Ămail dentaire
L'Ă©mail est une structure minĂ©ralisĂ©e d'origine Ă©pithĂ©liale qui recouvre la couronne dentaire des vertĂ©brĂ©s actuels et fossiles afin de la protĂ©ger des diffĂ©rentes agressions. L'amĂ©logenĂšse (ou formation de l'Ă©mail) est assurĂ©e par les amĂ©loblastes (en), cellules sĂ©crĂ©trices qui sont dĂ©truites lors de l'Ă©ruption de la dent dans la cavitĂ© buccale. L'Ă©mail ne pouvant se rĂ©gĂ©nĂ©rer en cas d'altĂ©ration, est dotĂ© par compensation d'une organisation tridimensionnelle complexe et d'un fort degrĂ© de minĂ©ralisation, qui en fait la structure la plus dure et rĂ©sistante de l'organisme, d'oĂč son intĂ©rĂȘt en mĂ©decine lĂ©gale et en palĂ©ontologie. L'Ă©mail est la structure dentaire (et non le tissu car celui ci n'est pas vascularisĂ©, ni innervĂ© mais minĂ©ralisĂ©, bien que trĂšs souvent mĂȘme en clinique on parle de tissu amĂ©laire)[1] normalement visible, supportĂ© par une couche sous-jacente de dentine. Avec la dentine, le cĂ©ment et la pulpe dentaire, il constitue un des quatre principaux tissus qui constituent la dent.
L'émail est composé de trois phases : la phase minérale représente 93-96 % en poids[2], la phase organique 0,4-5 %[3] et la phase aqueuse 3-7 % (le %age d'eau étant en moyenne de 12 % pour la dentine et 33 % pour l'os)[4]. Sa partie minérale est principalement composée d'un réseau de cristaux d'hydroxyapatite (Ca10(PO4)6(OH)2). Le fort pourcentage de minéraux dans l'émail est responsable non seulement de sa rigidité et de sa dureté supérieure au tissu osseux, mais aussi de sa friabilité. La dentine, qui est moins minéralisée et moins friable, est indispensable comme support et compense les faiblesses de l'émail.
cementum = cément
La couleur de l'émail va du jaune au gris clair. Comme l'émail est semi-translucide et opalescent, la couleur jaune orangée de la dentine (ou de tout matériau de réparation dentaire) sous l'émail affecte fortement l'apparence de la dent.
L'émail varie en épaisseur sur la surface de la dent. Il est plus épais au niveau du sommet de la couronne dentaire (plus de 2,5 mm) et plus mince sur la jonction émail-cément (JEC).
Contrairement au cĂ©ment et aux os, la matrice organique de l'Ă©mail ne contient pas de collagĂšne ni de kĂ©ratine ; elle possĂšde Ă la place des glycoprotĂ©ines riches en tyrosine (amĂ©logĂ©nines, Ă©namĂ©lines (en), tuftelines (en)âŠ) dont le rĂŽle est, pense-t-on, d'aider Ă la croissance de l'Ă©mail en servant de cadre de construction, entre autres fonctions. Cette matrice organique contient aussi des polysaccharides.
L'épaisseur, la composition isotopique de l'émail[5] et l'analyse de la micro-usure dentaire observée à l'échelle microscopique sur l'émail permet aux paléontologues de détecter des différences en fonction de la composition du régime alimentaire des vertébrés[6].
Structure
L'émail est la substance la plus dure du corps humain[7]. Surtout composé de phosphate de calcium et de carbonate de calcium, comprenant moins de 1 % de matiÚres organiques[7], il a une organisation tridimensionnelle complexe, formée par la juxtaposition de structures élémentaires appelées cordons, bùtonnets ou prismes d'émail. Chaque prisme minéralisé de 4 à 8 ”m de diamÚtre traverse l'émail, de la jonction émail-dentine jusqu'à la surface de la dent[8].
Ces prismes sont des cristaux d'hydroxyapatite entourés par une gaine de nature organique, imbriqués les uns dans les autres. En coupe transversale, ils ressemblent à un trou de serrure, avec la partie supérieure orientée vers la couronne de la dent et la base orientée vers la racine.
La disposition des cristaux Ă l'intĂ©rieur de chaque prisme est trĂšs complexe. Les amĂ©loblastes (en) (ou adamantoblastes), cellules qui initient la formation de l'Ă©mail, et les prolongements de Tomes influent tous les deux sur la forme des cristaux. Les cristaux d'Ă©mail de la tĂȘte du prisme sont orientĂ©s parallĂšlement au grand axe de ce dernier alors que ceux de la base divergent lĂ©gĂšrement du grand axe.
L'arrangement dans l'espace des prismes d'émail est compris plus clairement que leur structure interne. Les prismes d'émail sont situés en rang le long de la dent, et à l'intérieur de chaque rang, le grand axe du prisme est généralement perpendiculaire à la dentine sous-jacente. Dans les dents définitives, les prismes d'émail proches de la jonction émail-cément (JEC) basculent légÚrement vers la racine de la dent.
La zone situĂ©e autour du prisme d'Ă©mail est constituĂ©e d'Ă©mail interprismatique. Ce dernier a la mĂȘme composition que l'Ă©mail en prisme ; on fait cependant une distinction histologique entre les deux car l'orientation des cristaux est diffĂ©rente dans chaque cas. La limite oĂč les cristaux d'Ă©mail prismatique et les cristaux d'Ă©mail interprismatique se touche est appelĂ©e gaine prismatique.
L'étude des caractéristiques des microstructure de l'émail dentaire (stries de Retzius, bandes de Hunter-Schreger) permet d'évaluer les modalités du développement dentaire. Les stries de Retzius (en) sont des bandes qui apparaissent sur l'émail quand il est observé en coupe transversale au microscope. Formées par la variation du diamÚtre des prolongements de Tomes, ces bandes attestent de la croissance de l'émail de façon similaire aux anneaux de croissance d'un arbre. Les perikymaties sont des sillons peu profonds correspondants à la ligne formée par les stries de Retzius à la surface de l'émail. Plus sombre que les autres bandes, la ligne néonatale sépare l'émail formé avant et aprÚs la naissance. Les bandes de Hunter-Schreger (en) sont marquées par la succession de bandes parallÚles transversales claires (parazonies) et sombres (diazonies) dues à l'orientation des prismes dans la coupe.
DĂ©veloppement
La formation de l'émail est l'une des étapes du processus global de formation d'une dent. Quand on observe les tissus de la dent en développement au microscope, on peut distinguer différents amas de cellules, comme l'organe adamantin (Enamel organ), la lame dentaire et la papille dentaire. Les étapes généralement reconnues du développement de la dent sont le stade bourgeon, le stade capuchon, le stade cloche et le stade couronne (ou de calcification). L'émail en formation n'est visible qu'à partir du stade couronne.
On sait depuis le milieu des années 1930 que La phase minérale primaire [~ 96% en poids (% en poids)] de l'émail est constituée de cristaux de carbonate d'apatite fluorés non stoechiométriques[11] - [12] dont les arrangements cristallins trÚs particuliers assurent à la dent une grande résistance aux chocs et à l'usure [13] - [14].
L'amélogenÚse (ou formation de l'émail) a lieu aprÚs le début de l'apparition de la dentine, grùce à des cellules appelées améloblastes. L'émail humain se forme à un taux d'environ 4 ”m par jour, débutant au niveau de la future localisation des cupsides de la dent, au 3e ou 4e mois de grossesse environ. La création de l'émail est complexe, et se déroule en deux étapes intimement reliées : 1) le stade sécrétoire, qui implique des protéines et une matrice organique formant un émail qui se minéralise immédiatement (émail partiellement minéralisé, 30 %) ; 2) un stade de maturation, qui implique le retrait de cette matrice suivi d'une déposition minérale accrue[15].
Stade sécrétoire
Les amĂ©loblastes sont des cellules polarisĂ©es en forme de colonne. Les protĂ©ines de l'Ă©mail sont produites au niveau du reticulum endoplasmique granuleux de ces cellules, puis relĂąchĂ©e dans le milieu extracellulaire oĂč elles forment ce que l'on appelle la matrice de l'Ă©mail. Cette matrice sera alors partiellement minĂ©ralisĂ©e par une enzyme, la phosphatase alcaline. Quand cette premiĂšre couche est formĂ©e, les amĂ©loblastes s'Ă©loignent de la dentine, permettant le dĂ©veloppement des prolongements de Tomes sur la partie apicale de la cellule. La formation de l'Ă©mail continue autour des amĂ©loblastes adjacents (ce qui induit la crĂ©ation d'une surface cloisonnĂ©e, ou « puits », qui abrite les prolongements de Tomes) et aussi autour de l'extrĂ©mitĂ© de chaque prolongement de Tomes (ce qui induit le dĂ©pĂŽt d'une matrice de l'Ă©mail Ă l'intĂ©rieur de chaque puits). La matrice Ă l'intĂ©rieur du puits deviendra Ă terme le prisme d'Ă©mail, et les cloisons deviendront Ă terme l'Ă©mail interprismatique. Le seul facteur de distinction entre les deux est l'orientation des cristaux d'hydroxyapatite.
en=Ă©mail
d=dentine
od=odontoblates
p=papille dentaire
Stade de maturation
les améloblastes transportent des substances utilisées dans la formation de l'émail. L'aspect le plus notable de cette phase au niveau tissulaire est que ces cellules deviennent striées, ou ont une bordure ondulée. Ceci prouve que les améloblastes ont changé leur fonction : de productrice (cf la phase de sécrétion), elles deviennent transporteuses. Les protéines utilisées pour le processus final de minéralisation composent la majorité du matériel transporté. Les protéines impliquées les plus notables sont les amélogénines, améloblastines, enamélines et « tuft proteins ». Pendant ce processus, les amélogénines et améloblastines sont éliminées aprÚs usage, mais les énamélines et « tuft proteins » sont laissées dans l'émail. à la fin de cette phase, la minéralisation de l'émail est achevée.
En fin de maturation, avant que la dent apparaisse dans la bouche, les améloblastes se décomposent.
Par consĂ©quent l'Ă©mail, contrairement Ă la plupart des autres tissus du corps, n'a aucun moyen de se renouveler. AprĂšs une destruction de l'Ă©mail par action des bactĂ©ries ou par blessure, ni l'organisme, ni le dentiste ne pourront rĂ©parer le tissu de l'Ă©mail. L'Ă©mail peut de plus ĂȘtre affectĂ© par des processus non pathologiques. La coloration des dents avec le temps peut rĂ©sulter de l'exposition Ă des substances telles que le tabac, le cafĂ© et le thĂ©, mais la couleur de la dent peut aussi s'assombrir graduellement avec l'Ăąge. En effet, l'assombrissement est en partie dĂ» aux matĂ©riaux qui s'accumulent au niveau de l'Ă©mail, mais est aussi un des effets de la sclĂ©rotisation de la dentine sous-jacente. En outre, l'Ă©mail devient avec l'Ăąge moins permĂ©able aux fluides, moins soluble dans l'acide, et contient moins d'eau.
Taux d'émail formé à la naissance | AchÚvement de la minéralisation de l'émail | ||
---|---|---|---|
Dents Maxillaires Primaires |
Incisive centrale | â | 1,5 mois aprĂšs la naissance |
Incisive latĂ©rale | â | 2,5 mois aprĂšs la naissance | |
Canine | â | 9 mois aprĂšs la naissance | |
PrĂ©molaire | Cuspides rĂ©unies; Ă©mail occlusal complĂštement minĂ©ralisĂ© ; le tissu minĂ©ralisĂ© couvre Âœ Ă ÂŸ de la hauteur de la couronne |
6 mois aprĂšs la naissance | |
Molaire | Cuspides rĂ©unies; Ă©mail occlusal incomplĂštement minĂ©ralisĂ© ; le tissu minĂ©ralisĂ© couvre â Ă ÂŒ de la hauteur de la couronne |
11 mois aprĂšs la naissance | |
Dents Mandibulaires Primaires |
Incisive centrale | â | 2,5 mois aprĂšs la naissance |
Incisive latĂ©rale | â | 3 mois aprĂšs la naissance | |
Canine | â | 9 mois aprĂšs la naissance | |
Prémolaire | Cuspides réunies; émail occlusal complÚtement minéralisé | 5,5 mois aprÚs la naissance | |
Molaire | Cuspides réunies; émail occlusal incomplÚtement minéralisé |
10 mois aprĂšs la naissance |
Destruction
Carie dentaire
La haute teneur en minéral de l'émail, qui fait de ce tissu le plus dur de tous les tissus humains, le rend aussi susceptible de subir un processus de déminéralisation qui survient souvent sous forme de carie dentaire.
La dĂ©minĂ©ralisation peut avoir plusieurs causes. La cause principale des caries est une alimentation riche en sucres simples (bonbons, boissons sucrĂ©es et mĂȘme des jus de fruits). La bouche contient un grand nombre et une grande variĂ©tĂ© de bactĂ©ries, et quand le glucose et le saccharose, les plus communs des sucres alimentaires se solubilisent dans le biofilm bactĂ©rien qui couvre la surface des gencives et des dents, certaines bactĂ©ries buccales interagissent avec lui pour former de l'acide lactique, qui diminue le pH dans la bouche. Les cristaux d'hydroxyapatite de l'Ă©mail sont alors dĂ©minĂ©ralisĂ©s, permettant une invasion bactĂ©rienne plus importante et plus en profondeur dans la dent.
La bactérie la plus impliquée dans la carie dentaire est Streptococcus mutans, mais le nombre et les espÚces de bactéries varient en fonction de la progression de la destruction dentaire.
La morphologie dentaire fait que la carie dentaire apparait dans des entailles, trous et fissures de l'Ă©mail ; les endroits les plus difficiles Ă atteindre avec une brosse Ă dents, oĂč les restes de nourriture s'accumulent plus facilement. Quand la dĂ©minĂ©ralisation de l'Ă©mail a lieu, un dentiste peut utiliser un instrument pointu, comme un crochet de dentiste, et sentir que « ça accroche » Ă l'emplacement de la carie. Si rien n'est fait, l'Ă©mail se dĂ©minĂ©ralise jusqu'Ă la dentine sous-jacente, qui est alors, elle aussi dĂ©gradĂ©e. Quand la dentine, qui supporte l'Ă©mail en temps normal, est dĂ©truite par une carie ou autre souci de santĂ©, l'Ă©mail est incapable de supplĂ©er Ă sa friabilitĂ© et se dĂ©tache facilement de la dent.
La cariogénicité (capacité à provoquer des caries dentaires) d'un aliment dépend de différents facteurs, comme par exemple la durée pendant laquelle les sucres restent dans la bouche. Ce n'est pas la quantité de sucre ingéré, mais la fréquence de l'ingestion de sucre qui est le principal facteur responsable des caries. Quand le pH dans la bouche diminue par ingestion de sucre, l'émail se déminéralise et reste vulnérable pendant 30 minutes environ. Ainsi, manger une grande quantité de sucre une seule fois dans la journée est moins néfaste (pour les dents) qu'en prendre de trÚs petite quantité à de nombreuses reprises tout au long de la journée (en matiÚre de santé buccale, il vaut mieux manger un seul dessert au diner, avant un brossage de dents que de manger des friandises dans la journée).
Bruxisme
Outre les invasions bactériennes, l'émail est soumis à d'autres forces destructrices. Le bruxisme (grincement de dent compulsif) détruit l'émail trÚs rapidement. Le taux d'usure de l'émail, appelé attrition, est de 8 ”m par an en temps normal. C'est une erreur commune de croire que l'émail s'use principalement par mastication. En fait, les dents se touchent rarement pendant la mastication. De plus, le contact normal des dents est compensé physiologiquement par le ligament périodontal et la disposition des dents quand la bouche est fermée. Les forces réellement destructrices sont les mouvements de parafonction (tels que la succion qu'elle soit digitale (le plus souvent le pouce) ou d'un objet (tétine ou linge), ou le bruxisme), qui peuvent causer à l'émail des dommages irréversibles.
Autres causes de destruction de l'Ă©mail
Les autres processus de destruction non-bactĂ©rienne de l'Ă©mail comprennent l'abrasion (par des Ă©lĂ©ments Ă©trangers comme les brosses Ă dent, ou les Ă©pingles ou tuyaux de pipe tenus entre les dents), l'Ă©rosion (par des processus chimiques faisant intervenir des acides, par exemple l'action du jus de citron ou le suc gastrique lorsqu'il remonte l'Ćsophage), et parfois l'abfraction (par des forces de compression ou de tension).
HygiĂšne buccale et fluor
Nettoyage des dents
L'Ă©mail est donc trĂšs vulnĂ©rable face Ă la dĂ©minĂ©ralisation, et les attaques consĂ©cutives Ă l'ingestion de sucre sont quotidiennes. Ainsi, la santĂ© dentaire passe essentiellement par des mĂ©thodes prĂ©ventives visant Ă rĂ©duire la prĂ©sence de dĂ©bris alimentaires et de bactĂ©ries en contact avec l'Ă©mail. On utilise pour cela dans la plupart des pays la brosse Ă dent, qui rĂ©duit le nombre de bactĂ©ries et de particules alimentaires sur l'Ă©mail. Quelques sociĂ©tĂ©s isolĂ©es n'ayant pas accĂšs Ă ce genre de matĂ©riel utilisent d'autres objets, comme des morceaux de bois fibreux ou pointus, pour le nettoyage des dents. Pour nettoyer la surface de l'Ă©mail entre deux dents adjacentes, on peut utiliser du fil dentaire. Ni la brosse Ă dent, ni le fil dentaire ne peuvent atteindre les creux microscopiques de l'Ă©mail, mais de bonnes habitudes d'hygiĂšne buccale et une alimentation pauvre en sucres rapides empĂȘchent gĂ©nĂ©ralement suffisamment le dĂ©veloppement de la population bactĂ©rienne et donc l'apparition de caries dentaires.
Email et fluor
Le fluor se trouve naturellement dans l'eau, mais Ă des taux trĂšs variables. Il est aussi prĂ©sent dans tous les aliments d'origine marine (poissons, fruits de mer, sel de mer etc.). Le taux de fluor recommandĂ© dans l'eau de boisson est de 1 ppm (partie par million). Le fluor aide Ă la prĂ©vention des caries en se liant aux cristaux d'hydroxyapatite de l'Ă©mail, ce qui rend ce dernier plus rĂ©sistant Ă la dĂ©minĂ©ralisation, et donc plus rĂ©sistant Ă l'apparition des caries. Cependant, un excĂšs de fluor peut ĂȘtre problĂ©matique en provoquant des troubles appelĂ©s fluorose dentaire. La fluorose est donc une surexposition au fluor, surtout entre 6 mois et 5 ans, et se manifeste par l'apparition de taches sur les dents. L'aspect des dents devient alors moins esthĂ©tique, mĂȘme si l'incidence des caries sur ce genre d'Ă©mail est trĂšs faible. Pour Ă©viter ce problĂšme, on peut utiliser des filtres dans les zones oĂč le taux de fluor dans l'eau du robinet est trop Ă©levĂ© afin de le rĂ©duire. Le taux de fluor est considĂ©rĂ© comme toxique lorsqu'il dĂ©passe 0,05 mg de fluor par kg de masse corporelle. Le fluor ajoutĂ© dans les pĂątes dentifrice ou les bains de bouche ne semble avoir qu'un effet limitĂ© aussi bien sur la fluorose que sur la prĂ©vention des caries. Il semble que seul le fluor ingĂ©rĂ© dans l'eau ou le sel fluorĂ© puisse avoir une action rĂ©elle, qu'elle soit positive ou nĂ©gative ; seule la surface de l'Ă©mail est atteinte par le fluor des pĂątes dentifrice.
Salive
La salive a un rĂŽle protecteur sur l'Ă©mail. Elle contient plusieurs Ă©lĂ©ments protecteurs, rĂ©gulateurs, agissant individuellement ou sâorganisant en vĂ©ritables systĂšmes de dĂ©fense contre les bactĂ©ries, mais aussi en apportant des ions nĂ©cessaires Ă la re-minĂ©ralisation de la dent, lorsque celle-ci n'est pas trop abĂźmĂ©e.
Effet des techniques dentaires
RĂ©paration dentaire
De nombreuses réparations dentaires nécessitent d'enlever au moins une partie de l'émail. Généralement, le but de cette pratique est d'accéder aux couches sous-jacentes infectées, comme la dentine ou la pulpe dentaire, par exemple dans le cas d'une odontologie conservatrice, d'une endodontie ou de l'installation d'une couronne. L'émail peut aussi avoir disparu avant toute apparition de carie (voir #Destruction).
Mordançage Ă lâacide
Inventée en 1955, cette technique emploie un mordant dentaire. Elle est couramment utilisée en odontologie conservatrice. En dissolvant les minéraux de l'émail, le mordant enlÚve 10 ”m de la surface de l'émail et implique la création d'une couche poreuse de 5 à 50 ”m de profondeur. Ceci rend l'émail rugueux au niveau microscopique et augmentera l'adhérence des matériaux utilisés pour la réparation dentaire nécessitant des collages (composite dentaire).
Les effets du mordançage varient en fonction de la durée de son application, du type de mordant utilisé, et de l'état de l'émail sur lequel le mordançage est appliqué. On pense aussi que les résultats obtenus varieraient en fonction de l'orientation des cristaux de l'émail.
Blanchiment dentaire
Note : on rencontre aussi le terme « blanchissement » malgré son sens habituel passif (blanchissement des cheveux).
Maladies, polluants ou médicaments affectant la qualité de l'émail
- chez les trÚs jeunes enfants, certains médicaments acides semblent pouvoir attaquer l'émail dentaire encore immature[17] ;
- chez les trĂšs jeunes enfants, des phĂ©nomĂšnes de reflux gastro-Ćsophagien peuvent aussi dĂ©grader l'Ă©mail[18] ;
- chez les enfants de moins de 8 ans, certains médicaments anti-acnéiques peuvent aussi poser des problÚmes de dyschromie et d'hypoplasie de l'émail dentaire (résumé)[19] ;
- l'amoxicilline peut induire une dyschromie de l'Ă©mail dentaire[20] ;
- certains perturbateurs endocriniens inhibent aussi la minéralisation de l'émail dentaire (hypominéralisation), ce qui est source d'anomalies de colorations des dents (15 à 18% des enfants de 6 à 9 ans sont touchés par ce phénomÚne qui semble en augmentation) et d'une hypersensibilité dentaire (risque accru de caries)[21].
Parmi les hypothĂšses Ă©voquĂ©es concernant les sources de perturbateurs figurent notamment un apport de BisphĂ©nol A (BPA) Ă partir des rĂ©sines dentaires ; des traces en sont effectivement retrouvĂ©es dans la salive, au moins pour 5 types de rĂ©sines testĂ©es in vitro et in vivo (Ă©tude 2017) et avec un pic de relarguage 30 mois aprĂšs la liaison avec la dent cariĂ©e, et avec des taux de relarguage variant selon la marque du composites orthodontiques. Les flux restent infĂ©rieurs Ă la dose de rĂ©fĂ©rence pour l'ingestion quotidienne[22] (mais cette dose est discutĂ©e). Des perturbateurs endocriniens peuvent aussi ĂȘtre prĂ©sents dans les dentifrices (facilement avalĂ©s par les enfants ou mal rincĂ©s)[21].
Le BPA a une action dĂ©montrĂ©e sur lâamĂ©logenĂšse (formation de l'Ă©mail) chez le rat de laboratoire qui dĂ©veloppe des taches opaques jaunes Ă blanches sur l'Ă©mail dentaire lorsqu'exposĂ© au BPA, peut ĂȘtre via une action hormonale sur les amĂ©loblastes (cellules qui gĂ©nĂšrent l'Ă©mail)[21])[23] - [24].
Le BPA pourrait perturber l'élimination des protéines de la matrice dentaire (88) et il affecte les glandes salivaires en induisant une sécheresse buccale pouvant nuire à la durabilité de l'émail[21].
Prospective
L'Ă©mail mature est biogĂ©nique (produit par le vivant) mais pas vivant ; il est acellulaire et ne se rĂ©pare donc pas spontanĂ©ment aprĂšs des dommages[25], ce qui explique que la carie dentaire est lâune des maladies chroniques les plus rĂ©pandues chez lâhomme[26].
Toutes les stratĂ©gies et essais de reminĂ©ralisation de l'Ă©mail ont Ă©chouĂ© (minĂ©ralisation directe en solution, avec EDTA[27] - [28]), minĂ©ralisation induite par les protĂ©ines / peptides (15-17), minĂ©ralisation induite par un hydrogel[29],S. Busch (2004) Regeneration of human tooth enamel. Angew. Chem. Int. Ed. 43, 1428â1431) ou par autoassemblage cristallin Ă partir d'un prĂ©curseur plus ou moins bioinspirĂ©[30]. La structure hiĂ©rarchique microscopique complexe de lâĂ©mail naturel ne peut pas encore ĂȘtre reproduite Ă grande Ă©chelle, mĂȘme en laboratoire.
On sait produire Ă haute tempĂ©rature des cĂ©ramiques trĂšs dures, ayant l'apparence de l'Ă©mail, mais le phĂ©nomĂšne de biominĂ©ralisation de l'Ă©mail dit amĂ©logenĂšse, bien que trĂšs courant dans la Nature commence Ă peine Ă ĂȘtre compris[14]. Il l'est du point de vue physicochimique et thĂ©orique, mais la qualitĂ© des matĂ©riaux naturels peinent encore Ă ĂȘtre reproduit in vitro et encore plus in vivo. En particulier, rĂ©gĂ©nĂ©rer l'apatite dans la structure complexe et bien alignĂ©e qu'elle prend dans l'Ă©mail dentaire (dotĂ© d'une duretĂ© et de performances mĂ©caniques exceptionnelles) est encore un dĂ©fi biotechnologique qui intĂ©resse notamment la biomimĂ©tique. On ignore encore comment les microstructures des matĂ©riaux naturels durs biogĂ©niques (dents, griffes, corne, nacre et certaines coquilles de mollusques) sont contrĂŽlĂ©es et dupliquĂ©es avec autant de prĂ©cision[31].
Jusqu'en 2018, le motif cristallin auto-assemblĂ© qui rend l'Ă©mail si solide n'avait jamais pu ĂȘtre reproduit artificiellement. RĂ©cemment un matĂ©riau composĂ© d'agrĂ©gats d'ions phosphate de calcium a Ă©tĂ© utilisĂ© avec succĂšs pour produire une couche d'un Ă©lĂ©ment prĂ©curseur, qui a induit une croissance cristalline Ă©pitaxiale telle qu'on la trouve dans l'apatite dentaire, imitant la frontiĂšre cristalline-amorphe de la biominĂ©ralisation de ce tissu ultra-dur, telle qu'elle se produit dans la nature[32].
De lâĂ©mail endommagĂ© a ainsi pu ĂȘtre complĂštement rĂ©parĂ© (avec des propriĂ©tĂ©s mĂ©caniques a priori identiques Ă celles de lâĂ©mail naturel)[32].
L'hydroxyapatite (HAP) de formule Ca10(PO4)6(OH)2 est le modÚle minéral simplifié le plus utilisé pour l'étude de la formation et de la reconstruction de l'émail[33] - [34] - [35] - [36].
La biominĂ©ralisation s'effectue dans un contexte cristallin-amorphe : avec une phase amorphe (prĂ©curseur) assurant une construction Ă©pitaxiale continue[37] - [38] - [39] - [40] ce processus a rĂ©cemment inspirĂ© une structure rationnelle entre l'hydroxyapatite (HAP) et le phosphate de calcium amorphe (ou « PCA », dont la formule est Ca3(PO4)2nH2O ; aussi retrouvĂ© comme prĂ©curseur pour la formation d'os ou d'arĂȘtes de poissons[41]), qui peut imiter la biominĂ©ralisation et induire la rĂ©gĂ©nĂ©ration Ă©pitaxiale de l'Ă©mail[32]. La croissance Ă©pitaxiale programmĂ©e, basĂ©e sur une transformation de phase, semble prometteuse pour la rĂ©gĂ©nĂ©ration de l'Ă©mail, voire au delĂ pour la reproduction biomimĂ©tique de matĂ©riaux Ă structure complexe[32]. Cependant, la croissance Ă©pitaxiale de l'Ă©mail avec une phase Ă©trangĂšre de phosphate de calcium amorphe Ă©trangĂšre n'a pas Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e in vitro[32] et pour une application clinique en dentisterie, il faudrait aussi dĂ©velopper une mĂ©thode pour l'appliquer sur les dents en place.
Ămail chez les animaux
De nombreux animaux ont des dents d'une grande duretĂ© et/ou trĂšs coupante (requin, castor). Les dents comptent parmi les restes qui se conservent le mieux dans le temps ; elles sont utilisĂ©es par les archĂ©ologues et palĂ©ontologues pour identifier et dater des restes humains et animaux parfois trĂšs anciens. On y retrouve parfois de l'ADN en assez bon Ă©tat pour ĂȘtre analysĂ©.
Voir aussi
Bibliographie et sources
- (en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de lâarticle de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Tooth enamel » (voir la liste des auteurs).
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- CongrÚs de l'Association Dentaire Française
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Référence
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- La teneur en isotopes stables du carbone et de l'azote reflĂšte notamment le type de plantes consommĂ©es (Ă photosynthĂšse en C3 ou en C4) et le niveau trophique. L'isotope du Zinc 66Zn est Ă©galement un indicateur du rĂ©gime alimentaire, permettant de distinguer les carnivores des herbivores (et encore plus finement les brouteurs des pĂątureurs). cf. (en) Klervia Jaouen et al, « Zinc isotope ratios of bones and teeth as new dietary indicators: results from a modern food web (Koobi Fora, Kenya) », Scientific Reports, vol. 6, no 26281,â (DOI 10.1038/srep26281).
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