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Toluène (maladie professionnelle)

Une intoxication au toluène ou au xylène peut être reconnue comme maladie professionnelle en France.

Cet article relève du domaine de la législation sur la protection sociale et a un caractère davantage juridique que médical. Pour la description clinique des effets sur la santé se reporter à l'article suivant :

LĂ©gislation en Drapeau de la France France

Régime général

Fiche Maladie Professionnelle

Ce tableau définit les critères à prendre en compte pour qu'une affection gastro-intestinale provoquée par le benzène, le toluène ou le xylène soit prise en charge au titre de la maladie professionnelle

Régime Général[1]. Date de création :

Tableau no 4 bis RG

Affections gastro-intestinales provoquées par le benzène, le toluène, les xylènes et tous les produits en renfermant

DĂ©signation des maladies DĂ©lai de prise en charge Liste indicative des principaux travaux susceptibles de provoquer ces maladies
Troubles gastro-intestinaux apyrétiques accompagnés de vomissements à répétition. 7 jours Opérations de production, transport et utilisation du benzène,du toluène, des xylènes et autres produits en renfermant, notamment :

Préparation des carburants renfermant du benzène, du toluène et des xylènes, transvasement, manipulation de ces carburants, travaux en citerne ;

  • OpĂ©rations de sĂ©chage de tous les produits, articles, prĂ©parations, substances oĂą le benzène, le toluène, les xylènes (ou les produits en renfermant) interviennent comme agents d'extraction, d'Ă©lution, de sĂ©paration, d'imprĂ©gnation, d'agglomĂ©ration, de nettoyage, de concentration et comme dĂ©capant, dissolvant ou diluant.
  • Emploi du benzène comme dĂ©shydratant des alcools et autres substances liquides ou solides ;

Date de mise Ă  jour :

RĂ©gime agricole

Fiche Maladie Professionnelle

Ce tableau définit les critères à prendre en compte pour qu'une affection gastro-intestinale provoquée par le benzène, le toluène ou le xylène soit prise en charge au titre de la maladie professionnelle

Régime Agricole[2].. Date de création :

Tableau no 19 bis RA

Affections gastro-intestinales provoquées par le benzène, le toluène, les xylènes et tous les produits en renfermant

DĂ©signation des Maladies DĂ©lai de prise en charge Liste indicative des principaux travaux susceptibles de provoquer ces maladies
Troubles gastro-intestinaux apyrétiques accompagnés de vomissements à répétition. 7 jours Emploi du benzène, du toluène, des xylènes et de tous les produits en renfermant comme agents d'extraction, d'élution, d'imprégnation, d'agglomération ou de nettoyage, de décapage, de dissolution ou de dilution.
Troubles neurologiques : (Cf. tableau 48 a). Cf tableau 48 a Opérations de séchage de tous les produits, articles, préparations, substances où le benzène, le toluène, les xylènes ou les produits en renfermant sont intervenus au cours des opérations ci-dessus énumérées.
Préparation et emploi des vernis, peintures, émaux, mastics, colles, encres, produits d'entretien contenant du benzène, du toluène, des xylènes ou des produits en renfermant.

Date de mise Ă  jour :

Données professionnelles

Le toluène sert :

  • Ă  Ă©lever l'indice d'octane dans les carburants, mĂ©langĂ© avec du benzène et des xylènes. Il est donc prĂ©sent dans divers carburants pĂ©troliers.
  • de solvant d’extraction dans l’industrie cosmĂ©tique (parfum) et dans l’industrie pharmacochimique
  • comme solvant ou Ă©lĂ©ment de fabrication de peintures, vernis, laques, cires et encres(imprimerie..),
  • de produit de dĂ©part pour divers procĂ©dĂ©s industriels : synthèse du caoutchouc, du phĂ©nol, du TNT, du diisocyanate de toluène (TDI), nĂ©cessaire pour obtenir la mousse de polyurĂ©thane, benzène et xylènes, nitrotoluène, chlorure de benzyle, benzaldĂ©hyde, acide p-toluènesulfonique, vinyltoluène, etc.
  • pour la fabrication d'adhĂ©sifs et de colles,
  • pour le tannage du cuir.

Toxicologie, écotoxicologie, précautions & métabolisme

C'est un produit nocif et écotoxique (souvent présent dans certains sols industriels pollués). Sa toxicité aiguë est faible, mais il a comme premiers organes-cibles le système nerveux central (cerveau, moelle). C'est aussi un irritant pour la peau, l'œil et le système respiratoire.

Chez l'animal de laboratoire, l'exposition à des taux significatifs de toluène induit des symptômes généraux : hyperactivité, irritation de la peau et surtout des muqueuses (écoulement nasal, larmes), irritation des voies respiratoires, avec essoufflement. À des taux d'exposition supérieurs à 2000 ppm dans l'air, le stade suivant est celui d'une narcose (ataxie, dégradation des fonctions cognitives, troubles de l’équilibre et altérations neurochimiques. La mort est due à un arrêt respiratoire induit par une déplession du système nerveux central).
L'irritation augmente selon la durée d'exposition et la dose ; chez le lapin, un érythème modéré puis un œdème léger apparaissent après 72 h, irréversibles à 7 jours, et - chez le lapin toujours - un rinçage de l'œil exposé après 4 et 30 secondes ne diminuent pas l’intensité de l’irritation.

Sa toxicité chronique a été étudié chez l'animal de laboratoire (souris, rat) chez lequel on observe :

  • une augmentation de poids de divers organes impliquĂ©s dans la dĂ©toxication (foie, rein par exemple après exposition Ă  1250 ppm durant 15 jours chez le rat... Ă  2500 ppm le rat grossi, avec augmentation du poids du cerveau, du cĹ“ur, des poumons et des testicules, avec des symptĂ´mes de dyspnĂ©e et d'ataxie).
  • une modification du taux de neurotransmetteurs
  • une neurotoxicitĂ© affectant notamment l’hippocampe et le cervelet (avec altĂ©ration de l'audition[3] - [4])
  • une exposition longue (2 ans Ă  1500 ppm)chez le rat a induit une inflammation des muqueuses nasales avec Ă©rosion de l’épithĂ©lium olfactif, mĂ©taplasie et dĂ©gĂ©nĂ©rescence de l’épithĂ©lium respiratoire, mais en dessous de 300 ppm, aucun symptĂ´me n'a Ă©tĂ© observĂ© (La NOAEL ou concentration sans effet toxique observĂ© Ă©tait de 625 ppm pour une exposition de 6,5 heures par jour, 5 jours par semaine durant 15 semaines ; ou de 300 ppm sur une durĂ©e d'exposition de 2 ans. Par voie orale, la NOEL Ă©tait pour le rat et la souris de 625 mg/kg/j pendant 13 semaines)[5] - [6].

Le toluène ne semble pas avoir d'effets sur l'ADN in vivo, alors qu'il en a in vitro.

Via la peau ou par inhalation, il ne semble pas cancérogène[7] - [8] - [9] - [10], mais en tant que solvant pourrait contribuer à l'entrée dans l'organisme de produits cancérigènes.

Le toluène est reprotoxique[11] (altération de la fécondité à des taux où il n'est pas toxique pour la mère, chez le rat). Il altère aussi la fertilité des mâles via une altération de la spermatogenèse et/ou peut-être du fonctionnement de l'épididyme : réduction de 20 % du nombre de spermatozoïdes sans réduction de leur mobilité sous 6000 ppm. Au-delà, le nombre de spermatozoïdes diminue, ainsi que leur mobilité, mais sans modification de poids des testicules ou de la spermatogenèse testiculaire, et sans altération du taux d'hormones après un mois d’exposition[17]. La fertilité n'est pas affectée en deçà de 600 ppm.
Il passe facilement dans l'embryon, induisant au-delà de 600 ppm chez l'animal (pas de donnée pour l'homme) un retard de croissance et de poids à la naissance et des troubles psychomoteurs postnataux qui traduisent la neurotoxicité du toluène pour le cerveau embryonnaire, bien que sans malformations externes[12] - [13], y compris par inhalation[14]. Il n’est pas réputé tératogène in vivo ni in vitro. L’UE l’a classé toxique pour la reproduction, catégorie 3, R 63.

Cinétique dans l'organisme

MĂŞme sous forme liquide il franchit mal la barrière de la peau (14 Ă  23 mg/cm2/h) et sous forme vapeur encore moins (4,6 ÎĽg/cm2/h pour la souris nude exposĂ©e Ă  1 000 ppm, alors que de la peau de rat, in vitro, en absorbe 0,78 ÎĽg/cm2/min[15].).

Il traverse cependant aisément la muqueuse pulmonaire, dans les deux sens (10-20 % du toluène ingéré et/ou inhalé est ensuite excrété sous forme de vapeur via l'expiration). Le taux de benzène exhalé augmente après ingestion d'alcool éthylique, ce dernier inhibant le métabolisme du toluène, ce qui diminue son excrétion sous urinaire.

L'inhalation de vapeurs de toluène est nocive. À hautes doses, elle induit des nausées. L'inhalation chronique de toluène de façon prolongée provoque des dommages irréversibles au cerveau. À partir des poumons, il est transporté par le sang, pour moitié fixé à l'hémoglobine et pour moitié dans le sérum (chez l'homme... Chez le rat, il est majoritairement véhiculé par le sérum). Il est détectable dans le sang 10 à 15 minutes après le début de l’exposition (à un taux d'autant plus élevé que le taux de benzène était élevé dans l'air respiré ; le degré d’absorption (50 % environ de la concentration) dépendant aussi du taux de ventilation pulmonaire. On peut donc supposer que les joggers courant à proximité d'un grand axe de circulation y sont plus exposés. Il passe rapidement dans le cerveau : des rats expérimentalement exposés montrent un pic dans le sang 53 minutes après l'exposition et 5 minutes plus tard (58 min) dans le cerveau (riche en tissus gras). On le trouve aussi dans les moelles osseuse et épinière, les tissus adipeux, le foie et les reins.

Le toluène est également très bien absorbé via le tractus gastro-intestinal ; avec (chez l’homme et le rat) un pic détectable dans le sang environ deux heures après son ingestion.

Il est à peine filtré par la barrière placentaire ; chez le rat, la concentration dans le fœtus est environ 75 % de celle du sang maternel. Le lait maternel, s'il en contient en permet aussi le transfert de la mère à l'enfant(chez l’homme et l’animal).

La toxicité du toluène s'explique par son métabolisme. Comme le toluène est très faiblement soluble dans l'eau, il ne peut pas quitter l'organisme par les voies traditionnelles (urine, fèces, transpiration). Il doit être métabolisé pour être excrété. Le groupe méthyle du toluène s'oxyde plus facilement que le noyau aromatique. Cette réaction est réalisée dans le foie par les monooxygénases à cytochromes P450. Il s'ensuit que 95 % du toluène est transformé en alcool benzylique. Ce sont les 5 % restants qui créent les métabolites toxiques, les époxydes du noyau aromatique. La grande majorité de ces époxydes est conjuguée à la glutathione, cependant le peu qui parvient à s'échapper endommage gravement la machinerie cellulaire en allant alkyler certaines protéines, voire l'ADN.

Le toluène est excrété principalement via l'urine sous forme d'acide benzoïque - obtenu par oxydation enzymatique de l'alcool benzylique - et sous forme d'acide hippurique obtenu par conjugaison de l'acide benzoïque avec la glycine.

Le métabolisme de l'alcool benzylique
Le métabolisme de l'alcool benzylique

Synergies

De nombreuses synergies sont probables, car le toluène est un puissant solvant. On sait par exemple que l'association toluène - xylène induit par compétition métabolique, une augmentation du taux (sanguin et cérébral) de toluène[15].

Valeurs limites d’exposition professionnelle contraignantes

Il en existe dans certains pays. Par exemple en France, elles sont de 50 ppm soit 192 mg/m3 (pour 8 h) et de 100 ppm soit 384 mg/m3 (pour une exposition de court terme, ou 15 min)[16]. Aux États-Unis, ce seuil est plus bas (50 ppm Ă  ne pas dĂ©passer pour 8 h d'exposition).

Notes et références

  1. « les tableaux du régime Général », sur Bossons futés
  2. « Tous les tableaux du régime Agricole », sur Bossons futés
  3. Campo P et al. Toluene-induced hearing loss: A mid-frequency location of the cochlear lesions. Neurotoxicology and Teratology, 1997; 19: 129-40.
  4. Campo P et al. Combined effects of simultaneous exposure to toluene and ethanol on auditory function in rats. Neurotoxicology and Teratology, 1998; 20: 321-332.
  5. Guillot J-P et al. Evaluation of the cutaneous-irritation potential of 56 compounds. Food and Chemical Toxicology, 1982; 20: 563-572.
  6. Guillot J-P et al. Evaluation of the ocular-irritation potential of 56 compounds. Food and Chemical Toxicology, 1982; 20: 573-582.
  7. Toxicity summary for toluene. Toxicity profiles, Risk Assessment Information System; 1994. Consultable sur le site http://risk.lsd.ornl.gov/tox/rap_toxp.shtml
  8. Toxicology and carcinogenesis studies of toluene (Cas no 108-88-3) in F344/N Rats and B6C3F1 Mice (Inhalation Studies). Toxicity Review TR- 371, NTP; 1990. lien NIEHS
  9. Toluene. ln: IARC monographs on the evaluation of carcinogenic risks to humans. Lyon: IARC, 1999; 71 (2); 829-864.
  10. Toxicology and carcinogenesis studies of toluene (Cas no 108-88-3) in F344/N Rats and B6C3F1 Mice (Inhalation Studies). Toxicity Review TR-371, NTP; 1990. tr371.html Site NIEHS
  11. Toluène. DEMETER. Documents pour l’évaluation médicale des produits toxiques vis-à-vis de la reproduction. INRS, 2006
  12. Dalgaard M et al. – Developmental toxicity of toluene in male rats : effects on semen quality, testis morphology, and apoptotic neurodegeneration. Archives of Toxicology, 2001; 75 (2): 103-109.
  13. Wilkins-Haug L – Teratogen update: toluene. Teratology, 1997; 55: 145-151.
  14. Ono A et al. – Toluene inhalation induced epididymal sperm dysfunction in rats. Toxicology, 1999, 139 (3): 193-205.
  15. Fiche toxicologique INRS, accessible via les liens externes de cette page
  16. Art. R. 231-58 du Code du travail français

Sources spécifiques

Sources générales

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