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Bibliothèque de l'Arsenal

La bibliothèque de l’Arsenal fait partie de la Bibliothèque nationale de France. Elle est située au 1 rue de Sully, dans l’ancien Arsenal de Paris fondé par le roi François Ier au XVIe siècle, puis reconstruit par Sully, et élargi par l’architecte Germain Boffrand au XVIIIe siècle, dans le 4e arrondissement, au sein du quartier de l’Arsenal (15e quartier de Paris), en face du Pavillon de l'Arsenal.

Bibliothèque de l'Arsenal
Bibliothèque de l'Arsenal sur la place du Père-Teilhard-de-Chardin.
Localisation
Pays
RĂ©gion
Commune
Arrondissement
Adresse
Coordonnées
48° 51′ 01″ N, 2° 21′ 49″ E
Carte

Historique

Panneau Histoire de Paris
« Bibliothèque de l'Arsenal ».

Le logis du grand-maître de l'artillerie à l'Arsenal

Louis XII, préparant la guerre d’Italie, décide en 1512 avec l'accord de la ville de Paris de construire un endroit pour centraliser les dépôts de poudre et de munitions. L’Arsenal se modernise sous Henri II mais connaît surtout un grand éclat au moment où le duc de Sully, nommé grand maître de l'artillerie de France, s’y installe en 1599 dans le grand logis de l'Arsenal. Sous Louis XIII, de beaux appartements aménagés pour le maréchal de la Meilleraye viennent compléter le luxe de ce lieu qui va perdre progressivement sa fonction militaire. L'endroit va également servir de fonderie pour l'ensemble des statues du jardin de Versailles.

Au XVIIIe siècle, peu avant la mort de Louis XIV (1715) est décidé la transformation de l'Arsenal, aux frais du roi, avec notamment la création d'un nouveau corps de logis au goût du jour pour le duc du Maine (1670-1736), fils légitimé du roi et de Madame de Montespan, grand-maître de l'artillerie de France depuis 1694. Le grand logis aménagé en 1600 pour Sully est gardé intact, mais sa grande façade méridionale sera désormais masquée par le nouveau bâtiment, mis en chantier dès 1715 d'après les plans et sous la direction de Germain Boffrand. Faute de moyens financiers, seul le gros œuvre est achevé lorsque meurt, une vingtaine d'années plus tard, en 1736, le duc du Maine qui, n'ayant jamais pu bénéficier du nouveau logis, n'a que très rarement séjourné à l'Arsenal. Le comte d'Eu, son frère, lui succède. Il laisse une partie de ce bâtiment — inachevée, sans portes, ni fenêtres, ni aucun décor intérieur — à la disposition des maçons Destriches, père et fils, qui n'ont pas été payés pour leur travail. Ils y aménagent un logement, à leurs frais. Vers 1745 un architecte nommé Dauphin reçoit également l'autorisation d'y loger, et orne avec un goût remarquable une série de salons dont le décor harmonieux et élégant est toujours en place. D'autres pièces sont attribués à l'intendant du comte d'Eu, nommé Limanton, auquel succède en 1756 le marquis de Paulmy d'Argenson. La charge de grand maître de l'artillerie ayant été supprimée l'année précédente, ce dernier, désormais chargé d'administrer l'Arsenal est nommé gouverneur de l'Arsenal et bailli d'épée de l'artillerie de France. Il expulsera progressivement les occupants jusqu'à obtenir, en 1765, la mise à sa disposition de l'ensemble des cent quarante et une pièces du premier étage, et trente et une pièces et cabinets au deuxième étage[1]

La Bibliothèque

La bibliothèque de l'Arsenal vue du boulevard Morland. Dessin de Charles Ransonnette (1848).

Antoine-René de Voyer de Paulmy d'Argenson (1722-1787), marquis de Paulmy, puis d’Argenson, installé en 1757 dans la résidence du Grand Maître de l’Artillerie, au cœur de l’ancien Arsenal de Paris, possédait une riche collection personnelle, notamment de manuscrits médiévaux et d’estampes va constituer une vaste bibliothèque. En 1786, il avait également fait l’acquisition de la collection du duc de La Vallière et, de son vivant, voulut que les savants eussent toute liberté de venir profiter de ses richesses. Ambitionnant de faire de l’Arsenal une seconde Bibliothèque royale, il la revendit en entier, en 1785, au comte d’Artois. Ainsi, le roi avait sa bibliothèque, qui était publique, et avec laquelle aucune autre assurément ne pourrait rivaliser pour le nombre et l’importance des volumes mais, grâce à ces dispositions, le frère du Roi aurait aussi sa bibliothèque, qui, comme l’autre, serait publique. L'abbé de Vauxcelles, déjà au service du prince, assura l'administration de cette collection.

Louis Ulbach, dit Ferragus, qui fut bibliothécaire à l'Arsenal, et y mourut en 1889.

Ă€ la RĂ©volution, le peuple se porta en foule Ă  l’Arsenal pour la dĂ©truire lorsqu’il apprit, le jour de la Bastille, qu’il y existait une bibliothèque appartenant au comte d’Artois. Ne sachant comment rĂ©sister Ă  un pareil assaut, le bibliothĂ©caire ordonna au Suisse de changer de livrĂ©e et de prendre l’habit de la maison du Roi. Lorsque le Suisse ouvrit la porte, le peuple se retira, Ă  la vue de la livrĂ©e du Roi, en croyant s’être trompĂ©. Les dĂ©crets des et (prononçant la confiscation et la vente au profil de la nation de tous les biens mobiliers et immobiliers des personnes ayant quittĂ© la France et servant dans les armĂ©es ennemies) firent du dĂ©pĂ´t de livres de l’Arsenal un bien national, qui forma, dès lors, le huitième « dĂ©pĂ´t national littĂ©raire Â» de Paris. On y dĂ©posa les archives de la Bastille et de nombreuses Ĺ“uvres de qualitĂ© provenant des grandes abbayes parisiennes. Le 9 florĂ©al an V (), elle fut ouverte au public.

Redécouverte au XIXe siècle par Charles Nodier, qui en fut le bibliothécaire[2], sa notoriété ne cessa de croître, notamment grâce au Cénacle dont elle constitua le quartier général, ainsi que son fonds, enrichi par l’obligation du dépôt légal en 1841. Au XIXe siècle, les collections furent de plus en plus orientées vers la littérature, en particulier le théâtre, avec l'arrivée de José-Maria de Heredia puis de Paul Cottin, sous l'administration d'Eugène Thierry. C'est ainsi qu'en 1925 elle accueille la riche collection Rondel dédiée aux arts de la scène et aux débuts du cinéma. En 1934, elle est rattachée à la Réunion des bibliothèques nationales, puis devient en 1977 un département de la Bibliothèque nationale (Bibliothèque nationale de France depuis 1994)[3]. Le fonds Rondel, accru par d'autres collections sur le théâtre et les arts de la scène, ayant pris de l'importance, est créé en 1976 un département des arts du spectacle. Les collections correspondantes demeurent à l'Arsenal jusqu'en 2004, date à laquelle le département rejoint le site Richelieu.

La Bibliothèque de l’Arsenal aujourd’hui

L’Arsenal possède aujourd’hui plus d'un million de documents (dont 150 000 volumes datant d’avant 1880), un peu plus de 15 000 manuscrits, 100 000 estampes, et 3 000 cartes et plans. Elle est riche de plus de 150 000 titres de pĂ©riodiques clos et de quelque 250 revues vivantes. Sa politique d’acquisitions se concentre sur la littĂ©rature française du XVIe au XIXe siècle, les publications en rapport avec les archives et les fonds dĂ©jĂ  en place, la bibliophilie, l’histoire du livre et la reliure, ainsi que l’histoire de l’Arsenal lui-mĂŞme et de ses occupants[3].

La bibliothèque est classée monument historique en 2003[4].

Les grands fonds

Façade (détail) de la bibliothèque de l'Arsenal.
Intérieur de la bibliothèque de l'Arsenal.
  • Archives de la Bastille : datant de 1660, elles comprennent les registres d’écrou des dĂ©tenus (y compris ceux du marquis de Sade et d’autres prisonniers cĂ©lèbres), les archives de la Lieutenance de police de Paris, de la Chambre de l’Arsenal et de la Chambre du Châtelet, les documents privĂ©s des dirigeants de la Bastille, et une partie des papiers de la famille royale.
  • Fonds Prosper Enfantin : le disciple du saint-simonien Prosper Enfantin, Paul-Mathieu Laurent, dit « Laurent de l’Ardèche », qui fut administrateur de la bibliothèque de 1853 Ă  1871, procĂ©da Ă  l’acquisition, en 1865, des documents de son maitre, qui constituent une riche source pour l’histoire du saint-simonisme.
  • Fonds Lambert : en 1969, Pierre Lambert, un libraire qui avait consacrĂ© sa vie Ă  collectionner des objets liĂ©s Ă  l’écrivain Joris-Karl Huysmans, a lĂ©guĂ© sa collection Ă  la bibliothèque. Elle comprend des manuscrits, lettres, Ĺ“uvres ayant appartenu Ă  Huysmans, et des Ă©ditions originales de ses Ĺ“uvres.
  • Fonds Louis-SĂ©bastien Mercier : en 1967, l’Arsenal a acquis les papiers de Louis-SĂ©bastien Mercier, surtout connu pour ses descriptions de Paris, et qui a eu une grande influence sur l’évolution du théâtre et en particulier sur le drame rĂ©aliste. Le fonds comprend des documents biographiques et la correspondance, des articles, des notes, des manuscrits du Nouveau Paris, ses pièces de théâtre et ses Ĺ“uvres poĂ©tiques et philosophiques.
  • Fonds Lacroix : Paul Lacroix, dit « le Bibliophile Jacob », a travaillĂ© plusieurs annĂ©es Ă  l’Arsenal. Après sa mort en 1884, la bibliothèque a acquis la plupart de ses papiers personnels, y compris sa collection d’autographes, contenus dans des lettres d’écrivains, de musiciens et des philosophes prĂ©cĂ©dant et pendant l’époque de Lacroix.
  • Fonds PĂ©ladan : en 1936, l’Arsenal a acquis tous les papiers de JosĂ©phin Peladan, un Ă©crivain spiritualiste fascinĂ© par les sciences occultes qui fonda sa propre Ă©glise en 1891. La bibliothèque est particulièrement riche en documents occultes, notamment avec les manuscrits originaux de Le livre d'Abramelin le Mage et le Livre de PĂ©nitence d'Adam.
Pedro II, l'Empereur de Brésil, visitant la Bibliothèque de l'Arsenal (L'Univers illustré, Levy (Paris), nº 879, 27 janvier 1872).
  • Fonds JosĂ©-Maria de Heredia : les filles du poète JosĂ© MarĂ­a de Heredia, qui fut bibliothĂ©caire de l’Arsenal de 1901 jusqu’à sa mort en 1905, ont fait don Ă  la bibliothèque d’un fonds de portraits, de manuscrits, d’œuvres et de lettres concernant leur père et elles-mĂŞmes. L’une d’elles, Marie de RĂ©gnier, a lĂ©guĂ© sa bibliothèque de l’Arsenal, qui est Ă©galement très riche en Ă©lĂ©ments liĂ©s Ă  l’écrivain Pierre LouĂżs, qui Ă©tait le gendre de Heredia.
  • Fonds Georges Douay : l’homme du monde, amateur de théâtre, et compositeur de chansons et d’opĂ©rettes, Georges Douay, a lĂ©guĂ© Ă  l’Arsenal en 1919 le fonds (principalement d’imprimĂ©s) sur le théâtre français du XVIe au dĂ©but du XXe siècle, qu’il avait rassemblĂ©.
  • Archives Parlementaires : les imprimĂ©s officiels de l’AssemblĂ©e nationale Ă  partir de 1789.
  • Affiches : la collection de gravures contient des portraits, de nombreuses caricatures de la RĂ©volution et la Restauration, une sĂ©rie de topographiques de plans et de vues de villes et de grandes sĂ©ries des Ă©coles italiennes, allemandes et anglaises du XVIIIe siècle acquises par Paulmy cours de ses voyages dans toute l’Europe.
  • Cartes et plans : Paulmy acquis une sĂ©rie des plans de reconnaissance militaires rĂ©alisĂ©es pour son oncle, le comte d’Argenson, qui Ă©tait ministre de la guerre.
  • Musique : la collection de manuscrits et de solfège de l’Arsenal provient presque exclusivement du XVIIIe siècle, Ă  l’exception de quelques manuscrits mĂ©diĂ©vaux. La plupart de la collection de musique a Ă©tĂ© collectĂ©e par Paulmy.

Notes et références

  1. Bulletin de la Société de l'histoire de Paris et de l'Ile-de-France : ''La construction de l'Arsenal au XVIIIe siècle et Germain Boffrand, Paris, H. Champion, E. Champion, Librairie d'Argences, 1931, pp. 78ff (voir en ligne).
  2. Didier Barrière, « Mais que faisait donc le bibliothécaire Charles Nodier à l’Arsenal ? », Bulletin du bibliophile, no 2,‎ , p. 286‑318.
  3. « Présentation de la Bibliothèque de l'Arsenal », sur Site officiel de la BnF (consulté le ).
  4. « Pavillon de l'Arsenal, actuellement bibliothèque de l'Arsenal », notice no PA00086239, base Mérimée, ministère français de la Culture

Annexes

Bibliographie

Par ordre chronologique de publication :

  • Henry Martin, Histoire de la Bibliothèque de l’arsenal, Paris, E. Plon, Nourrit et Cie, 1900.
  • François Rousseau, « Un ancien bĂ©nĂ©dictin sous-bibliothĂ©caire Ă  l'Arsenal pendant la RĂ©volution », dans Bulletin de la SociĂ©tĂ© de l'histoire de Paris et de l'ĂŽle-de-France, 52e annĂ©e, 1925, p. 82-84 (lire en ligne)
  • Jean-Pierre Babelon, « Le Palais de l'Arsenal Ă  Paris - Étude architecturale et essai de rĂ©pertoire iconographique critique », dans Bulletin monumental, tome 128, no 4, 1970, p. 267-310 (lire en ligne)
  • Sous la direction de Jean-Marie PĂ©rouse de Montclos, Le guide du patrimoine Paris, Hachette, Paris, 1994, p. 101-102, (ISBN 978-2-01-016812-3)

Articles connexes

Liens externes

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