The Family of Man
« The Family of Man » est une exposition de photographies organisĂ©e par Edward Steichen pour le musĂ©e dâart moderne de New York (MoMa) en 1955.
Elle est prĂ©sentĂ©e Ă Paris en 1956, au musĂ©e dâArt moderne de la ville de Paris, sous le titre de « La grande famille des hommes », et Roland Barthes lui consacre alors un article critique dans le cadre de ses Mythologies.
ExposĂ©e de maniĂšre permanente Ă Clervaux, au Grand-DuchĂ© de Luxembourg, « The Family of Man » est inscrite en 2003 au registre de la MĂ©moire du monde de lâUNESCO.
Historique
Présentée comme « la plus grande exposition photographique de tous les temps[1] », « The Family of Man » est conçue dans les années 1950 par le photographe américain et directeur du département photographie du MoMa, Edward Steichen, et par son assistant, Wayne Miller.
Ă partir de 1951, Steichen et ses assistants rassemblent des images notamment par le biais dâannonces pour contacter des photographes, mais aussi en consultant les archives dâagences comme Magnum ou celles de Life Magazine[2].
Elle est inaugurée le , au MoMa, et réunit 503 photographies de 273 photographes, professionnels et amateurs, renommés ou inconnus, en provenance de 68 pays[1].
Lâexposition parcourt ensuite le monde entier, sâarrĂȘtant notamment en Allemagne, Ă Berlin, dĂšs 1955 ; en France, sous le titre « La grande famille des hommes » au musĂ©e dâArt moderne de la ville de Paris ainsi quâau Japon, Ă Tokyo en 1956, mais aussi en Afrique du Sud, en Inde, au Mexique, au Zimbabwe, en Australie, en Russie, etc.
Elle est vue par plus de dix millions de visiteurs entre 1955 et 1962, au fil dâexpositions dans plus de 160 musĂ©es diffĂ©rents[2].
En 1964, Steichen ayant fait le vĆu quâelle soit remise au Luxembourg, son pays natal, le gouvernement des Ătats-Unis lâoffre au Grand-DuchĂ©, qui lâexpose au chĂąteau de Clervaux[2].
De 1974 Ă 1989, la collection est exposĂ©e partiellement Ă Clervaux, puis fait lâobjet dâune restauration avant dâĂȘtre installĂ©e en tant quâexposition permanente[2].
La collection est prĂ©sentĂ©e de nos jours en respectant sa conception originelle, selon la mise en scĂšne de lâĂ©poque, que Steichen voulait « moderniste et spectaculaire »[2]. Elle est entiĂšrement composĂ©e de tirages originaux de photographies noir et blanc, collĂ©s sur des panneaux de bois. Tous les tirages datent de 1955 ; leur format varie de 24 Ă 36 cm Ă 300 Ă 400 cm[2].
Un portrait humaniste de lâhumanitĂ©
« The Family of Man » brosse un portrait de lâhumanitĂ©, insistant sur les diffĂ©rences entre les hommes mais aussi leur appartenance Ă une mĂȘme communautĂ©. Elle sâorganise autour de 37 thĂšmes tels que lâamour, la foi en lâhomme, la naissance, le travail, la famille, lâĂ©ducation, les enfants, la guerre et la paix. Lâintention de Steichen Ă©tait de montrer lâuniversalitĂ© de lâexpĂ©rience humaine, mais aussi la formidable capacitĂ© de la photographie Ă rendre compte de cette expĂ©rience universelle.
Le musĂ©e de Clervaux prĂ©sente « The Family of Man » « comme une collection d'instantanĂ©s et d'Ă©motions qui visent Ă faire passer un message de paix en pleine guerre froide. [...] les rĂ©actions des visiteurs tĂ©moignent encore aujourd'hui de l'impact de ces images toujours d'actualitĂ© â et dont certaines sont devenues des icĂŽnes de l'histoire de la photographie[2]. »
La prĂ©sentation musĂ©ographique de la collection souligne que « de l'aveu mĂȘme d'Edward Steichen, The Family of Man est l'Ćuvre la plus importante de sa carriĂšre. Elle est Ă la fois insolite et visionnaire pour l'Ă©poque, tant par son approche photographique que scĂ©nographique : les photographies sont choisies selon leur puissance Ă©vocatrice, tandis que la scĂ©nographie immerge le visiteur dans un essai photographique[2]. »
En 2003, la collection est inscrite au registre de la MĂ©moire du monde de lâUNESCO[2] :
« The Family of Man, tout en Ă©tant devenu un monument lĂ©gendaire de lâhistoire de la photographie, dĂ©passe de trĂšs loin le cadre dâune exposition dans le sens classique du terme. Elle peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme la mĂ©moire de toute une Ă©poque, marquĂ©e par la guerre froide et le maccarthysme, mais aussi par les attentes et les dĂ©sirs de paix de millions dâhommes et de femmes dans le monde entier[3]. »
Photographes participants
Liste non exhaustive
- Berenice Abbott
- Ansel Adams
- Allan Arbus
- Diane Arbus
- EugĂšne Atget
- Richard Avedon
- Ăva BesnyĆ
- Werner Bischof
- Ădouard Boubat
- Margaret Bourke-White
- Bill Brandt
- Manuel Ălvarez Bravo
- BrassaĂŻ
- Harry Callahan
- Robert Capa
- Henri Cartier-Bresson
- Roy DeCarava
- Jack Delano
- Robert Doisneau
- David Douglas Duncan
- Nora Dumas
- Alfred Eisenstaedt
- Elliott Erwitt
- Louis Faurer
- Andreas Feininger
- Robert Frank
- Ernst Haas
- Hiroshi Hamaya
- Tana Hoban
- Frank Horvat
- Yasuhiro Ishimoto
- Izis
- Ihei Kimura
- Dorothea Lange
- Russell Lee
- Helen Levitt
- Jean Marquis
- Lee Miller
- Lisette Model
- Hedda Morrison
- Carl Mydans
- Lennart Nilsson
- Ruth Orkin
- Gordon Parks
- Irving Penn
- Willy Ronis
- Vero (Werner Rosenberg)
- August Sander
- Ăric Schwab
- David Seymour
- Ben Shahn
- Gotthard Schuh
- George Silk
- William Eugene Smith
- Edward Steichen
- François Tuefferd
- Jakob Tuggener
- Ed van der Elsken
- William Vandivert
- Pierre Verger
- Roman Vishniac
- Todd Webb
- Sabine Weiss
- Edward Weston
- Garry Winogrand
Restauration
Lâexposition est restaurĂ©e entre 1989 et 1991 : la restauration est dirigĂ©e par Jean Back, Ă la suite de lâexpertise dâAnne Cartier-Bresson. Silvia Berselli et son Ă©quipe consacrent 2 000 heures Ă ce travail.
Lâexposition restaurĂ©e rencontre un nouveau succĂšs Ă Toulouse, Tokyo et Hiroshima de 1993 Ă 1994 avant son retour au musĂ©e de Clervaux. Le musĂ©e ouvre ses portes le , en respectant lâagencement de lâexposition de 1955.
Une deuxiÚme campagne de restauration a été menée pendant les années 2010-2013. La restauration a été effectuée en collaboration avec le Studio Berselli de Milan, Italie (Silvia Berselli, Roberta Piantavigna, Francesca Vantellini, Isabel Dimas)[4].
Postérité
Lâentreprise de Steichen est restĂ©e unique en son genre. Plusieurs expositions photographiques sâen sont plus ou moins inspirĂ©es comme « The Family of Children » et « The Family of Woman » par Jerry Mason, et lâExposition mondiale de la photographie, organisĂ©e dans les annĂ©es 1960 par Karl Pawek en Allemagne, et prĂ©sentĂ©e Ă Paris, au musĂ©e des arts dĂ©coratifs, dans les annĂ©es 1970.
Catalogue
- The Family of Man, album de lâexposition, publiĂ© pour le Museum of Modern Art, New York, par Maco Magazine Corporation, 1955. PrĂ©face de Carl Sandburg, introduction dâEdward Steichen, citations de Albert Einstein, James Joyce, William Blake, Thomas Jefferson, Saint-John Perse, Bertrand Russell, Platon, Montaigne, etc.
Critique
The Family of man, vue par des millions de spectateurs dans des dizaines de pays à travers le monde, véhicule depuis son origine un message « humaniste » différemment apprécié des spécialistes[3].
Elle demeure une source de débats et de controverses parmi les critiques comme Roland Barthes, Susan Sontag et Hilton Kramer[5].
Roland Barthes[6], dans son ouvrage Mythologies paru en 1957, reproche Ă Edward Steichen « de promouvoir un universalisme de la nature humaine en sâappuyant sur un humanisme issu dâun dogme religieux[3]. »
Eric J. Sandeen[7] considĂšre « que lâexposition a servi dâoutil de propagande aux Ătats-Unis dâAmĂ©rique[3]. »
Bibliographie critique
- Claude Dupuis, « The Family of Man : rĂ©flexions autour des usages et de la patrimonialisation dâune exposition photographique controversĂ©e », Diacronie. Studi di Storia Contemporanea, nos 19, 3,â (DOI 10.4000/diacronie.1582, lire en ligne)
- (en) Gerd Hurm, Anke Reitz et Shamoon Zamir, The Family of Man Revisited: Photography in a Global Age, I.B. Tauris & Co. Ltd, (ISBN 978-1784539672, présentation en ligne)
- (en) Eric J. Sandeen, Picturing an Exhibition: The Family of Man and 1950s America, Albuquerque, University of New Mexico Press, , 227 p. (ISBN 0-8263-1558-5, présentation en ligne)
Notes et références
- Sous-titre de l'album publié en 1955.
- CNA, « "The Family of Man" Mémoire du Monde de l'UNESCO », sur steichencollections-cna.lu, Centre national de l'audiovisuel du Grand Duché du Luxembourg (consulté le ).
- Claude Dupuis, « "The Family of Man" : rĂ©flexions autour des usages et de la patrimonialisation dâune exposition photographique controversĂ©e », Diacronie. Studi di Storia Contemporanea, vol. 3, no 19,â (ISSN 2038-0925, DOI 10.4000/diacronie.1582, lire en ligne, consultĂ© le ).
- « The Family of Man », sur Steichen Collections CNA (consulté le )
- « Lancement international du livre âThe Family Of Man Revisited : Photography in a Global Ageâ », sur Culture.lu, .
- Roland Barthes, « La grande famille des hommes », in ID., Mythologies, Paris, Le Seuil, 1970, p. 806.
- Eric J. Sandeen, Picturing an Exhibition: The Family of Man and 1950s America, Albuquerque, University of New Mexico Press, , 227 p. (ISBN 0 8263 1558 5).
Liens externes
- Site officiel du Musée The Family of Man, Clervaux, Luxembourg
- Plateforme de ressources et dâoutils pĂ©dagogiques