Accueil🇫🇷Chercher

William Eugene Smith

William Eugene Smith, connu sous le diminutif familier de « Gene Smith Â» ou encore comme « W. Eugene Smith Â» (nĂ© le Ă  Wichita, Kansas - mort le Ă  Tucson, Arizona), est un photojournaliste amĂ©ricain, photographe de guerre pendant la Guerre du Pacifique.

William Eugene Smith
Biographie
Naissance
Décès
Surnom
E. Gene Smith
Nationalité
Formation
Université de Notre-Dame-du-Lac (à partir de )
Wichita North High School (en)
Activités
Période d'activité
Enfant
Kevin Smith (d)
Autres informations
Membre de
Représenté par
Kevin Smith (d)
Distinctions
Ĺ’uvres principales
Tomoko Uemura in Her Bath (d)

Sa rigueur et son exigence en ont fait un modèle pour des gĂ©nĂ©rations de photographes, attachĂ©s Ă  la valeur du tĂ©moignage que permet la photographie. W. Eugene Smith Ă©tait, au sens littĂ©ral du terme, ce que les AmĂ©ricains appellent un « concerned photographer Â», un photographe engagĂ©, qui utilisait son appareil photographique comme une arme pour dĂ©fendre ses idĂ©es.

Biographie

Adolescent, il est fortement intéressé par l’aviation, ce qui est assez naturel à Wichita qui compte plusieurs usines d’aviation (Cessna, Boeing) et débute en photographie. En 1933, il rencontre le photographe de presse Frank Noel, qui le conseille, et commence rapidement à publier des photos dans les journaux locaux (le Wichita Eagle, et le Wichita Beacon). En 1935-1936, il fait des reportages sur les événements sportifs, l’aviation, les catastrophes naturelles. C’est l’époque du Dust Bowl et de la grande misère des fermiers du Midwest.

En 1936, il étudie la photo pendant un semestre à l’université Notre-Dame du Lac de South Bend (Indiana) puis à l’Institut de photographie de New York. Il détruira le travail de ces premières années par la suite, le jugeant techniquement insuffisant et manquant de profondeur.

Dès 1938, il travaille pour Newsweek mais est licenciĂ© parce qu’il a utilisĂ© un appareil de petit format (± 6 x 6) contrairement aux règles du magazine (Ă  cette Ă©poque les reporters utilisent en gĂ©nĂ©ral un Speed Graphic 4 Ă— 5 inches, alors que Smith dĂ©fend le petit format qui donne « une plus grande libertĂ© de vision ») puis il intègre l’agence Black Star et publie des photos dans Life Magazine, Collier’s, The New York Times et Harpers Bazaar.

Smith est rapidement intĂ©grĂ© au staff de Life qui l’engage pour rĂ©aliser deux reportages par mois. Il quitte le magazine en 1941, insatisfait de la routine qu’impose une publication rĂ©gulière et devient photographe indĂ©pendant. Il jugera par la suite qu’il a mal utilisĂ© sa libertĂ©, produisant des photos montrant « une grande profondeur de champ mais une très faible sensibilitĂ©[1]. Â» Il travaille notamment pour le magazine Parade, reconnu pour la qualitĂ© de ses documents photographiques. Il est blessĂ© par une explosion de dynamite lors d’une sĂ©ance de photos de conditions de combats simulĂ©es.

Correspondant de guerre dans le Pacifique

En 1942, Smith est invité à rejoindre l’unité photographique de la Navy (Naval Photographic Institute) dirigée par Edward Steichen, mais sera refusé par la commission de sélection pour « insuffisance physique et académique » : il souffre en effet d’une audition déficiente, conséquence de l’accident avec la dynamite, et ne possède pas de diplôme universitaire[2]. Il est néanmoins engagé par la Ziff Davis Publishing Company comme correspondant de guerre dans le Pacifique sud et embarque sur un porte-avions. Il réalise des prises de vue aériennes, en mer et sur terre de la campagne des îles Marshall, revient brièvement à San Francisco en 1944, puis repart pour le Pacifique comme correspondant pour Life. Il quitte Ziff Davis parce qu’il s’aperçoit que près de la moitié de ses photos sont censurées. Il semble qu’il ait trop montré les souffrances des populations civiles. Il photographie aussi bien les combats que leurs conséquences sur la population japonaise ; c’est alors qu’il développe dans son travail le thème de la responsabilité sociale du reporter qui restera présent durant toute sa vie. Il a toujours voulu être au plus près de son sujet (selon son expression « sink into the heart of the picture » : plonger au cœur de l’image), et c’est ainsi qu’il est gravement blessé lors des combats à Okinawa le et qu'il est rapatrié.

Smith a été touché par un éclat d’obus qui lui a traversé la main gauche et la joue. Il subit une trentaine d’opérations et sa rééducation dure deux ans. Il a cru perdre la possibilité de tenir encore un jour un appareil photo en main.

Une Ă©thique du photojournalisme

Durant sa convalescence, il publie des articles et des interviews et insiste sur son attachement à une éthique du photojournalisme. La première photo qu’il réalise au terme de cette période difficile est The Walk to Paradise Garden, une photo de ses enfants devenue ultra-célèbre mais qui est refusée par Life car les personnages tournent le dos à l’objectif[3].

Smith travaille à plein temps pour Life jusqu’à sa démission en 1954 à la suite d'un désaccord de plus en plus profond sur la façon dont la revue modifie les légendes de ses photos et l’usage qui en est parfois fait. Le sujet de rupture sera la publication du reportage sur Albert Schweitzer, alors considéré par Life comme le plus grand homme de son époque. Smith, tout en reconnaissant son travail humanitaire, le trouve autoritaire et raciste et veut montrer par un reportage en deux parties la complexité du personnage. Life publiera une version abrégée conforme au sentiment de l’époque sur le médecin, prix Nobel de la paix en 1952.

Smith rejoint l’agence Magnum en 1955 et va Ă  Pittsburgh pour un reportage, qui devrait durer trois semaines, et pour lequel il doit fournir une centaine de photos Ă  l’occasion du bicentenaire de la ville. Il va y travailler durant trois ans et en ramener plus de 10 000 images, sans l’accord ni le soutien de l’agence ; cela entraĂ®nera sa ruine malgrĂ© deux bourses reçues de la fondation Guggenheim, en 1956 et 1958, car aucune revue ou agence n’accepte de financer un tel projet. Il refuse une proposition de 21 000 $ pour une publication partielle car on ne lui accorde pas le contrĂ´le du choix des images, de leurs lĂ©gendes et de la mise en page. Il y aura une publication de 88 photos dans la revue Photography Annual de 1959, pour laquelle il ne touchera que 1 900 $ mais dont il aura le contrĂ´le total.

En 1956, Smith rĂ©alise sa première commande en couleurs pour l’American Institute of Architects lors d’un travail sur l’architecture moderne. Des tirages gĂ©ants de 3,50 m seront rĂ©alisĂ©s Ă  cette occasion.

En 1957, il quitte sa famille et s’installe seul dans un loft de la Sixième avenue à New York où il commence un travail de longue haleine sur des images de rue prises de sa fenêtre et des photos de musiciens lors de jam sessions ou de séances d’enregistrement. Il enseigne à la New School for Social Research, et quitte Magnum en 1958.

En 1961-1962, il fait un reportage de deux ans sur la firme Hitachi au Japon et, en 1971, il s’installe avec sa seconde épouse Eileen Mioko, également photographe, à Minamata, une petite ville du Japon, afin de suivre les effets de la pollution industrielle. Il y passe quatre ans dans le dénuement le plus complet. Victime de violences de la part d’employés de la firme Chisso, responsable de la pollution, il perd presque la vue et doit être rapatrié d’urgence aux États-Unis. La publication de 11 photos dans Life puis d’un livre sur le sujet ont un retentissement mondial. C'est au cours de ce reportage qu'il réalise la très célèbre photo Le Bain de Tomoko, devenue une icône du photojournalisme.

En 1975, Smith est présent à Arles, pour montrer en avant-première, lors d'une soirée pleine d'émotion, aux Rencontres internationales de la photographie, le résultat de ce travail réalisé avec sa femme pour documenter les conséquences sur la population de la pollution au mercure de la baie de Minamata, au Japon, par les rejets en mer d'une usine chimique.

Sa volontĂ© d’implication personnelle dans les sujets de ses reportages a rĂ©volutionnĂ© cette nouvelle forme de photojournalisme, pour l’époque, appelĂ©e « essai photographique ». Insistant sur la responsabilitĂ© sociale du photographe, il a dĂ©veloppĂ© tout au long de sa carrière une Ă©thique Ă  laquelle il s’est tenu sans dĂ©vier et est devenu un modèle pour beaucoup de reporters qui l’ont suivi.

En 1976, Smith dĂ©pose ses archives (11 tonnes !) Ă  l'universitĂ© d'Arizona, Ă  Tucson, oĂą il enseigne.

Il meurt d’un infarctus deux ans plus tard, avec 18 $ sur son compte en banque…

Postérité

Le prix W. Eugene Smith, prix de photojournalisme, dotĂ© de 30 000 $ est dĂ©cernĂ© chaque annĂ©e depuis 1980 par l'International Center of Photography de New York. Il est destinĂ© Ă  aider et encourager les photographes travaillant indĂ©pendamment des courants de la mode et des impĂ©ratifs Ă©conomiques de l’édition pour rendre compte des aspects importants du monde actuel.

Publications dans Life Magazine

Année 1944

  • SaĂŻpan. 28.08.44, 11 photos sur la bataille de SaĂŻpan en
  • Hospital on Leyte. 5.12.44, 9 photos sur un hĂ´pital installĂ© dans la cathĂ©drale de Leyte (Philippines)
  • Marines win bloody, 12.03.45, 4 photos sur la bataille d’Iwo Jima
  • The Battlefield of Iwo. 09.04.45, 13 photos, dont celle de couverture
  • American Battle for Okinawa. 20.09.48, 18 photos sur l’attaque de l’île

Années 1948-1949

  • Country doctor. 20.09.48, 28 photos sur le Dr Ceriani, mĂ©decin de campagne au Colorado
  • Life without germs. 26.09.49, 18 photos sur un programme expĂ©rimental de bactĂ©riologie de l’universitĂ© Notre-Dame (Indiana)

Années 1950

  • Recording artists. 26.03.51, 22 photos sur des musiciens dans les studios d’enregistrement de RKO-Victor et de Columbia
  • Spanish village. 09.04.51, 17 photos sur Deleitosa, un village d’EstrĂ©madure
  • Nurse Midwife. 03.12.51, 30 photos sur la vie de Maud Callen, sage-femme en Caroline du Sud
  • Chaplin at work. 17.03.52, 31 photos de Charlie Chaplin pendant le tournage de Limelight
  • The Reign of Chemistry. 05.01.53, 18 photos sur les activitĂ©s de Monsanto
  • My Daughter Juanita, 21.09.53, 17 photos dont celle de couverture, sur sa fille
  • A Man of mercy. 15.11.54, 25 photos sur le Dr Albert Schweitzer Ă  LambarĂ©nĂ© (Gabon)
  • Drama beneath a city window. 10.03.58, 14 photos prises de son loft Ă  New York

Année 1963

  • Colossus of the Orient. 30.08.63, 13 photos sur Hitachi au Japon

Année 1972

  • Death flow from a pipe, 02.06.72, 11 photos sur la pollution Ă  Minamata, Japon

Citations

  • Ă€ propos de Maud Callen :
« Je voulais pointer du doigt le racisme en montrant simplement une femme remarquable faisant un travail remarquable dans une situation impossible. Â»
  • Ă€ propos des photos de guerre :
« Je voulais que mes images portent un message contre la cupiditĂ©, la stupiditĂ© et l’intolĂ©rance qui sont causes de ces guerres. Â»

Expositions

Bibliographie

  • W. Eugene Smith, collection Photo Poche, Ă©dition du Centre national de la Photographie
  • W. Eugene Smith. His photographs and notes, Museum of Modern Art Edition. 1969
  • Let Truth be the Prejudice. W. E. Smith: his life and photographs, Aperture Foundation
  • Minamata. New York: Holt, Rinehart and Winston, 1975. By Smith and Aileen M. Smith

Filmographie

Notes et références

  1. « A great depth of field, a very little depth of feeling. »
  2. Le comitĂ© de trois amiraux qui statue sur son cas dira que « quoiqu’il apparaisse comme un gĂ©nie dans son domaine, il ne se montre pas Ă  la hauteur des standards de l’US Navy. »
  3. C’est cette photo qui clĂ´turera l’exposition « The Family of Man Â», 503 photos choisies dans un ensemble de 4 000 000 venues du monde entier, qu’Edward Steichen monte Ă  partir de 1951 (prĂ©sentĂ©e pour la première fois au MOMA en 1955) et qu’on peut encore voir actuellement au château de Clervaux.

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.