les travaux de Harker et Kasper[5], Karle et Hauptmann[6] - [7] et Sayre[8], entre autres.

Les mĂ©thodes directes nĂ©cessitent une connaissance (au moins approximative) de la composition chimique du cristal, du nombre de chaque espĂšce chimique dans la maille et du groupe d'espace du cristal. En plus des deux hypothĂšses sur la densitĂ© Ă©lectronique, elles ne considĂšrent que les cas oĂč tous les atomes ont un facteur de diffusion comparable (par exemple, C, N, O comme dans les composĂ©s organiques).

Ces méthodes utilisent plusieurs outils mathématiques :

  • des tests statistiques sur la valeur absolue des facteurs de structure pour dĂ©terminer la centrosymĂ©trie d'un cristal ;
  • les inĂ©galitĂ©s d'Harker-Kasper qui donnent des relations entre les phases de diffĂ©rents facteurs de structure en fonction des opĂ©rations de symĂ©trie du groupe d'espace ;
  • l'Ă©quation de Sayre, basĂ©e sur le thĂ©orĂšme de convolution, qui permet de calculer directement la phase d'un facteur de structure appartenant Ă  un « triplet » de rĂ©flexions.

La plupart des structures organiques ont été déterminées par des méthodes directes.

MĂ©thode de Patterson

La méthode de Patterson utilise les propriétés des séries de Fourier dont les coefficients sont les produits des facteurs de structure avec leurs conjugués, , afin de déterminer les vecteurs entre atomes dans un cristal. Elle n'utilise que les intensités mesurées et ne prend pas en compte les phases des facteurs de structure. Cette méthode a été développée par A.L. Patterson en 1934[9]. Elle utilise plus précisément le théorÚme de convolution : la transformée de Fourier inverse du produit des facteurs de structure avec leurs conjugués est égale à la fonction d'autocorrélation de la densité électronique, aussi appelée fonction de Patterson :

La fonction de Patterson, calculée dans l'espace direct, est constituée de maxima qui correspondent aux vecteurs entre atomes dans la structure, centrés à l'origine de la maille. Ces vecteurs sont pondérés : d'aprÚs l'expression de la fonction de Patterson, chaque maximum est obtenu par convolution des densités électroniques individuelles de deux atomes et sa valeur dépend du nombre d'électrons des atomes. Les contributions des atomes lourds (à grand numéro atomique relativement aux autres atomes du cristal) sont donc particuliÚrement visibles.

MĂ©thode de l'atome lourd

Principe de la méthode de l'atome lourd. Le facteur de structure F(hkl) est représenté en rouge, celui de l'atome lourd, FHA(hkl), est en bleu. Les contributions des atomes légers sont en noir.
Carte de différence Fourier F'-FHA aprÚs localisation de l'atome lourd. Les pics restants permettent de retrouver les atomes légers.

La prĂ©sence d'un atome lourd (notĂ© HA) dans la structure facilite la dĂ©termination de structure, car cet atome peut ĂȘtre localisĂ© facilement dans la maille Ă  partir de la mĂ©thode de Patterson. Son facteur de structure partiel FHA peut alors ĂȘtre calculĂ© :

oĂč la somme sur prend en compte l'ensemble des atomes Ă©quivalents par symĂ©trie dans la maille.

La méthode de l'atome lourd consiste à remplacer la phase du facteur de structure total par celle du facteur de structure partiel de l'atome lourd, puisqu'il contribue majoritairement aux intensités observées :

Les atomes plus légers sont localisés par une analyse de différence Fourier, la densité électronique différence calculée par la transformée de Fourier inverse de la différence F'-FHA permet de mieux mettre en évidence leurs positions :

oĂč est le volume de la maille.

L'utilisation des atomes lourds dans la détermination d'une structure cristalline a été introduite par David Harker en 1936[10].

Remplacement isomorphe

La mĂ©thode du remplacement isomorphe est utilisĂ©e lorsqu'il est possible de substituer une espĂšce chimique A par une autre espĂšce B de numĂ©ro atomique diffĂ©rent dans la structure, sans que celle-ci ne change de symĂ©trie. Les deux cristaux, l'un contenant A et l'autre contenant B, sont mesurĂ©s par diffraction. L'atome B est gĂ©nĂ©ralement choisi plus lourd que l'atome A : sa position peut ĂȘtre dĂ©terminĂ©e par la mĂ©thode de Patterson et la phase de son facteur de structure partiel pour une rĂ©flexion donnĂ©e est alors connue. La diffĂ©rence entre les deux jeux de donnĂ©es provient de la substitution atomique, ce qui permet de retrouver la position des atomes substituĂ©s. Il s'agit d'une des plus anciennes mĂ©thodes de dĂ©termination de structure, inventĂ©e par J.M. Cork en 1927 pour dĂ©terminer la structure des aluns[11].

La position des atomes A et B Ă©tant connue, le facteur de structure total pour une rĂ©flexion donnĂ©e peut ĂȘtre sĂ©parĂ© en une somme de facteurs de structure partiels pour les cristaux 1 (contenant A) et 2 (contenant B) :

Principe du remplacement isomorphe.

oĂč FX reprĂ©sente la contribution des autres atomes non substituĂ©s dans la maille au facteur de structure, d'oĂč :

En effet, puisque les atomes non substituĂ©s lors du remplacement isomorphe occupent les mĂȘmes positions dans les deux structures, leurs contributions aux facteurs de structure sont Ă©gales. La phase du facteur de structure total pour le cristal 1 peut alors se dĂ©duire par la relation (voir figure Ă  droite)[12] :

La valeur absolue de peut ĂȘtre calculĂ©e, mais son signe n'est pas connu si seulement deux cristaux isomorphes sont utilisĂ©s. Les deux possibilitĂ©s sont donc testĂ©es par une analyse de diffĂ©rence Fourier[13].

La méthode du remplacement isomorphe n'est plus vraiment utilisée pour les cristaux inorganiques à cause du succÚs des méthodes directes ou de Patterson ; cependant, elle est trÚs utile dans le cas des structures de macromolécules biologiques[14].

Remplacement moléculaire

Lorsqu'un cristal inconnu contient un fragment molĂ©culaire connu, dont la structure a Ă©tĂ© dĂ©terminĂ©e dans un autre composĂ© cristallin, il est possible de retrouver la position et l'orientation du fragment dans le cristal inconnu en comparant les fonctions de Patterson des deux cristaux : du fait de la prĂ©sence du fragment dans les deux structures, les fonctions de Patterson prĂ©sentent des caractĂ©ristiques similaires[15]. Lorsque la position et l'orientation du fragment ont Ă©tĂ© trouvĂ©es, le reste de la structure peut ĂȘtre dĂ©terminĂ© par une succession d'affinements et analyses de la densitĂ© Ă©lectronique Ă  partir des cartes de diffĂ©rence Fourier.

L'utilisation de la mĂ©thode du remplacement molĂ©culaire suppose l'existence d'une banque de donnĂ©es des structures dĂ©jĂ  dĂ©terminĂ©es, contenant le mĂȘme fragment que le cristal inconnu. Il s'agit d'une mĂ©thode importante pour les structures de macromolĂ©cules biologiques[16].

Diffraction anomale

La méthode de la diffraction anomale à plusieurs longueurs d'onde (MAD, Multi-wavelength anomalous diffraction) est une méthode de solution du problÚme de phase. Il s'agit d'une technique de diffraction de rayons X, surtout accessible en synchrotron : elle consiste en une série d'expériences de diffraction avec des longueurs d'onde différentes afin d'utiliser les effets de la diffusion anomale. L'importance de la diffusion anomale pour la résolution de structures a été remarquée dÚs 1949 par Johannes Martin Bijvoet, qui a utilisé la violation de la loi de Friedel afin de déterminer la configuration absolue de molécules[17] - [18].

La diffraction anomale est employĂ©e pour dĂ©terminer la structure de protĂ©ines[19] et, plus gĂ©nĂ©ralement, de macromolĂ©cules. Elle nĂ©cessite la prĂ©sence d'atomes avec un numĂ©ro atomique assez Ă©levĂ© dans la structure pour provoquer une diffusion anomale observable (Ă  partir du soufre). GĂ©nĂ©ralement, trois longueurs d'onde sont utilisĂ©es : avant l'arĂȘte d'absorption, sur l'arĂȘte d'absorption et aprĂšs. Il est aussi possible d'utiliser la diffraction anomale avec une seule longueur d'onde (SAD, Single-wavelength anomalous dispersion). Dans ce cas, la longueur d'onde est sĂ©lectionnĂ©e pour optimiser le contraste entre diffĂ©rents atomes de la structure. Cette technique a l'avantage de minimiser la destruction du cristal par les rayons X.

Le principe est similaire Ă  celui de la mĂ©thode du remplacement isomorphe : au lieu de changer les atomes de la structure, c'est la longueur d'onde utilisĂ©e pour l'expĂ©rience qui varie autour de l'arĂȘte d'absorption de l'atome produisant la diffusion anomale. Il existe deux mĂ©thodes de dĂ©termination de structure par la diffraction anomale : la premiĂšre utilise la partie imaginaire de la correction anomale, la seconde utilise les variations de la partie rĂ©elle en fonction de la longueur d'onde.

Méthode du recuit simulé

Il s'agit d'une mĂ©thode de dĂ©termination de structure dĂ©veloppĂ©e en 1997[20] qui opĂšre directement dans l'espace direct. Elle est plus connue en anglais sous le nom de simulated annealing method. Les atomes sont placĂ©s au hasard dans la maille et leurs positions sont changĂ©es de maniĂšre alĂ©atoire Ă  chaque cycle, en comparant les intensitĂ©s calculĂ©es aux intensitĂ©s observĂ©es. Il n'est pas nĂ©cessaire de connaĂźtre la composition chimique exacte du cristal : deux atomes peuvent ĂȘtre superposĂ©s sur la mĂȘme position, simulant un atome plus lourd. D'autre part, la mĂ©thode n'a pas besoin du groupe d'espace du cristal pour fonctionner.

L'algorithme du recuit simulĂ© fonctionne par itĂ©rations de cycles. La configuration atomique de dĂ©part est choisie alĂ©atoirement. Pour chaque cycle est calculĂ©e la valeur d'une « fonction de coĂ»t » , qui doit ĂȘtre minimisĂ©e au cycle suivant :

oĂč est une fonction obtenue Ă  partir de potentiels interatomiques, α Ă©tant choisi entre 0 et 1. est un facteur d'accord cristallographique dĂ©fini par la somme des diffĂ©rences entre intensitĂ©s observĂ©es et intensitĂ©s calculĂ©es Ă  partir de la configuration atomique. Si α est Ă©gal Ă  0, seul le facteur d'accord est pris en compte, ce qui autorise plusieurs atomes Ă  se retrouver sur la mĂȘme position.

À chaque cycle, toutes les positions atomiques , , sont modifiĂ©es. La fonction de coĂ»t permet de garder ou de rejeter les changements :

  • si > , les valeurs du cycle sont gardĂ©es et les changements sont rejetĂ©s ;
  • si < , les nouvelles valeurs sont gardĂ©es avec une probabilitĂ© , dĂ©finie par :

oĂč dĂ©croĂźt Ă  chaque cycle. Par analogie avec la statistique de Maxwell-Boltzmann, le paramĂštre peut ĂȘtre vu comme une « tempĂ©rature » du systĂšme, d'oĂč le nom de « recuit simulĂ© ». L'utilisation de la probabilitĂ© permet d'Ă©viter Ă  l'algorithme de rester coincĂ© dans un minimum local de la fonction de coĂ»t. Des critĂšres de convergence permettent l'arrĂȘt automatique de l'algorithme, par exemple lorsqu'une certaine valeur de la fonction de coĂ»t est atteinte.

Si la composition chimique est connue, il est possible d'imposer des contraintes souples sur les longueurs des liaisons afin d'aider l'algorithme Ă  converger.

Cette mĂ©thode est utilisĂ©e pour la dĂ©termination de structure Ă  partir de donnĂ©es sur poudres[21] et est implĂ©mentĂ©e dans le programme FullProf[22], par exemple. Au contraire des autres mĂ©thodes prĂ©sentĂ©es, celle du recuit simulĂ© peut aussi ĂȘtre utilisĂ©e pour des donnĂ©es de diffraction de neutrons, puisqu'elle n'utilise aucune hypothĂšse sur la densitĂ© Ă©lectronique dans le cristal.

MĂ©thode d'entropie maximum

La méthode d'entropie maximum pour la détermination d'une structure cristalline consiste à reconstruire la densité électronique pour un ensemble de points définissant une grille fine dans la maille, à partir des facteurs de structure observés. Le nombre de points de la grille étant généralement beaucoup plus grand que le nombre de réflexions observées, il existe une infinité de solutions. La solution choisie est celle qui maximise l'entropie de Shannon [23] :

oĂč peut contenir des informations supplĂ©mentaires sur la densitĂ© Ă©lectronique, mais est souvent choisi comme une fonction constante. Certaines contraintes sont appliquĂ©es lors de la recherche de solution :

  • l'intĂ©gration de la densitĂ© Ă©lectronique dans la maille doit donner le nombre total d'Ă©lectrons, connu par la formule chimique du composĂ© et sa densitĂ© ;
  • la densitĂ© Ă©lectronique calculĂ©e doit reproduire au mieux les facteurs de structure observĂ©s.

La connaissance du groupe d'espace du cristal permet d'imposer des contraintes supplémentaires de symétrie à la densité électronique.

Cette mĂ©thode peut ĂȘtre utilisĂ©e pour les structures modulĂ©es[24]. Elle a aussi Ă©tĂ© appliquĂ©e pour des donnĂ©es de diffraction d'Ă©lectrons[25].

Algoritme de charge flipping

Cette méthode fonctionne sans connaissances a priori sur le contenu de la maille ou sur la symétrie du cristal. Elle utilise uniquement l'hypothÚse sur la positivité de la densité électronique. Il s'agit d'une méthode itérative, développée en 2004 et décrite par les séquences suivantes[26].

  1. À chaque facteur de structure est associĂ©e une phase alĂ©atoire . Les phases des facteurs de structure des rĂ©flexions non mesurĂ©es sont nulles, ainsi que celle de qui est Ă©gal au nombre total d'Ă©lectrons dans la maille et est nĂ©cessairement un nombre rĂ©el.
  2. À partir de ces phases alĂ©atoires, une densitĂ© Ă©lectronique est calculĂ©e par la transformation de Fourier inverse des facteurs de structure.
  3. La densitĂ© Ă©lectronique ainsi calculĂ©e peut ĂȘtre nĂ©gative par endroits, puisque les phases sont alĂ©atoires et ne correspondent pas Ă  la structure du cristal. Elle est alors modifiĂ©e : pour les valeurs nĂ©gatives, le signe est changĂ©, on ne garde que la valeur absolue de la densitĂ© (d'oĂč le nom de « charge flipping »).
  4. La transformée de Fourier de cette densité électronique modifiée est calculée : .
  5. Les phases des sont assignées aux facteurs de structure observés ; comme au début, et les phases des réflexions non observées sont remises à 0.
  6. Retour Ă  la deuxiĂšme Ă©tape jusqu'Ă  ce que la convergence soit atteinte.

La méthode de charge flipping a été appliquée avec succÚs pour la détermination de structures cristallines inconnues et fonctionne aussi pour les structures modulées, elle est d'ailleurs implémentée dans le programme Jana2006[27]. Il n'existe cependant toujours pas de preuve mathématique de la convergence de l'algorithme.

Fonction de distribution de paires

Cette méthode est adaptée pour des échantillons sous forme de poudre dont les cristallites sont des nanoparticules, ainsi que pour les matériaux amorphes. Elle est aussi appelée « analyse PDF » d'aprÚs le terme anglais pair distribution function.

Mesure expérimentale de phases

Il est possible de mesurer la phase d'une réflexion par l'utilisation de faisceaux multiples et de la théorie dynamique de la diffraction[28]. Cette méthode n'est pas une méthode standard en cristallographie et est coûteuse en temps.

Affinement de structure

L'affinement de structure n'est pas Ă  proprement parler une mĂ©thode de dĂ©termination de structure. À partir du modĂšle dĂ©terminĂ© par une des mĂ©thodes citĂ©es ci-dessus, les paramĂštres structuraux (positions des atomes, agitations thermiques
) sont affinĂ©s par une mĂ©thode de moindres carrĂ©s afin de rĂ©aliser le meilleur accord possible entre intensitĂ©s mesurĂ©es et intensitĂ©s calculĂ©es.

Lors de l'affinement d'un modÚle, il est possible qu'un paramÚtre atteigne une valeur physiquement absurde : cela indique qu'une espÚce chimique dans la structure n'a pas été identifiée correctement. Par exemple, si le paramÚtre d'agitation thermique isotrope d'un atome devient proche de zéro pour une mesure à température ambiante, cela peut vouloir dire qu'il s'agit d'une autre espÚce chimique avec un plus grand numéro atomique : le programme d'affinement compense l'intensité trop faible calculée à partir du modÚle en réduisant l'agitation thermique de l'atome. Si au contraire le paramÚtre d'agitation thermique est beaucoup plus grand que la valeur des autres atomes, cela signifie sans doute qu'un atome de plus faible numéro atomique est présent sur cette position. Enfin, le calcul des distances interatomiques peut aussi permettre d'identifier clairement une espÚce chimique dans la structure.

Lorsqu'un atome n'a pas pu ĂȘtre trouvĂ© dans la maille (typiquement, les atomes d'hydrogĂšne, qui ne possĂšdent qu'un Ă©lectron et ont une faible interaction avec les rayons X), il est possible de le trouver par examination de la densitĂ© Ă©lectronique diffĂ©rence , aprĂšs affinement du reste de la structure. Si Fobs et Fcalc dĂ©signent les facteurs de structure observĂ©s et calculĂ©s, respectivement, en assignant les phases obtenues par le modĂšle aux Fcalc, la densitĂ© Ă©lectronique diffĂ©rence s'Ă©crit :

Notes et références

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  2. (en) W.L. Bragg, R.W. James et C.H. Bosanquet, « The Intensity of Reflexion of X-rays by Rock-Salt », Phil. Mag., vol. 41, no 243,‎ , p. 309-337 (DOI 10.1080/14786442108636225)
  3. (en) W.L. Bragg, R.W. James et C.H. Bosanquet, « The Intensity of Reflexion of X-rays by Rock-Salt. Part II », Phil. Mag., vol. 42, no 247,‎ , p. 1-17 (DOI 10.1080/14786442108633730)
  4. (en) « for their outstanding achievements in the development of direct methods for the determination of crystal structures » in Personnel de rédaction, « The Nobel Prize in Chemistry 1985 », Fondation Nobel, 2010. Consulté le 26 août 2010
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  6. (en) Herbert Aaron Hauptman et Jerome Karle, Solution of the Phase Problem. I. The Centrosymmetric Crystal, Dayton, Ohio, Polycrystal Book Service, coll. « American Crystallographic Association Monograph » (no 3),
  7. (en) Herbert Aaron Hauptman et Jerome Karle, « Structure invariants and seminvariants for noncentrosymmetric space groups », Acta Cryst., vol. 9, no 1,‎ , p. 45-55 (DOI 10.1107/S0365110X56000097)
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