Accident ferroviaire de Brétigny-sur-Orge
L’accident ferroviaire de Brétigny-sur-Orge est un déraillement survenu le en gare de Brétigny, sur le territoire de la commune de Brétigny-sur-Orge (Essonne), à 31 km au sud de Paris.
Accident ferroviaire de Brétigny-sur-Orge | |||||
Voiture renversée à la suite du déraillement. | |||||
Caractéristiques de l'accident | |||||
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Date | |||||
Type | DĂ©raillement | ||||
Causes | DĂ©faillance d'une Ă©clisse de la voie | ||||
Site | Gare de Brétigny | ||||
Coordonnées | 48° 36′ 26″ nord, 2° 18′ 08″ est | ||||
Caractéristiques de l'appareil | |||||
Type d'appareil | Train de voyageurs Intercités | ||||
Compagnie | SNCF | ||||
No d'identification | 3657 | ||||
Phase | Traversée d'une gare sans arrêt | ||||
Passagers | 385 | ||||
Morts | 7 | ||||
Blessés | 70 dont 9 graves | ||||
GĂ©olocalisation sur la carte : Essonne
GĂ©olocalisation sur la carte : ĂŽle-de-France
GĂ©olocalisation sur la carte : France
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À la suite de la défaillance d'une éclisse, plusieurs voitures d'un train de voyageurs Intercités reliant Paris-Austerlitz à Limoges-Bénédictins déraillent, entraînant la mort de sept personnes.
En 2022, la SNCF est condamnée pour homicides et blessures involontaires.
DĂ©roulement
DĂ©raillement
À 17 h 11[1], alors que le train s'apprête à traverser la gare de Brétigny sur la voie 1 (passant à droite du quai no 3), plusieurs témoins à bord constatent un choc lors du franchissement d'une traversée jonction double. Le train déraille et se sépare en deux parties entre les voitures 4 et 5. Celui-ci roule alors à 137 km/h, soit en dessous de la vitesse limite autorisée sur cette voie qui est de 150 km/h[1] - [2]. Alors que la locomotive et les premières voitures continuent de rouler sur la voie 1 lors du freinage d'urgence sur une distance de 400 mètres jusqu'à l'arrêt total, la voiture no 4 se couche sur son flanc droit. L'arrière de la rame est dévié à gauche sur la voie 3 par l'embranchement simple qui suit la traversée jonction double. La voiture no 6 se retrouve en travers et fauche le quai de la voie 3 sur plusieurs dizaines de mètres, se faisant transpercer par un longeron de la marquise du quai, alors que la voiture no 5, qui présente également des traces de coups sur son flanc gauche, finit par se coucher sur la droite le long du quai de la voie 2.
Le président de la République François Hollande, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault et plusieurs ministres, dont le ministre délégué chargé des Transports Frédéric Cuvillier, se rendent sur place dans les heures suivant l'accident[3]. Le président de la SNCF Guillaume Pepy se rend à Brétigny dès la première heure pour constater les dégâts et s'assurer du plan de secours mis en place[4] - [5]. Guillaume Pepy rend hommage aux cheminots « qui ont permis d'arrêter le train et d'éviter qu'il ne percute un autre train qui venait en sens inverse[6]. »
Secours
À 17 h 23, le dispositif Orsec nombreuses victimes, anciennement appelé « plan rouge », est déclenché et les pompiers arrivent sur les lieux, pendant que la SNCF interrompt le trafic sur la ligne entre Paris-Austerlitz, Étampes et Dourdan[7]. Le plan Orsan est déclenché également dans de nombreux hôpitaux franciliens. Selon les témoignages, la solidarité a été immédiate entre les voyageurs et l'arrivée des secours rapide. Des agents de la SNCF brisent les vitres pour permettre aux voyageurs de sortir[8].
D'importants moyens de secours sont dépêchés sur place[9] - [10].
Vols
Des témoignages concordants indiquent qu'il y aurait des scènes de vols sur les lieux de l'accident. Les faits sont confirmés par le rapport de synthèse de la Direction centrale des Compagnies républicaines de sécurité (DCCRS). Le syndicat de police Alliance fait également état de scènes de vol avec un groupe de jeunes qui aurait dépouillé les victimes[11] - [12]. Un an plus tard, l'enquête montre que « trois ou quatre » vols ont bien eu lieu mais qu'il ne s'agit pas de bandes de jeunes ou de marginaux mais d'un opportuniste solitaire[13].
Victimes
L'accident a fait, selon le rapport de la sécurité civile, 7 morts et 70 blessés, dont 9 graves, et 227 impliqués[14]. Quatre personnes ont été fauchées sur le quai de la ligne C du RER et sont originaires de l'Essonne : deux jeunes hommes de 19 et 23 ans venant d'Étampes ainsi qu'un couple d'octogénaires habitant Brétigny-sur-Orge. Une jeune femme de 27 ans et un sexagénaire du Limousin sont, eux, morts à bord du train. La septième, une femme de 66 ans hospitalisée en région parisienne, voyageait également à bord du train. La plupart des blessés étaient à bord du train, certaines personnes sur le quai d'en face ont été blessées par des projections de ballast. Du au , six cents demandes de soutien de la part de victimes et de proches sont reçues par la cellule mise en place par la SNCF et RFF. En mémoire des victimes, une minute de silence est observée dans toutes les gares et les trains de France le à midi[8] - [15] - [16].
Conséquences sur le trafic
La gare de Brétigny a été fermée pendant les trois jours suivant l'accident, sur décision du président de la République François Hollande. De ce fait, l'exploitation de la ligne C du RER est interrompue au sud, les usagers étant invités à prendre des itinéraires de substitution par les lignes U, N et D. Quelques trains sont déviés par la gare de Nevers pour rejoindre Limoges[17].
Causes
Trois enquêtes sont ouvertes, par le parquet d'Évry, par le bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) du ministère des Transports et par la SNCF. Le train semble avoir déraillé au passage d'un aiguillage, 200 m en amont de Brétigny. Le ministre des Transports, Frédéric Cuvillier, déclare que « [c]e n'est pas un problème humain » et écarte la responsabilité du conducteur du train[18]. Les voies avaient été inspectées huit jours avant l'accident[19].
Lors d'une conférence de presse le lendemain du drame, les dirigeants de la SNCF expliquent que la défaillance d'une éclisse serait la cause de l'accident[20], hypothèse qui confirmée lors d'une troisième conférence de presse de la SNCF, photos à l’appui[21]. Selon Guillaume Pepy, « l'éclisse s'est désolidarisée [des rails] et s'est logée au milieu de l'aiguillage », ce qui aurait provoqué le déraillement[22], indiquant par ailleurs que « sur le dernier essieu de la 3e voiture, il y a bien une trace de choc avec l'éclisse »[23].
L'éclisse a pivoté autour d'un boulon[24]. Le rapport du BEA-TT[25] explique l'accident par « une fissuration qui s'est développée depuis plusieurs mois dans l'âme de l'about de cœur de traversée incriminé, jusqu’à ce qu'un morceau s’en détache, entrainant des efforts anormaux dans le troisième boulon du joint éclissé considéré. Sous ces efforts, la tête de ce boulon a rompu » [quelques semaines avant l’accident]. « Les trois autres boulons ont ensuite cédé, le premier en se dévissant, les deux autres par rupture de leur tête »[25] peu avant l’accident.
Le président de la SNCF a indiqué que la société de transport « […] se considère comme responsable : elle est responsable de la vie de ses clients » et annonce une campagne de vérification de tous les équipements similaires, près de 5 000 en tout, en place sur le reste du réseau ferré national français dont elle assure l'entretien[22].
L'ensemble du train est évacué quelques jours après l'accident à l'exception des deux voitures les plus abîmées qui ont été placées sur des voies de débords, leur état ne permettant pas un déplacement aisé[26]. Elles sont évacuées par la route trois mois plus tard, pour être entreposées dans un autre lieu durant toute l'instruction[26].
Le , des journaux font état de l'avis d'un enquêteur indépendant en accidentologie, Robert Hazan, qui met en cause la maintenance dans le déraillement du train[27].
Le , les experts désignés par la justice estiment que « la cause principale est un déficit de qualité de maintenance » en signalant « un état de délabrement - jamais vu par ailleurs - de l'armement de cet appareil de voie »[28], situé en zone à risque (en entrée de gare) à fort trafic (classée UIC2) et « franchissable en voie directe à 150 km/h ». Ils estiment que dans ces conditions « une dérogation aurait dû être mise en place pour qu'une vérification des liaisons éclissées avec démontage eut lieu chaque année ». Les experts soulignent que « nous ne sommes pas en présence d'un acte de malveillance, et que le processus ayant abouti à la désagrégation complète de l'assemblage s'est bien au contraire étalé sur plusieurs mois et a concerné l'ensemble de l'appareil de voie incriminé, sur lequel ont été relevées plus de 200 anomalies de divers degrés de criticité »[29].
Suites judiciaires
EnquĂŞte
Le , quatorze mois après l'accident, Réseau ferré de France (RFF) est mis en examen pour « homicides et blessures involontaires ». La SNCF est également convoquée devant les juges le en vue d'une mise en examen pour les mêmes chefs d'inculpation[30].
Le , le journal Le Monde indique que les trois juges d’instruction chargés de l'enquête sur l’accident avaient demandé au début de l'année 2015 à être dessaisis du dossier faute de moyens suffisants. Le parquet s'y oppose pour éviter de devoir réexaminer l'ensemble du dossier[31].
Le , trois cheminots chargés de la surveillance des voies au moment du déraillement sont placés sous le statut de témoin assisté dans le cadre de l'enquête judiciaire [32] - [33].
En , le journal Le Figaro révèle des éléments du dossier d'instruction. Selon le journal, la retranscription d'écoutes téléphoniques de personnes travaillant au pôle juridique de la SNCF montrerait que la société aurait tenté de manipuler les enquêteurs. Ainsi, une juriste de la SNCF aurait recommandé aux agents amenés à témoigner devant les enquêteurs de n’apporter aucun document lors de leur audition. Toujours selon le journal, le dossier d'instruction mettrait en lumière le fait que la SNCF aurait eu dans les mains le rapport du BEA-TT trois mois avant sa diffusion[34] - [35] - [36].
Le , de nouveaux éléments du dossier sont révélés par Mediapart. Des écoutes judiciaires montreraient comment la direction de la SNCF a, pendant plusieurs mois après l'accident, refusé de réduire la vitesse sur des tronçons dangereux, ceci afin de cacher sa connaissance du mauvais état des voies en question[37].
Le , le journal Le Parisien révèle que, plusieurs mois avant l'accident, le responsable de l'infrastructure pour l'Île-de-France avait signalé un nombre insuffisant d'agents d'entretien des voies à sa hiérarchie, mais sans résultats tangibles[38].
Procès
Le procès se tient devant le tribunal correctionnel d'Évry, du au [39] - [40]. Au terme de deux mois de procès, le procureur de la République requiert la peine maximale contre la SNCF, soit 450 000 euros, pour homicides et blessures involontaires, en récidive légale (à la suite d'un accident ferroviaire survenu à Troyes, pour lequel la SNCF a été condamnée en 2013). Il requiert également la relaxe de SNCF Réseau et du cheminot mis en cause aux côtés de la maison-mère[41].
Le , le tribunal condamne la SNCF à 300 000 euros d'amende pour homicides et blessures involontaires en état de récidive légale mais relaxe un cadre cheminot et SNCF Réseau (successeur de Réseau ferré de France)[42].
Galerie de photographies
- La locomotive BB 26005 en tĂŞte du train no 3657.
- Les voitures nos 3 et 4.
- Le dessous de la voiture no 4 couchée sur les rails.
- La locomotive et les quatre premières voitures du train no 3657.
- La place de la gare le .
- La grue qui a procédé au relevage des voitures accidentées par-dessus le bâtiment de la gare.
Notes et références
- « Brétigny : la SNCF s'est trompée sur l'heure du déraillement du train », sur LEFIGARO, (consulté le )
- Benoît Hopquin, « Accident de train en Essonne : au moins six morts, des dizaines de blessés graves », sur Le Monde, (consulté le ).
- « Déraillement mortel de train : une collision évitée », sur Libération, (consulté le ).
- « EN DIRECT. Brétigny : une collision avec un autre train a été évitée », sur Le Parisien, (consulté le ).
- « Accident de train mortel en région parisienne : 200 Limougeauds rentrent en bus », sur L'Écho républicain, (consulté le ).
- « Brétigny : une collision "avec un autre train" a été évitée », sur Europe 1, (consulté le ).
- Géraldine Drot, « Catastrophe de Brétigny », sur croix-rouge.fr, (consulté le ).
- Benoît Hopquin, « Brétigny-sur-Orge : "un spectacle effroyable" », Le Monde, (consulté le ).
- « Brétigny: 300 pompiers mobilisés », Le Figaro, (consulté le ).
- « Brétigny-sur-Orge: «J'ai vu la poutre d'une caténaire rentrer à l'intérieur de la rame» », Le Figaro, (consulté le ) : « Des véhicules sillonnent le site en permanence : Croix-Rouge, Protection civile de Paris, police, Samu et les sapeurs-pompiers de l'Essonne. ».
- Jean-Michel Décugis et Aziz Zemouri, « EXCLUSIF. Brétigny : des scènes de vol et de caillassage ont bien eu lieu », sur Le Point, (consulté le ).
- « Brétigny-sur-Orge : «T'as trouvé quoi dans les bagages ?» », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
- « Accident de Brétigny : des victimes ont bien été volées », sur rtl.fr, .
- « Publication d'un retex sur l'accident ferroviaire de Brétigny-sur-Orge », sur pompiers.fr, article du 8 octobre 2014 (consulté le ).
- « Accident de train à Brétigny : revivez l'événement minute par minute », sur Le Nouvel Observateur, (consulté le ).
- « Catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge : une minute de silence sera observée à midi dans toutes les gares et les trains », sur France Télévision, (consulté le ).
- « Brétigny : le trafic ferroviaire fortement perturbé », sur Le Parisien, (consulté le ).
- « Déraillement de Brétigny : Cuvillier écarte l'erreur humaine », Le Parisien, (consulté le ).
- Anne Jouan, « Déraillement de Brétigny : la SNCF doit revoir son management », sur le site internet du journal Le Figaro, (consulté le ).
- [PDF] « Schéma explicatif du détachement de l'éclisse », sur http://www.sncf.com, (consulté le ).
- « Brétigny : l'éclisse, pièce de l'aiguillage, est bien la cause du déraillement », Le Monde.fr, (consulté le ).
- « Accident de Brétigny : la défaillance d'une pièce de l'aiguillage a provoqué le déraillement du train, selon la SNCF », sur France Télévision (consulté le ).
- Brétigny : Guillaume Pepy confirme la défaillance d'une éclisse, sur itele.fr, le 14 juillet 2013. Consulté le 8 juillet 2014.
- « Brétigny: le basculement de l'éclisse "à l'origine de la catastrophe" (procureur) », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
- [PDF] BEA-TT Bureau d’enquêtes sur les accidents de transport terrestre – Rapport d’étape sur le déraillement du train Intercités n° 3657 le 12 juillet 2013 à Brétigny-sur-Orge (91), janvier 2014.
- « Catastrophe de Brétigny : les deux derniers wagons évacués », article du Parisien du 14 octobre 2013, consulté le 16 octobre 2013.
- « Accident ferroviaire à Brétigny-sur-Orge : la maintenance pointée du doigt », Le Monde.fr, (consulté le ).
- Accident de Brétigny : les experts judiciaires pointent un « état de délabrement jamais vu », Le Figaro, 7 juillet 2014.
- Déraillement de Brétigny: "un état de délabrement jamais vu", Challenges, 7 juillet 2014.
- « Accident de Brétigny : RFF mis en examen », sur le site du journal Le Monde, (consulté le ).
- « Accident ferroviaire de Brétigny-sur-Orge : les juges ont demandé à être dessaisis », sur le site du journal Le Monde, (consulté le ).
- « Brétigny : trois cheminots placés sous le statut de témoin assisté », sur lepoint.fr, (consulté le ).
- « Accident de Brétigny : trois cheminots placés sous statut de témoin assisté », sur Europe 1 (consulté le ).
- Anne Jouan, « Accident de Brétigny : ce que la SNCF aurait préféré cacher à la justice », Le Figaro, (consulté le ).
- « La SNCF aurait dissimulé des éléments sur l'accident de Brétigny », Capital, (consulté le ).
- « La SNCF aurait sciemment dissimulé des éléments sur Brétigny », Les Echos, (consulté le ).
- Yann Philippin, « SNCF: le nouveau scandale de Brétigny », Médiapart, .
- Nicolas Jacquard, « Accident de Brétigny : des documents accablants pour la SNCF », sur leparisien.fr, (consulté le ).
- Florian Garcia, « Catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge : le procès se tiendra du 25 avril au 17 juin 2022 », sur leparisien.fr, (consulté le ).
- « Catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge : près de deux mois de procès », sur lemonde.fr, (consulté le ).
- « Catastrophe de Brétigny : la SNCF fixée sur son sort le 26 octobre », sur Les Echos, (consulté le ).
- Agence France-Presse, « Catastrophe de Brétigny-sur-Orge : la SNCF condamnée à 300 000 euros d’amende », Le Monde, (consulté le ).
Voir aussi
Articles connexes
Lien externe
- Bureau d’enquêtes sur les accidents de transport terrestre, Rapport d’étape sur le déraillement du train Intercités n° 3657 le 12 juillet 2013 à Brétigny-sur-Orge (91), , 118 p. (lire en ligne [PDF])