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Verdun (porte-avions)

Le Verdun (sigle PA 58 puis PA 59) est un projet de porte-avions développé pour la Marine nationale et les Forces aériennes stratégiques françaises à la fin des années 1950, en complément du Clemenceau et du Foch, et qui est annulé en 1961.

Verdun
Autres noms PA 58, PA 59
Type Porte-avions
Classe Clemenceau
Histoire
A servi dans Marine nationale
Chantier naval Prévu Saint-Nazaire
Statut Projet abandonné en 1961
Caractéristiques techniques
Longueur 286,3 mètres
Maître-bau 34 mètres à la flottaison - 58 mètres hors-tout
DĂ©placement 35 000 tonnes (Washington)
45 500 tonnes (Ă  pleine charge)
Propulsion Turbines Ă  engrenage (TE)
agissant sur 4 lignes d'arbre
vapeur fournie par 8 chaudières.
Puissance 147 MW
Vitesse 33 nœuds
Caractéristiques militaires
Blindage Caisson et pont d'envol blindés
Armement 2 systèmes de missiles mer-air moyenne portée Masurca, 60 missiles
8 canons de 100 mm AA Mle 53
Aéronefs Mirage IVM, GAMD Étendard IVM
Pavillon France

Histoire

De six Ă  trois porte-avions (1949-1953)

Le projet de statut naval Ă©tabli par l’État-major gĂ©nĂ©ral en 1949 demande quatre porte-avions de 20 000 tonnes pour en avoir deux disponibles en permanence. Dans sa sĂ©ance du , le Conseil supĂ©rieur de la Marine est encore plus ambitieux : discutant le projet de statut naval, il demande 6 porte-avions d’escadre. Le , il en rĂ©clame encore cinq dont deux pour l’Union française (non mis Ă  la disposition de l’OTAN). D’après le MRC 12, document final de la confĂ©rence de Lisbonne de 1952, la France devrait mettre Ă  la disposition de l’OTAN un porte-avions au jour J, deux Ă  J+30, trois Ă  J+180. Mais, dès 1953, la Marine nationale doit dĂ©finitivement admettre qu’elle devra se contenter de trois porte-avions. Le PA 54 Clemenceau, inscrit au budget de 1953, est mis sur cale en novembre 1955 ; le PA 55 Foch, inscrit au budget de 1955, est mis sur cale en fĂ©vrier 1957. Le troisième de la sĂ©rie, provisoirement dĂ©nommĂ© PA 58 (le nom de Verdun a Ă©tĂ© proposĂ©) et destinĂ© Ă  remplacer l’Arromanches dont le dĂ©sarmement est prĂ©vu en 1962, doit ĂŞtre inscrit au budget de 1958, mais il est supprimĂ© Ă  la dernière minute pour raisons budgĂ©taires, si bien que la tranche de 1958 se retrouve pratiquement rĂ©duite Ă  rien. La Marine essaie de relancer le projet l’annĂ©e suivante avec le PA 59, qui devrait ĂŞtre un Clemenceau amĂ©liorĂ© ou un porte-avions plus grand, de 35 000 tonnes lège, capable de mettre en Ĺ“uvre des bombardiers stratĂ©giques constituant « la puissance de frappe rĂ©siduelle de la France ».

L'embarquement de la bombe A (1956-1957)

Selon le rapport au Conseil supĂ©rieur de la Marine du , le problème de l’embarquement d’armes atomiques Ă  bord du porte-avions (la « muratisation Â», notamment) est posĂ© dès la conception du Clemenceau. L’objectif d’embarquement d’avions de 20 tonnes rĂ©pond au souci de disposer d’appareils au rayon d’action suffisant. Le Conseil supĂ©rieur, dans sa sĂ©ance du , en dĂ©libère longuement il est prĂ©vu que la bombe A sera disponible en 1965, la bombe H en 1970. L’amiral Pierre Barjot pose dĂ©jĂ  la question de bombes atomiques tactiques. Ă€ l’avènement de la Ve RĂ©publique, dĂ©jĂ  apparaissait la traditionnelle rivalitĂ© interarmĂ©es : en octobre 1956, une directive ministĂ©rielle dĂ©finit le triptyque : frappe atomique – dĂ©fense - intervention, en rĂ©servant la première mission Ă  la seule ArmĂ©e de l’air. La Marine rĂ©agit et sept mois plus tard, une directive complĂ©mentaire lui reconnaĂ®t une place.

Vers l'abandon (1958-1960)

Le Conseil supérieur de la Marine délibère enfin du sort du Verdun dans sa séance du . Le secrétaire d’état à la Marine Alain Poher impose la solution d'une variante extrapolée du Clemenceau, pour des raisons budgétaires (35 milliards de francs au lieu de 45 à 47 pour le Verdun[note 1]). Cette variante est désignée PA59. Mais la priorité donnée par la Ve République à la force de frappe enterre définitivement le projet. La Marine conserve pendant quelque temps encore l’espoir de le faire reprendre : elle envisage, dans le cadre de la loi de programme 1960-1964, une mise sur cale en 1962, avec admission au service actif en 1967[1]. Le projet est finalement abandonné en 1961 au profit de SNLE supplémentaires[2].

Caractéristiques

Le navire

Le bâtiment devant ĂŞtre apte Ă  mettre en Ĺ“uvre un bombardier, son dĂ©placement est de 35 000 tW — contre 27 000 tW pour le Clemenceau et le Foch — et 45 000 tonnes Ă  pleine charge. Deux bâtiments seulement paraissant Ă  l'Ă©poque insuffisant pour l'assurer, le porte-avions PA 58 doit permettre la permanence Ă  la mer d'une force aĂ©ronavale.

Lors de la mise à flot du Clemenceau, le , le ministre de la défense confirme donc la nécessité d'un troisième bâtiment de cette catégorie. Le navire est inscrit à la tranche navale de 1958. Le délégué ministériel à l'armement tient des propos analogues lors de la mise à l'eau du Foch, le . L'espoir de réaliser ce bâtiment semble avoir perduré dans la marine jusqu'en 1961.

Il s'agit d'un porte-avions — destinĂ©, entre autres, Ă  la dissuasion nuclĂ©aire — avec un pont d'envol « travaillant », Ă  l'instar de la solution architecturale traditionnelle britannique — et diffĂ©rente de celle en vogue dans l'US Navy pour sa classe Essex, dont le pont d'envol est "posĂ©" sur la "poutre-navire" —. SymĂ©trique par rapport Ă  l'axe du navire (alors que ceux des Joffre et PainlevĂ© Ă©taient dĂ©portĂ©s, tout comme celui de la classe Clemenceau) le hangar mesure 200 mètres de longueur. La longueur du pont d'envol passe Ă  plus de 286 mètres, avec une piste oblique de 192 mètres de longueur, inclinĂ©e Ă  8°. Les deux ascenseurs, de 17 mètres sur 14, sont latĂ©raux (Ă  tribord), en avant et en arrière de l'Ă®lot. Il y a quatre brins d'arrĂŞts. Il Ă©tait question de deux catapultes de 75 mètres, voire 100 mètres pour la catapulte axiale. La disposition gĂ©nĂ©rale est similaire Ă  celle de la classe Clemenceau.

L'appareil propulsif consiste en quatre groupes de turbines Ă  vapeur agissant sur quatre lignes d'arbre, avec une puissance totale de 200 000 ch, permettant de soutenir (au dĂ©placement d'essai, de 42 000 tonnes) une vitesse de 34 nĹ“uds, tandis qu'une vitesse de 35 nĹ“uds Ă©tait susceptible d'ĂŞtre atteinte aux essais de puissance (« Ă  feux poussĂ©s »). La disposition de la protection est comparable Ă  celle du Foch et du Clemenceau, mais elle est renforcĂ©e pour le caisson et le pont d'envol, tous deux blindĂ©s[3].

Armement

L'armement aurait consisté en 8 tourelles de 100 mm (les mêmes que celles du Clemenceau) et deux systèmes surface-air Masurca.

L'autoprotection du PA 58 doit être assurée par quatre groupements indépendants. Ceux-ci auraient été dotés — à ce moment-là du projet — d'une combinaison de pièces antiaériennes de 100 mm et de systèmes Masurca. En matière de senseur anti-sous-marin, un sonar remorqué (à basses fréquences — BF) devait même être installé.

Des variantes de disposition de l'armement sont étudiées (sans que la date en soit précisée) avec de chaque bord :

  • variante 1 : une rampe (double) Masurca Ă  l'avant et trois tourelles de 100 mm Ă  l'arrière ;
  • variante 2 : une rampe (double) Masurca avec deux tourelles de 100 mm Ă  l'avant et trois tourelles de 100 Ă  l'arrière ;
  • variante 3 : deux tourelles de 100 mm Ă  l'avant, une rampe (double) Masurca et deux tourelles de 100 mm Ă  l'arrière.

À la suite des diverses demandes de l'état-major de la Marine sur l'ensemble du projet PA 58, le Service technique répond le avec l'envoi au Chef d'état-major de la marine d'une série de caractéristiques. Les plans sont signés de l'ingénieur général du Génie maritime Amiot, chef du groupe Constructions navales du Service Technique des Constructions et Armes navales. Dans le projet retenu depuis cette date, l'autoprotection consistait en huit canons de 100 mm et deux plateformes lance-engins (30 engins par rampe) — proche de la variante 3, ci-dessus — . La nécessité d'une arme anti-sous-marine cohérente en portée avec celle du système sonar BF[note 2] conduit à envisager l'installation de rampes pour engins Latécoère porteurs d'une torpille L4 — le futur Malafon — avec six engins en soute.

Cet avant-projet est approuvé par le ministre lors du Conseil supérieur de la Marine du , mais l'armement doit être revu.

Le , une solution d'amélioration de l'armement comporte dix canons de 100 mm, deux rampes Masurca et deux rampes Malafon. Les deux encorbellements de l'arrière portent chacun trois canons de 100 mm et un télépointeur, et ceux de l'avant deux canons de 100 mm et une rampe Masurca — disposition proche de celle de la variante 2, ci-dessus —. Les deux rampes Malafon sont posées sur des encorbellements de la plage arrière. Une variante avec douze canons de 100 mm est repoussée, les Masurca (sur les encorbellements avant) devenant alors trop exposés à la mer[4].

Dans tous ces projets, il semble que l'armement d'autoprotection soit structuré autour de quatre groupements indépendants pour la défense aérienne, et d'un ou deux groupements de lutte anti-sous-marine.

AĂ©ronefs

À partir de 1957, la Marine envisage le groupe aérien embarqué du PA 59. Ainsi, il est envisagé un avion qui serait livré en deux versions : un chasseur tout temps et un bombardier (nucléaire), c'est le programme CB62. Le chasseur ne doit pas dépasser 15 tonnes de masse maximale au décollage afin d'opérer sur les Foch et Clemenceau. Le bombardier peut atteindre une masse de 20 tonnes, mais au début du projet du PA 59, il est question qu'il possède les mêmes catapultes à vapeur Mitchell-Brown de 50 m des Clemenceau. Il est alors question que le bombardier du programme CB 62 décolle à 15 tonnes et soit ravitaillé ou bien qu'il soit assisté par des fusées JATO. C'est l'avant-projet du du conseil supérieur de la Marine qui fige les caractéristiques du PA 59 avec ces catapultes de 75 ou 100 mètres[4] :

  • la Marine nationale française s'intĂ©resse Ă  une version embarquĂ©e du Mirage IV. La GAMD remet un avant-projet le suivi d'un projet en mars 1957 de Mirage IV-M monoplace, raccourci et avec ailes et dĂ©rive repliables. Ce projet est abandonnĂ© fin 1958, Ă  la suite du lancement en 1955 de deux porte-avions lĂ©gers de 22 000 tonnes, le Clemenceau (R98) et le Foch (R99) qui ne peuvent pas soutenir cet appareil de 16,5 t au catapultage ;
  • selon Dassault Aviation, « le Jaguar M est abandonnĂ© suite aux limites opĂ©rationnelles de l’appareil sur porte-avions »[5] ;
  • le projet concurrent du Mirage IV, le bombardier SNCASO SO 4060 Super Vautour, est Ă©galement envisagĂ© si celui-ci est retenu, le plan succinct d'Ă©bauche du profil de cet avion est visible aux pages en rĂ©fĂ©rence[3] ;
  • Dassault Étendard IV.

Notes et références

Notes

  1. Soit 540 millions d'euros au lieu de 700-730 millions d'euros au cours 2006
  2. Lequel n'est encore qu'un projet qui sera expérimenté sur l'escorteur d'escadre anti-sous-marin La Galissonnière (D638) trois ou quatre ans plus tard

Références

  1. Note au Conseil supérieur de la Marine pour sa réunion du , Service historique de la Marine
  2. Hervé Coutau-Bégarie, « Le problème du porte-avions - Le cas français », sur stratisc.org, Institut de Stratégie Comparée, Commission Française d'Histoire Militaire, Institut d'Histoire des Conflits Contemporains (consulté le )
  3. Francis Dousset, Les Porte-avions français : des origines (1911) à nos jours, Brest/Paris, Éditions de la Cité, , 159 p. (ISBN 2-85186-015-1), p. 88-90
  4. Jean Moulin, Les porte-avions Clemenceau et Foch, Marines Editions, (ISBN 978-2-915379-47-1), p. 224
  5. « Jaguar », sur dassault-aviation.com/fr, Dassault Aviation (consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

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