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Trafic d'armes

Le trafic d'armes consiste Ă  approvisionner en armes et/ou en munitions une entitĂ© (groupe combattant, association criminelle, État) en violant les rĂ©glementations internationales ou nationales sur les ventes d'armes. Sa dĂ©finition reste floue, nombre de ventes d'armes se faisant sur le « marchĂ© gris » de l'armement.

Armes illĂ©gales, confisquĂ©es et destinĂ©es Ă  ĂȘtre dĂ©truites, Ă  Nairobi, Kenya

Selon l'ONU, le trafic d'armes est l'une des quatre activitĂ©s illĂ©gales les plus lucratives avec le trafic de drogues, le trafic de mĂ©dicament et la prostitution. Le marchĂ© international du trafic d'armes est Ă©valuĂ© Ă  1 200 milliards de dollars par an[1]. En 2004, on estimait Ă  500 millions le nombre d’armes lĂ©gĂšres en circulation dans le monde[2], armes qui ne font l'objet d'aucun traitĂ© international[1] – dont plus de 100 millions en Afrique, soit une arme pour 12 personnes[2].

Les ventes illégales

Voir aussi : Industrie de l'armement.

La Russie arrive en tĂȘte des exportations d'armes, avec 31 % des exportations, suivi par les États-Unis (30 %), la France (9 %), l'Allemagne (6 %), Le Royaume-Uni (4 %) et l’Ukraine (2 %).

Les armes représentent un pan important de l'économie mondiale. Ainsi, elles représentaient 4,4 % des exportations totales françaises entre 1980 et 1988 et 4,8 % pour le Royaume-Uni[3].

En 2005, le rapport annuel du CongrĂšs des États-Unis sur les ventes d'armes dans le monde a estimĂ© qu'en 2004, la valeur totale des contrats de ventes d'armes (et tous services associĂ©s) Ă  travers le monde Ă©tait de 37 milliards de dollars, alors qu'elle Ă©tait l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente de 28,5 milliards de dollars. En 2000 elle atteignit 42,1 milliards de dollars. Si on considĂšre non plus les contrats, mais les livraisons, la valeur pour 2004 est de 34,8 milliards de dollars, Ă  peu prĂšs stable en monnaie constante depuis 2000.

Par contre, l'organisme Stockholm International Peace Research Institute Ă©value le volume mondial des transactions Ă  environ 34 milliards de dollars en 2000 et 50 milliards en 2004. Entre 2002 et 2006 les ventes d’armement du Nord vers le Sud ont augmentĂ© de 50 %[4].

La réglementation contre le trafic d'armes

16 Ă©tats seulement ont adoptĂ© une rĂ©glementation pour l’enregistrement, l’homologation des courtiers en armes et la rĂ©pression des transactions illicites[5]. Plusieurs rĂ©gimes multilatĂ©raux de contrĂŽle des exportations sont en cours pour limiter la prolifĂ©ration de technologies Ă  usage militaire.

Le « marché gris » de l'armement et les problÚmes de définition de trafic illégal

Nombre de ventes d'armes effectuĂ©es par des Ă©tats souverains se font sur le marchĂ© « gris », Ă  la frontiĂšre du lĂ©gal et de l'illĂ©gal. Ainsi, le Royaume-Uni autorisait des ventes de matĂ©riel de guerre Ă  des pays dont il avait condamnĂ© le non-respect des droits de l’homme, comme l’IndonĂ©sie, le NĂ©pal et l’Arabie saoudite, et alors que les directives sur les exportations d’armes stipulent que les autorisations seront refusĂ©es s’il existe « un risque manifeste qu’elles puissent ĂȘtre utilisĂ©es Ă  des fins de rĂ©pression interne »[6].

Selon le rapport Small Arms Survey (2007) : « Les transferts autorisĂ©s peuvent enfreindre le droit international, les rĂšgles et les coutumes – y compris les normes juridiques relatives au respect des droits de l’homme ou aux conflits internationaux. Les transferts peuvent Ă©galement ĂȘtre irresponsables en raison du risque accru de dĂ©tournement vers des destinataires non autorisĂ©s »[7]. [
] Au moins 60 États ont effectuĂ© ce qui pourrait ĂȘtre raisonnablement assimilĂ© Ă  des envois d’armes lĂ©gĂšres irresponsables vers 36 pays pendant la pĂ©riode 2002–2004[7].

Les gouvernements europĂ©ens ont ainsi autorisĂ© les marchands d’armes Ă  commercer avec des pays peu scrupuleux comme le Soudan, l'Angola en guerre civile (qui soutenait les rebelles ougandais de la Lord Resistance Army), le YĂ©men, mais aussi la Chine, le Zimbabwe et la Birmanie, pourtant tous trois sous embargos europĂ©ens[8]. D'autres embargos de l'ONU, visant le Liban, la Somalie et le Soudan ont Ă©tĂ© violĂ©s en 2006[7].

Amnesty International a dĂ©noncĂ© en la Russie, la France, l’Italie, le Royaume-Uni et l’Allemagne, en les accusant d'avoir livrĂ© des armes Ă  des pays d’Afrique oĂč d’importantes violations des droits de l’homme avaient Ă©tĂ© observĂ©es[8]. D’aprĂšs le BaromĂštre 2007 de la transparence du commerce des armes lĂ©gĂšres, les grands exportateurs d’armes lĂ©gĂšres les plus transparents sont les États-Unis, la France, l’Italie, la NorvĂšge, le Royaume-Uni et l’Allemagne. Les moins transparents sont la Bulgarie, la CorĂ©e du Nord et l’Afrique du Sud[7].

En Belgique

Le port d'Anvers est l'une des plaques tournantes européennes du trafic d'armes.

La loi Onkelinx, votée en , vise à un meilleur recensement des armes en Belgique, alors qu'une arme sur deux n'y est pas enregistrée. Elle semble avoir frappé principalement les détenteurs d'armes historiques acquises par héritage ou peu usitées, plutÎt que les criminels[9].

Soutenue depuis 2004 par le gouvernement de la RĂ©gion wallonne, la « cellule de veille »[10] tenue par le Groupe de Recherche et d'Information sur la Paix (GRIP) Ă©tudie les rĂ©glementations et les politiques belges et europĂ©ennes relatives au contrĂŽle des armements et des biens et technologies Ă  double usage ; les initiatives internationales de contrĂŽle des armements ; le contrĂŽle exercĂ© Ă  travers, entre autres, le marquage et le traçage, le contrĂŽle des munitions, la dĂ©tention civile d’armes ; les Ă©volutions technologiques et industrielles dans le secteur de l’armement ; les donnĂ©es socio-Ă©conomiques sur la production et le commerce d’armes en Belgique et dans le monde. Le GRIP maintient Ă©galement Ă  jour des bases de donnĂ©es sur les transferts d’armes de la Belgique et sur l’industrie belge de l’armement.

Sommairement, la Belgique soumet toute exportation d'armes Ă  un rĂ©gime de licences dĂ©livrĂ©es par le gouvernement rĂ©gional. Ces dĂ©livrances de licences sont conditionnĂ©es : par exemple, la rĂ©glementation belge interdit le commerce des armes avec un pays en guerre. En aoĂ»t 2002, la vente de 5 500 mitrailleuses au NĂ©pal malgrĂ© la lutte armĂ©e sĂ©vissant sur son sol a soulevĂ© un important dĂ©bat. Ce dĂ©bat a dĂ©bouchĂ© sur la rĂ©gionalisation de la compĂ©tence.

Aux États-Unis

Le trafic d'armes est régi par l'Arms Control Export Act[11], au nom duquel ITT Corporation a été condamné en 2007 à une amende de 100 millions de dollars pour des exportations à destination de la Chine, de Singapour et du Royaume-Uni[12].

En France

Interdiction à une entreprise ou un commerçant d'exporter des armes sans l'aval du gouvernement[13].

Vers un traité international sur les ventes d'armes ?

En plus des réglementations commerciales, des ONG (Oxfam, Amnesty International et IANSA) ont lancé en 2002 une campagne internationale, Control Arms, destinée à obtenir un traité international sur le commerce des armes[14]. Aucun traité n'interdit le commerce d'armes légÚres[1].

Le , une majoritĂ© de l’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations unies s'est prononcĂ©e en faveur d’un traitĂ© international visant Ă  interdire les transferts d’armes qui alimentent les conflits, la pauvretĂ© et les graves atteintes aux droits humains (153 gouvernements ont soutenu la mesure, 24 se sont abstenus, et un, les États-Unis, a votĂ© contre). Un groupe d’experts gouvernementaux doit Ă  prĂ©sent Ă©tablir la trame d’« un instrument exhaustif et contraignant fixant des normes internationales communes pour l’importation, l’exportation et le transfert d’armes classiques ».

La Journée internationale de la destruction des armes légÚres, lancée par les Nations unies en 2001, a lieu le de chaque année.

La provenance des armes illégales

Les pays occidentaux, le Moyen-Orient, IsraĂ«l, le Chili de Pinochet, l'Afrique du Sud - principalement sous le rĂ©gime d'apartheid - ainsi que les pays de l'ex-URSS (Russie, BiĂ©lorussie, Ukraine), ont Ă©tĂ© la source d'importants trafics. Ces ventes illĂ©gales ont Ă©tĂ© Ă  l'instigation de trafiquants ou de bandes organisĂ©es, mais aussi d'États souhaitant exporter des armes contre les rĂšgles internationales. Le trafic d'armes est un instrument essentiel des proxy wars, ou guerres menĂ©es par des intermĂ©diaires, reconnu en 1994 par le prĂ©sident Bill Clinton comme un outil essentiel de la politique Ă©trangĂšre des États-Unis[15]. La guerre Iran-Irak (1980-1988), oĂč les deux adversaires Ă©taient approvisionnĂ©s par des pays occidentaux, parfois les mĂȘmes (France, Bulgarie, URSS, etc.), en est un exemple, ainsi que la guerre du Biafra (1967-1970), oĂč l'aide humanitaire sert de couverture Ă  l'approvisionnement d'armes, par Paris, de la RĂ©publique autoproclamĂ©e du Biafra[16].

AprĂšs la fin de la Guerre froide et de l'effondrement des systĂšmes Ă©tatiques en Europe de l'Est, d'importants stocks d'armes ont Ă©tĂ© dispersĂ©s par une partie de l'ancien appareil d'État. Entre 1982 et 1992, 32 milliards de dollars d'armes ont Ă©tĂ© ainsi dĂ©robĂ©s dans la seule Ukraine[17]... Parmi les autres pays accusĂ©s de lĂ©gĂšretĂ© en ce domaine, figurent la Bulgarie, avec la firme d'État Kintex, accusĂ©e d'avoir violĂ© de nombreux embargos[18] - [19], l'AlgĂ©rie, l'Inde et le Pakistan.

Ensuite, une partie des armes illĂ©gales provient de vols ou de pertes ; environ un million d’armes sont perdues ou volĂ©es chaque annĂ©e[20], y compris par des forces de sĂ©curitĂ© internationales. Il s'agit de la source principale des armes de la criminalitĂ© (braquage).

Des troupes de l'ONU ont été impliquées dans ce trafic, au Congo[21].

Selon Small arms survey 2001, les armes illégales représentent 10 à 20 % du nombre total d'armes. Seuls trente à quarante pays dans le monde disposent de réglementations spécifiques sur la vente d'armes.

La destination des armes illégales

Dans les années 1990, l'accroissement des conflits localisés, mettant aux prises des armes irréguliÚres, a favorisé l'essor de la demande. De plus, l'accroissement des rÚgles internationales (embargo international sur les armes sur un pays, renforcement des contrÎles
) ont favorisé la demande d'armes livrées illégalement.

Pour la plupart les échanges se font par voies maritime et aérienne, en camouflant les transports et en falsifiant la nature des cargaisons, avec ou sans complicités officielles.

La rĂ©glementation internationale oblige chaque exportation, importation et fret d'armes Ă  ĂȘtre accompagnĂ©e d'un document prĂ©cisant l'expĂ©diteur et le destinataire (en France, toute vente d'armes par une entreprise est soumise Ă  l'autorisation de l'État). Une technique de fraude consiste Ă  l'achat d'armes lĂ©galement par un État, qui les rĂ©expĂ©die illĂ©galement ensuite ; la Chine a ainsi Ă©tĂ© critiquĂ©e Ă  plusieurs reprises, notamment lors de la vente de 50 hĂ©licoptĂšres par la France[22].

Entre 1997 et 2007, les Nations unies ont imposĂ© 13 embargos sur les armes, tous enfreints, avec des missions d'enquĂȘtes et de contrĂŽles aux moyens insuffisants.

L'impact du trafic d'armes et la diffusion des armes légÚres

Selon Small arms survey 2001, une personne meurt tuée par une arme toutes les minutes[2]. 15 armes sont produites à la minute.

L'impact du trafic d'arme est trĂšs important : 500 000 civils et militaires meurent chaque annĂ©e tuĂ©s par des armes lĂ©gĂšres[2] et les blessĂ©s et mutilĂ©s sont innombrables. Selon le rapport Small Arms Survey de [23], 650 des 850 millions de petites armes Ă  feu sur terre (76,5 %) sont en fait dĂ©tenu par des civils, le reste l'Ă©tant par les diverses armĂ©es et forces de l'ordre.

Bibliographie

  • Benjamin Valverde, Le Trafic illicite d'armes lĂ©gĂšres, travail universitaire de DESS de gĂ©opolitique, universitĂ© Paris-I PanthĂ©on-Sorbonne/ENS,
  • Rapport Small Arms Survey (en français), 2007[24]

Filmographie

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. David Servenay, Trafic d'armes, dĂ©raison d'État, Rue 89, 2 septembre 2008
  2. Benjamin Valverde, Le Trafic illicite d'armes légÚres, travail universitaire de DESS de géopolitique, Université Paris-I Panthéon-Sorbonne/ENS, p. 9
  3. Benjamin Valverde, op.cit., p. 16
  4. Arielle Denis, La France vend ses armes, L'Humanité, 11 décembre 2007
  5. Benjamin Valverde, op.cit., p. 65
  6. Benjamin Valverde, op.cit., p. 58
  7. RĂ©sumĂ© du chapitre 3, EnquĂȘte en zone d’ombre - Les transferts irresponsables d'armes lĂ©gĂšres, Small Arms Survey, juillet 2007
  8. Benjamin Valverde, op.cit., p.60
  9. « La loi Onkelinx sur les armes en passe d’ĂȘtre rĂ©formĂ©e », sur RTL Info (consultĂ© le ).
  10. « La Belgique et le commerce des armes | Grip », sur grip.org (consulté le )
  11. (en) ITT fined $100m for shipping night vision goggles to China, The Register, 27 mars 2007
  12. Article L. 2335-2 du code de la défense (matériels de guerre et assimilés) et décret n° 2014-62 du 28 janvier 2014 (autres armes à feu).
  13. « Campagne Control Arms »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?)
  14. Benjamin Valverde, op.cit., p.14
  15. Jean Guisnel, « DerriÚre la guerre du Biafra, la France », in Histoire secrÚte de la Ve République (dir. Roger Faligot et Jean Guisnel), La Découverte, 2006, 2007 (p. 147-154).
  16. Du film à la réalité, plaquette du DVD Lord of War, 2005.
  17. (en) Bulgaria Becomes a Weapons Bazaar, New York Times, 3 août 1998
  18. (en) « Bulgaria: Money Talks - Arms Dealing with Human Rights Abusers »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?), Human Rights Watch, 1 April 1999, D1104
  19. Journée mondiale pour la destruction des armes, Journee-mondiale.com
  20. David Servenay, Congo: quand les soldats de la paix font du trafic d'armes, Rue 89, 28 avril 2008
  21. Le Monde du 13 décembre 2007
  22. RapportSmall Arms Survey conduit par l’Institut universitaire de hautes Ă©tudes internationales de GenĂšve, source d'information retenue par l'ONU pour la surveillance des petites armes dans le monde
  23. Jonathan Franklin, Pinochet and son deny selling cocaine to Europe and US, The Guardian, 12 juillet 2006
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