Viennoiserie
La viennoiserie est synonyme de boulangerie de luxe[1], fine[2] ou de fantaisie[3].
On appelle viennoiseries les produits de boulangerie dont la technique de fabrication se rapproche de celle du pain ou de la pâte feuilletée, mais auxquels leurs ingrédients donnent un caractère plus gras et plus sucré qui les rapproche de la pâtisserie (œufs, beurre, lait, crème, sucre, etc.) ; les pâtes sont levées ou feuilletées.
Les viennoiseries sont souvent servies le matin ou comme en-cas.
Leur nom fait référence au kipferl viennois, qui inspira la forme du croissant, mais leur développement eut lieu à Paris et se base principalement sur la technique française de la pâte feuilletée levée[4].
Histoire
Pour certains auteurs, l’existence du kipferl, brioche en forme de croissant, serait attestée dans l'Autriche entre le XIIIe siècle et le XVIIe siècle[5], voire en Hongrie mais sans que l'on en connaisse les recettes (salée ou sucrée) ni la pâte (feuilletée ou pas)[6]. Ces pâtisseries pourraient aussi avoir des origines au Proche-Orient et dans les cuisines du palais de Topkapı[7].
C'est un officier autrichien, August Zang, associé à un noble viennois, Ernest Schwarzer[8], introduisit à Paris le kipferl (brioche en forme de croissant) et le kaisersemmel (pain viennois)[4] entre 1837 et 1839, en ouvrant une Boulangerie viennoise (installée au 92, rue de Richelieu[9]) et dont le succès a vite inspiré une foule d'imitateurs[10]. Les boulangers parisiens s'inspireront de ces préparations pour développer les viennoiseries en utilisant la pâte feuilletée levée française[4].
D'abord réalisée en France par des ouvriers venus de Vienne, la viennoiserie est ensuite pratiquée par leurs élèves. La pratique se répandant, elle donne lieu à l'appellation « travail viennois », l'ouvrier étant dit un « viennois ». Parmi ces ouvriers, on distinguait alors le croissantier, le biscottier et le pâtissier-viennois[1].
Mais ce n'est qu'au début du XXe siècle que ces recettes, comme celle du croissant, sont devenues un symbole culinaire français[11]. On notera aussi que le pain viennois des nordiques (le Wienerbrød), se nomme Danish pastry en anglais[12].
De la boulangerie viennoise Ă la viennoiserie
Le mot dérivé « viennoiserie » est issu de l'adjonction du suffixe « -erie » à l'onomastisme « viennois », lui-même dérivé du nom de Vienne. En français, une viennoiserie, de même qu'une chinoiserie[13], peut faire référence à une activité ou un « objet dans le goût viennois ». Cela à l'image de cette capitale culturelle que l'on associe au raffinement[14], déjà au début du XIXe siècle.
Cependant, son usage est plutôt réservé aux produits de boulangerie originaires de Vienne, ou à laquelle le terme rend hommage. Celui-ci n'est pas attesté dans les dictionnaires avant le XXe siècle[15], alors que « boulangerie viennoise » l'est en 1876[16], au moins. Cette dernière expression est d’ailleurs employée couramment dès le début des années 1840[17], sans doute en écho au prestige commercial de Zang[18] ou au rayonnement international de ces recettes viennoises.
Exemples
- Baguette viennoise nature ou aux pépites de chocolat
- Biscotte
- Bolus belge
- Bolus zélandais
- Boule de Berlin
- Brioche nature, au sucre, aux pépites de chocolat, ou aux pralines
- Bugnes
- Chinois
- Croissant
- Chausson aux pommes
- Chausson napolitain ou chausson italien
- Cougnou (Belgique et nord de la France)
- Danoise
- Suisse
- Gosette
- Oranais
- Pain au lait
- Pain au chocolat ou chocolatine (sud-ouest de la France et Québec[19]), couque au chocolat (Belgique et Ardennes), petit pain au chocolat (Hauts-de-France et Grand Est), croissant au chocolat (Grand Est)[20]
- Pain aux raisins (appelé « escargot » quand il est en spirale et parfois « schneck » en Lorraine et en Alsace[21])
- Palmier
- Sacristain
- Rissoles
Notes et références
Notes
Références
- Félix Urbain-Dubois, La boulangerie d'aujourd'hui. Recettes pratiques, conduite du travail, outillage et procédés les plus modernes de boulangerie française et étrangère et de pâtisserie-boulangère, Flammarion, Paris, 1933, 282 p., p. 102-103.
- Cf. Émile de la Bédollierre 1842, ci-dessous.
- Cf. MĂ©moires d'agriculture 1850, ci-dessous.
- (en) Jim Chevallier, August Zang and the French Croissant: How Viennoiserie Came to France, Chez Jim, (ISBN 978-1-4486-6784-0, lire en ligne)
- (de) Jacob Grimm and Wilhelm Grimm, Deutsches Wörterbuch von Jacob Grimm und Wilhelm Grimm 11.
- Voir les documents suivant :
(de) Friedrich Kunz, Das Croissant : echter Franzose oder EU-BĂĽrger ?, dans bmi aktuell, 1, Bonn et Vienne, Backmittelinstitut, avril 2007, p. 14-16.
(fr) Franz Rainer, Sur l'origine de croissant et autres viennoiseries, dans Revue de linguistique romane, 71, Zürich, 2007, p. 467–481 (commentaires) - Voir, par exemple, Charles Perry, « The Taste for Layered Bread among the Nomadic Turks and the Central Asian Origins of Baklava », A Taste of Thyme : Culinary Cultures of the Middle East, éd. par Sami Zubaida et Richard Tapper, 1994, p. 87 (ISBN 1-86064-603-4).
- Cf. Gustav Rümelin, « Schwarzer (Ernest) », Biographie universelle ancienne et moderne, Louis-Gabriel Michaud (dir.), 38, p. 492, Paris, c. 1860.
- Voir Alan Davidson, The Oxford Companion to Food, Oxford, 2006 (2e éd.), les articles « viennoiserie » (p. 829), « croissant » (p. 228) et « culinary mythology » (p. 232).
On peut, mais avec grande prudence, consulter le volume auto-édité de Jim Chevallier, August Zang and the French Croissant : How Viennoiserie Came to France, North Hollywood (CA), 2010 (2e éd.), p. 17-18 et 38-39 (ISBN 1448667844) (partiellement en ligne).
Voir aussi du même les articles « Zang, Christophe Auguste » et « Viennoiserie » dans le Dictionnaire Universel du Pain, Laffont, 2010. - Mémoires d'agriculture, d'économie rurale et domestique, publiés par la Société nationale et centrale d'agriculture. Année 1850, Ire partie, Paris, Bouchard-Huzard, 1850, p. 588 (en ligne) : « nos petits pain de fantaisie dits viennois, de dextrine, de gruaux, croissants » (souligné par l'auteur même).
- Cf. Alan Davidson 2006, p. 228.
- Voir (da) Wienerbrød et (en) Danish pastry.
- Balzac, L'Interdiction, 1836, p. 163, d'après le cnrtl.
- Martine Temple, Pour une sémantique des mots construits, Presses Univ. Septentrion, (lire en ligne), p. 218 à 225.
- Une occurrence semble être notée en 1907 dans Le Correspondant (volume 229, partie 4, Paris, 1907, p. 170). En tout cas, on trouve un article « viennoiserie » dans le Grand Larousse encyclopédique édité en 1964 (tome 10).
- Cf. Pierre Larousse, « viennois, oise », Grand dictionnaire universel du XIXe siècle, 15, Paris, 1876, p. 1021.
- Comme par Émile de la Bédollierre (Les industriels, métiers et professions en France, Paris, 1842, p. 132) à propos de la boulangerie fine « dite Viennoise » dont on ne manque jamais « de faire en bien mangeant l'éloge des morceaux » (Nicolas Boileau, Satires, 3, 1665).
- Par ailleurs en 1840, un certain Martin Finckbohner, domestique de 28 ans du colonel Parquin et interrogé (ou coaccusé) dans le cadre du procès de Louis-Napoléon, est un ancien employé de la boulangerie parisienne.
- Clarisse, « On dit pain au chocolat ou chocolatine ? », sur Lingoda, (consulté le )
- « Chocolatine ou pain au chocolat la science a tranché », sur France 3 Occitanie (consulté le )
- « Le Robert on Twitter », Twitter,‎ (lire en ligne, consulté le )
Voir aussi
Bibliographie
- Marie-Laure Fréchet, Encyclopédie de la viennoiserie maison, Flammarion, 2020