Sun Quan
Sun Quan ( - ) (chinois : ć«æŹ ; chinois simplifiĂ© : ćæ ; pinyin : ), avec Zhongmou (ä»ČèŹ / ä»Čè°, ) pour prĂ©nom social, Ă©tait un seigneur de guerre chinois Ă l'Ă©poque de la fin de la dynastie Han, et le premier empereur de la dynastie des Wu occidentaux lors du dĂ©but de la pĂ©riode des trois royaumes. Comme de nombreuses personnalitĂ©s de son Ă©poque Sun Quan fut immortalisĂ© dans le Roman desdits Trois Royaumes de Luo Guanzhong.
En 200 Sun Quan hĂ©rite de la rĂ©gion du Jiangdong, thĂ©oriquement sous vasselage de l'empereur Xiandi de la dynastie Han mais gardant une trĂšs grande indĂ©pendance de par sa position gĂ©ographique. Sun Quan protĂ©gea l'indĂ©pendance de son territoire en sortant victorieux de la bataille de la Falaise Rouge en 208. En 220, Ă la chute des Han, il renouvela son serment de vassalitĂ© envers la nouvelle dynastie Wei, mais proclama son indĂ©pendance en 222 en fondant le royaume de Wu dont il se donna le titre d'empereur le [1]. AprĂšs sa mort, il lui succĂšde son fils Sun Liang et reçut le titre posthume de grand empereur des Wu occidentaux (æ±ćłć€§çćž).
Son rÚgne se caractérise initialement par une gestion trÚs efficace de l'administration et une sélection rigoureuse de ses conseillers, mais se détériore aprÚs les années 230 lorsqu'il commet plusieurs erreurs de jugement qui aboutissent à des défaites militaires et l'aliÚne temporairement de son état-major. La fin de son rÚgne est marqué par des crises de succession et des affaires de cour.
Il est le fils de Sun Jian et de Wu Guotai, le petit frĂšre de Sun Ce et le grand frĂšre de Sun Yi et de Sun Shangxiang.
Sa concubine préférée était Bu Lian, qui lui donna deux filles, Sun Luban et Sun Luyu.
Biographie
Sun Quan Grand empereur des Wu occidentaux |
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Noms |
Chinois traditionnel (simplifiĂ©) : ć«æŹ (ćæ) |
Pinyin: SĆ«n QuĂĄn |
EFEO : Souen Tsâiuan ou Souen Kâiuan |
Wade-Giles : Sun ChâĂŒan |
PrĂ©nom social : ZhĂČngmĂłu (ä»ČèŹ) |
Nom japonais : Sonken ChĆ«bĆ |
Nom corĂ©en : Songweon Jungmo (ìê¶ ì€ëȘš) |
Nom vietnamien : TĂŽn Quyá»n Trá»ng MÆ°u |
Noms de rĂšgne |
Nom de temple : Taizu (« grand ancĂȘtre ») ć€Șç„ |
Titre posthume : Grand empereur des Wu occidentaux (æ±ćłć€§çćž) |
Ăres de rĂšgne |
Jeunesse
Sun Quan naßt vers 182. Il est le cadet des quatre fils du seigneur de guerre Sun Jian, et le petit frÚre du guerrier Sun Ce. D'aprÚs les Mémoires du fleuve Yangzi[2], il naßt à Xiapi, lorsque son pÚre était alors député. Il a la mùchoire carrée, la bouche grande et les yeux brillants. Il est d'un naturel humain, ayant les idées larges et aimant se lier d'amitié avec les personnalités héroïques.
Toujours selon les MĂ©moires du fleuve Yangzi, dans les annĂ©es qui suivent la mort de Sun Jian en 191, lorsque Sun Ce part Ă la conquĂȘte du Jiangdong, Sun Quan l'accompagne. MalgrĂ© sa jeunesse, Sun Quan se fait trĂšs vite un nom dans la rĂ©gion et sa cĂ©lĂ©britĂ© est comparable Ă celle de son pĂšre et de son frĂšre aĂźnĂ©. Il participe aux rĂ©unions d'Ă©tat-major, et son talent impressionne grandement Sun Ce.
Ă 14 ans, Sun Quan reçoit de Sun Ce le poste de chef du district de Yangxian (éœçŸšé·), qui se trouve au sud de l'actuelle ville-district de Yixing dans la province de Jiangsu.
En 199, le seigneur de guerre Cao Cao doit lancer une campagne contre son rival Yuan Shao et craint que Sun Ce n'en profite pour l'attaquer. Il propose Ă Sun Ce plusieurs mariages entre leurs clans, et fait pression sur le gouverneur de la rĂ©gion pour que celui-ci recommande Sun Quan Ă la cour en tant que « Talent accompli » (èæ) lors de l'examen xiaolian. Sun Quan est en consĂ©quence nommĂ© « commandant faisant respecter la justice » (ć„çŸ©æ Ąć°). Cette mĂȘme annĂ©e, il accompagne Sun Ce dans son expĂ©dition contre Liu Xun, le grand administrateur de Lujiang, puis contre Huang Zu Ă Shaxian.
Prise de succession
Le , Sun Ce est griÚvement blessé dans une tentative d'assassinat. Sur son lit de mort, il fait officiellement de Sun Quan son successeur.
D'aprĂšs les MĂ©moires du fleuve Yangzi, Li Shu, qui avait Ă©tĂ© nommĂ© grand administrateur de Lujiang (ćșæ±) par Sun Ce, refuse de reconnaĂźtre Sun Quan comme successeur et fomente une rĂ©bellion. Sur les conseils de Cao Cao, Sun Quan lance une expĂ©dition punitive. Li Shu, qui comptait sur l'aide de Cao Cao et ignorait que celui-ci agissait de concert avec Sun Quan, est vite vaincu et exĂ©cutĂ©. Sa ville est rasĂ©e et les trente mille survivants sont relogĂ©s.
Sous les conseils de Zhang Zhao, Sun Quan abandonne le deuil pour prendre en main la direction des affaires de la rĂ©gion et achever les conquĂȘtes commencĂ©es par Sun Ce. Cao Cao le recommande Ă l'empereur pour qu'il soit nommĂ© « gĂ©nĂ©ral punissant les criminels » (èšèć°è») et grand administrateur de Kuaiji (æçšœć€Șćź), correspondant Ă l'actuelle ville de Yuyao. Il l'envoie se poster dans la rĂ©gion du Wu et lui envoie un assistant administratif.
Sun Quan s'attache Ă©galement les services des anciens conseillers de gĂ©nĂ©raux de son pĂšre et de son frĂšre : il prend Zhang Zhao comme tuteur et conseiller principal et nomme gĂ©nĂ©raux le stratĂšge Zhou Yu, le conseiller LĂŒ Fan et le militaire Cheng Pu. Il part ensuite Ă la recherche de nouveaux talents et recrute Yan Jun, Lu Su et Zhuge Jin.
Ălargissement
Chronologie des événements importants | |
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182 | Naissance Ă Xiapi. |
196 | Nommé chef du district de Yangxian. |
199 | Est nommĂ© « talent accompli »lors de lâexamen xiaolian, sous la pression de Cao Cao. |
200 | Mort de Sun Ce. Sun Quan prend la direction de ses terres et de son armée. |
208 | Alliance avec Liu Bei. Gagne la bataille de la Falaise Rouge contre Cao Cao. |
211 | DĂ©place sa capitale Ă Molin. |
212 | Sort vainqueur de la bataille de Ruxu. |
214 | Violente dispute avec Liu Bei concernant les territoires de la province de Jing. AprĂšs plusieurs escarmouches, la province est divisĂ©e et lâalliance rĂ©tablie. |
215 | Subit une violente défaite à Hefei. |
217 | Signe la paix avec Cao Cao. |
219 | Sort vainqueur de la lutte contre Guan Yu. Conquiert la totalité de la province de Jing. |
Dans les annĂ©es qui suivent, Sun Quan sâatĂšle Ă pacifier les rĂ©gions aux alentours : en 203, il lance une expĂ©dition navale contre Huang Zu et lui inflige une dĂ©faite, mais ne parvient pas Ă capturer sa base dâopĂ©rations. Il envoie LĂŒ Fan pour pacifier Poyang (Ă l'est de l'actuel district de Poyang dans le Jiangxi), Cheng Pu Ă Lean (l'est de l'actuelle ville-district de Dexing), Taishi Ci Ă Haihun (l'actuel district de Yongxiu). Il charge Hang Dang, Zhou Tai et LĂŒ Meng de la gestion des divers districts.
En 205, il envoie He Qi pour capturer Shangrao qui servira de base pour construire le district de Jianping (l'actuel district de Jianyang dans le Fujian). En 207, il lance une nouvelle campagne Ă lâouest contre Huang Zu, qu'il renouvelle au printemps 208. La flotte de Huang Zu est dĂ©passĂ©e par les tactiques du gĂ©nĂ©ral LĂŒ Meng et Huang Zu s'enfuit, mais est capturĂ© par des bandits qui offrent sa tĂȘte Ă Sun Quan. Cette mĂȘme annĂ©e, Sun Quan envoie He Qi pour attaquer les districts de Yi (Ă l'est de l'actuel district de Yi) et de She.
Bataille de la Falaise Rouge
Prélude
Vers , Liu Biao, le protecteur de la province de Jing, meurt et Sun Quan dĂ©pĂȘche Lu Su pour assister aux funĂ©railles, prĂ©senter ses condolĂ©ances aux fils de Liu Biao, et observer la situation. Mais avant que Lu Su n'arrive, la province de Jing s'est soumise Ă Cao Cao. Lu Su fait cependant la rencontre du guerrier Liu Bei lorsque ce dernier manifeste son intention d'affronter Cao Cao. Ă la bataille de Changban (éżć), Liu Bei subit une sĂ©vĂšre dĂ©faite et se rĂ©fugie Ă Xiakou (ć€ćŁ). Il envoie son stratĂšge Zhuge Liang auprĂšs de Sun Quan pour nĂ©gocier une alliance.
Affrontement
En faisant la conquĂȘte du Jing, Cao Cao semble tenir dĂ©sormais une position de choix pour attaquer Sun Quan, d'autant qu'il avait renforcĂ© son armĂ©e avec les anciens soldats de Liu Biao. Sun Quan organise une rĂ©union d'Ă©tat-major pour dĂ©cider de la marche Ă suivre. La plupart de ses gĂ©nĂ©raux sont d'avis de se soumettre Ă Cao Cao, mais le stratĂšge Zhou Yu, appuyĂ© par Lu Su s'y oppose de façon vĂ©hĂ©mente et considĂšre que malgrĂ© leur infĂ©rioritĂ© numĂ©rique, de nombreux facteurs font qu'il est possible de rĂ©sister Ă Cao Cao. Sun Quan dĂ©cide de faire confiance Ă Zhou Yu et lui offre le commandement de l'armĂ©e ainsi qu'Ă Cheng Pu et donne Ă chacun dix mille soldats et l'envoie rejoindre l'armĂ©e de Liu Bei.
L'affrontement entre les forces de la coalition Sun Quan â Liu Bei et celles de Cao Cao a lieu en novembre Ă la Falaise Rouge (au nord-ouest de l'actuelle ville de Chibi, ou au nord-est de Jiayu). D'aprĂšs les MĂ©moires du fleuve Yangzi, Cao Cao dispose alors d'une armĂ©e de 800 000 hommes tandis que la coalition dispose de vingt fois moins d'hommes. La bataille s'achĂšve pourtant par une sĂ©vĂšre dĂ©faite pour Cao Cao qui perd sa flotte dans un incendie et plus de la moitiĂ© de ses hommes en raison d'Ă©pidĂ©mies. Cao Cao doit battre en retraite.
Ă la suite de cette victoire, Sun Quan donne Ă Liu Bei sa sĆur Sun Shangxiang en mariage.
Suites
Sun Quan et Liu Bei tentent d'assurer leurs positions et de tenter de capturer les territoires abandonnĂ©s par Cao Cao dans sa fuite : vers , Sun Quan dirige en personne une expĂ©dition pour capturer Hefei (ćè„) et envoie Zhang Zhao pour attaquer le district de Dangtu (au sud-est de l'actuel district de Haiyuan). Cependant les efforts de Sun Quan et Zhang Zhao ne sont pas couronnĂ©s de succĂšs et aprĂšs quelques mois de siĂšge, Sun Quan doit abandonner et se retirer lorsque arrivent les renforts de Cao Cao.
Vers janvier-, aprÚs presque un an de siÚge, Zhou Yu parvient à forcer Cao Ren à fuir, et prend possession du district de Nanjun (actuel district de Jiangling) dont Sun Quan le nomme grand administrateur. Il nomme également Liu Bei général et lui offre la charge de protecteur de la province de Xu, puis protecteur de la province de Jing[3].
En 210, Sun Quan entreprend une réforme des frontiÚres administratives de son territoire, puis en 211, déplace sa capitale à Molin (l'actuelle Nankin), fait construire le chùteau de Dantou (à l'ouest de Nankin), puis en 212 installe définitivement sa capitale administrative à Molin.
Bataille de Ruxu
En 212, apprenant que Cao Cao avait l'intention de lancer une nouvelle campagne contre lui, Sun Quan fait construire des murailles à l'embouchure de la riviÚre Ruxu. En , Cao Cao attaque Ruxu, mais est tenu en respect par les fortifications de Sun Quan. AprÚs un mois, voyant l'organisation de l'armée de Sun Quan, il abandonne le siÚge.
Selon lâHistoire du Wu[4], au cours de cette campagne, Cao Cao perd plusieurs milliers d'hommes lors des batailles navales. Sun Quan tente de le provoquer Ă mener ouvertement bataille, parfois en se prĂ©sentant en personne, mais Cao Cao, Ă©chaudĂ© par ses dĂ©faites navales et suspectant une ruse, n'y rĂ©pond pas. Il soupire : « Que j'aimerais avoir un fils comme Sun Zhongmou ! En comparaison les fils de Liu Jingsheng sont tels des porcs et des chiens[5] ! » Sun Quan envoie plus tard Ă Cao Cao une lettre : « Les eaux du printemps seront bientĂŽt lĂ . Monseigneur, il est temps que vous vous retiriez. » Voyant l'organisation de l'armĂ©e de Sun Quan, Cao Cao dĂ©cide de se retirer, estimant que Sun Quan ne profitera pas de sa retraite pour l'attaquer.
Selon le Wei LĂŒe[6], Cao Cao fit tirer ses archers sur les navires de Sun Quan si bien que le poids des flĂšches menaçaient de les faire chavirer. Voyant cela, Sun Quan demanda Ă ses vaisseaux de se retourner afin que les nouvelles flĂšches Ă©quilibrent leur poids, puis se retira.
PremiĂšres tensions contre le Shu
En , Sun Quan part Ă l'assaut du chĂąteau de Wan (correspondant Ă l'actuel district de Qianshan) et au mois suivant[7] le capture, faisant prisonnier Lu Jiang, le grand administrateur de Zhuguang, et son conseiller militaire, Dong He.
Cette mĂȘme annĂ©e, Liu Bei conquiert la rĂ©gion de Shu (correspondant Ă peu prĂšs Ă l'actuelle province de Sichuan). Voyant que Liu Bei avait conquis un fief, Sun Quan envoie auprĂšs de lui Zhuge Jin afin de lui demander de lui restituer la province de Jing. Liu Bei refuse, et demande que Sun Quan attende le temps qu'il s'empare de la province de Liang. IrritĂ© par le refus de Liu Bei, Sun Quan envoie des mandarins pour prendre la direction de la province Ă la place de Liu Bei, mais ils sont chassĂ©s par le gĂ©nĂ©ral Guan Yu.
Cette fois vĂ©ritablement furieux, Sun Quan envoie LĂŒ Meng, Xian Yudan, Xu Zhong et Sun Gui avec vingt mille hommes pour reprendre possession des districts de Changsha, Lingling (l'actuelle Yongzhou) et Guiyang (l'actuelle Chenzhou). Il dĂ©pĂȘche Ă©galement Lu Su avec dix mille hommes pour dĂ©fendre Baqiu (le mont Baling, dans l'actuelle ville de Yueyang) contre Guan Yu. Sun Quan s'installe Ă l'embouchure du fleuve Lu pour superviser l'armĂ©e.
LĂŒ Meng capture Changsha et Guiyang, mais ne parvient pas Ă venir Ă bout de Hao Pu, le grand administrateur de Lingling. De son cĂŽtĂ©, Liu Bei envoie Guan Yu Ă Yiyang avec trente mille hommes, forçant Sun Quan Ă rappeler LĂŒ Meng pour assister Lu Su. LĂŒ Meng parvient entre-temps Ă soumettre Hao Pu par la ruse, accomplissant sa mission initiale. Suivant les ordres de Sun Quan, il fusionne son armĂ©e avec celles de Lu Su, Sun Jiao et Pan Zhang pour affronter Guan Yu Ă Yiyang.
Néanmoins, l'affrontement n'a pas lieu : l'armée de Cao Cao vient de pénétrer Hanzhong, lui offrant une place stratégique de choix pour envahir le Shu. Liu Bei signe en toute hùte la paix avec Sun Quan et la province de Jing est divisée : les districts de Changsha, Jiangxia et Guiyong reviennent à Sun Quan, ceux de Nanjun, Lingling et Wuling (ouest de l'actuelle Changde) à Liu Bei.
Bataille de Hefei
Vers septembre-, Sun Quan monte une expédition de plusieurs dizaines de milliers d'hommes pour assiéger à nouveau Hefei, mais sa campagne se montre infructueuse. Alors qu'il lÚve le camp, il est attaqué par l'armée des généraux Zhang Liao, Li Dian et Yue Jin. Sun Quan est dépassé par les événements et manque de peu de se faire tuer, devant se défendre avec sa hallebarde (Il perd d'ailleurs Taishi Ci, qui tout comme Sun Ce, le protégeait).
D'aprÚs les Mémoires du fleuve Jiangzi, sa seule voie de sortie est un pont sur la riviÚre, mais celui-ci est détruit sur une distance de plus d'un zhang (environ 2,4 m). Son cheval parvint néanmoins à sauter par-dessus le pont, permettant à Sun Quan de fuir le champ de bataille.
Soumission au Wei â Nouvelles tensions avec le Shu
En , Cao Cao, maintenant roi de Wei, prépare une nouvelle campagne contre Sun Quan et, en , attaque Ruxu. Sun Quan décide d'envoyer un émissaire pour négocier la paix avec Cao Cao. Des mariages sont alors arrangés entre les deux familles pour sceller l'alliance.
En 219, le général Guan Yu harcÚle le général Cao Ren, menaçant de prendre des positions stratégiques vitales pour Cao Cao. Ce dernier tente de détourner l'attention de Guan Yu en donnant d'une part l'ordre à Sun Quan d'attaquer Guan Yu, et de l'autre en tentant d'inciter Guan Yu à attaquer Sun Quan. Guan Yu refuse de s'en prendre à Sun Quan, mais Sun Quan fait le premier geste et attaque Guan Yu au mois de décembre.
Sun Quan charge LĂŒ Meng de mener la campagne contre Guan Yu, et celui-ci marque de nombreuses victoires, forçant Guan Yu Ă battre en retraite et Ă trouver refuge dans le district de Dangyang dans le chĂąteau de Mai (sud-est de l'actuelle Dangyang). La situation se montre alors critique pour Guan Yu et Sun Quan, qui Ă©prouvait beaucoup de respect pour Guan Yu, lui offre de se rendre. Guan Yu fait initialement mine de soumettre, puis fait attacher des banniĂšres et faux soldats pour donner l'illusion d'une grosse armĂ©e protĂ©geant le chĂąteau, espĂ©rant ainsi pendant un temps couvrir sa fuite. Guan Yu est finalement capturĂ© avec son fils Guan Ping en et tous deux sont exĂ©cutĂ©s, permettant Ă Sun Quan d'achever la conquĂȘte de la province de Jing.
Pour le rĂ©compenser de ses victoires, Cao Cao recommande Sun Quan Ă l'empereur pour qu'il soit nommĂ© gĂ©nĂ©ral de la cavalerie blanche (é©éšć°è»). Il l'officialise Ă©galement dans son rĂŽle de protecteur de Jing (èć·ç§), et lui confĂšre le titre de marquis de Nanchang (ćæäŸŻ).
Fondation du royaume de Wu
En mars 220, Cao Cao meurt et son fils Cao Pi lui succĂšde. Quelques mois plus tard, il force lâempereur Xiandi Ă abdiquer, mettant fin Ă la dynastie Han, et se proclame premier empereur de la dynastie Cao Wei. En , il est imitĂ© par Liu Bei qui fonde sa propre dynastie, celle des Shu Han.
Sun Quan, qui avait sans succÚs par le passé tenté de pousser Cao Cao à se proclamer empereur, transmet ses félicitations à Cao Pi.
Sun Quan renomme le district de E de Gongâan[8] en Wuchang, crĂ©e la prĂ©fecture de Wuchang (æŠæ)[9] Ă partir des districts de Wuchang, Xiazhi[10], Xunyang[11], Yangxin[12], Chaisang[13] et sây installe en .
Au mois de dĂ©cembre Cao Pi dĂ©cerne Ă Sun Quan le titre de roi de Wu (ćłç) et lui transmet les neuf sacrements[14].
Cao Pi demande que Sun Quan lui envoie son fils Sun Deng Ă la capitale comme otage, mais Sun Quan refusa, arguant que Sun Deng Ă©tait encore trop jeune. Sun Quan nomme ensuite Sun Deng son hĂ©ritier. DâaprĂšs les MĂ©moires du fleuve Jiangzi, devant le refus de Sun Quan, Cao Pi exige de Sun Quan un tribut grandiose : argent, perles, dĂ©fenses dâĂ©lĂ©phant, cornes de rhinocĂ©ros, jade, faisans, Ă©meraudes, canards de Dou et poulets de Changming. Sun Quan estime cependant quâil sâagit dâun faible prix pour garder son fils Ă ses cĂŽtĂ©s.
En , Liu Bei lance une attaque contre Sun Quan. Ce dernier envoie Lu Xun, qui reste sur la dĂ©fensive plusieurs mois, avant de soudain passer Ă lâoffensive au mois de juillet, et inflige Ă Liu Bei une dĂ©faite Ă©crasante lors la bataille de Yiling.
Au mois de septembre, comprenant que Sun Quan nâenverra pas dâotage Ă la capitale, Cao Pi lui envoie plusieurs armĂ©es pour assiĂ©ger ses villes : Cao Xiu, Zhang Liao, et Zang Ba Ă Dongkou ; Cao Ren Ă Ruxu ; Cao Zhen, Xiahou Shang, Zhang He et Xu Huang Ă Jiangling. De son cĂŽtĂ©, Sun Quan dĂ©pĂȘche LĂŒ Fan avec cinq armĂ©es et parvient Ă rĂ©sister efficacement Ă chaque siĂšge. Entretemps, les tribus Yue vivant sur les terres de Sun Quan se rebellent, poussant ce dernier Ă demander Ă Cao Pi de lever le siĂšge. Cao Pi accepte de lever le siĂšge Ă la condition que Sun Quan renouvelle son allĂ©geance et que Sun Deng lui soit envoyĂ© comme otage.
Sun Quan refuse et déclare son indépendance en proclamant une nouvelle Úre puis interrompt les relations diplomatiques avec le Wei. La séparation de la Chine en trois royaumes et alors effective. La situation au front se faisant mauvaise aprÚs la chute de Xuling, il envoie un émissaire auprÚs de Liu Bei pour entamer les négociations pour une nouvelle alliance.
Vers fĂ©vrier-mars 223, Cao Pi envoie Cao Zhen pour tenter de capturer Jiangling et de couper le territoire de Sun Quan en deux. Vers avril-mai, Cao Ren envoie le gĂ©nĂ©ral Cheng Diao avec 5 000 hommes pour tenter de traverser le fleuve Ruxu. Cependant toutes les tentatives du Wei Ă©chouent et ils battent en retraite. Sun Quan est alors pressĂ© par ses conseillers pour qu'il se proclame lui-mĂȘme empereur, mais il refuse et se contente du titre de « Roi de Wu ».
Roi et Empereur du Wu
Au dĂ©but de rĂšgne de Sun Quan, lâadministration du Wu est connue pour son efficacitĂ©, car le nouveau roi sait prendre en compte les bons conseils et dĂ©lĂ©guer des pouvoirs aux personnes appropriĂ©es. Par exemple, il s'appuie sur ses fidĂšles conseillers Lu Xun et Zhuge Jin pour gouverner; au point de faire fabriquer un double du sceau impĂ©rial qu'il confie a Lu Xun. Chaque fois quâil correspond avec lâempereur Liu Shan du Shu ou le rĂ©gent Zhuge Liang, il soumet systĂ©matiquement la lettre Ă Lu Xun, qui est en poste Ă proximitĂ© de la frontiĂšre du Shu. Si Lu pense que des changements sont nĂ©cessaires, il modifie la lettre de son propre chef, avant de la refermer avec son double du sceau impĂ©rial des Sun. En outre, Lu Xun et Zhuge Jin sont autorisĂ©s Ă coordonner leurs actions avec celles du Shu sans avoir Ă demander l'autorisation prĂ©alable de Sun Quan. Il traite ses hauts responsables comme amis et lorsqu'il s'adresse Ă eux il utilise toujours leurs noms de courtoisie. En retour, ces derniers consacrent tous leurs efforts Ă prĂ©server le Wu de la destruction. Il sait aussi quels sont les postes appropriĂ©s pour les fonctionnaires en qui il a confiance. Par exemple, en 225, alors qu'il doit choisir un chancelier, il se trouve que tous les hauts fonctionnaires de son gouvernement respectent grandement Zhang Zhao et souhaitent que le poste lui soit attribuĂ©. Sun Quan raisonne diffĂ©remment et calcule que, mĂȘme si lui aussi respecte grandement Zhang, il doit prendre en compte le fait qu'un chancelier doit gĂ©rer toutes les affaires de lâĂtat. Or, si Zhang est trĂšs compĂ©tent, il a aussi des opinons tranchĂ©es et un fort caractĂšre, ce qui ne peut que dĂ©boucher sur des conflits incessants avec Sun Quan et les autres hauts fonctionnaires. Il confie donc le poste de Chancelier Ă un autre de ses conseillers. A contrario, il promeut Ă plusieurs reprises un officiel nommĂ© LĂŒ Fan malgrĂ© le jeune Ăąge de ce dernier. En effet, LĂŒ Fan avait mis en garde Sun Ce, le frĂšre aĂźnĂ© de Sun Quan, par rapport Ă ses dĂ©penses d'habillement qu'il jugeait excessives. GrĂące Ă cette mise en garde, Quan a compris que Fan Ă©tait d'une loyautĂ© absolue envers son frĂšre et a dĂ©cidĂ© de l'en rĂ©compenser aprĂšs la mort de Sun Ce par le biais de ces promotions.
En 224 et 225, Cao Pi attaque Ă nouveau le Wu ; mais chaque fois les forces du Wu repoussent celles du Wei avec une telle facilitĂ© que Cao Pi finit par dire que « le Ciel a crĂ©Ă© le YangtsĂ© pour sĂ©parer le Nord et le Sud ». Cependant, les efforts de Sun Quan pour lancer des attaques majeures contre le Wei ne rencontrent guĂšre plus de succĂšs. Ainsi, aprĂšs la mort de Cao Pi en 226, Sun Quan lance une attaque contre la Commanderie de Jiangxia[15], qui appartient au Wei, mais il est obligĂ© de se retirer dĂšs lâarrivĂ©e des renforts du Wei. Cependant, un peu plus tard la mĂȘme annĂ©e, il renforce son emprise sur la province de Jiao (äș€ć·)[16] grĂące Ă une victoire de son gĂ©nĂ©ral LĂŒ Dai sur le seigneur de la guerre Hui Shi (ćŁ«ćŸœ) qui met fin Ă lâindĂ©pendance de fait des territoires du clan Shi. En outre, plusieurs royaumes indĂ©pendants situĂ©s dans la zone qui correspond actuellement au Cambodge, au Laos et au sud du Vietnam deviennent des vassaux du Wu.
Selon le Liang Shu, une des 24 chroniques relatant l'histoire de la Chine, un marchand de lâEmpire romain (Da Qin) arrive Ă Jiaozhi, prĂšs de l'actuelle ville de HanoĂŻ, en l'an 226[17] - [18]. Le prĂ©fet de Jiaozhi l'envoie Ă Nanjing, auprĂšs de Sun Quan[17] qui lui demande un rapport dĂ©taillĂ© sur son pays natal et ses habitants[18]. AprĂšs quoi, une expĂ©dition est prĂ©parĂ©e pour permettre au marchand de retourner chez lui, accompagnĂ© de dix femmes et dix hommes « nains de couleur noire » qu'il a demandĂ©s comme une curiositĂ© et d'un officier chinois qui, malheureusement, meurt en route[18] - [19].
Lâune des grandes victoire du Wu sur le Wei a lieu durant cette pĂ©riode, en 228, lors de la bataille de Shiting. Avec lâapprobation de Sun Quan, son gĂ©nĂ©ral Zhou Fang fait semblant de faire dĂ©fection au profit du Wei, aprĂšs avoir reçu plusieurs punitions factices pour parfaire sa couverture. La ruse fonctionne et le gĂ©nĂ©ral Cao Xiu du Wei, guidĂ© par Zhou Fang, part vers le sud Ă la tĂȘte d'une grande armĂ©e. Il tombe dans le piĂšge tendu par Zhou Fang et Lu Xun et subit des pertes importantes. Il est sauvĂ© de justesse de lâannihilation totale par Jia Kui et rĂ©ussit Ă rentrer au Wei.
En 229, Sun Quan finit par s'autoproclamer empereur du Wu, ce qui dĂ©tĂ©riore les relations avec le Shu. En effet, bon nombre de fonctionnaires de ce royaume voient cette proclamation comme une trahison envers la dynastie Han, dont le Shu prĂ©tend ĂȘtre le successeur lĂ©gitime. Cependant, Zhuge Liang, le rĂ©gent du Shu, sâoppose Ă toute rupture de lâalliance entre les deux royaumes. Un peu plus tard la mĂȘme annĂ©e, Sun Quan et Zhuge Liang renforcent les relations entre le Shu et le Wu en signant un traitĂ© dans lequel les deux Ătats s'engagent Ă se soutenir mutuellement et Ă se rĂ©partir Ă parts Ă©gales les territoires du Wei, s'ils arrivent Ă le vaincre. Toujours en 229, Sun Quan dĂ©place sa capitale de Wuchang Ă Jianye, laissant son prince hĂ©ritier Sun Deng, assistĂ© de Lu Xun, responsable de la partie occidentale du royaume de Wu.
En 230, cependant, apparait le premier signe de la dĂ©tĂ©rioration du jugement de Sun Quan. Cette annĂ©e-lĂ , il donne Ă ses gĂ©nĂ©raux Wen Wei (èĄæș«) et Zhuge Zhi (è«žèçŽ) le commandement d'une flotte de 10 000 marins et les envoie en mer de Chine orientale pour trouver et conquĂ©rir les Ăźles lĂ©gendaires de Yizhou (怷æŽČ) et Danzhou (äș¶æŽČ). Il lance cette expĂ©dition malgrĂ© la forte opposition de Lu Xun et Quan Cong. Finalement, la flotte n'arrive pas Ă trouver Danzhou mais localise Yizhou et retourne au Wu en 231 aprĂšs la capture de plusieurs milliers d'habitants de cette ile et la perte de 80 Ă 90 % des marins Ă cause des maladies. Au lieu de reconnaĂźtre l'avis de Lu Xun et Quan Cong et qu'il s'est trompĂ©, Sun Quan fait exĂ©cuter Wen Wei et Zhuge Zhi. Peut-ĂȘtre prĂ©occupĂ© par cette dĂ©tĂ©rioration du jugement de Sun Quan, Sun Deng laisse la partie occidentale de l'empire entre les mains de Lu Xun et retourne Ă Jianye en 232, oĂč il reste jusqu'Ă sa propre mort en 241.
En 232, Sun Quan connaĂźt une autre mĂ©saventure impliquant sa marine. Il envoie par la voie maritime ses gĂ©nĂ©raux Zhou Il (ćšèł) et Pei Qian (èŁŽæżł) rencontrer Gongsun Yuan, qui est Ă la fois le Grand Administrateur du Liaodong[20] et un vassal du Wei. La situation entre le Wei et Yuan est tendue, car ce dernier a pris le pouvoir en renversant son oncle Gongsun Gong et le Wei craint qu'il ne cherche Ă devenir totalement indĂ©pendant. Sun Quan cherche Ă profiter de la situation pour lui acheter des chevaux. Yu Fan s'oppose Ă cette expĂ©dition car il la trouve trop dangereuse. Sun Quan ne supporte pas que Fan s'oppose Ă lui et l'exile dans la Commanderie de Cangwu[21], une zone Ă peine dĂ©frichĂ©e, pour le punir. Cependant, tout comme Yu Fan l'a prĂ©dit, lâentreprise se solde par un Ă©chec, lorsque Zhou Il et Pei Qian sont interceptĂ©s sur le chemin du retour par les forces de Wei et tuĂ©s. Regrettant ses actes, Sun Quan essaye de rappeler Yu Fan Ă Jianye, mais il est trop tard car ce dernier est mort en exil.
En 233, Gongsun Yuan, toujours en mauvais termes avec le Wei, envoie des messagers Ă Sun Quan pour lui faire sa soumission et se reconnaĂźtre comme Ă©tant un vassal du Wu. Extatique, Quan nomme Gongsun Yuan Roi de Yan (çç), lui accorde les neuf sacrements et lui envoie en renfort un dĂ©tachement de 10 000 hommes par voie maritime, pour l'aider dans sa campagne contre le Wei. En agissant ainsi, il va Ă l'encontre de lâavis de la quasi-totalitĂ© de ses conseillers, notamment Zhang Zhao. Une nouvelle fois, ce sont ses proches qui ont raison, car lâarmĂ©e est Ă peine arrivĂ©e que Gongsun Yuan trahit le Wu en tuant Zhang Mi (ćŒ”ćœ) et Xu Yan (èš±æ), les envoyĂ©s de Sun Quan qui devaient remettre les neuf sacrements et saisit leurs troupes. Lorsqu'il est mis au courant, Sun Quan, fou de rage, veut prendre le commandement d'une flotte pour partir attaquer Gongsun Yuan. Au dĂ©part, personne, pas mĂȘme Lu Xun n'arrive Ă lâarrĂȘter, mais il finit par se calmer et renonce Ă son projet.
MalgrĂ© ces erreurs de jugements, Sun Quan garde encore une grande part de luciditĂ©, assez pour reconnaĂźtre ces torts et continuer Ă prendre de bonnes dĂ©cisions. Ainsi, aprĂšs le fiasco de 233, il reconnaĂźt son erreur et se rend personnellement Ă la maison de Zhang Zhao pour lui prĂ©senter ses excuses. Il fournit un autre exemple de luciditĂ© en 235 lorsque Cao Rui, l'empereur de Wei, lui offre des chevaux en Ă©change de perles, de jade et de carapaces de tortues. Ce prix est exorbitant et il est clair qu'avec cette proposition, Rui cherche implicitement Ă insulter Sun Quan. Bien qu'ayant parfaitement compris le petit jeu de Cao Rui, Quan ignore lâinsulte et procĂšde Ă lâĂ©change, car il juge que son empire a bien plus besoin de chevaux que de perles, de jade ou de carapaces.
En 234, en coordination avec la derniĂšre expĂ©dition nordique de Zhuge Liang contre le Wei, Sun Quan mĂšne personnellement une attaque majeure contre la ville-frontiĂšre d'Hefei, qui appartient au Wei. En parallĂšle, Lu Xun et Zhuge Jin attaquent Xiangyang, espĂ©rant attirer sur eux les renforts du Wei et les vaincre, avant d'aller prĂȘter main-forte Ă Sun Quan. Cependant, les gĂ©nĂ©raux du Wei analysent correctement la situation et laissent simplement Sun Quan assiĂ©ger Hefei sans intervenir. Ce n'est que lorsque les vivres de Sun Quan sont presque Ă©puisĂ©es et que son armĂ©e est dĂ©cimĂ©e par une Ă©pidĂ©mie, que Cao Rui arrive personnellement avec des renforts. Sun est alors obligĂ© de se replier, tout comme Lu Xun et Zhuge Jin.
En 237 Gongsun Yuan fini par entrer ouvertement en rĂ©bellion contre le Wei, qui riposte en 238 en envoyant une armĂ©e commandĂ©e par Sima Yi. AcculĂ©, Yuan envoie une ambassade auprĂšs de Sun Quan pour essayer de recrĂ©er une alliance entre eux. Quan a beau ĂȘtre toujours fou de rage Ă l'encontre de Gongsun Yan, il juge correctement la situation et comprend qu'il peut en tirer parti si Sima Yi Ă©choue. Il s'abstient donc de refuser immĂ©diatement la demande dâaide de Gongsun Yuan. L'empereur du Wu espĂ©re que Yi va se retrouver enlisĂ© dans une guerre d'usure contre Yan, ce qui lui laisserait le champ libre pour lancer une attaque de grande ampleur contre le Wei. Cependant, comme Sima Yi rĂ©ussit Ă Ă©craser Gongsun Yuan rapidement, Sun Quan doit renoncer Ă ses plans.
C'est Ă©galement en 238 qu'il comprend que son SecrĂ©taire en chef LĂŒ Yi (ććŁč) avait lancĂ© de fausses accusations contre les autres hauts fonctionnaires du royaume. Il fait exĂ©cuter LĂŒ et rĂ©affirme aux victimes des manigances de l'ancien secrĂ©taire qu'ils ont toute sa confiance en Ă©crivant personnellement une lettre pleine dâĂ©motion Ă Zhuge Jin, Bu Zhi, Zhu Ran et LĂŒ Dai. Dans cette lettre, il se blĂąme pour les problĂšmes survenus durant les prĂ©cĂ©dentes annĂ©es de son rĂšgne, tout en les invitant Ă parler ouvertement et honnĂȘtement lorsqu'ils le voient commettre des erreurs.
En 241, Sun Quan lance le dernier assaut de grande envergure contre le Wei de son rĂšgne. Depuis la mort de Cao Rui en 239, le nouvel empereur du Wei est mineur et le royaume connaĂźt une rĂ©gence, ce dont Quan veut profiter. Mais il rejette une stratĂ©gie proposĂ©e par Yin Zha (æź·æ), consistant Ă attaquer le Wei sur quatre fronts diffĂ©rents avec l'aide du Shu. Le Wu part donc seul au combat et la campagne sâachĂšve par un Ă©chec.
Fin de vie
Le prince hĂ©ritier Sun Deng meurt un peu plus tard, la mĂȘme annĂ©e. Ce dĂ©cĂšs laisse ouverte la question de la succession et semble marquer le dĂ©but dâun dĂ©clin abrupt de la santĂ© mentale de Sun Quan. En 242, il nomme son fils Sun He, un des fils de sa consort Wang, prince hĂ©ritier. Cependant, dans le mĂȘme temps, il multiplie les faveurs en direction du Prince de Lu, Sun Ba (ć«éž), un autre fils de la consort Wang, qui finit par avoir le mĂȘme niveau de vie que le prince hĂ©ritier. Pour bon nombre des membres du gouvernement, cela va encourager une concurrence et des tensions entre Sun Ba et Sun He, mais Sun Quan ne les Ă©coute pas. AprĂšs 245, lorsque Sun He et Sun Ba commencent Ă vivre chacun de leur cĂŽtĂ©, la relation entre les deux princes se dĂ©tĂ©riore de plus en plus et Sun Ba commence Ă comploter pour devenir prince hĂ©ritier aux dĂ©pens de Sun He. ĂnervĂ© au dernier degrĂ© par les potins de sa fille Sun Dahu (ć«ć€§è), Sun Quan blĂąme la mĂšre des deux princes et fait d'elle la seule responsable de la situation. Consort Wang ressort de cette rencontre morte de peur. Il interdit Ă©galement Ă Sun He et Sun Ba de s'approcher ou de communiquer avec les fonctionnaires qui les soutiennent dans lâespoir de recevoir des faveurs dans le futur. Mais ces prĂ©cautions sont vaines et n'arrivent pas Ă arrĂȘter les machinations de Sun Ba. En effet, lorsque Lu Xun essaye dâintervenir pour protĂ©ger Sun He ; Sun Ba lance des fausses accusations contre lui, concernant de nombreux crimes. Sun Quan fini par ĂȘtre tellement en rage contre son gĂ©nĂ©ral quâil le rĂ©primande Ă maintes reprises, au point que Lu Xun finit par mourir en colĂšre contre son empereur.
En 250, lassĂ© des attaques incessantes de Sun Ba contre Sun He, Sun Quan prend une sĂ©rie de dĂ©cisions totalement inexplicables. Il contraint Sun Ba Ă se suicider, tout en destituant Sun He de son rang de prince hĂ©ritier, alors qu'il n'a aucune preuve que ce dernier ait commis le moindre crime. AprĂšs quoi, il fait de Sun Liang, son fils cadet, le nouveau prince hĂ©ritier en remplacement de Sun He. Cette dĂ©cision est contestĂ©e par son gendre Zhu Ju, le mari de Sun Xiaohu. Non seulement les plaidoiries de Zhu n'aident pas Sun He, mais en plus Sun Quan lâoblige Ă se suicider. De nombreux autres fonctionnaires qui sâopposent Ă©galement Ă la dĂ©cision de Sun Quan, ainsi que d'autres qui avaient soutenu Sun Ba, sont exĂ©cutĂ©s.
Ă cette Ă©poque, Sun Quan ordonne Ă©galement Ă ses gĂ©nĂ©raux de dĂ©truire un certain nombre de digues prĂšs de la frontiĂšre avec le Wei, pour crĂ©er de vastes zones dâinondations, afin de gĂȘner les attaques potentielles du Wei.
En 251, Sun Quan fait de sa consort Pan, la mĂšre de Sun Liang, la premiĂšre impĂ©ratrice de son rĂšgne. Avant cette date il a dĂ©jĂ eu plusieurs Ă©pouses, mais jamais aucune d'entre elles n'a reçu le titre d'impĂ©ratrice, Ă lâexception de sa favorite, Dame Bu, qui l'a reçu Ă titre posthume aprĂšs sa mort en 238. Plus tard la mĂȘme annĂ©e, il rĂ©alise que Sun He est irrĂ©prochable et veut le rappeler de son exil. Mais sa fille Sun Dahu et Sun Jun, qui soutiennent lâascension de Sun Liang, le font changer d'avis. Sun Quan est alors ĂągĂ© de 69 ans et se rend compte quâil lui reste peu de temps Ă vivre. Sur la recommandation de Sun Jun, il fait de Zhuge Ke, le fils de Zhuge Jin, le futur rĂ©gent de Sun Liang. Quan Ă des doutes sur la maniĂšre dont Zhuge Ke va assurer la rĂ©gence, car il est arrogant et a une trop haute opinion de lui-mĂȘme ; mais Ă cette Ă©poque les victoires militaires accumulĂ©es par Ke font que pratiquement tout lâempire est convaincu qu'il est le meilleur choix pour la rĂ©gence.
En 252, alors que Sun Quan se rapproche de la mort, l'impĂ©ratrice Pan est assassinĂ©e et les causes de ce meurtre restent un sujet de controverse. Les hauts fonctionnaires du Wu affirment que ses serviteurs, incapables de la supporter plus longtemps, lâont Ă©tranglĂ©e pendant quâelle dormait. Dans le mĂȘme temps, un certain nombre dâhistoriens, dont Hu Sanxing, le commentateur du Zizhi Tongjian de Sima Guang, pensent que ces mĂȘmes hauts fonctionnaires sont complices du meurtre, car ils craignaient quâelle sâempare du pouvoir en tant qu'impĂ©ratrice douairiĂšre aprĂšs la mort de Sun Quan. La mĂȘme annĂ©e, Sun Quan dĂ©cĂšde Ă lâĂąge de 70 ans et Sun Liang lui succĂšde sur le trĂŽne du Wu. Il est enterrĂ© dans un mausolĂ©e situĂ© dans la Montagne Pourpre, prĂšs de l'actuelle ville de Nankin.
Informations complémentaires
La lignée impériale des Wu
Notes
- (en) East Asian History, Australian National University, , p. 16.
- Le Jiang Biao Zhuan (æ±èĄšćł) ou MĂ©moires du fleuve Yangzi est un ouvrage Ă©crit par Yu Pu lors de la premiĂšre dynastie Jin (317â420) et regroupe un ensemble de biographies fortement embellies des personnalitĂ©s de la rĂ©gion du sud du fleuve Yangzi. L'ouvrage favorise Ă©galement les personnalitĂ©s du royaume de Wei et diminue grandement l'importance de celles du royaume de Shu. Son contenu est accueilli avec beaucoup de suspicion par les historiens.
- Selon l'historien Rafe de Crespigny dans Generals of South, Liu Bei avait probablement pris possession de lui-mĂȘme de ces territoires, et il est alors vraisemblable que ces titres offerts par Sun Quan aient Ă©tĂ© une façon de sauver la face. Les chroniques de ces Ă©vĂ©nements ont en effet Ă©tĂ© Ă©crits par des hommes du royaume de Wu qui s'accordent Ă dire que Sun Quan aurait prĂȘtĂ© les provinces de Xu et Jing Ă Liu Bei. Le royaume de Shu fondĂ© par Liu Bei n'a pas gardĂ© d'annales offrant leur point de vue sur la question.
- L'Histoire du Wu, ou Wu Li (ćłæ) est un ouvrage de Hu Chong. Hu Chong fut un chroniqueur du Wu Ă l'Ă©poque de Sun Hao, puis sous la dynastie Jin devint grand administrateur du district de Wu.
- Allusion aux fils de Liu Biao qui en 208 se soumirent Ă Cao Cao sans livrer bataille.
- La Chronologie sommaire du Wei, ou Wei LĂŒe (éç„) parfois appelĂ© Dian LĂŒe (ć žç„) est une chronique des nations composant la Chine, Ă©crite par Yu Huan entre 240 et 265. Cet ouvrage a aujourd'hui disparu et seuls survivent des passages insĂ©rĂ©s au dĂ©but du Ve siĂšcle par Pei Songzhi dans les Chroniques des Trois Royaumes. Tout en ne citant aucune source, Yu Huan tenta d'ĂȘtre aussi exhaustif que possible, au point d'inclure des rĂ©cits qui se contredisent si bien que son contenu est parfois accueilli par les historiens avec beaucoup de rĂ©serves. Il s'agit cependant du plus ancien texte chinois Ă faire mention de l'Empire romain.
- Les Chroniques des Trois Royaumes disent que l'attaque eut lieu au « 5e mois » et la capture au « mois intercalaire ». Cependant cette année-là , le mois intercalaire eut lieu entre le 4e et le 5e mois. Il est possible que le rédacteur ait fait une erreur.
- Ce qui correspond Ă l'actuelle ville d'Ezhou.
- Ce qui correspond à l'actuelle ville-préfecture d'Ezhou, dans la province du Hubei.
- Au sud-est de l'actuel Yangxin.
- Au nord de l'actuel Xian du Huangmei.
- Au sud-ouest de l'actuel Xian de Yangxin (Hubei).
- Au sud-ouest de l'actuelle ville-préfecture de Jiujiang.
- Jiu xi (äčé«) - RĂ©compenses que lâempereur offre Ă ses mandarins les plus mĂ©ritants. Selon le Classique des rites, ces neuf sacrements Ă©taient :
1) don dâun chariot et de chevaux : le mandarin est modeste dans sa dĂ©marche et nâa plus besoin de marcher â Sun Quan reçut de Cao Pi un grand chariot et un chariot de guerre, chacun tirĂ© par deux Ă©talons noirs ;
2) don de vĂȘtements : le mandarin Ă©crit Ă©lĂ©gamment et montre ses bonnes actions â Sun Quan reçut les vĂȘtements dâhonneur, un bonnet et des chaussons rouges ;
3) don dâune partition musicale : le mandarin a lâamour en son cĆur et enseigne la musique aux siens â Sun Quan reçut une sĂ©lection dâinstruments pour dĂ©corer son palais ;
4) don dâune porte rouge : le mandarin gĂšre bien sa maisonnĂ©e, et a le droit dâutiliser une porte rouge pour montrer que sa maison est diffĂ©rente des autres ;
5) don dâune rampe : le mandarin fait ce qui est appropriĂ©, il peut marcher en usant de la rampe pour maintenir sa force ;
6) don de gardes : le mandarin est brave et prĂȘt Ă dire la vĂ©ritĂ©, il doit ĂȘtre protĂ©gĂ© â Sun Quan reçut cent « guerriers ayant lâĂ©nergie du tigre » ;
7) don dâarmes, dâun arc et de flĂšches : le mandarin a bonne conscience, il reprĂ©sente le gouvernement et Ă©crase la trahison â Sun Quan reçut un arc Ă©carlate avec cent flĂšches Ă©carlates et dix arcs noirs avec mille flĂšches noires ;
8) don dâune hache cĂ©rĂ©monielle : le mandarin est fort, sage et loyal envers le clan impĂ©rial, il doit exĂ©cuter les criminels ;
9) don de vin : le mandarin fait preuve de piĂ©tĂ© filiale et doit offrir des libations Ă ses ancĂȘtres â Sun Quan reçut une coupe de jade pour les libations avec une liqueur de millet noir. - Ce qui correspond Ă l'actuel xian de Yunmeng, Hubei.
- Ce qui correspond actuellement au nord du Vietnam.
- Gary K. Young, Rome's Eastern Trade: International Commerce and Imperial Policy, 31 BC - AD 305, 2001, (ISBN 0-415-24219-3), p. 29.
- (en) Paul Halsall, « East Asian History Sourcebook: Chinese Accounts of Rome, Byzantium and the Middle East, c. 91 B.C.E. - 1643 C.E. », sur Fordham.edu, Fordham University, (consulté le ).
- Hirth (1885), p. 47â48.
- Ce qui correspond actuellement à la moitié sud de la province du Liaoning.
- Cette commanderie se situait à proximité de l'actuelle ville de Wuzhou, au Guangxi.
- (en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de lâarticle de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Sun Quan » (voir la liste des auteurs).
Bibliographie
- Chen Shou. Chroniques des Trois Royaumes (Sanguozhi).
- Pei Songzhi. Annotations aux Chroniques des Trois Royaumes (Sanguozhi zhu).
- Luo Guanzhong. Les Trois Royaumes (Sanguo Yanyi).
- (en) Rafe de Crespigny, Generals of the South, Rafe de Crespigny Publications, Australian National University Faculty of Asian Studies, (1re Ă©d. 1990) (lire en ligne).
- (en) Friedrich Hirth, China and the Roman Orient, Shanghai et Hong Kong (réimpr. : Chicago), Ares Publishers (réimpr.), 1875 (réimpr. : 1975).