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SA-6 (Apollo)

SA-6, pour « Saturn Apollo-6 », également désigné A-101[1] - [2] - [Note 1] (COSPAR ID : 1964-025A[3], SATCAT No. 800[4]), fut le sixième vol du lanceur américain Saturn I et le deuxième vol de sa deuxième version, aussi désignée « Block II ». Il fut le premier vol à lancer une maquette (aussi désignée « simulateur de masse », ou « boilerplate ») du module de commande Apollo en orbite terrestre basse[3].

SA-6
(A-101)
SA-6 sur son pas de tir, avant l'exécution d'un test d'interférences, le 24 avril 1964.
SA-6 sur son pas de tir, avant l'exécution d'un test d'interférences, le .
Données de la mission
Organisation Drapeau des États-Unis NASA
Vaisseau Module de commande Apollo BP-13 (maquette)
Objectif Vol d'essais
Équipage Aucun
Lanceur Saturn I « Block II »
Date de lancement 17 h 7 min 0 s UTC
Site de lancement Drapeau des États-Unis LC-37B (en), Base de lancement de Cap Canaveral
Durée 5 h 43 min
Dernier contact (après 4 orbites)
Retour dans l'atmosphère
Identifiant COSPAR 1964-025A
Paramètres orbitaux
Nombre d'orbites 54
ApogĂ©e 199 km
PĂ©rigĂ©e 178 km
PĂ©riode orbitale 88,26 minutes
Inclinaison 31,7°
Navigation

Prenant place au cĹ“ur de la montĂ©e en puissance du programme Apollo, SA-6 dĂ©colla le de Cap Canaveral, en Floride, pour des essais se dĂ©roulant sur quatre orbites, soit un vol d'environ six heures. Le vaisseau et son Ă©tage supĂ©rieur effectuèrent toutefois un total de 54 orbites avant de rentrer dans l'atmosphère et retomber dans l'OcĂ©an Pacifique, le [5].

Le vol ne connût qu'une seule anomalie : l'un des huit moteurs du premier étage se coupa prématurément, mais le système de guidage de la fusée compensa ce problème par une combustion plus longue des sept moteurs restants. Le vol SA-6 fut suivi par quatre vols supplémentaires pour vérifier les caractéristiques aérodynamiques des modules de commande et de service Apollo (CSM), ainsi que de leur tour de sauvetage.

Objectifs de la mission

Lors des cinq premiers vols de la fusĂ©e Saturn I, cette dernière avait reçu un cĂ´ne de nez de fusĂ©e Jupiter-C, une pièce largement Ă©prouvĂ©e qui permettait aux ingĂ©nieurs de se focaliser sur le dĂ©veloppement du lanceur. Afin de vĂ©rifier les caractĂ©ristiques aĂ©rodynamiques du module de commande et de service Apollo (ou CSM, pour « Command and Service Module »), le vol SA-6 embarquait une maquette du module de commande[3] - [6], surnommĂ©e « boilerplate » (en français : « tĂ´le d'acier de haute qualitĂ© relativement Ă©paisse utilisĂ©e dans la construction d'une chaudière »), jouant en fait le rĂ´le de simulateur de masse[6]. DĂ©signĂ©e « BP-13 »[3] — pour « Boilerplate-13 » — elle avait une masse de 7 700 kg et reproduisait la forme et la taille du module de commande « rĂ©el » totalement Ă©quipĂ©[3] - [7]. Le vaisseau reçut Ă©galement une tour de sauvetage factice. Le tout Ă©tait fixĂ© au sommet d'un module de service factice rĂ©alisĂ© en aluminium, qui restait fixĂ© au deuxième Ă©tage S-IV et Ă  sa case Ă  instruments[3]. En orbite, l'ensemble formĂ© par le CSM et le deuxième Ă©tage avaient une masse de 16 900 kg[3].

La maquette du CSM Ă©tait Ă©quipĂ©e de 116 capteurs, enregistrant les contraintes, la pression et les accĂ©lĂ©rations rencontrĂ©es au cours du vol[3]. Elle Ă©tait Ă©galement Ă©quipĂ©e de trois installations de tĂ©lĂ©mesure[3]

Vol

Préparation pré-vol

La prĂ©paration prĂ©-vol de la mission SA-6 arriva avec son lot de nouveautĂ©s, de problèmes et de reports de calendrier, mais elle demeura bien moins pĂ©nible que celle du vol SA-5, qui dura 70 jours de plus que la moyenne du temps de prĂ©paration des vols restants SA-6 Ă  SA-10, qui Ă©tait de 91 jours[7].

La maquette (boilerplate) du vaisseau Apollo utilisée lors de ce vol, la BP-13 (maquette no 13), était l'une des trente maquettes du vaisseau construites par North American pour les essais préliminaires du programme Apollo[7]. Le Centre des vols habités (Manned Spacecraft Center, MSC) avait déjà procédé à plusieurs tests de boilerplates sur le centre d'essais de White Sands, afin de tester le vaisseau pour des impacts sur le sol et la surface de l'eau, le système de parachutes de récupération, les système d'abandon au lancement, et effectuer des essais de flottaison et des simulations d'évacuation d'urgence en mer[7]. Le vol SA-6 fut l'occasion de vérifier la compatibilité du vaisseau avec un lanceur de type Saturn[7].

La vĂ©rification de la maquette BP-13 avait commencĂ© en lorsque G. Merrit Preston, directeur des opĂ©rations au secteur Florida Operations du Manned Spacecraft Center Ă  Houston, au Texas, envoya George T. Sasseen et une Ă©quipe de quarante personnes Ă  l'usine de Downey du constructeur North American, en Californie[7]. Pendant deux mois, les Ă©quipes de la NASA et de North American soumirent la BP-13 Ă  de nombreuses sĂ©ries de tests intensifs, allant de simples vĂ©rifications sur la ligne d'assemblage Ă  des vols simulĂ©s[7]. Le vaisseau subit une nouvelle longue sĂ©rie de tests après avoir Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© en Floride. DĂ©but avril, l'Ă©quipe Ă©tait prĂŞte Ă  arrimer la maquette au sommet de la fusĂ©e[7]. Pendant les six semaines suivantes, l'Ă©quipe rĂ©solut divers problèmes liĂ©s aux systèmes de refroidissement du vaisseau et au mĂ©canisme de largage de la tour de sauvetage factice[7]. Un temps important fut Ă©galement passĂ© Ă  vĂ©rifier les systèmes de tĂ©lĂ©mesure et des 116 capteurs qui devaient enregistrer les rĂ©ponses structurelles et thermiques du vaisseau pendant son vol[7].

Lancement

George Mueller, Wernher von Braun, et Eberhard Rees (en) observent le lancement de SA-6 depuis la salle de lancement.

Il ne fallut pas moins de trois tentatives pour parvenir à lancer la fusée.

La première tentative, le , fut annulĂ©e après que l'oxygène liquide ait endommagĂ© un treillis mĂ©tallique pendant un test, entraĂ®nant une contamination du carburant[7]. La deuxième tentative de lancement, six jours plus tard, se dĂ©roula sans problème jusqu'Ă  115 minutes du lancement, lorsqu'un compresseur de climatisation dĂ©faillant entraĂ®na une surchauffe du système de guidage de la fusĂ©e[7]. Le lancement fut alors Ă  nouveau reportĂ©.

Le , jour de la troisième tentative de lancement, l'Ă©quipe au sol dut Ă  nouveau affronter quelques problèmes rĂ©currents et ordonner plusieurs arrĂŞts de compte-Ă -rebours[7]. Des vapeurs d'oxygène liquide Ă©manaient de l'Ă©tage S-IV troublant la liaison visuelle entre une fenĂŞtre optique Ă  l'intĂ©rieur de la case Ă  Ă©quipements de la fusĂ©e et un thĂ©odolite Ă  terre[7]. Le problème disparut après un arrĂŞt de dĂ©compte de 38 minutes, lorsque le vent Ă©loigna les vapeurs de la fusĂ©e[7]. Toutefois, il fallut ajouter une autre heure d'arrĂŞt le temps de rĂ©gler un problème avec un clapet de remplissage de l'oxygène liquide[7]. Le problème optique entre la case a Ă©quipements et le thĂ©odolite rĂ©apparut enfin dans les dernières minutes du dĂ©compte, cette fois causĂ© par des vapeurs Ă©manant de la tour de service[7]. Ce thĂ©odolite Ă©tait nĂ©cessaire pour que l'ordinateur du compte-Ă -rebours permette le lancement de la fusĂ©e. Si sa vision Ă©tait obstruĂ©e, il annulait le lancement trois secondes avant l'heure prĂ©vue, par mesure de sĂ©curitĂ©[8]. Les ingĂ©nieurs le jugèrent finalement non-critique et bricolèrent rapidement l'ordinateur pour se passer de lui, permettant aux opĂ©rations de lancement de reprendre normalement, 75 minutes plus tard[8].

La fusĂ©e dĂ©colla finalement le Ă  17 h 7 min 0 s UTC depuis le LC-37B (en), Ă  Cap Canaveral[1] - [2] - [3]. Le vol se dĂ©roula de façon nominale jusqu'Ă  117,3 secondes après le dĂ©collage, moment oĂą le moteur H-1 no 8 du premier Ă©tage s'Ă©teignit prĂ©maturĂ©ment[9] - [10], 24 secondes en avance sur l'heure prĂ©vue[3]. Contrairement au test rĂ©alisĂ© lors du vol SA-4, cet arrĂŞt n'Ă©tait pas prĂ©vu, mais la fusĂ©e compensa parfaitement le problème en brĂ»lant les ergols restants dans les sept moteurs encore fonctionnels pendant 2,7 secondes de plus que la durĂ©e initialement prĂ©vue, ainsi qu'en ajustant automatiquement son orientation pour ne pas sortir de sa trajectoire prĂ©vue[3] - [9]. Cet Ă©vĂ©nement, seule dĂ©faillance connue subie par un moteur H-1 au cours des quinze lancements des fusĂ©es Saturn I et Saturn IB[9], mit en Ă©vidence la capacitĂ© de la fusĂ©e Ă  gĂ©rer une panne de moteur pendant le vol (en anglais : "engine-out" capability)[1] - [11].

Le premier Ă©tage se sĂ©para et le deuxième alluma ses moteurs. Dix secondes plus tard, la tour de sauvetage fut larguĂ©e comme prĂ©vu. Pendant ce temps, huit nacelles contenant des camĂ©ras qui avaient Ă©tĂ© conçues pour observer la sĂ©paration des deux Ă©tages[10] avaient Ă©tĂ© larguĂ©es pour ĂŞtre rĂ©cupĂ©rĂ©es sur Terre. Le deuxième Ă©tage s'arrĂŞta 624,5 secondes après le lancement — soit 1,26 secondes plus tĂ´t que prĂ©vu —, avec l'Ă©tage et la maquette du vaisseau Apollo placĂ©s sur une orbite de 182 Ă— 227 km[1] - [10]. Les systèmes de tĂ©lĂ©mesure continuèrent Ă  transmettre les donnĂ©es rĂ©coltĂ©es par les capteurs jusqu'Ă  l'Ă©puisement des batteries, au cours de la quatrième orbite[3]. Le vĂ©hicule effectua un total de 54 orbites, retombant dans l'atmosphère Ă  l'est de l'Ă®le de Canton, dans l'OcĂ©an Pacifique, le [3] - [12].

Analyse post-lancement

Le vol SA-6 fut un succès, tous les objectifs de la mission ayant été remplis comme prévu[1] - [3] - [12].

La télémesure parvint à transmettre toutes les données souhaitées en continu pendant tout le vol, à l'exception d'une petite coupure de trois secondes pendant la séparation des deux étages[12]. L'échauffement cinétique produit pendant l'ascension de la fusée produisit une valeur de température maximale sur la structure de la tour de sauvetage 20 % en dessous de la limite prévue à la conception du lanceur, qui était de 288 °C[12]. L'analyse des données de pression, contraintes et accélérations enregistrées pendant le vol indiquèrent que la structure du véhicule était adaptée aux divers domaines de vol rencontrés[12].

Le cause de la défaillance du moteur no 8 du premier étage fut rapidement découverte par les ingénieurs lors de l'analyse des données retransmises par la télémesure. Ils déduisirent que les dents d'un des engrenages de la turbopompe de ce moteur avaient été arrachées, ce qui avait mené à son arrêt brutal pendant l'ascension de la fusée[13]. Heureusement, les techniciens travaillant au Centre Marshall et à Rocketdyne avaient effectué de nombreux tests de la turbopompe au sol et en avaient déjà déduit qu'elle était trop fragile et qu'il fallait repenser sa conception[13]. Une modification déjà prévue concernait justement la largeur des dents des engrenages, et ce nouveau modèle de pompe était déjà prévu pour voler lors de la mission SA-7[13]. Cet incident ne remit alors pas en cause le calendrier des vols prévus du lanceur Saturn I et il n'y eut plus le moindre problème avec les moteurs H-1 en vol[13].

Notes et références

Notes

  1. « A-101 » provient cependant du numéro de série attribué à cet exemplaire de la fusée Saturn I. Les sites officiels de la NASA désignent tous le nom officiel de la mission comme étant « SA-6 »[1] - [2] - [3].

Références

  1. (en) « Saturn Test Flights », sur www.nasa.gov, NASA, (consulté le ).
  2. (en) « SA-6 », NASA (consulté le ).
  3. (en) « Saturn SA-6 » [archive du ], NASA (consulté le ).
  4. (en) Jonathan McDowell, « Satellite Catalog », Jonathan's Space Page (consulté le ).
  5. (en) Brooks et al. 2009, p. 142.
  6. (en) Benson et Faherty 1978, p. 191.
  7. (en) Benson et Faherty 1978, p. 215.
  8. (en) Benson et Faherty 1978, p. 216.
  9. (en) Bilstein 2015, p. 104.
  10. (en) Bilstein 2015, p. 328.
  11. (en) Jennifer Harbaugh, « This Week in NASA History: Saturn I SA-4 Launches – March 28, 1963 », NASA, (consulté le ).
  12. (en) Apollo Program Summary Report, JSC-09423, p. 2-5.
  13. (en) Bilstein 2015, p. 329.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) Courtney G. Brooks, James M. Grimwood, Loyd S. Swenson, Jr. et Paul Dickson, Chariots for Apollo : The NASA History of Manned Lunar Spacecraft to 1969, Dover Publications Inc., coll. « Dover Books on Astronomy », (1re Ă©d. 1979), 576 p. (ISBN 978-0-486-46756-6 et 0-486-46756-2, lire en ligne). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Charles D. Benson et William Barnaby Faherty, Moonport : A History of Apollo Launch Facilities and Operations, CreateSpace Independent Publishing Platform, coll. « The NASA History Series », , 1re Ă©d., 656 p. (ISBN 1-4700-5267-9 et 978-1-47005-267-6, lire en ligne [PDF]). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Roger E. Bilstein, Stages to Saturn : A Technological History of the Apollo/Saturn Launch Vehicles, Andesite Press, coll. « The NASA History Series », (1re Ă©d. 1996), 538 p. (ISBN 978-1-297-49441-3 et 1-297-49441-5, lire en ligne [PDF]). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Apollo Program Summary Report (JSC-09423), Houston, Texas, États-Unis, NASA, (lire en ligne [PDF]). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Ivan D. Ertel et Mary Louise Morse, The Apollo Spacecraft : A Chronology, vol. 1 : Through November 7, 1962, CreateSpace Independent Publishing Platform, coll. « The NASA Historical Series », (1re Ă©d. 1969), 284 p. (ISBN 978-1-4954-1397-1 et 1-4954-1397-7, lire en ligne [PDF]).


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