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Tomboy (film, 2011)

Tomboy est un film français écrit et réalisé par Céline Sciamma sorti en 2011.

Tomboy
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Zoé Héran, interprÚte du rÎle principal, ici à la cérémonie des Prix LumiÚres 2012
Titre original Tomboy
RĂ©alisation CĂ©line Sciamma
Scénario Céline Sciamma
Acteurs principaux
Sociétés de production Hold Up Films
Arte France Cinéma
Pays de production Drapeau de la France France
Genre Comédie dramatique
Durée 84 minutes
Sortie 2011

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Synopsis détaillé

Laure, un enfant de dix ans, « garçon manquĂ© » (tomboy en anglais), s’installe dans une nouvelle ville avec ses parents et sa sƓur Jeanne au cours des vacances d'Ă©tĂ©. Un jour Laure rencontre Lisa Ă  qui elle se prĂ©sente en tant que MickaĂ«l, un garçon. Ses cheveux courts, sa façon de s'habiller et ses allures garçonniĂšres suffisent Ă  ce que Lisa ne se pose pas de question. Lisa introduit alors ce MickaĂ«l auprĂšs des enfants de son groupe d'immeubles et il fait rapidement partie de la bande.

Il a encore si peu de poitrine qu’il peut, torse nu, jouer avec eux au football et nager : pour rendre la chose vraisemblable, il a pris soin de couper le haut de son maillot de bain, ne gardant que le slip, et de mettre un morceau de pĂąte Ă  modeler dans sa culotte pour faire croire qu’il a un pĂ©nis. En jouant au football avec les garçons, alors que ces derniers urinent prĂšs du terrain, il ressent lui-mĂȘme un besoin pressant, et part dans les buissons pour se soulager. Surpris accroupi par un des garçons, il se lĂšve brusquement et urine sur son short. MickaĂ«l observe le garçon qui l'a surpris raconter aux autres comment il s'est « pissĂ© dessus ». Il est humiliĂ©, mais pas dĂ©couvert, et l'affaire semble bientĂŽt oubliĂ©e. La situation se complique car Lisa semble de plus en plus tomber amoureuse de celui qu'elle prend pour un garçon ; un jour, elle l'embrasse et MickaĂ«l lui rend la pareille. Plus tard, Lisa s'Ă©tonne que le prĂ©nom MickaĂ«l ne figure pas sur la liste des Ă©lĂšves attendus Ă  la prochaine annĂ©e scolaire.

En l’absence de Laure alias MickaĂ«l, Lisa vient chez lui. C’est Jeanne, sƓur cadette de Laure, qui lui ouvre. Lorsque Lisa demande MickaĂ«l, Jeanne ne vend pas la mĂšche mais, au retour de Laure, elle menace sa sƓur de tout raconter Ă  leurs parents. Cependant, elle accepte de ne rien dire et en Ă©change Laure/MickaĂ«l l'emmĂšne jouer avec les autres enfants.

Un jour, pour protĂ©ger sa petite sƓur, MickaĂ«l se bat avec l'un des garçons. La mĂšre de ce dernier vient se plaindre Ă  celle de MickaĂ«l, parlant de lui comme d'un garçon. Sa mĂšre comprend alors ce qui s’est passĂ© mais ne rĂ©vĂšle rien sur le moment. DĂšs le lendemain, elle force Laure alias MickaĂ«l Ă  enfiler une robe et l’emmĂšne rĂ©vĂ©ler son secret au garçon et Ă  Lisa. Celle-ci est choquĂ©e. Plus tard, MickaĂ«l observe, cachĂ©, les autres enfants jouant dans la forĂȘt. Ces derniers le dĂ©couvrent et poussent Lisa Ă  vĂ©rifier le sexe de Mickael en le dĂ©culottant (d'abord rĂ©ticente, elle s'exĂ©cute aprĂšs qu'on lui a fait remarquer qu'elle avait embrassĂ© une fille, ce qu'elle reconnaĂźt ĂȘtre « dĂ©goĂ»tant »). AprĂšs cette humiliation, Laure/MickaĂ«l reste quelques jours dans l'appartement. Voyant Lisa seule dans le jardin devant l'immeuble, prĂšs de l'endroit oĂč les deux enfants s'Ă©taient rencontrĂ©s la premiĂšre fois, Laure/MickaĂ«l la rejoint, et lorsque cette derniĂšre lui demande Ă  nouveau son prĂ©nom, Laure/MickaĂ«l lui rĂ©vĂšle son prĂ©nom de naissance.

Fiche technique

Distribution

  • ZoĂ© HĂ©ran : Laure / MickaĂ«l
  • Malonn LĂ©vana : Jeanne, la petite sƓur de Laure
  • Jeanne Disson : Lisa, la nouvelle copine de MickaĂ«l
  • Sophie Cattani : la mĂšre de Laure, enceinte
  • Mathieu Demy : le pĂšre de Laure
  • Rayan Boukekri : Rayan
  • Yohan Vero : Vince, un garçon de la bande
  • Noah Vero : Noah, un garçon de la bande
  • Cheyenne LainĂ© : Cheyenne, une amie de Jeanne
  • Christel Baras : la mĂšre de Lisa
  • ValĂ©rie Roucher : la mĂšre de Rayan

Production

Tomboy est rĂ©alisĂ© avec des moyens et une Ă©quipe plus restreints que ceux de Naissance des pieuvres, le prĂ©cĂ©dent et premier long-mĂ©trage de CĂ©line Sciamma[3]. La production a Ă©tĂ© rapide : l'idĂ©e du film est prĂ©sentĂ©e Ă  la productrice en , le scĂ©nario est Ă©crit en avril, le casting et les recherches de financements sont lancĂ©s en mai ; le tournage, prĂ©parĂ© en trois semaines, a lieu au mois d'aoĂ»t en vingt jours, et est suivi d'une phase de postproduction de dix semaines ; moins de onze mois s'Ă©coulent jusqu'Ă  la premiĂšre projection du film Ă  Berlin[3]. L'Ă©quipe du film, rĂ©duite, comprend une dizaine de personnes[2]. Le tournage a lieu Ă  Vaires-sur-Marne, dans deux dĂ©cors, une forĂȘt et un appartement[2].

Avant sa sortie au cinéma en France, le film est présenté au 61e Festival international du film de Berlin le [4].

Accueil

À sa sortie en France en , le film reçoit un trĂšs bon accueil critique. À la date du , le site AllocinĂ© lui attribuait une note moyenne de 4,23 sur 5, d'aprĂšs les notes envoyĂ©es par vingt-deux titres de presse[5].

À l'automne 2013, le film relance le dĂ©bat sur l'Ă©tude du genre en France, et notamment sur son supposĂ© enseignement Ă  l'Ă©cole[6]. Tomboy a Ă©tĂ© en effet inscrit en septembre 2012 dans le dispositif « École et cinĂ©ma », soutenu par le ministĂšre de l'Éducation nationale et par le ministĂšre de la Culture, qui entend initier les Ă©lĂšves Ă  la culture cinĂ©matographique. La polĂ©mique part entre autres de la ville de Niort, oĂč une mĂšre de famille envoie Ă  l'instituteur de son enfant une lettre oĂč elle estime « tout Ă  fait dangereux de laisser penser Ă  des enfants de 9 ans que l'on peut changer de sexe, qui plus est sans dommage »[7]. Dans un contexte de reprise des manifestations contre le mariage homosexuel, une pĂ©tition intitulĂ©e « Non Ă  la diffusion du film Tomboy dans les Ă©coles ! » est lancĂ©e fin novembre, affichant 16 650 signatures le [6].

Le taux de satisfaction des enseignants parisiens ayant visionné Tomboy est quant à lui trÚs élevé, 79 % d'entre eux jugeant le film « trÚs intéressant » (en comparaison, seul le film Peau d'ùne avait obtenu un score plus élevé avec 84 %). De son cÎté, l'instance ayant décidé de la diffusion de ce film dans les écoles en juge dans son rapport qu'il faut « faire confiance à la capacité d'analyse des élÚves et ne pas projeter des peurs d'adultes sur ce que pourraient penser des enfants »[7].

À l'occasion de sa diffusion tĂ©lĂ©visĂ©e sur la chaĂźne franco-allemande Arte, l'association catholique Civitas lance une pĂ©tition visant Ă  l'empĂȘcher[8]. RĂ©unissant prĂšs de 40 000 signatures en ligne, la pĂ©tition reste sans effet : le film est bien diffusĂ© le mercredi Ă  20h50 et rĂ©unit 1,25 million de tĂ©lĂ©spectateurs (4,9 % de part de marchĂ©)[9], soit une des meilleures audiences de l'histoire de la chaĂźne.

RĂ©ception queer du film

Représentation d'un enfant queer et transidentité

Le film Tomboy de CĂ©line Sciamma Ă©voque la thĂ©matique du genre pendant l’enfance, et notamment les questionnements que celui-ci peut provoquer chez les enfants.

Le genre est considĂ©rĂ© comme une performance par Judith Butler[10], c’est-Ă -dire que dĂšs la naissance, les individus apprennent Ă  performer une identitĂ© de genre, qu’elle soit masculine ou fĂ©minine. Rien de nos gestes « fĂ©minins » ou « masculins » ne seraient alors innĂ©s, puisque que tout est social. Le film de Sciamma se conçoit dans cette lignĂ©e. CĂ©line Sciamma a par ailleurs affirmĂ© que Tomboy rĂ©vĂ©lait les pressions que les garçons doivent endurer pour performer leur masculinitĂ©[11] .

Le film met en scĂšne le personnage de Laure/MickaĂ«l qui est dĂ©fini comme « tomboy », c’est-Ă -dire un garçon manquĂ©. Mais plus qu’un garçon manquĂ©, il veut ĂȘtre perçu comme un garçon tout court. Cela se fait par des signes et comportements extĂ©rieurs, Ă  savoir des paroles, des crachats, jouer au football, se battre, etc. En reproduisant les comportements masculins attendus par la sociĂ©tĂ©, il montre qu’ils ne sont pas innĂ©s (et donc performatifs dans le sens de Butler). Mais le film va plus loin, en abordant la notion du corps et ici, du corps masculin. La masculinitĂ© est poussĂ© Ă  son comble puisqu’il arrive Ă  mettre en scĂšne le signifiant le plus puissant de la virilitĂ©, le phallus, par cette prothĂšse construite par ses soins[12].

Le film tente Ă©galement de montrer comment les enfants font tĂŽt dans leur vie l’expĂ©rience d’une identitĂ© queer, bien avant de pouvoir la nommer[13].

Approche phénoménologique du genre

Le corps est l’objet central du film, CĂ©line Sciamma disait ainsi en 2011 « Le corps, c’est les limites [et] l’objet du film »[12] . On peut alors Ă©mettre une analyse phĂ©nomĂ©nologique du genre dans Tomboy.

Maurice Merleau-Ponty, qui a contribuĂ© au dĂ©veloppement du courant philosophique de la phĂ©nomĂ©nologie, expliquait ainsi que le corps est le moyen par lequel nous expĂ©rimentons le monde et notre environnement, c’est par une expĂ©rience physique et corporelle du monde que l’on se trouve. Il Ă©crivait ainsi que « nous sommes au monde par notre corps [
]. Mais en reprenant ainsi contact avec le corps et avec le monde, c’est aussi nous-mĂȘme que nous allons retrouver »[14]. Dans le film, c’est par la transformation partielle de son corps que Laure/MickaĂ«l essaie de s’immiscer dans la peau d’un garçon, et de paraĂźtre garçon aux yeux de la sociĂ©tĂ©. C’est ainsi qu’il rencontre Lisa dans la peau d’un garçon, il fait l’expĂ©rience de la rencontre dans un corps dĂ©fini comme masculin.

Un film qui peine à dépasser la binarité des genres

MalgrĂ© la volontĂ© de construire un personnage dont l’identitĂ© genrĂ©e est fluide, il faut rappeler que Laure/MickaĂ«l est avant tout dĂ©fini comme un « tomboy », c’est-Ă -dire une fille qui aurait l’apparence et le comportement attendus chez un garçon. Cela signifie donc que il ne se conçoit pas totalement par les notions d’homosexualitĂ©, de transidentitĂ© ou d’intersexualitĂ©. Le titre mĂȘme du film, Tomboy, montre que Laure/MickaĂ«l est compris comme une femme qui ne rĂ©pond pas aux attendus de son genre, qui prĂ©fĂšre faire comme les garçons, mais cela nous place alors dans une vision des genres encore trĂšs binaires[15].

Distinctions

Musique du film

Always est l'unique musique présente dans le film. Elle a été composée par Para One et Tacteel, et est sortie sur un album du nom de Fair Enough le 12 juillet 2011.

Notes et références

  1. « Tomboy, la BO », Cinezik, avril 2011 ; page consultée le 10 mai 2011.
  2. « L'enfance d'un film », dans Les Cahiers du cinéma, février 2011, p. 57.
  3. « L'enfance d'un film », dans Les Cahiers du cinéma, février 2011, p. 56.
  4. « 11.02 Tomboy de Céline Sciamma », article dans Arte Journal sur le site de la chaßne Arte le 11 février 2011. Page consultée le 18 avril 2011.
  5. Page « Critiques Presse pour le film Tomboy » sur le site Allociné. Page consultée le 23 avril 2011.
  6. Clarisse Fabre, « Le film « Tomboy » relance le débat sur la question du genre », sur Le Monde.fr, (consulté le ).
  7. Clarisse Fabre, « Une pétition s'oppose à la projection de « Tomboy » dans les écoles », sur Le Monde.fr, (consulté le ).
  8. « "Tomboy" : Civitas lance un nouvel appel à la censure » AccÚs libre, sur nouvelobs.com, L'Obs, (consulté le ).
  9. « « Tomboy » rencontre un beau succĂšs sur Arte », sur madmoiZelle.com, (consultĂ© le ).
  10. Sylvie ThiĂ©blemont-Dollet, « Judith Butler, Trouble dans le genre. Pour un fĂ©minisme de la subversion, trad. de l’amĂ©ricain par C. Kraus », Questions de communication, no 9,‎ (ISSN 1633-5961 et 2259-8901, DOI 10.4000/questionsdecommunication.7983, lire en ligne, consultĂ© le )
  11. Darren Waldron, « Embodying Gender Nonconformity in ‘Girls’: CĂ©line Sciamma’s Tomboy' », L'Esprit CrĂ©ateur, vol. 53, no 1,‎ , p. 60–73 (ISSN 1931-0234, DOI 10.1353/esp.2013.0001, lire en ligne, consultĂ© le )
  12. Darren Waldron, « Embodying Gender Nonconformity in ‘Girls’: CĂ©line Sciamma’s Tomboy », L'Esprit CrĂ©ateur, vol. 53, no 1,‎ , p. 60–73 (ISSN 1931-0234, DOI 10.1353/esp.2013.0001, lire en ligne, consultĂ© le )
  13. Zach Green, « Haptic Aesthetics and Queer Space in the New Queer Coming of Age Film » [PDF], (consulté le )
  14. Aron Gurwitsch, « Maurice Merleau-Ponty, PhĂ©nomĂ©nologie De La Perception (Paris: Librairie Gallimard, 1945), Xvi and 531 pp. », dans Phaenomenologica, Springer Netherlands, (ISBN 978-90-481-2830-3, lire en ligne), p. 487–490
  15. (en) VILCHEZ Jennifer, « The Controversy Around Tomboy: the Aversion to Gender Theory in French Education and Culture », ĐšŃƒĐ»Ń‚ŃƒŃ€Đ°/Culture,‎ , p. 116 (lire en ligne)
  16. « Ausente de Marco Berger et Tomboy de Céline Sciamma récompensés aux Teddy Awards 2011 », article de Yannick Barbe sur Yagg le 20 février 2011. Page consultée le 18 avril 2011.
  17. Page « Récompenses et nominations » du film sur allociné. Page consultée le 18 avril 2011.
  18. Communiqué de presse (fichier pdf) sur le site du festival.
  19. Le Masque et la Plume, émission du 19 février 2012 sur France Inter.
  20. (en) « 33rd Annual Young Artist Awards », YoungArtistAwards.org (consulté le )

Annexes

Articles connexes

Liens externes

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